Vu la requête, enregistrée par télécopie au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 24 août 2001 sous le n° 01MA01972 et régularisée le 28 août 2001, et le mémoire complémentaire, enregistré le 26 octobre 2001, présentés pour M. François X, demeurant ..., par la S.C.P. BORE-XAVIER, avocats aux conseils ;
M. X demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement, en date du 21 juin 2001 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 23 novembre 2000 par lequel le préfet de Corse, préfet de Corse-du-Sud, a déterminé les communes desservies par chaque officine du département située dans une commune de moins de 2.500 habitants ;
2°/ d'annuler ledit arrêté du 23 novembre 2000 ;
Classement CNIJ : 01-05-02
61-04-005
55-03-04-01-01-02
C
3°/ de condamner l'Etat aux dépens et à lui verser une somme de 15.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que le jugement encourt l'annulation pour vice de forme, procédure irrégulière, insuffisance et contradiction de motifs, inexactitude matérielle, erreur d'appréciation des faits, violation de la loi et des principes généraux du droit ; que la proportion de la population de Cauro desservie par l'officine de Porticcio est erronée ; que la commission consultative s'est prononcée au vu d'une carte entachée d'une erreur matérielle, qui a pu influer sur l'avis émis ; que le Tribunal administratif a refusé d'examiner le moyen tiré de la méconnaissance des prescriptions du IV de l'article L.571 du code de la santé publique ; que le jugement viole les dispositions de l'article L.5125-14 et de l'article L.5125-3 du code de la santé publique selon lesquelles les officines de pharmacie doivent être créées, transférées ou regroupées en sorte de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines ; que la décision qui revient à détacher, pour la desserte en médicaments, Cauro des autres communes formant le canton de Bastelica, est de nature à compromettre toute possibilité de création d'une officine dans ce canton ; que la composition de la commission a pu être entachée d'irrégularité, en ce que M. Y a pu y siéger ; que l'article 25 de la déclaration universelle des droits de l'homme, l'article 12 du pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels de New-York, l'article 35 de la charte des droits fondamentaux de l'union européenne, l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, le préambule de la constitution du 27 octobre 1946 imposent à l'Etat de répartir les officines de pharmacie sur le territoire de telle sorte qu'aucun secteur de population ne soit délaissé ; que la décision du préfet est contradictoire avec les décisions qu'il avait prises auparavant, en considérant alors que la commune de Cauro était desservie par l'officine de Bastelicaccia ; que l'officine de Porticcio a été créée en vue de desservir une population saisonnière importante ; que les demandes de création présentées antérieurement à l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions doivent continuer à être instruites au regard des anciennes dispositions ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 13 juin 2003, présenté par le ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées, qui conclut au rejet de la requête ;
Il soutient que l'arrêté préfectoral n'est entaché d'aucun vice de procédure ; que la commune de Cauro présente une configuration particulière puisque s'étendant de la zone de montagne à la plaine littorale ; que la population agglomérée au chef-lieu ne représente que la moitié de la population totale, et que le développement récent se fait dans la partie basse de la commune ; que la localité de Cauro peut être rattachée aux officines de Porticcio, dont l'accès est aisé à partir de la nationale 196 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique, modifié notamment par la loi n° 99-641 du 27 juillet 1999 ;
Vu le décret n° 2000-259 du 21 mars 2000 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 février 2004 :
- le rapport de M. ZIMMERMANN, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
Considérant qu'aux termes du V de l'article 65 de la loi susvisée du 27 juillet 1999 : V. Pour les communes de moins de 2500 habitants disposant d'au moins une officine à la date de publication de la présente loi, un arrêté du représentant de l'Etat dans le département détermine, pour chacune de ces officines, la ou les communes desservies par cette officine, après avis d'une commission qui comprend des représentants de l'administration et des professionnels. Seules peuvent être retenues les communes dont au moins 50 % des habitants sont desservis par l'officine de manière satisfaisante. ;
Considérant que, sur le fondement de ce texte, le préfet de Corse-du-Sud a, par arrêté du 23 novembre 2000, déterminé les communes desservies par les officines de pharmacie situées dans des communes de moins de 2.500 habitants ; que M. François X, pharmacien ayant demandé à être autorisé à créer une officine de pharmacie dans la commune de Cauro, qui a moins de 2.500 habitants et ne dispose d'aucune officine, a contesté ledit arrêté, qui considère explicitement que la pharmacie située à Porticcio, sur le territoire de la commune de Grosseto-Prugna, dessert la population de la commune de Cauro et, implicitement, en ne mentionnant pas les autres communes du canton de Bastelica, qui sont également toutes dépourvues d'officine, que ces autres communes sont desservies par l'officine située à Bastelicaccia, commune de plus de 2.500 habitants ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des cartes produites, que la nationale 196 qui relie Ajaccio à Sartène dessert successivement les communes de Bastelicaccia, Cauro et Santa-Maria-Sicche ; que les pharmacies de Santa-Maria-Sicche et de Bastelicaccia sont l'une et l'autre à 12 kilomètres du chef-lieu de la commune de Cauro, où se trouve la moitié de la population de celle-ci, et l'officine de Porticcio, accessible par la nationale 196 puis la départementale 55, ou la nationale 196, et départementale 555, puis enfin la départementale 55, à 14,5 kilomètres du chef-lieu de la commune de Cauro ; que la pharmacie de Bastelicaccia est également plus proche que celle de Porticcio du quartier de Pisciatello où résident la plupart des autres habitants de la commune de Cauro ; enfin que de nombreux habitants de celle-ci se rendent à Ajaccio, notamment pour y travailler ; que, dès lors, la circonstance que l'officine de Porticcio serait insérée dans un ensemble commercial conçu pour accueillir l'affluence estivale sur le littoral ne suffit pas à établir que plus de la moitié de la population de la commune de Cauro est desservie en médicaments par l'officine sise à Porticcio ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté susvisé du 23 novembre 2000 ;
Considérant qu'il n'y a lieu d'annuler ledit arrêté qu'en tant qu'il considère que la commune de Cauro est desservie par l'officine située au lieu-dit Porticcio, sur le territoire de la commune de Grosseto-Prugna, aucun moyen n'étant articulé contre les autres dispositions de l'arrêté, qui n'est pas indivisible ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser à M. X une somme de 1.000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement susvisé du Tribunal administratif de Bastia en date du 21 juin 2001 est annulé.
Article 2 : L'arrêté susvisé du 23 novembre 2000 du préfet de Corse-du-Sud est annulé en tant qu'il considère que la commune de Cauro est desservie par l'officine de pharmacie située à Porticcio, sur le territoire de la commune de Grosseto-Prugna.
Article 3 : L'Etat versera une somme de 1.000 (mille euros) à M. François X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la commune de Cauro et au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.
Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.
Délibéré à l'issue de l'audience du 17 février 2004, où siégeaient :
M. LAPORTE, président de chambre,
Mme LORANT, présidente assesseur,
M. ZIMMERMANN, premier conseiller,
assistés de Mme LOMBARD, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 9 mars 2004.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Guy LAPORTE Franck ZIMMERMANN
Le greffier,
Signé
Marie-Claire LOMBARD
La République mande et ordonne au ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 01MA01972