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18/12/2003 | FRANCE | N°99MA01045

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 18 décembre 2003, 99MA01045


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 9 juin 1999, sous le n° 99MA01045, présentée pour la SCI Parc de Vallauris , dont le siège social est ... Fédération, à Paris (75737), par Me Philippe X..., avocat ;

La SCI Parc de Vallauris demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 25 mars 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits de taxes sur la valeur ajoutée qui lui avaient été réclamés, par avis de mise en recouvrement n° 94 01 M 003 du 12 jan

vier 1994 ;

Classement CNIJ : 19 06 02 01

C +

2°/ de la décharger des droi...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 9 juin 1999, sous le n° 99MA01045, présentée pour la SCI Parc de Vallauris , dont le siège social est ... Fédération, à Paris (75737), par Me Philippe X..., avocat ;

La SCI Parc de Vallauris demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 25 mars 1999, par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à la décharge des droits de taxes sur la valeur ajoutée qui lui avaient été réclamés, par avis de mise en recouvrement n° 94 01 M 003 du 12 janvier 1994 ;

Classement CNIJ : 19 06 02 01

C +

2°/ de la décharger des droits litigieux ;

Elle soutient :

- qu'elle est une société de construction vente, ayant édifié plusieurs immeubles sur un terrain à Vallauris ; que certains des immeubles ont été vendus dans le délai de cinq ans, suivant leur achèvement, et soumis de ce fait au régime de la taxe sur la valeur ajoutée immobilière, le litige se posant pour les autres appartements ;

- que, contrairement à ce qu'ont estimé l'administration fiscale, puis le tribunal administratif, la vente des immeubles postérieurement au délai de cinq ans après leur achèvement relève de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, en application de l'article 257-6 du code général des impôts ;

- qu'il doit exister une corrélation entre la taxe sur la valeur ajoutée due et la taxe sur la valeur ajoutée récupérable ; qu'à partir du moment où une taxe est due au titre de la vente de l'immeuble, même sur la marge, il existe nécessairement un droit à déduction sur cet immeuble ;

- que dans les circonstances de l'espèce, le seul immeuble acquis par la société est le terrain ; que dans une décision ancienne le Conseil d'Etat a validé sa position ; qu'ainsi, seule la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat des terrains à bâtir doit faire l'objet d'un redressement soit 224.228 F ; que c'est donc à tort que lui a été réclamée une somme de 3.442.080 F ;

- que la jurisprudence sur laquelle s'est fondé le Tribunal administratif de Nice, devra être écartée ; que la société ayant fait une opération de construction est fondée à se prévaloir de la rédaction claire de l'article 257 - 6e du code général des impôts ; que la doctrine précisait, s'agissant de cet article, que la société était passible de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ;

- qu'elle est également fondée à invoquer les principes de sécurité juridique et de confiance légitime, réaffirmés par la Cour européenne des droits de l'homme, ainsi que par la Cour de justice des communautés européennes, et en application desquels, la société s'étant fondée sur une position du Conseil d'Etat, sur la position de la doctrine administrative, et également sur la rédaction de l'article 257-6° du code général des impôts, elle ne saurait voir rétroactivement remise en cause sa situation fiscale ;

- que l'article 221 de l'annexe II du code général des impôts se réfère aux opérations exonérées de taxe sur la valeur ajoutée et ne saurait s'appliquer aux opérations passibles de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge ;

- que l'avis de mise en recouvrement n'est pas suffisamment motivé, et que la décharge s'imposera de ce fait ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 14 juin 1999, le nouveau mémoire présenté pour la SCI Parc de Vallauris ; la société demande à la Cour de prononcer le sursis à exécution de l'avis de mise en recouvrement du 21 juillet 1993, par lequel lui ont été réclamés les droits litigieux ;

La société invoque les mêmes moyens de décharge que ceux de sa requête introductive d'appel, et soutient que les conséquences seraient pour elle difficilement réparables, dès lors qu'elle ne dispose pas d'une trésorerie suffisante, ou de valeurs mobilières à vendre, afin de régler l'imposition mise à sa charge ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 1999, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre demande à la Cour de rejeter la requête de la SCI Parc de Vallauris ;

Il soutient :

- qu'aux termes de l'article 257-7°-2 du code général des impôts, la taxe sur la valeur ajoutée immobilière, à laquelle sont normalement assujetties les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles, n'est toutefois pas applicable, dans le cas d'opérations portant sur des biens immobiliers achevés depuis plus de cinq ans ; qu'en application de l'article 221 - 1 de l'annexe II du même code, la taxe dont la déduction a déjà été opérée doit être reversée, lorsque les biens concernés donnent lieu à une opération qui n'est pas effectivement soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ;

- que dans les circonstances de l'espèce, la société a vendu des immeubles d'habitation achevés, et non pas des terrains à bâtir ; que toutes les dépenses effectuées antérieurement contribuent à l'achèvement des immeubles ; que des immeubles non revendus dans le délai de cinq ans suivant leur date d'achèvement sortent du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée ; que c'est donc à bon droit qu'a été réclamée à la société, la taxe afférente aux opérations ayant concouru à la production de ces immeubles ;

- que, dans ces conditions, la décision du Tribunal administratif de Nice est fondée, et que peu importe à cet égard que les reventes d'immeubles soient ou non passibles de la taxe sur la valeur ajoutée sur la marge, en application de l'article 257 - 6 du code général des impôts ;

- que, contrairement à ce que soutient la société, la remise en cause du droit à déduction par l'administration fiscale résulte clairement de la doctrine administrative et de la jurisprudence en vigueur à la date des redressements ; que le principe de sécurité juridique n'a pas été méconnu ; que la société n'a jamais été inscrite au registre du commerce des sociétés en tant que marchand de biens et n'en a pas la qualité ; qu'à supposer même que cette qualité aurait pu être reconnue, elle aurait toujours été contrainte de reverser la taxe sur la valeur ajoutée litigieuse, en application de l'article 221 de l'annexe II repris par la doctrine DB 8A 222 ;

- que la motivation de l'avis de mise en recouvrement, par référence à la notification de redressement du 26 août 1993 est correcte ; que la différence entre les rappels portés sur la notification de redressement, et ceux figurant sur l'avis de mise en recouvrement n'affecte pas la régularité de cet avis ;

- que la demande de sursis exécution devra également être rejetée, les conditions prévues pour l'octroi du sursis n'étant pas réunies

Vu, enregistré le 4 janvier 2000,le nouveau mémoire présenté pour la SCI Parc de Vallauris ; la société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens, et par le moyen que l'avis de mise en recouvrement n'est pas suffisamment motivé, comme l'a rappelé un arrêt du Conseil d'Etat ;

Vu, enregistré le 23 février 2000, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens, et par le moyen :

- que la loi de finances rectificative pour 1999 a validé les avis de mise en recouvrement émis à la suite d'une notification de redressement effectuée avant le 1er janvier 2000, en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré d'une insuffisance de motivation par référence à la notification de redressement ; que l'avis de mise en recouvrement litigieux, en ce qu'il se réfère à la notification de redressement du 26 août 1993, est suffisamment motivé ;

Vu, enregistré le 24 mars 2000, le nouveau mémoire présenté pour la SCI Parc de Vallauris ; la société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens, et par les moyens :

- que l'application de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 est contraire à l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme ;

- que, de plus, l'avis de mise en recouvrement litigieux n'est pas couvert par la validation, puisqu'il mentionne une date erronée ; qu'il ne saurait être question d'étendre le champ d'application de l'article 25 de la loi de finances pour 1999 ;

Vu, enregistré le 2 mai 2003, le nouveau mémoire présenté pour la SCI Parc de Vallauris ; la société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et par les moyens :

- que la jurisprudence de la Cour de cassation considère comme contraire à l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme l'article 25 II B de la loi de finances rectificative pour 1999 ;

- que ces dispositions sont également contraires à l'article premier du protocole additionnel de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, et à l'article 14 de cette convention relative au principe de non discrimination ;

- - que l' avis de mise en recouvrement est encore irrégulier en ce qu'il ne comporte pas le détail des intérêts de retard ; que la notification à laquelle il renvoie ne comporte aucun élément relatif au calcul de ces intérêts ;

Vu, enregistré le 26 novembre 2003, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut à ce que la Cour prononce un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement prononcé, et, pour le surplus, à ce qu'elle rejette les prétentions de la société ; il soutient :

- qu'en application d'une jurisprudence constante du Conseil d'Etat l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'est pas applicable aux procédures relatives aux taxations fiscales ; que par ailleurs le Conseil Constitutionnel a déclaré conforme à la constitution des dispositions litigieuses ;

- que le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement, pour défaut de date de la notification de redressement ne constitue pas une irrégularité de nature à entraîner la décharge des impositions ;

- que les moyens invoqués par la société, et tirés de l'illégalité des dispositions de la loi de finances rectificative au regard des dispositions de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et de l'article 14 de la convention seront également rejetés, compte tenu de la jurisprudence ;

- qu'il a fait droit aux prétentions de la société concernant l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement, en ce qui concerne les pénalités ;

Vu, enregistré le 2 décembre 2003, le nouveau mémoire présenté pour la SCI Parc de Vallauris ; la société conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens, et par les moyens :

- que l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est applicable en l'espèce, puisqu'il s'agit d'un contentieux portant sur la taxe sur la valeur ajoutée, impôt communautaire ;

- que les dispositions de validation résultant de la loi du 30 décembre 1999 sont contraires à l'article premier du protocole additionnel, en ce qu'elles portent atteinte au droit de propriété, et que la validation rétroactive n'est pas justifiée par un but d'intérêt général évident et impérieux ;

- que les dispositions litigieuses violent encore l'article premier du protocole additionnel, combiné avec l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'enfin, les dispositions litigieuses violent l'article 13 de la même convention ;

Vu, enregistré le 8 décembre 2003, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ; le ministre conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, et sollicite un report pour répondre au nouveau moyen présenté par la société ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 décembre 2003 :

- le rapport de Mme PAIX, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Sur le principe du reversement de la taxe :

Sur l'application de la loi fiscale :

Considérant que la société civile immobilière Parc de Vallauris fait appel du jugement du 25 mars 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge d'un montant de taxe sur la valeur ajoutée de 3.217.852 F (490.558, 38 euros) qui lui a été assigné à raison du reversement de la taxe d'amont relative à la construction à Vallauris d'immeubles destinés à la vente , mais demeurés invendus dans le délai de 5 ans suivant leur achèvement ;

Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 257 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à la période d'imposition : Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée : 7°) les opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles. Ces opérations sont imposables même lorsqu'elles revêtent un caractère civil. 1. Sont notamment visés : ... les ventes d'immeubles ... 2. Les dispositions qui précèdent ne sont pas applicables : - aux opérations portant sur des immeubles ou parties d'immeubles qui sont achevés depuis plus de 5 ans , et, d'autre part, qu'en application des dispositions de l'article 271 du code général des impôts la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé le prix d'une opération n'est déductible que dans le cas où cette opération est elle-même soumise à cette taxe ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les travaux de construction d'un immeuble est regardée comme déductible tant que cet immeuble demeure, pendant la durée du délai de cinq ans fixé à cet article 257-7°, destiné à la vente et, d'autre part, que si l'immeuble n'est pas vendu à l'expiration de cette période de cinq ans, la condition à laquelle est subordonné l'exercice du droit à déduction n'étant pas remplie, la taxe sur la valeur ajoutée primitivement déduite doit alors être reversée, comme le prévoit le 1 de l'article 221 de l'annexe II au code général des impôts, pris en application de l'article 273 de ce code ;

Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, de l'article 4.1.4° de la loi du 6 janvier 1966, reprises à l'article 257. 6° du code général des impôts, que celles-ci visent les opérations d'achat et de revente, en l'état, d'immeubles qui procurent aux personnes s'y livrant à titre habituel des profits auxquels l'article 35-I-1°, premier alinéa, du code général des impôts attribue le caractère de bénéfices industriels et commerciaux ; qu'en vertu du 2 de l'article 24 de la loi du 6 janvier 1966, le régime d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée prévu par les dispositions reprises à l'article 257-6° du code général des impôts n'est pas applicable aux opérations concourant à la production ou à la livraison d'immeubles visées par l'article 257-7°, issu de l'article 27 de la loi du 15 mars 1963, modifié par l'article 9 de la loi du 17 décembre 1966, alors même que l'article 2 de la loi du 31 décembre 1970, repris à l'article 35.I.1°, second alinéa, du code général des impôts, a ultérieurement précisé que les profits réalisés à titre habituel par les personnes ... qui achètent des biens immeubles en vue d'édifier un ou plusieurs bâtiments et de les revendre en bloc ou par locaux , conservent, en dépit du caractère civil de ces opérations, la nature de bénéfices industriels et commerciaux ; que le fait que le régime d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée prévu par l'article 257-7° n'est pas applicable, en vertu du 2, précité, de cet article, aux opérations portant sur des bâtiments ainsi édifiés qui sont achevés depuis plus de cinq ans, ne peut avoir effet, même au cas où elles seraient le fait d'une personne ayant, au titre d'autres activités, la qualité de marchand de biens, de faire entrer ces opérations dans le champ d'application de l'article 257-6° ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la société civile immobilière requérante ait eu, au regard de la loi fiscale correctement interprétée, ainsi qu'elle l'admet en définitive, la qualité de marchand de biens à raison de la construction et de la vente, après cinq ans, des immeubles en litige ; que la société ne saurait donc en tout état de cause prétendre avoir conservé en tout ou partie des droits à déduction dont il s'agit à raison d'une qualité légale de marchand de biens ; que, n'étant passible à aucun titre de la taxe sur la valeur ajoutée à raison des immeubles dont la construction s'était achevée depuis plus de cinq ans, la société civile ne peut revendiquer pour ces biens l'application du 6° de l'article 256 du code général des impôts pour en déduire que l'article 221-1 de l'annexe II à ce code ne leur était pas applicable ; que, l'administration n'ayant pas fondé le rappel de taxe contesté sur l'article 231 de cette annexe, la circonstance que cette disposition ne pourrait être opposée à la société est alléguée en vain ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le rappel critiqué doit être regardé comme procédant, ainsi que l'a jugé le Tribunal administratif de Nice, d'une exacte application des textes applicables ; que si la société civile immobilière requérante soutient qu'il doit exister une corrélation entre la TVA due et la TVA récupérable et qu'à partir du moment où une TVA est due au titre de la vente de l'immeuble (même sur une assiette réduite, en l'occurrence la marge), il existe nécessairement un droit à déduction (certes réduit) au titre de cet immeuble , ces affirmations de principe ne reposent sur aucun texte et ne peuvent donc être opposées à l'application correcte du code général des impôts par le service ; qu'il en va de même de l'affirmation selon laquelle l'administration ne pourrait exiger que le reversement de la taxe afférente au terrain ;

Sur l'invocation de la doctrine administrative et des principes de sécurité juridique et de confiance légitime :

Considérant que la société requérante invoque, sur le fondement de l'article L.80-A du livre des procédures fiscales, la doctrine figurant dans la documentation de base référencée 8 FI 8 A 2211 selon laquelle les promoteurs demeurent, après le délai de 5 ans, assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée sur la différence entre le prix de vente et le prix de revient des biens cédés ; que, toutefois, il ressort des dispositions combinées des articles 257-6° du code général des impôts et de l'article 231 de l'annexe II au même code que les opérations qui portent sur des immeubles et dont les résultats doivent être compris dans les bases de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices industriels ou commerciaux ne peuvent donner lieu à déduction de la taxe ayant grevé le prix d'acquisition des immeubles ; que la doctrine administrative relative à ce point précis, qui figure dans la documentation de base DB 8A 222 n° 3 ne donne pas de ces dispositions une interprétation différente ; que c'est donc en vain que l'article L. 80-A du livre des procédures fiscales est invoqué sur ce chef ; que l'existence, dès 1990, avant le fait générateur du reversement de la taxe en cause, d'une jurisprudence interprétant comme il a été dit ci-dessus la combinaison de l'articles 257-6° du code général des impôts avec l'article 231 de l'annexe II au même code ne permet pas à la société civile requérante de se prévaloir des principes, applicables en l'espèce, de la sécurité juridique et de la confiance légitime, dès lors qu'il ne résulte d'aucun élément du dossier qu'elle n'aurait pas été en mesure de prendre connaissance en temps utile de cette jurisprudence, et de ce qu'elle était exposée à l'obligation de reverser la taxe afférente aux immeubles qui seraient invendus depuis cinq ans ;

Sur la régularité de l'avis de mise en recouvrement n° 94 01 M 003 du 12 janvier 1994 :

Considérant qu'aux termes de l'article R.256-1 du livre des procédures fiscales : L'avis de mise en recouvrement individuel prévu à l'article L.256 comporte : 1° les indications nécessaires à la connaissance des droits, taxes, redevances, impositions ou autres sommes qui font l'objet de cet avis ; 2° les éléments du calcul et le montant des droits et des pénalités, indemnités ou intérêts de retard qui constituent la créance. Toutefois, les éléments du calcul peuvent être remplacés par le renvoi au document sur lequel ils figurent, lorsque ce document a été établi ou signé par le contribuable ou son mandataire ou lui a été notifié antérieurement ; mais qu'aux termes du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative en date du 30 décembre 1999, publiée postérieurement à l'enregistrement de la requête susvisée : B. Sont réputés réguliers, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, les avis de mise en recouvrement émis à la suite de notifications de redressements effectuées avant le 1er janvier 2000, en tant qu'ils seraient contestés par le moyen tiré de ce qu'ils se réfèreraient, pour ce qui concerne les informations mentionnées à l'article R.*256-1 du livre des procédures fiscales, à la seule notification de redressements ; que ces dernières dispositions font, désormais, obstacle à ce que la société civile immobilière Parc de Vallauris fasse utilement valoir que les éléments de calcul des droits portés sur l'avis de mise en recouvrement n° 94 01 M 003 du 12 janvier 1994 ne figuraient pas dans la notification de redressement du 21 juillet 1993 qui avait été adressée à la société par deux plis successifs, le premier ayant été retourné au service avec la mention non réclamé , et le second ayant été envoyé le 26 août 1993, et à laquelle renvoyait ledit avis, alors que ces éléments de calcul et le montant, plus faible, de ces droits et pénalités, résultaient de la réponse de l'administration aux observations de la redevable ; que la circonstance, en outre invoquée par la société, que la date de notification des redressements indiquée sur l'avis de mise en recouvrement serait erronée, argument qui d'ailleurs manque en partie en fait puisque l'avis de mise en recouvrement mentionne la date du 26 août 1993, n'est pas de nature en toute hypothèse à vicier la référence faite à cette notification ; que le renvoi de l'avis de mise en recouvrement à une notification de redressements du 26 août 1993 n'est entaché d'aucune erreur matérielle substantielle, puisque la notification des rehaussements a bien été adressée une seconde fois à la société à cette dernière date ; que la société n'est donc pas fondée à soutenir à ce sujet qu'admettre la régularisation de l'avis dont il s'agit serait méconnaître l'interprétation restrictive qu'aurait donné du texte rétroactif en cause le Conseil Constitutionnel dans sa décision n° 99-425 DC du 29 décembre 1999 ;

Considérant, il est vrai, que la société requérante excipe de l'inconventionnalité du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative en date du 30 décembre 1999, en soutenant que ces dispositions méconnaissent les articles 6 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'article premier du premier protocole additionnel à cette convention ; mais considérant que les dispositions internes incriminées, qui ont pour objet d'assurer le paiement d'impositions légalement fondées et l'égalité devant les charges publiques des redevables de la taxe sur la valeur ajoutée ayant fait l'objet de procédures de reprise antérieures et postérieures à leur entrée en vigueur, poursuivent un motif d'intérêt général de nature à justifier la validation, qu'elles prononcent, de telles procédures ; qu'elles ne font pas obstacle à la contestation de la régularité d'avis de mise en recouvrement par tout autre moyen que celui tiré du seul renvoi à une notification de redressements et ne privent donc les redevables d'aucune garantie de fond ni de forme ; que si elles réservent le cas des redevables bénéficiant d'une décision juridictionnelle passé en force de chose jugée, ce dispositif, qui répond au souci de la sécurité juridique, tire les conséquences normales de la différence fondamentale de situation existant entre les administrés selon qu'ils peuvent ou non se prévaloir de la chose jugée ; que, dès lors, la société Parc de Vallauris n'est pas fondée à soutenir qu'elles méconnaîtraient les stipulations de l'article 1er du 1er protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni qu'elles créeraient une situation de discrimination prohibée par l'article 14 de cette convention ni enfin que l'article 13 de la même convention aurait été méconnu ; qu'en outre, la société ne peut utilement faire valoir qu'elles méconnaîtraient les stipulations de l'article 6-1 de cette convention, qui ne régissent pas la matière fiscale ; que, par suite, l'avis de mise en recouvrement litigieux doit être réputé suffisamment motivé ;

Sur les intérêts de retard :

Considérant que la société civile requérante élève une critique distincte à l'encontre des intérêts de retard appliqués aux droits en cause, fondée sur l'absence des éléments de calcul dans la notification de redressements et dans l'avis de mise en recouvrement afférents au rappel de taxe en cause ;

Considérant que le ministre estime sur ce point devoir, par acquiescement au moyen de la société requérante, faire droit à ses conclusions et prononcer un dégrèvement d'un montant de 438.865 F (66.904, 54 euros) correspondant à la totalité des intérêts de retard mis en recouvrement ; que toutefois, il n'a pas transmis à la Cour le certificat correspondant ; qu'il y a donc lieu pour la Cour, dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que la décision de l'administration sur ce point serait erronée, de prononcer elle même la décharge des intérêts litigieux ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société civile immobilière Parc de Vallauris est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice n'a pas prononcé en sa faveur la décharge des intérêts de retard dont ont été assortis les droits en principal contestés ;

Sur les conclusions à fins de sursis à l'exécution de l'avis de mise en recouvrement du 12 janvier 1994 :

Considérant que la présente décision se prononce au fond sur les conclusions de la société requérante ; qu'il n'y a donc plus lieu de statuer sur ses conclusions à fins de sursis à l'exécution de la décision d'imposition contestée ;

D E C I D E :

Article 1 : La société civile immobilière Parc de Vallauris est déchargée de la somme de 438.865 F (66.904, 54 euros) correspondant à la totalité des intérêts de retard afférents à la taxe sur la valeur ajoutée mise à son nom par l'avis de mise en recouvrement n° 94 01 M 003 du 12 janvier 1994.

Article 2 : Le jugement n° 95 1550 du 25 mars 1999 du Tribunal administratif de Nice est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société civile immobilière Parc de Vallauris est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à SCI Parc de Vallauris et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 9 décembre 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

Mme PAIX, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 18 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Evelyne PAIX

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

12

N° 99MA01045


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 99MA01045
Date de la décision : 18/12/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Mme PAIX
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : BUREAU FRANCIS LEFEBVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-18;99ma01045 ?
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