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16/12/2003 | FRANCE | N°02MA00944

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 16 décembre 2003, 02MA00944


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 mai 2002 (télécopie) et le 28 mai 2002 (courrier postal), sous le n° 02MA00944, présentée par M. Charles X, représentant l'établissement ..., port de plaisance à Saint-Laurent-du-Var (06700), domicilié au siège de l'établissement ;

M. X demande à la Cour d'annuler le jugement, en date du 25 février 2002 du Tribunal administratif de Nice l'ayant condamné, d'une part, au paiement d'une amende à titre de contravention de grande voirie, d'autre part, à évacuer les lieux indûment occ

upés, situés au-delà de la zone amodiable du port de plaisance de Saint-L...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 25 mai 2002 (télécopie) et le 28 mai 2002 (courrier postal), sous le n° 02MA00944, présentée par M. Charles X, représentant l'établissement ..., port de plaisance à Saint-Laurent-du-Var (06700), domicilié au siège de l'établissement ;

M. X demande à la Cour d'annuler le jugement, en date du 25 février 2002 du Tribunal administratif de Nice l'ayant condamné, d'une part, au paiement d'une amende à titre de contravention de grande voirie, d'autre part, à évacuer les lieux indûment occupés, situés au-delà de la zone amodiable du port de plaisance de Saint-Laurent-du-Var, et à les remettre en état dans un délai de 90 jours à compter de la notification du jugement précité ;

Classement CNIJ : 24-01-03-01

C

Il soutient que les terre-pleins sur lesquels ont été réalisés les extensions litigieuses font partie du domaine privé de l'Etat ; que la convention de concession du port de plaisance de Saint-Laurent-du-Var conclue en 1974 entre l'Etat et la commune ne lui est pas opposable ; que l'infraction poursuivie étant constitutive d'une contravention de petite voirie, le juge administratif est incompétent pour en connaître ; qu'en l'espèce, s'agissant d'une dépendance du domaine privé de l'Etat dont l'entretien est assuré par des fonds privés, la procédure de contravention de grande voirie n'est pas applicable ; que c'est à tort que le tribunal administratif a prononcé les condamnations dont il est fait appel sans trancher la question de savoir si les zones litigieuses sont ou non amodiables et sans se prononcer sur le refus de l'Etat de lui délivrer le contrat d'amodiation sollicité ; que les poursuites engagées sont tardives et discriminatoires ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er octobre 2002, le mémoire en défense présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer qui conclut au rejet de la requête et à la confirmation du jugement attaqué ;

Il soutient que l'argumentation développée par M. X est confuse et inopérante ; que le requérant confond les critères de la domanialité publique et de la domanialité privée ; qu'il opère une confusion entre la procédure de contravention de grande voirie et celle de la contravention de voirie routière ;

Vu, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 21 août 2003, le mémoire en observation, présenté pour la commune de Saint-Laurent-du-Var par la SCP BURLETT-PLENOT-SUARES-BLANCO, avocats ;

La commune soutient :

- qu'à titre principal le juge administratif est incompétent au profit du juge judiciaire dès lors que l'on se trouve en présence d'une contravention de voirie routière ; qu'en l'espèce, les atteintes délictueuses affectant des dépendances de voies de circulation ouvertes au public, les dispositions de l'article R.116-2 du code de voirie routière sont applicables en lieu et place des poursuites engagées pour cause de contravention de grande voirie ;

- qu'à titre subsidiaire que les contrevenants doivent être relaxés dès lors que, d'une part, en engageant tardivement des poursuites en vue de mettre fin à des occupations irrégulières du domaine public qu'il avait pourtant tolérées depuis de nombreuses années, l'Etat a modifié son comportement initial et a commis une faute de nature à priver de fondement légal les poursuites engagées au-delà d'un délai raisonnable ; d'autre part, la faute précitée constitue un cas de force majeure de nature à justifier l'exonération des poursuites ; qu'en s'abstenant d'agir et de mettre fin à une situation confuse, notamment sur la consistance réelle des zones amodiables, l'autorité administrative a mis les contrevenants dans l'impossibilité de prévenir la réalisation des dommages résultant des occupations litigieuses ; qu'enfin, c'est à tort qu'en l'espèce, le préfet ne s'est pas abstenu d'engager des poursuites en considération des intérêts économiques locaux ;

Vu, enregistré au greffe de la Cour le 18 septembre 2003, le nouveau mémoire présenté par le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer qui persiste dans ses précédentes conclusions ;

Il soutient que les trottoirs, objet des occupations litigieuses, à les supposer qualifiables de dépendances de voies de circulation, font partie intégrante du domaine public portuaire qui continue d'appartenir à l'Etat, nonobstant le transfert de compétences aux communes décidé par la loi du 22 juillet 1983, et entrent ainsi dans le champ d'application des pouvoirs de police spéciale en matière de contravention de grande voirie ; que, par suite, le juge administratif est, en l'espèce, compétent ; qu'en outre, la position arrêtée dans cette affaire par les services de l'Etat n'est ni tardive, ni ambiguë et n'a pu, par suite, constituer un cas de force majeure ; que le délai consenti depuis 1980 pour mettre un terme aux occupations litigieuses a joué en faveur du requérant ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'ordonnance sur la marine du 3 août 1681 ;

Vu le code pénal ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu la loi n° 2002-1062 du 6 août 2002 portant amnistie ;

Vu le code des ports maritimes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 18 novembre 2003 :

- le rapport de Mme LORANT, présidente assesseur ;

- les observations de Me BURLETT pour la commune de Saint-Laurent-duVar ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur le non-lieu en appel en ce qui concerne l'action publique :

Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi n°2002-1062 du 6 août 2002 : Sont amnistiées de droit, en raison soit de leur nature ou des circonstances de leur commission, soit du quantum ou de la nature de la peine prononcée, les infractions mentionnées par le présent chapitre lorsqu'elles ont été commises avant le 17 mai 2002... et qu'aux termes de l'article 2 de ladite loi : Sont amnistiées en raison de leur nature : 1° Les contraventions de police et les contraventions de grande voirie. ;

Considérant que l'intervention de ces dispositions fait définitivement obstacle à l'exécution de la condamnation à l'amende prononcée par le jugement attaqué ; que par suite, dans la mesure où il ne résulte pas de l'instruction que l'amende prononcée par le jugement attaqué en date du 25 février 2002 a été payée, les conclusions dirigées contre l'article 2 du jugement et tendant à la décharge de cette condamnation sont devenues sans objet ;

Sur la compétence de la juridiction administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.116-1 du code de la voirie routière : La répression des infractions à la police de la conservation du domaine public routier est poursuivie devant la juridiction judiciaire sous réserve des questions préjudicielles relevant de la compétence de la juridiction administrative. , et qu'aux termes de l'article R.116-2 dudit code : Seront punis d'amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe ceux qui : 1º Sans autorisation, auront empiété sur le domaine public routier ou accompli un acte portant ou de nature à porter atteinte à l'intégrité de ce domaine ou de ses dépendances, ainsi qu'à celle des ouvrages, installations, plantations établis sur ledit domaine ; ;

Considérant que s'il est soutenu que les installations commerciales en cause sont implantées sur des voies ouvertes à la circulation et pourvues de trottoirs et donc relèvent du domaine public routier dont les litiges sont de la compétence du juge judiciaire conformément aux dispositions précitées du code de la voirie routière, il ressort des pièces du dossier que lesdites installations sont implantées dans une enceinte portuaire, sur les terres-pleins du port de plaisance créés par exondation lors de la réalisation du port et que les voies sur lesquelles sont installés les commerces ont été aménagées, à titre principal, pour la desserte des installations portuaires et plus généralement pour l'exploitation du port, dans laquelle figure l'activité commerciale ; que par suite et alors même que lesdites voies sont ouvertes à la circulation et à l'usage du public elles doivent être regardées comme appartenant au domaine public maritime ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le Tribunal administratif de Nice s'est reconnu à bon droit compétent pour statuer sur les conclusions du préfet des Alpes-Maritimes tendant à ce que soient prononcées, sur le fondement des poursuites engagées en matière de contravention de grande voirie, les condamnations litigieuses ;

Sur le bien fondé des contraventions de grande voirie sous l'angle de l'action domaniale :

Considérant qu'ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les zones d'implantation des constructions litigieuses, créés par exondation lors de la réalisation du port et principalement affectées à la desserte des installations portuaires, font partie intégrante du domaine public maritime et non du domaine privé de l'Etat et ce sans qu'y fassent obstacle, d'une part, le fait que les ouvrages du port seraient financés par des fonds privés, d'autre part, la circonstance qu'une grande partie de la zone portuaire ferait l'objet d'occupations privatives ; que la procédure de contravention de grande voirie leur est ainsi applicable au même titre que pour l'ensemble du port de plaisance ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que les installations litigieuses ont été réalisées, sans autorisation de l'autorité compétente, sur des parties du domaine public maritime non comprises dans l'amodiation initiale, et que ces faits méconnaissent ainsi non seulement les stipulations du cahier des charges, dont la direction départementale de l'équipement avait réclamé, dès le 3 octobre 1980, le respect, mais aussi les dispositions de l'ordonnance de marine du 6 août 1681 et sont constitutifs de contravention de grande voirie ; que le moyen tiré d'un prétendu refus de l'Etat de délivrer au requérant le contrat d'amodiation qu'il aurait sollicité est sans incidence sur l'existence de ladite contravention ; qu'en outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que les poursuites engagées seraient entachées de discrimination ;

Sur les causes d'exonération :

Considérant que le requérant fait valoir en premier lieu que l'Etat a commis une faute de nature à l'exonérer en raison de ce que les documents juridiques se rapportant au transfert de compétence des zones amodiables sur le port sont inexacts en comparaison des plans initiaux de sorte qu'il a considéré comme amodiables les surfaces litigieuses ; que cette circonstance est inopérante dès lors qu'il est constant que ces surfaces ont en tout état de cause été occupées sans autorisation ;

Considérant en deuxième lieu que, contrairement à ce que soutient le requérant, l'inertie administrative antérieure ou son retard à poursuivre ne saurait constituer une faute, et qu'en tout état de cause l'imprescriptibilité du domaine public s'oppose à toute forme de prescription acquisitive ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a fait droit à la requête du préfet des Alpes Maritimes ;

DECIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête présentées par M. X en tant qu'elles sont dirigées contre sa condamnation à une amende de 750 euros.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. X est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. X, à la société Yacht Club International, à la commune de Saint-Laurent-du-Var et au ministre de l'équipement, du logement, du tourisme et de la mer.

Délibéré à l'issue de l'audience du 18 novembre 2003, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme GAULTIER, premier conseiller,

assistés de Mme LOMBARD, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 16 décembre 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Marie-Claire LOMBARD

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA00944
Date de la décision : 16/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BURLETT-PLENOT-SUARES-BLANCO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-12-16;02ma00944 ?
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