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17/06/2003 | FRANCE | N°01MA00244

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4eme chambre-formation a 3, 17 juin 2003, 01MA00244


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er février 2001, sous le n° 01MA00244, présenté pour Mme Suzanne X, demeurant ..., par Me BENSA, avocat à la Cour ;

Mme X demande à la Cour de réformer le jugement n° 94-4740 en date du 19 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône à lui verser une indemnité de 291.308,59 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi ;

Elle soutient que le Tribunal

administratif de Marseille l'a déboutée à tort des demandes de réparation de ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 1er février 2001, sous le n° 01MA00244, présenté pour Mme Suzanne X, demeurant ..., par Me BENSA, avocat à la Cour ;

Mme X demande à la Cour de réformer le jugement n° 94-4740 en date du 19 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône à lui verser une indemnité de 291.308,59 F, qu'elle estime insuffisante, en réparation du préjudice qu'elle a subi ;

Elle soutient que le Tribunal administratif de Marseille l'a déboutée à tort des demandes de réparation de son préjudice immatériel des chefs des perturbations et soucis occasionnés pour la période de juin 1993 jusqu'à ce jour et de son préjudice financier pour la période d'octobre 1995 jusqu'à ce jour ;

Classement CNIJ : 60-01-02-01-03-01-01

C

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juillet 2001, présenté pour l'Office Public d'Aménagement et de Construction (O.P.A.C.) des Bouches-du-Rhône, par Me BERNARDI, avocat à la Cour ;

L'O.P.A.C. demande à la Cour le rejet de la requête et la condamnation de Mme X à lui verser une somme de 20.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la requête, dépourvue de moyen, est irrecevable, et qu'aucune régularisation n'est intervenue dans le délai de recours ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 6 septembre 2001, présenté pour Mme X par Me BENSA ;

Mme X persiste dans ses conclusions, et demande en outre la condamnation de l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône à lui verser une somme de 491.640 F au titre de son préjudice financier pour la période d'octobre 1995 à ce jour, une somme de 507.860 F au titre de son préjudice immatériel pour la période de juin 1993 jusqu'à octobre 2000, et une somme de 20.000 F au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que sa requête a dûment présenté les faits et les moyens à l'appui de ses conclusions ; que l'importance des travaux, des frais d'expertise, et la situation financière précaire de la requérante ne lui permettaient pas de faire face à d'importants travaux de réfection, ce qui lui a créé un préjudice financier ; que l'expert judiciaire a admis l'existence de préjudices immatériels que le Tribunal administratif a considéré à tort comme éventuels ;

Vu le mémoire, enregistré le 15 novembre 2001, présenté pour l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône par Me BERNARDI ;

L'O.P.A.C. persiste dans ses conclusions et demande en outre que le jugement attaqué soit réformé en ce qu'il a rejeté sa demande de condamnation solidaire de la Société Régionale des Travaux Méditerranéens, de M. Christian Y et de la Société Contrôle et Prévention, par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la requérante confond moyens et conclusions ; que Mme X n'apporte aucun justificatif à l'appui de ses prétentions ; que l'avance de 138.000 F, considérée par les premiers juges comme sans rapport avec les travaux en cause, ont été réalisés à la demande de Mme X après le sinistre et à cause de lui, pour soutenir l'immeuble endommagé ; que la demande de l'O.P.A.C. de ce chef était dirigée contre les constructeurs et non contre la requérante ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 janvier 2002, présenté pour Mme X par Me BENSA ;

Mme X persiste dans ses conclusions, mais limite son préjudice financier à la période d'octobre 1995 à octobre 2000, par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre qu'elle a subi une absence de revenus locatifs qui a aggravé sa situation financière ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2003 :

- le rapport de M. POCHERON, premier conseiller ;

- les observations de Me ESTIENNE, substituant Me BENSA, pour Mme X ;

- les observations de Me DUPIN, substituant Me BERNARDI, pour l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert judiciaire, M. CHIRIE, que les travaux de construction d'un immeuble d'habitation pour le compte de l'Office Public d'Aménagement et de Construction (O.P.A.C.) des Bouches-du-Rhône sur un terrain sis 5 et 7, boulevard Saint-Bruno à Marseille (4ème), sont à l'origine des désordres affectant deux immeubles appartenant à Mme Suzanne X situés au n° 3 du même boulevard ;

Sur la recevabilité de l'appel :

Considérant que dans sa requête déposée le 1er février 2001 dans le délai de recours contentieux, Mme X demande l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Marseille en date du 19 décembre 2000, qui n'a fait que partiellement droit à ses demandes, aux motifs que les premiers juges l'avaient déboutée de son préjudice immatériel correspondant aux perturbations et aux soucis occasionnés pour la période de juin 1993 jusqu'à ce jour... et de son préjudice financier pour la période d'octobre 1995 jusqu'à ce jour. ; que cette requête doit être considérée comme contenant l'exposé des faits et des moyens prévu par l'article R.411-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône n'est pas fondé à soutenir que les conclusions de Mme X seraient irrecevables faute pour la requérante d'avoir présenté des moyens à leur appui avant l'expiration du délai d'appel ;

Sur le préjudice financier :

Considérant que devant le Tribunal administratif de Marseille, Mme X avait sollicité du chef du préjudice financier qu'elle prétendait avoir subi jusqu'au 1er décembre 1996, une somme de 315.478,62 F ; que M. CHIRIE, expert, avait fixé ce même préjudice, comprenant les pertes de loyer, le remboursement des cautions aux locataires, les frais de l'arrêté de péril, les frais de contentieux, et les taxes foncières, à un montant de 110.628,62 F pour une période allant jusqu'au 31 août 1994 ; que les premiers juges, ont évalué le dit préjudice, pour la période allant de juillet 1993 à septembre 1995, à 150.000 F ; qu'en appel, la requérante réclame dans le dernier état de ses conclusions, une indemnité de 491.640 F couvrant la période d'octobre 1995 à octobre 2000 ;

Considérant que les cautions des locataires et les taxes foncières sont dues en tout état de cause par la propriétaire ; que les frais d'arrêté de péril ont déjà été pris en compte par les premiers juges et que les frais de contentieux sont, le cas échéant, indemnisés en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative, en application duquel Mme X demande par ailleurs une somme de 20.000 F ; que, par suite, la requérante n'est fondée à invoquer, du chef de son préjudice financier, que les seules pertes de loyer résultant de l'impossibilité de donner ses appartements en location suite aux dommages causés à ses immeubles par les travaux de l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône ; que Mme X soutient que, faute de moyens financiers suffisants, elle n'a pu engager les travaux nécessaires avant le mois d'octobre 2000 et produit à l'appui de ses allégations un constat d'huissier en date du 2 octobre 2001 ; qu'il résulte du rapport de M. CHIRIE que le montant des travaux imputable au maître d'ouvrage s'élève à 141.308,60 F ; que, par arrêt du 27 septembre 1995, la Cour administrative de Lyon a accordé à la requérante une provision de 150.000 F ; qu'il est constant que si l'octroi d'une indemnité égale à la valeur vénale de l'immeuble fait obstacle à ce que le propriétaire obtienne une indemnité supplémentaire au titre des pertes de loyer postérieures à la date à laquelle l'étendue du dommage a été connue et à laquelle la valeur vénale de l'immeuble a été estimée, le propriétaire peut prétendre à une indemnité réparant les pertes de loyer qu'il a subies pendant la période antérieure, où il s'était trouvé dans l'impossibilité tout à la fois de procéder à la réparation du dommage et de louer son immeuble ; que, d'une part, la provision de 150.000 F accordée à l'appelante par la cour administrative de Lyon lui permettait de procéder à la remise en état de son immeuble ; que le fait qu'un coefficient de vétusté a été pris en compte pour le montant de la réparation du dommage est conforme aux principes de réparation devant le juge administratif ; que, d'autre part, il appartenait à Mme X de préciser à la Cour la date à laquelle elle a eu la disposition effective de la provision de 150.000 F, ce qu'elle n'a pas fait ; que, cependant, il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que la durée des travaux de remise en état de l'immeuble était de cinq mois ; que, dans l'hypothèse la plus favorable, la location des appartements sinistrés ne pouvait reprendre avant la fin du mois de février 1996 ; que, par suite, même en tenant compte du montant total des travaux nécessaires pour réhabiliter les appartements en cause, de la faiblesse des revenus de la requérante, et des frais d'expertise avancés, qui sont allégués par Mme X pour justifier son inaction, l'O.P.A.C. ne saurait être tenu comme responsable du retard mis par la propriétaire à réhabiliter son bien immobilier au-delà de cette échéance ; qu'il sera fait une juste appréciation de son préjudice financier subi, pour la période d'octobre 1995 à février 1996, en le fixant à une somme de 29.675 F, soit 4.523,92 euros, correspondant à cinq mois de loyers évalués par l'expert à 5.935 F mensuels ;

Sur le préjudice immatériel :

Considérant que si Mme X invoque les soucis et les tracasseries résultant des dommages dont elle se plaint, elle n'établit pas avoir effectivement subi dans ses conditions d'existence, alors notamment que l'immeuble en cause ne constituait pas sa résidence, des troubles distincts de ceux réparés par la décision prise par les premiers juges et réformée par le présent arrêt ; qu'elle n'est donc pas fondée à soutenir que c'est à tort que, sur ce point, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Sur l'indemnité :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la somme que l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône a été condamné à payer en première instance à Mme X doit être portée à 48.933,63 euros, sous déduction de la somme de 22.867,35 euros accordée par la Cour administrative d'appel de Lyon ;

Sur les conclusions de l'O.P.A.C. des Bouches du Rhône tendant à la réformation du jugement attaqué et a la condamnation de la société régionale de travaux méditerranéens, de M. Y et de la société contrôle et prévention :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la somme de 138.000 F réclamée devant le tribunal par l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône aux constructeurs sus-mentionnés correspond à une avance effectuée par l'office pour la réalisation de travaux d'urgence ; que ce litige est étranger au présent litige, la somme de 138.000 F en cause n'étant pas au nombre des indemnisations auxquelles Mme X pouvait prétendre devant les premiers juges ; que, par suite, l'O.P.A.C. n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, de condamner l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône à payer à Mme X une somme de 3.000 euros au titre des frais exposés par celle-ci et non compris dans les dépens ;

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que Mme X, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamnée à payer à l'O.P.A.C. des Bouches-du-Rhône la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme de 44.409,70 euros (quarante-quatre mille quatre cent neuf euros et soixante-dix centimes) que l'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône a été condamné à verser à Mme Suzanne X par le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 19 décembre 2000 est portée à 48.933,63 euros (quarante-huit mille neuf cent trente-trois euros et soixante-trois centimes), sous déduction de la somme de 22.867,35 euros (vingt-deux mille huit cent soixante-sept euros et trente-cinq centimes) accordée par la Cour administrative de Lyon à titre de provision par arrêt du 27 septembre 1995.

Article 2 : Le jugement du Tribunal administratif de Marseille du 19 décembre 2000 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône versera une somme de 3.000 euros (trois mille euros) à Mme X au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme X, et les conclusions de l'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône tendant à la condamnation de la Société Régionale de Travaux Méditerranéens, de M. Y et de la société Contrôle et Prévention à lui verser une somme de 138.000 F (cent trente-huit mille francs), ainsi qu'à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Suzanne X et au président de l'Office Public d'Aménagement et de Construction des Bouches-du-Rhône.

Délibéré à l'issue de l'audience du 3 juin 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

M. POCHERON, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 17 juin 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé signé

François BERNAULT Michel POCHERON

Le greffier,

signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 01MA00244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4eme chambre-formation a 3
Numéro d'arrêt : 01MA00244
Date de la décision : 17/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. POCHERON
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : BENSA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-06-17;01ma00244 ?
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