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10/06/2003 | FRANCE | N°02MA00657

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2eme chambre - formation a 3, 10 juin 2003, 02MA00657


Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 15 avril 2002 sous le n° 02MA00657, la requête présentée pour la COMMUNE DE CAGNES SUR MER, légalement représentée par son maire en exercice, domicilié es qualité en l'hôtel de ville, BP 79, à Cagnes Sur Mer (06800), par la S.E.L.A.R.L BURLETT-PLENOT-SUARES, avocats ;

La commune demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 11 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision du maire de la commune en date du 19 juillet 1999, portant radiation des

cadres de Mme X ;

2°/ de rejeter la demande de Mme X et de la condamner à ...

Vu, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 15 avril 2002 sous le n° 02MA00657, la requête présentée pour la COMMUNE DE CAGNES SUR MER, légalement représentée par son maire en exercice, domicilié es qualité en l'hôtel de ville, BP 79, à Cagnes Sur Mer (06800), par la S.E.L.A.R.L BURLETT-PLENOT-SUARES, avocats ;

La commune demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement en date du 11 février 2002 par lequel le Tribunal administratif de Nice a annulé la décision du maire de la commune en date du 19 juillet 1999, portant radiation des cadres de Mme X ;

2°/ de rejeter la demande de Mme X et de la condamner à verser 760 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

Classement CNIJ : 36-10-09

C+

La commune soutient qu'il résulte des dispositions combinées des articles L.7 du code électoral, 131-26, 432-10 à 432-16 du code pénal qu'une personne exerçant une fonction publique reconnue coupable d'un manquement à la probité défini par le code pénal ou du recel du produit d'un de ces manquements, ne peut plus être inscrite sur les listes électorales pendant 5 ans et que par suite elle ne peut plus exercer une fonction publique ; que Mme X ayant été reconnue coupable du recel de sommes d'argent qu'elle savait provenir d'escroquerie commise par une personne chargée d'une mission de service public, l'article L.7 du code électoral s'applique à l'espèce et que par voie de conséquence, Mme X a pu être radiée des cadres de la commune sans qu'il y ait lieu à procédure disciplinaire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 4 juin 2002, le mémoire en défense présenté pour Mme X par Me CHARBIT, avocat ;

Mme X conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune à lui verser 1.000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

L'intéressée fait valoir que l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 impose la mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire avant toute sanction ; que Mme X n'entre pas dans les cas de radiation sans procédure disciplinaire, le jugement du tribunal correctionnel ne comportant aucune disposition interdisant à l'intéressée d'exercer un emploi public ; que d'ailleurs elle a conservé sa carte d'électeur ;

Vu, enregistré le 30 octobre 2002, le mémoire présenté pour Mme X, tendant aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens ; l'intéressée réclame en outre le bénéfice de la loi d'amnistie ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code électoral ;

Vu le code pénal ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 mai 2003 :

- le rapport de Mme LORANT, présidente assesseur ;

- les observations de Me BLANCO pour la S.E.L.A.R.L. BURLETT-PLENOT-SUARES pour la COMMUNE DE CAGNES SUR MER ;

- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant que Mme X, employée par la COMMUNE DE CAGNES SUR MER, et affectée à l'entretien du musée Renoir dont son mari était le régisseur des recettes, a été mise en examen en septembre 1995 du chef de recel d'escroquerie commis par une personne chargée d'une mission de service public ; qu'elle a été suspendue par arrêté du maire de la commune en date du 18 septembre 1995 ; qu'après sa condamnation le 10 juin 1998 par le tribunal correctionnel de Grasse, qui l'a reconnue coupable des faits qui lui étaient reprochés, commis de manière habituelle depuis juin 1994, à un an de prison avec sursis assortie d'une mise à l'épreuve de 3 ans, sur le fondement des articles 321-1, 321-3 et 321-10 du code pénal, la commune l'a radiée des cadres par arrêté du 19 juillet 1999 ; que Mme X a attaqué cette décision devant le Tribunal administratif de Nice qui l'a annulée au motif que la condamnation prononcée à l'encontre de Mme X ne comportait pas la perte de ses droits civiques ;

Considérant en premier lieu que Mme X ne peut en tout état de cause prétendre au bénéfice de la loi d'amnistie du 6 août 2002, les faits qui sont à l'origine de la décision litigieuse étant contraires à l'honneur et à la probité ;

Considérant en second lieu qu'aux termes de l'article 5 de la loi du 13 juillet 1983 : nul ne peut avoir la qualité de fonctionnaire : ... 2°) s'il ne jouit de ses droits civiques ; 3°) le cas échéant si les mentions portées au bulletin n° 2 de son casier judiciaire sont incompatibles avec l'exercice des fonctions ; ... ; qu'en vertu des dispositions de l'article 24 de la même loi, la déchéance des droits civiques a pour conséquence la cessation définitive de fonctions qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire ;

Considérant que si l'article 132-21 du code pénal créé par la loi n° 92-683 du 22 juillet 1992, promulguée le 23 juillet 1992, et entré en vigueur le 1er mars 1994, prévoit que : L'interdiction de tout ou partie des droits civiques, civils et de famille mentionnés à l'article 131-26 ne peut, nonobstant toute disposition contraire, résulter de plein droit d'une condamnation pénale., les dispositions de l'article L.7 du Code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 19 janvier 1995, selon lesquelles : ne doivent pas être inscrites sur la liste électorale, pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive, les personnes condamnées pour l'une des infractions prévues par les articles 432-10 à 432-16, 433-1, 433-2, 433-3 et 433-4 du code pénal ou pour le délit de recel de l'une de ces infractions, défini par les articles 321-1 et 321-2 du code pénal. dérogent au principe antérieurement posé par l'article 132-21 précité du Code pénal ; que par suite, dès lors que les faits délictueux reprochés à Mme X se sont produits, au moins pour partie, postérieurement à la date de promulgation de la loi du 19 janvier 1995, et que la condamnation de Mme X a été prononcée sur le fondement des articles 321-1 et 321-3 du code pénal, le jugement devenu définitif en date du 10 juin 1998, par lequel le tribunal correctionnel de Grasse a condamné Mme X, s'opposait, conformément aux prévisions de l'article L.7 du code électoral, à ce que l'intéressée fût inscrite sur les listes électorales et la rendait inéligible ; que, par l'effet de cette condamnation, l'intéressée doit donc être regardée comme ayant été privée de ses droits civiques, bien que le tribunal n'ait pas prononcé contre elle la peine complémentaire de l'interdiction des droits civiques ; que la circonstance qu'elle a conservé sa carte d'électeur, et celle que l'extrait de casier judiciaire délivré le 15 janvier 2002 mentionne l'absence de condamnation devant figurer au bulletin n° 3, sont sans incidence sur l'application des dispositions précitées ; que par suite, en prononçant la radiation des cadres de Mme X, par l'arrêté attaqué en date du 19 juillet 1999, le maire de la COMMUNE DE CAGNES SUR MER n'a pas pris une mesure disciplinaire mais s'est borné, comme il y était tenu, à tirer les conséquences de la condamnation pénale de l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE CAGNES SUR MER est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 19 juillet 1999 par le seul moyen invoqué par Mme X ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative

Considérant que Mme X étant la partie perdante, ses conclusions présentées de ce chef ne peuvent qu'être rejetées ; que dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées sur ce fondement par la commune ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Nice en date du 11 février 2002 est annulé.

Article 2 : La demande de Mme X est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par les parties sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X, à la COMMUNE DE CAGNES SUR MER et au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales

Délibéré à l'issue de l'audience du 13 mai 2003, où siégeaient :

M. LAPORTE, président de chambre,

Mme LORANT, présidente assesseur,

Mme GAULTIER, premier conseiller,

assistés de Melle FALCO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 10 juin 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

Guy LAPORTE Nicole LORANT

Le greffier,

Signé

Sylvie FALCO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales au en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

N° 02MA00657 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 02MA00657
Date de la décision : 10/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction totale
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAPORTE
Rapporteur ?: Mme LORANT
Rapporteur public ?: M. BOCQUET
Avocat(s) : SELARL BURLETT-PLENOT-SUARES-BLANCO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-06-10;02ma00657 ?
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