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06/05/2003 | FRANCE | N°99MA01579

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4 eme chambre, 06 mai 2003, 99MA01579


Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 12 août 1999 sous le n° 99MA01579, présentée pour M. et Mme Ange X, demeurant ..., par Me PISCINA, avocate à la Cour, chez qui ils ont élu domicile au 97, avenue Victor Hugo à Paris (75116) ;

Classement CNIJ : 19-01-01-02

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19-04-02-03

19-04-02-08-02

C

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°/ de réformer le jugement n° 94852

et n° 961586 en date du 8 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice ne leur a accordé qu'une réduction du montant net ...

Vu la requête enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 12 août 1999 sous le n° 99MA01579, présentée pour M. et Mme Ange X, demeurant ..., par Me PISCINA, avocate à la Cour, chez qui ils ont élu domicile au 97, avenue Victor Hugo à Paris (75116) ;

Classement CNIJ : 19-01-01-02

19-01-01-03-02

19-01-01-05

19-01-03-01-03

19-01-04

19-04-01-02-02

19-04-01-02-05-02-02

19-04-02-03

19-04-02-08-02

C

M. et Mme X demandent à la Cour :

1°/ de réformer le jugement n° 94852 et n° 961586 en date du 8 avril 1999 par lequel le Tribunal administratif de Nice ne leur a accordé qu'une réduction du montant net imposable des plus-values réalisées par les intéressées au titre des années 1987 et 1988 et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête en décharge de l'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;

2°/ de leur accorder la décharge de l'imposition restant en litige ;

3°/ subsidiairement d'ordonner une expertise ;

Ils soutiennent :

- que le jugement attaqué, en qualifiant le domicile fiscal des époux X par référence aux critères de l'article 4 A du code général des impôts sans apprécier les éléments de qualification de leur domicile ivoirien au regard de l'article 2-1 de la convention franco-ivoirienne, a méconnu le respect de la hiérarchie des normes juridiques ; qu'aux termes de l'article 2-1 de cette convention, le domicile fiscal est situé au lieu du foyer permanent d'habitation, qui désigne le centre des intérêts vitaux du contribuable, indépendamment des éléments de son patrimoine ;

- que les éléments de patrimoine du couple situés en France et retenus par les premiers juges, notamment la possession d'un véhicule immatriculé en France, n'ont pas de valeur quant à la fixation de leur domicile fiscal en France ;

- que le Tribunal administratif n'a pas répondu au moyen des requérants tiré de l'application de l'article 2-1 de la convention franco-ivoirienne ; que M. et Mme X résident depuis longtemps en Côte d'Ivoire et sont eux-mêmes issus de familles expatriées ; que notamment M. et Mme X, tous deux titulaires d'une carte de résident ivoirienne, habitent à Daloa, où Mme X est née et où son époux exerce les fonctions de négociant en café et cacao ;

- que l'établissement stable en Côte d'Ivoire de M. X aux termes des articles 3 et 3 a de la convention franco-ivoirienne est établi par les déclarations de ses bénéfices commerciaux aux services ivoiriens et que doivent en être tirées les conséquences juridiques en application de l'article 25 de la convention ;

- que M. X vit en Côte d'Ivoire d'août à mars chaque année, soit huit mois par an, comme l'y oblige la loi ivoirienne pour pouvoir exercer ses fonctions d'acheteur de café et cacao ; que Mme X justifie résider en Côte d'Ivoire avec son mari ; que seuls les enfants du couple et la soeur de Mme X chargée de les garder vivent régulièrement à Antibes ;

- que les revenus fonciers en France sont inférieurs à ceux procurés par le négoce du café et du cacao en Côte d'Ivoire ; qu'étant fiscalement domiciliés en Côte d'Ivoire, les requérants ne sont passibles de l'impôt sur le revenu en France qu'à raison de leurs revenus de source française en application de l'article 4 A du code général des impôts ;

- que les conditions de la mise en oeuvre de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, notamment la présence d'indices sérieux de nature à laisser supposer que le contribuable disposerait de revenus supérieurs à ceux déclarés, dans la mesure où à la date de notification de la demande de renseignements le 22 août 1999, ne pouvaient être visés les avoirs et revenus d'avoirs à l'étranger ;

- que le cas des avoirs étrangers n'a été prévu que par l'article 98-7 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989, entré en vigueur le 1er janvier 1990, alors que le vérificateur avait visé la convention franco-ivoirienne et demandé l'assistance administrative de la Côte d'Ivoire dés le 31 juillet 1989 et que la qualification de l'établissement stable dépendait de la réponse des autorités ivoiriennes ;

- que l'administration ne pouvait demander des justifications à un contribuable non domicilié en France sur le fondement de l'article L.16 du livre des procédures fiscales sans établir auparavant que l'intéressé pouvait avoir des revenus de source française supérieurs à ceux qui avaient fait l'objet de sa déclaration ; que les notifications de redressement des 19 décembre 1989, 19 décembre 1990 et 5 juillet 1991 ne respectent pas les modalités de prorogation prévues à l'article L.12 du livre des procédures fiscales ;

- que, pour les revenus d'origine indéterminée, l'existence d'un établissement stable en Côte d'Ivoire entraîne en application de l'article 25 de la convention franco-ivoirienne la non-imposition en France ;

- que les premiers juges ont statué infra petita en ne reprenant pas l'intégralité des opérations de crédit litigieux pour lesquels les requérants avaient apporté des éléments de justification ; que, s'agissant du crédit de 600 000 F tiré de la négociation d'un bon de caisse de la Société Générale ivoirienne négocié le 15 mars 1988 et réglé par chèque vert de 30 millions de CFA, l'administration ne peut régulièrement demander de justificatif dès lors que sa demande ne repose sur aucun élément permettant de présumer la souscription du bon de caisse au cours des années vérifiées ;

- qu'une deuxième demande de justification portant sur le solde inexpliqué de balances de trésorerie établies par l'administration au titre des années de souscription indiquées par le contribuable en tenant compte des bons de caisse est également irrégulière ; que la demande de justifications des opérations relevées sur le compte bancaire des requérants à Monaco est ainsi irrégulière ;

- que suite au défaut de réponse à la demande de justification sur les points applicables aux avoirs étrangers, demande antérieure au 1er janvier 1990, la taxation d'office ne pouvait être appliquée ;

- que la remise d'espèces sur les comptes des appelants ne peut faire présumer l'existence de revenus dissimulés en l'absence de recherches approfondies sur l'origine de la somme dissimulée ; que les plus-values immobilières doivent être uniquement soumises au prélèvement du tiers dans la mesure où les époux X ont leur domicile fiscal en Côte d'Ivoire ; qu'il doit être fait application de l'article 13 de la convention franco-ivoirienne aux revenus de capitaux mobiliers ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 10 mars 2000, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour le rejet de la requête ;

Il soutient qu'il a été accordé un dégrèvement exagéré pour l'exécution du jugement du 8 avril 1999 dont il sera tenu compte pour une compensation éventuelle le cas échéant ; que le foyer des époux X au sens de l'article 4 B du code général des impôts étant en France, leur domicile fiscal au sens de l'article 4 A est également dans ce pays ; que les époux X ont également leur domicile fiscal en France en application de l'article 2 de la convention franco-ivoirienne dans la mesure où il est établi qu'ils y ont les relations personnelles les plus étroites ; qu'ils n'apportent pas la preuve qu'ils séjournent plus longtemps en Côte d'Ivoire qu'en France ; que, dans l'impossibilité de déterminer le lieu de séjour principal, la même convention prévoit que le domicile fiscal appartient à l'Etat dont le contribuable est ressortissant, en l'espèce, la France ; que la demande de justification au titre de l'article L.12 du livre des procédures fiscales était régulièrement motivée par la demande d'assistance aux autorités ivoiriennes, ce dont les requérants ont été informés dès le 29 mars 1990 ; que pour l'année 1986, la durée de la procédure de contrôle a été en tout état de cause inférieure à un an ; que, pour 1987 et 1988, le point d'arrivée du délai de prorogation était la réception de la réponse des autorités étrangères et qu'en l'absence de réponse, les procédures ont été régulièrement clôturées par les notifications de redressement ; que la correspondance entre les crédits bancaires français et les bénéfices commerciaux ivoiriens, de même que l'existence d'un établissement commercial stable imposable en Côte d'Ivoire ne sont pas établies ; que l'article 25 de la convention franco-ivoirienne est inopérant car les requérants ont leur domicile fiscal en France ; que lorsque le contribuable justifie l'origine d'une ressource par la cession d'un élément patrimonial l'administration peut demander la preuve de la détention du bon de caisse au début de la période vérifiée, de la date de vente et de l'identité du souscripteur ; que la demande de justification du 22 août 1989 ne concernait que des crédits bancaires figurant sur les comptes de la Société Générale d'Antibes et pas les avoirs étrangers ; que la taxation d'office du revenu correspondant au solde d'une balance des espèces pour 1988 a été abandonnée par le vérificateur le 8 août 1991 ; que pour 1988, la taxation d'office ne concerne que des crédits bancaires n'ayant pas pour origine des remises d'espèces ; que la taxation d'office porte sur la totalité des crédits bancaires et que le contribuable n'a présenté aucune observation sur la notification de redressement ; que l'article 244 bis A du code général des impôts et l'article 13 de la convention franco-ivoirienne sont inopérants, les requérants ayant leur domicile fiscal en France ; qu'au surplus, le dit article 13 réserve l'imposition des revenus de capitaux mobiliers en cause à la France car ils ont été payés par une collectivité ayant son siège en France ;

Vu le mémoire en réplique enregistré le 4 août 2000, présenté pour M. et Mme X par Me PISCINA ;

M. et Mme X persistent dans leurs conclusions par les mêmes moyens et subsidiairement demandent la décharge des pénalités prévues à l'article 1728 du code général des impôts ;

Ils soutiennent en outre qu'aux termes des articles 13 et 14 du décret ivoirien du 10 février 1999, il est requis un exercice direct de leurs missions par les personnels de la filière café-cacao ; que l'administration ne saurait fixer de manière unilatérale le point d'arrivée du délai de prorogation prévu à l'article L.12-5° du livre des procédures fiscales ; que la demande de justifications du 8 avril 1991 est irrégulière car relative à des faits antérieurs à l'entrée en vigueur de l'article 98-7 de la loi de finances pour 1990 ; que l'irrégularité de la procédure de taxation d'office entraîne également la décharge de l'imposition du crédit de 600 000 F sur le compte des requérants à la Société Générale de Monaco ; que les pénalités infligées au titre de l'article 1728 du code général des impôts ne sont pas fondées, le traitement du dossier fiscal ayant été difficile à formaliser compte tenu de l'expatriation des époux X en Côte d'Ivoire et des délais de procédure ;

Vu le mémoire en réponse, enregistré le 28 mars 2003, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Il soutient en outre que la date de clôture d'une procédure de contrôle fiscal résulte toujours d'une décision unilatérale de l'administration, qui doit intervenir dans le respect d'une date limite, mais l'article 12-5ème alinéa du livre des procédures fiscales ne prévoit pas de date limite pour la production des renseignements par les autorités étrangères ; que la seule demande de justifications antérieure à l'entrée en vigueur de l'article 98-7 de la loi du 29 décembre 1989 ne portait que sur des comptes bancaires ouverts en France ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention conclue le 6 avril 1966 entre la France et la Côte d'Ivoire ;

Vu le code général des impôts ;

Vu le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2003 :

- le rapport de M. POCHERON, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que les requérants soutiennent que le jugement attaqué, en déterminant leur domiciliation fiscale au regard des dispositions de l'article 4 A du code général des impôts sans faire application des critères définis par l'article 2-1 de la convention susvisée conclue entre la France et la Côte d'Ivoire, méconnaît la hiérarchie des normes juridiques selon laquelle une convention internationale a une valeur supérieure à celle des lois nationales, et que les premiers juges n'ont de surcroît pas répondu au moyen tiré des stipulations de ce même article 2-1 de la convention franco-ivoirienne ;

Considérant que les conventions bilatérales destinées à prévenir les risques de double taxation fiscale ne peuvent fonder l'imposition mais ont seulement pour objet d'empêcher éventuellement l'imposition prévue par la loi interne ; que leur application suppose au préalable de vérifier si au regard du droit interne le contribuable est imposable en France en vertu de la législation nationale ;

Considérant qu'en l'espèce il ressort des motifs du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Nice a d'abord examiné la situation des époux X en fonction des dispositions des articles 4A et 4B du code général des impôts ; qu'ensuite, constatant l'existence d'une activité professionnelle imposable de M. X en Côte d'Ivoire, il a précisé qu'il y avait lieu de prendre en compte les exigences de la convention franco-ivoirienne ; que le jugement contesté fait d'ailleurs application des articles 4 et 9 de la convention s'agissant de l'imposition litigieuse des revenus fonciers et des plus-values immobilières, des articles 2-1 et 25 de cette même convention s'agissant de la taxation des revenus d'origine indéterminée et des articles 2-1 et 14 à propos de l'imposition des revenus de capitaux mobiliers ; que les premiers juges ont de surcroît développé leur argumentation sur les conséquences en l'espèce des stipulations de 2-1 de la convention ; que, par suite, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que le jugement dont ils demandent l'annulation serait entaché d'irrégularités ;

Sur le domicile fiscal :

Considérant qu'aux termes de l'article 4A du code général des impôts : Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus... et qu'en application de l'article 4B du même code : Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4A : a) Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; ... ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les requérants étaient propriétaires d'un appartement à Antibes (Alpes-Maritimes) où vivaient leurs trois enfants mineurs et une soeur de Mme X à laquelle il en était confié la garde en l'absence des parents du domicile ; qu'ils étaient également propriétaires en France de biens donnés en location ; qu'ils y avaient réalisé en 1987 et 1988 des opérations de constructions immobilières sur des terrains qui leur appartenaient ; qu'ils disposaient en France de comptes bancaires et y possédaient deux véhicules dont l'un était immatriculé dans les Alpes-Maritimes ; qu'ainsi M. et Mme X doivent être regardés, au sens des dispositions précitées du code général des impôts, comme ayant en France leur domicile fiscal ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2-1 de la convention conclue entre la France et la Côte d'Ivoire le 6 avril 1966 : Une personne physique est domiciliée, au sens de la présente convention, au lieu où elle a son foyer permanent d'habitation, cette expression désignant le centre des intérêts vitaux, c'est à dire le lieu avec lequel les relations personnelles sont les plus étroites. Lorsqu'il n'est pas possible de déterminer le domicile d'après l'alinéa qui précède, la personne physique est réputée posséder son domicile dans celui des Etats contractants où elle séjourne le plus longtemps. En cas de séjour d'égale durée dans les deux Etats, elle est réputée avoir son domicile dans celui dont elle est ressortissante... ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment des déclarations de bénéfices industriels et commerciaux aux services fiscaux ivoiriens, des attestations fiscales ivoiriennes, de l'immatriculation au registre du commerce ivoirien, des certificats de résidence communaux, du consulat de France à Abidjan et des cartes de résident privilégié de Côte d'Ivoire concernant M. et Mme X, des autorisations d'achat de café et de cacao délivrées à M. X mentionnant une obligation de domicile dans la zone d'achat, toutes pièces produites au dossier, que durant les années 1986 à 1988 les requérants avaient également des liens étroits avec la Côte d'Ivoire ; que, dans ces conditions, il n'est pas possible de déterminer le pays avec lequel les intéressés entretenaient les relations personnelles les plus étroites et où ils avaient par suite leur foyer permanent d'habitation au sens des stipulations de la convention précitée ; qu'il ressort également de l'instruction que, durant les années en cause, les requérants ont résidé une partie de l'année dans les deux pays, sans que puissent être appréciées les durées exactes de leurs séjours dans les deux Etats ; que, par application, à laquelle il convient dès lors de recourir, du second des critères subsidiaires prévus par cette convention, et eu égard à la nationalité française qui est celle des intéressés, c'est bien en France que devait être fixé leur domicile fiscal ; que, dès lors, les époux X ne sont pas fondés à se plaindre de ce que les premiers juges ont fixé leur domicile fiscal dans ce pays ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article L.16 du livre des procédures fiscales en vigueur avant le 1er janvier 1990 : En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peur demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut, en outre, lui demander des justifications au sujet de sa situation et de ses charges de famille... ; que cet article a été complété, en raison de l'entrée en vigueur de l'article 98-7 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989 par les dispositions suivantes : ...ainsi que des avoirs ou revenus détenus à l'étranger. ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur ayant constaté que les comptes bancaires ouverts par M. et Mme X auprès de la Société Générale à Antibes étaient créditeurs en 1987 de 1 771 700 F alors que les intéressés avaient déclaré pour cette même année des revenus d'un montant de 98 510 F, a, par courrier du 22 août 1989, demandé des justifications au sens des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; que par le même courrier, les requérants étaient également invités à produire des justificatifs de l'existence d'avoirs en Côte d'Ivoire afin de clarifier la question de leur domiciliation fiscale ; que, cependant, cette dernière demande ne leur était pas adressée en application de la procédure prévue à l'article L.16 du livre des procédures fiscales ; que, par suite, M. et Mme X ne sont pas fondés à soutenir que le vérificateur aurait méconnu ces dispositions en visant des avoirs étrangers avant l'entrée en vigueur de l'article 98-1 de la loi sus-mentionnée du 29 décembre 1989 ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article L.284 du livre des procédures fiscales : Sauf dispositions contraires, les règles de procédure fiscale ne s'appliquent qu'aux formalités accomplies après leur date d'entrée en vigueur, quelle que soit la date de la mise en recouvrement des impositions. ;

Considérant qu'il résulte de ces dispositions et des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales en vigueur à compter du 1er janvier 1990 que le vérificateur pouvait légalement demander aux contribuables par courrier en date du 8 avril 1991 la production de justifications sur l'origine et la nature des remises de chèques opérées en 1988 sur le compte 53800059 dont ils disposaient auprès de la Société Générale de Monaco ;

Considérant en troisième lieu qu'aux termes de l'article L.12 du livre des procédures fiscales : Dans les conditions prévues au présent livre, l'administration des impôts peut procéder à l'examen contradictoire de la situation fiscale des personnes physiques au regard de l'impôt sur le revenu... Sous peine de nullité de l'imposition, un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle ne peut s'étendre sur une période supérieure à un an à compter de la réception de l'avis de vérification. Cette période est prorogée... des délais nécessaires à l'administration... pour recevoir les renseignements demandés aux autorités étrangères, lorsque le contribuable a pu disposer de revenus à l'étranger ou en provenance directe de l'étranger... ;

Considérant que l'imposition supplémentaire au titre de l'année 1986 fait suite à un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme X qui a commencé le 5 avril 1989 et s'est achevé le 19 décembre 1989 ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés en tout état de cause à soutenir que l'administration aurait en l'espèce méconnu les dispositions précitées ;

Considérant que l'imposition supplémentaire au titre de l'année 1987 a été établie à la suite d'un examen contradictoire dont le début est également fixé au 5 avril 1989 ; que le délai d'un prévu par les dispositions précitées de l'article L.12 du livre des procédures fiscales expirait en conséquence le 5 avril 1990 ; qu'il résulte de l'instruction que l'administration a sollicité l'assistance des autorités fiscales ivoiriennes le 31 juillet 1989 ; qu'elle en a informé les contribuables le 26 mars 1990 alors qu'elle n'en avait pas l'obligation ; que, dans la notification de redressement du 19 décembre 1990, il est indiqué qu'en l'absence de réponse de l'administration ivoirienne, la dite notification était expédiée à l'intérieur du délai prorogé ; que le service a ainsi justifié de l'existence de sa demande aux autorités étrangères et du délai nécessaire à l'obtention des renseignements dont il avait besoin ; qu'en raison de la persistance de l'absence de réponse, la date à laquelle s'était achevé l'examen de la situation fiscale n'a jamais été notifiée ; que, cependant, en l'absence de nouvelle notification de redressement relative à l'année d'imposition 1987 et postérieure à celle du 19 décembre 1990, cette dernière date doit être regardée comme celle qui clôture la procédure litigieuse ; que les appelants soutiennent que l'administration avait l'obligation d'indiquer la date d'expiration du délai de prorogation ; que, cependant, aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit une telle formalité ; que les époux X ne sont en tout état de cause pas fondés à se prévaloir de l'instruction administrative 13 L-6-88 du 15 avril 1988, qui précise en son article 2-2-4 que la notification de redressement doit expressément rappeler la durée de cette prorogation, dés lors qu'en ajoutant à la loi fiscale elle est contraire à celle-ci, et n'est donc pas opposable à l'administration sur le fondement du décret du 15 novembre 1983, et que, traitant de la procédure d'imposition, elle ne constitue pas une interprétation du texte fiscal qui fonde l'imposition au sens de l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;

Considérant que s'agissant de l'imposition supplémentaire au titre de l'année 1988 l'examen contradictoire a commencé le 9 juin 1989 et que le délai d'un an expirait en conséquence le 9 juin 1990 ; que le dit délai a été prorogé par la demande d'assistance aux autorités ivoiriennes du 31 juillet 1989 ; qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressement du 5 juillet 1991 mentionnait cette saisine et l'absence de réponse à laquelle l'administration était confrontée ; qu'en l'espèce la date de clôture de l'examen contradictoire doit être fixée à la date de notification aux époux X de l'avis du 31 mars 1993 de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires ; que, pour les mêmes motifs que ceux sus-exposés, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que la procédure serait irrégulière faute pour l'administration d'avoir indiqué dans la notification de redressement du 5 juillet 1991 la date d'expiration du délai de prorogation ;

Sur les revenus d'origine indéterminée :

Considérant en premier lieu que le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient statué infra petita en ne prenant pas en compte l'intégralité des opérations de crédit pour lesquels les requérants auraient apporté les éléments de justification est dénué des précisions permettent d'en apprécier la portée ou le bien fondé ;

Considérant en deuxième lieu qu'aux termes de l'article 25 de la convention susvisée conclue entre la France et la Côte d'Ivoire : Les revenus non mentionnés aux articles précédents ne sont imposables que dans l'Etat contractant du domicile fiscal du bénéficiaire à moins que ces revenus ne se rattachent à l'activité d'un établissement stable que ce bénéficiaire possèderait dans l'autre Etat contractant. ;

Considérant qu'il résulte des motifs sus-exposés que le domicile fiscal des époux X est en France ; que, pour justifier de l'existence d'un établissement stable en Côte d'Ivoire, les requérants produisent des déclarations de bénéfices commerciaux souscrites auprès des services fiscaux ivoiriens, des relevés de comptes bancaires ouverts auprès de la Société Générale dans ce pays et une déclaration d'immatriculation au registre du commerce en qualité d'acheteur de produits locaux ; qu'il n'est fait nulle part mention dans ces documents d'un des éléments qui caractérisent l'existence d'un établissement stable en Côte d'Ivoire au sens des stipulations de l'article 3 de la convention sus-mentionnée ; que, par suite, les appelants ne sont pas fondés à revendiquer les stipulations précitées de l'article 25 de la convention pour soutenir que les revenus litigieux ne seraient pas imposables en France ;

Considérant en troisième lieu que les requérants soutiennent que le crédit de 600 000 F apparu sur un de leurs comptes bancaires, retenu par l'administration comme étant d'origine indéterminée, provenait de la négociation le 15 mars 1988 d'un bon de caisse de la Société Générale de Côte d'Ivoire réglé par chèque vert d'un montant de trente millions de CFA ; qu'ils contestent au vérificateur le droit de leur demander de prouver que ce bon de caisse avait été souscrit avant le début de la période ayant fait l'objet de l'examen contradictoire de situation fiscale dès lors que cette demande ne reposait sur aucun élément permettant de présumer la dite souscription au cours des années vérifiées ; qu'il résulte de l'instruction que les documents produits ne permettaient pas d'établir que le bon avait été acquis antérieurement au début de la période d'imposition en litige ; que le vérificateur était en conséquence en droit, en application des dispositions précitées de l'article L.16 du livre des procédures fiscales, d'inviter le contribuable à en justifier ;

Considérant en quatrième lieu qu'aux termes de l'article L.69 du livre des procédures fiscales : ...sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L.16. ;

Considérant que M. et Mme X allèguent que les revenus d'origine indéterminée relevés sur leurs comptes à l'étranger ne pouvaient être régulièrement taxés d'office en application des dispositions précitées car ils ne pouvaient faire l'objet de demandes de justification au sens de l'article L.16 du livre de procédure fiscale avant l'entrée en vigueur de l'article 98-7 sus-mentionné de la loi du 29 décembre 1989 ; que, cependant, il ne résulte pas de l'instruction que des demandes afférentes à des comptes étrangers leur auraient été adressées antérieurement au 1er janvier 1990 ; que, par suite, ce moyen devra être rejeté ;

Considérant en cinquième lieu que les requérants soutiennent que la remise d'espèces sur des comptes bancaires ne peut faire présumer l'existence de revenus dissimulés en l'absence de recherches approfondies sur l'origine de la somme dissimulée ; qu'il résulte de l'instruction que la taxation d'office du revenu correspondant au solde d'une balance des espèces établie au titre de l'année 1988 a été abandonnée par le vérificateur le 8 octobre 1991 et que les autres revenus taxés d'office pour cette même année sont des crédits bancaires n'ayant pas pour origine des remises d'espèces ; que, s'agissant de l'année d'imposition 1987, les allégations des appelants sont dénuées des précisions permettant d'en apprécier la portée ou le bien fondé ; que, dès lors, ce moyen sera écarté ;

Sur les plus-values immobilières :

Considérant qu'aux termes de l'article 244 bis A du code général des impôts : Sous réserve des conventions internationales, les personnes physiques qui ne sont pas fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B... sont soumis à un prélèvement d'un tiers sur les plus-values résultant de la cession d'immeubles... ; et qu'aux termes de l'article 9 de la convention susvisée conclue entre la France et la Côte d'Ivoire : Les revenus des biens immobiliers... ne sont imposables que dans l'Etat où ces biens sont situés. ;

Considérant qu'il résulte des dispositions et des stipulations précitées qu'en tout état de cause, M. et Mme X ne sont pas fondés à revendiquer l'application de l'article 244 bis A du code général des impôts aux plues-values immobilières qu'ils ont réalisées suite à deux cessions d'immeubles situés en France en 1987 et 1988 ;

Sur les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la convention franco-ivoirienne susvisée alors en vigueur : Sous réserve des dispositions des articles 15 à 17 ci-après, les revenus des valeurs mobilières et les revenus assimilés... payés par des sociétés ou des collectivités publiques ou privées ayant leur domicile fiscal sur le territoire de l'un des Etats contractants sont imposables dans cet Etat ;

Considérant qu'il résulte des stipulations précitées que le moyen tiré de ce que les revenus des capitaux mobiliers constitués par des intérêts financiers versés aux requérants le 5 janvier 1987 sur leur compte n° 368 0869.5 ouvert à la Société Générale d'Antibes ne seraient pas imposables en France manque en droit et sera écarté ;

Sur les pénalités :

Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : 1. Lorsqu'une personne physique... tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts... établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter un acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de l'acte déposé tardivement est assorti de l'intérêt de retard visé à l'article 1727 et d'une majoration de 10 p. 100... 3. La majoration visée au 1 est portée à : 40 p. 100 lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à la produire dans ce délai... ;

Considérant que M. et Mme X demandent à être déchargés des majorations des droits auxquels ils ont été assujettis au titre des plus-values immobilières réalisées en 1987 et 1988 en application des dispositions précitées aux motifs de leur expatriation en Côte d'ivoire et des délais de procédure eu égard à la complexité de leurs dossiers fiscaux ; que ces moyens, doivent être écartés dés lors que les intéressés n'établissent pas ne pas avoir résidé en France aux dates auxquelles les procédures conduisant aux majorations reprochées ont été engagées à leur encontre, et que la complexité alléguée des dossiers fiscaux ne permet pas légalement de solliciter des prolongations de délais de procédure ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. et Mme X ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice ne leur a accordé qu'une réduction du montant net imposable des plus-values qu'ils avaient réalisées au titre des années 1987 et 1988 et a rejeté le surplus des conclusions de leur requête en décharge de l'impôt sur le revenu auquel ils ont été assujettis au titre des années 1986, 1987 et 1988 ;

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme Ange X est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie aux fins de compensation sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme Ange X et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 8 avril 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur

M. POCHERON, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 6 mai 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Michel POCHERON

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

14

N° 99MA01579


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4 eme chambre
Numéro d'arrêt : 99MA01579
Date de la décision : 06/05/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. POCHERON
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : PISCINA

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-05-06;99ma01579 ?
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