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10/04/2003 | FRANCE | N°98MA02011

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ere chambre, 10 avril 2003, 98MA02011


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 12 novembre 1998 sous le n° 98MA02011, et le mémoire ampliatif enregistré le 6 janvier 1999, présentés pour la commune de COLLIOURE, par la SCP d'avocats COULOMBIE-GRAS ;

La commune de COLLIOURE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 96/2417, en date du 15 septembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération, en date du 25 octobre 1996, du conseil municipal de la commune de COLLIOURE, en tant qu'elle crée, à l'occasion de la révisi

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 12 novembre 1998 sous le n° 98MA02011, et le mémoire ampliatif enregistré le 6 janvier 1999, présentés pour la commune de COLLIOURE, par la SCP d'avocats COULOMBIE-GRAS ;

La commune de COLLIOURE demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 96/2417, en date du 15 septembre 1998, par lequel le Tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération, en date du 25 octobre 1996, du conseil municipal de la commune de COLLIOURE, en tant qu'elle crée, à l'occasion de la révision du plan d'occupation des sols (POS) de la commune, une zone 1 NAe, au lieu-dit Cap Dourats ;
2°/ de condamner l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE (APSEC) et M. Jean-Claude X, requérants en première instance, à lui verser la somme de 28.944 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Classement CNIJ : 68-01-01-01
C

La commune de COLLIOURE soutient :

- que contrairement à l'appréciation formulée par les premiers juges, les dispositions de l'article L.146-4-I du code de l'urbanisme n'ont nullement été méconnues ; qu'en particulier, l'urbanisation réalisée par le POS révisé s'est effectuée en continuité avec l'agglomération existante, l'ensemble des zones classées NA se situant dans une partie déjà urbanisée de la commune, située au nord de l'agglomération ; qu'au surplus, la zone NA jouxte des parties déjà construites ;

- que la surface autorisée est très faible et n'est pas, comme telle, susceptible, de jurisprudence constante, de porter atteinte aux dispositions de la loi littoral codifiées à l'article L.146 du code de l'urbanisme ;

- que, subsidiairement, les zones classées en zone NA constituent un hameau nouveau intégré à l'environnement ;

- que contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, les éléments constitutifs d'un détournement de pouvoir ne sont pas réunis en l'espèce ;

- que la commune a recherché l'intérêt général en sauvegardant, par une délocalisation, l'activité traditionnelle de salage des anchois ; que si elle a pu acquérir de gré à gré, à un prix conforme à l'appréciation des domaines, faisant ainsi l'économie d'une procédure d'expropriation, les parcelles nécessaires à cette translation des industries de l'anchois, elle a recherché une solution équitable en permettant le relogement sur place du propriétaire ; que le classement d'une parcelle en zone NAe au profit du propriétaire des parcelles nécessaires doit être regardé comme motivée par l'intérêt général ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistrés les 18 janvier 1999 et 25 mars 1999, le mémoire en défense et le mémoire complémentaire produits par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et par M. Jean-Claude X, concluant au rejet de la requête, à la condamnation de la commune de COLLIOURE à leur verser la somme de 5.000 F au titre des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et à la suppression, dans le mémoire de la commune, des passages diffamatoires ;

Ils soutiennent :

- que la convention conclue entre le maire de COLLIOURE et M. Y, propriétaire des parcelles classées en zone NA par le POS révisé a été conclue, dans le seul intérêt de ce dernier et sans autorisation du conseil municipal ;
- que le déplacement des unités de salage d'anchois n'est qu'un prétexte et que c'est à juste titre que les premiers juges ont retenu le détournement de pouvoir ;
- que le relogement sur place de M. Y ne s'imposait nullement ;
- que les dispositions de l'article L.146-4-I du code de l'urbanisme ont été méconnues, en ce que l'urbanisation réalisée, l'a été en rupture avec l'urbanisation de l'agglomération existante, et sans aboutir à la formation d'un hameau nouveau, intégré à l'environnement ;
- que la création du secteur 1 NAe litigieux est en contradiction avec le parti d'aménagement retenu dans le POS de 1994 ;

Vu, enregistrés les 25 octobre 1999 et 13 janvier 2003, les deux mémoires ampliatifs de la commune de COLLIOURE, tendant aux mêmes conclusions par les mêmes moyens et concluant, en outre, à la suppression dans les écritures en défense de l'association, de passages diffamatoires et injurieux et à la condamnation de l'association intimée à lui verser, à titre de dommages-intérêts une somme de 1 F ;

Vu, enregistré le 18 mars 2003, le mémoire en défense présenté par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et par M. Jean(Claude X, tendant aux mêmes conclusions, par les mêmes moyens et concluant, en outre, à ce que la commune soit condamnée à lui verser la somme de 1 F de dommages-intérêts en réparation du préjudice que lui ont causés les passages diffamatoires contenus dans les écritures de la commune ;

Vu les autres pièces du dossier ;
Vu, le code de l'urbanisme ;
Vu, le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2003 :

- le rapport de M. LOUIS, premier conseiller ;
- les observations de Me COULOMBIE pour la commune de COLLIOURE ;
- les observations de M. MAILLET, président de l'ASSOCIATION APSEC ;
- et les conclusions de M. BENOIT, premier conseiller ;

Considérant que, par un jugement en date du 15 septembre 1998, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération, en date du 25 octobre 1996, par laquelle le conseil municipal de la commune de COLLIOURE a créé, à l'occasion de la révision du plan d'occupation des sols de la commune, une zone 1 NAe au lieu-dit Cap Dourats ; que la commune de COLLIOURE interjette appel de ce jugement ;

Considérant qu'il ressort de l'examen des pièces du dossier et qu'il est d'ailleurs expressément reconnu par la commune de COLLIOURE dans ses écritures en défense, que la création, par la délibération en date du 25 octobre 1996, par laquelle le conseil municipal a approuvé la révision du POS de la commune, d'une zone 1 NAe d'une superficie de 5053 mètres carrés, qui fait seule l'objet du litige porté devant la Cour, était motivée par la volonté de la commune de reloger sur place l'ancien propriétaire des parcelles, désormais incluses dans les zones 4NA et 4 NAa, sur lesquelles devaient être édifiés les bâtiments nécessaires à l'industrie du salage de l'anchois ;

Considérant que la commune expose que le reclassement en zone 1NAe de la parcelle n° 22, auparavant située en zone NC, doit être regardé comme le résultat de la négociation qu'elle a menée avec le propriétaire des parcelles nécessaires à l'implantation, dans une zone d'activité éloignée du centre ville, des bâtiments nécessaires à la poursuite à COLLIOURE, d'une activité traditionnelle de salaison des anchois, dont la situation, au centre de l'agglomération, ne permettait plus le respect des normes européennes applicables ; qu'à cet effet, la commune a, par l'effet d'un acte authentique en date du 30 décembre 1995, conclu avec M. Baruk Y, bénéficié d'une promesse de vente, par laquelle M. Y, en qualité de promettant, s'engageait à lui céder au prix de 1.850.000 F les parcelles 13, 14 et 27 de la section AB, formant la zone 4NA de l'actuel plan d'occupation des sols révisé de la commune ; que cette promesse de vente stipulait, au seul profit de la commune bénéficiaire, une clause suspendant sa validité à la réalisation d'une condition tenant au classement des parcelles précitées, ainsi que d'une parcelle de la section AB, n° 22 acquise par M. Y, le 28 décembre 1995, en zone NA ; que, par acte authentique, un contrat de vente de gré à gré des parcelles 13, 14 et 27, a été conclu entre la commune et M. Y, les 4 décembre 1996 et 10 décembre 1996 ;

Considérant que si la commune de COLLIOURE soutient que seule la translation des usines de salage d'anchois, du centre ville vers la nouvelle zone d'activité, était de nature à permettre la poursuite de cette activité, elle ne le démontre pas ; qu'elle n'établit pas davantage que les parcelles servant d'assiette à la zone d'activité ne pouvaient pas être acquises par la procédure d'expropriation, ni, enfin, que la vente de gré à gré, même conclue au prix de vente qu'avait estimé l'administration des domaines, a permis la réalisation d'un gain de temps rendu indispensable au regard des échéances, dès lors que l'industrie du salage, qui s'était vue imposer les règles contenues dans la directive européenne du 22 juillet 1991, par un arrêté ministériel en date du 28 décembre 1992 portant réglementation des conditions d'hygiène applicables dans les établissements de manipulation des produits de la pêche, avait obtenu de la part du préfet des Pyrénées Orientales une dérogation lui permettant de continuer à exercer son activité au centre ville jusqu'au 1er mars 1997 ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, qu'ainsi que l'a à bon droit relevé le tribunal administratif, la délibération du conseil municipal de la commune de COLLIOURE en date du 25 octobre 1996, en tant qu'elle approuve le classement, opéré par la révision litigieuse du plan d'occupation des sols, en zone NAe la parcelle n° 22 de la section AB, doit être regardée comme ayant été prise en vue de satisfaire un intérêt étranger à tout motif d'urbanisme, et non l'intérêt général de la commune en matière d'urbanisme ; que ladite délibération est, dans cette mesure, entachée de détournement de pouvoir ; que dès lors, et sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur la valeur du second motif d'annulation retenu par les premiers juges, la commune n'est, en tout état de cause, pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montpellier a annulé la délibération en date du 25 octobre 1996, par laquelle le conseil municipal a approuvé la révision partielle du plan d'occupation des sols de la commune, en tant que celle-ci a créé une zone 1 NAe, au lieu-dit Cap Dourats ;

Sur les conclusions présentées par la commune de COLLIOURE tendant à la suppression de passages injurieux ou diffamatoires :

Considérant qu'aux termes de l'article L.741-2 du code de justice administrative : Sont également applicables les dispositions des alinéas 3 à 5 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ci-après reproduites :
Article 41 alinéas 3 à 5 : Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux.
Pourront néanmoins les juges, saisis de la cause et statuant sur le fond, prononcer la suppression des discours injurieux, outrageants ou diffamatoires, et condamner qui il appartiendra à des dommages-intérêts.
Pourront toutefois les faits diffamatoires étrangers à la cause donner ouverture, soit à l'action publique, soit à l'action civile des parties, lorsque ces actions leur auront été réservées par les tribunaux et, dans tous les cas, à l'action civile des tiers. ;

Considérant, d'une part, que le passage du mémoire en défense présenté par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et M. Jean-Claude X, qui a été enregistré au greffe de la Cour le 18 janvier 1999 commençant par les mots On ne s'interrogera pas vainement... et finissant par les mots ... casino à COLLIOURE, celui commençant par Il faut en conclure que M. Z... et se terminant par ... tiers intéressé, celui commençant par ...L'opération de salaison... et se terminant par ... industrie des saleurs, celui, enfin, commençant par Alors qu'à COLLIOURE... et se terminant par ... propres lois présentent un caractère diffamatoire ; qu'il y a lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'en revanche, les autres passages incriminés n'excédant pas le droit à la libre discussion, il n'y a pas lieu d'en prononcer la suppression ;

Considérant, d'autre part, que les passages du mémoire en défense présenté par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et M. Jean-Claude X, qui a été enregistré au greffe de la Cour le 18 janvier 1999, et qui doivent, comme il a été dit plus haut, être regardés comme diffamatoires, ont un rapport direct avec les faits de la cause jugée au fond par la Cour ; qu'il y a lieu, dès lors, en application des dispositions combinées de l'alinéa 4 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 et de l'article L.741-3 du code de justice administrative, de faire droit aux conclusions présentées par la commune de COLLIOURE, tendant à la condamnation de l'association défenderesse, dans la limite des conclusions de la commune, à la somme symbolique de 0,15 euro, à titre de dommages-intérêts ;

Sur les conclusions présentées par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et M. Jean-Claude X, tendant à la suppression de passages injurieux ou diffamatoires :

Considérant que le passage de la requête de la commune de COLLIOURE qualifié de diffamatoire par l'association intimée ne porte pas atteinte à l'honneur de son fondateur et n'excède pas le droit à la libre discussion ; qu'il n'y a, dès lors, pas lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions précitées de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 ;

Sur les conclusions présentées par la commune de COLLIOURE tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et M. Jean-Claude X, qui ne sont pas, dans la présente instance, la partie perdante soient condamnés à payer à la commune de COLLIOURE la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Sur les conclusions présentées par l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE, tendant à l'application des dispositions de l'article L.761(1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et de M. Jean-Claude X, tendant au remboursement des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : L'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et M. Jean-Claude X verseront, en application des dispositions combinées de l'alinéa 4 de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 et de l'article L.741-3 du code de justice administrative, la somme de 0,15 Euro (quinze centimes d'euro) à la commune de COLLIOURE.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune de COLLIOURE est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et de M. X, tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les passages susmentionnés du mémoire de l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE et de M. X, en date du 18 janvier 1999 sont supprimés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de COLLIOURE, à M. Jean Claude X et à l'Association pour la Préservation du Site et de l'Environnement de COLLIOURE.

Délibéré à l'issue de l'audience du 27 mars 2003, où siégeaient :

M. ROUSTAN, président de chambre,
M. LAFFET, président assesseur,
M. LOUIS, premier conseiller,
assistés de Mlle RANVIER, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 10 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
Marc ROUSTAN Jean-Jacques LOUIS
Le greffier,
Signé
Patricia RANVIER

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer, en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,

N° 98MA02011 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 98MA02011
Date de la décision : 10/04/2003
Sens de l'arrêt : A saisir ultérieurement
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ROUSTAN
Rapporteur ?: M. LOUIS
Rapporteur public ?: M. BENOIT
Avocat(s) : SCP COULOMBIE-GRAS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-10;98ma02011 ?
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