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08/04/2003 | FRANCE | N°00MA01652

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4 eme chambre, 08 avril 2003, 00MA01652


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 juillet 2000, sous le n° 00 MA 001652, présenté par le ministre de l'économie des finances et de l'industrie, sous-direction du contentieux administratif, 11 rue Tronchet, à PARIS cedex 08 (75840) ;

Le ministre de l'économie des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97 01784 en date du 8 février 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a partiellement déchargé M. et Mme Roger X des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le re

venu, et des pénalités y afférentes, auxquelles ils avaient été assujettis ...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 27 juillet 2000, sous le n° 00 MA 001652, présenté par le ministre de l'économie des finances et de l'industrie, sous-direction du contentieux administratif, 11 rue Tronchet, à PARIS cedex 08 (75840) ;

Le ministre de l'économie des finances et de l'industrie demande à la Cour :

1°/ d'annuler le jugement n° 97 01784 en date du 8 février 2000, par lequel le Tribunal administratif de Nice a partiellement déchargé M. et Mme Roger X des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, et des pénalités y afférentes, auxquelles ils avaient été assujettis au titre des années 1989, 1990 et 1991 ;

Classement CNIJ : 19 04 01 02

C

2°/ de rétablir M. et Mme Roger X dans les rôles de l'impôt sur le revenu au titre des sommes pour lesquelles les dégrèvements de première instance leurs ont été accordés ;

Il soutient :

- que pour accorder la décharge contestée le Tribunal administratif de Nice a considéré que la notification de redressements adressée à M. et Mme Roger X n'était pas suffisamment motivée, ce qui revient à exiger la mention des textes applicables dans cette notification, exigence qui ne résulte pas de la jurisprudence ; qu'au cas d'espèce la notification de redressements mentionnait la variation des travaux, son montant, et le montant du redressement ; qu'elle était donc suffisante contrairement à ce qu'a jugé le Tribunal administratif de Nice ;

- que la demande de saisine de l'interlocuteur département, verbale, était antérieure à la persistance du désaccord et que donc M. et Mme Roger X ne peuvent invoquer la méconnaissance des dispositions de la charte ; que par ailleurs les dispositions de la charte ne font aucune obligation au vérificateur de répondre par écrit à une demande du contribuable ;

- que l'évaluation des travaux en cours sur l'immeuble Notre Dame de Vaise , au titre de l'année 1989, par M. X révèle une insuffisance d'évaluation de 639 260,52 F ; que le contribuable ne saurait, à cet égard, invoquer des malfaçons, qui auraient pu éventuellement donner lieu à constitution de provisions, mais ne pouvaient pas réduire le coût de revient des travaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 6 novembre 2000, le mémoire en défense présenté pour M. et Mme Roger X, demeurant ..., par Me Jean(Pierre COURTIGNON, avocat ;

M. et Mme Roger X demandent à la Cour :

1°/ de rejeter le recours du ministre de l'économie des finances et de l'industrie ;

A cet effet, ils soutiennent :

- que tous les moyens invoqués en première instance doivent être revus par le juge d'appel ;

- que la notification de redressements contestée ne contient qu'un catalogue des travaux et n'énonce à aucun moment les textes applicables ; que ce n'est que dans la réponse aux observations du contribuable que figurent les règles relatives aux travaux en cours, lesquels doivent être évalués en principe à leur coût de revient ; qu'il n'a donc pas été mis en mesure de contester utilement la notification de redressements ;

- que l'interlocution demandée a eu lieu sur le champ, sans qu'ils puissent avertir leur conseil et constitue donc une parodie d'interlocution ; qu'ils ont donc été privés d'une garantie substantielle, le vérificateur ne les ayant pas informé par ailleurs du caractère prématuré, selon lui, de la demande d'interlocution ; que, de plus, n'ayant reçu aucune réponse orale détaillée, ni de réponse écrite motivée, ils ont attendu plusieurs semaines avant de saisir la commission départementale des impôts de leur litige ;

2°/ dans le cadre de l'effet dévolutif d'appel, d'annuler la décision du directeur des services fiscaux des Alpes-Maritimes, en date du 12 mars 1997, rejetant leur demande de réclamation relative aux impositions litigieuses, et de les décharger desdites impositions ;

Vu, enregistré le 24 novembre 2000, le nouveau mémoire présenté pour M. et Mme X ; M. et Mme X concluent aux mêmes fins que leurs précédentes écritures, par les mêmes moyens, et par les moyens :

- qu'en ne répondant pas à la demande formulée par M. X, d'être reçu par l'interlocuteur départemental, l'administration fiscale n'a pas respecté l'une des garanties essentielles à laquelle les contribuables pouvaient prétendre ;

- que la motivation des redressements figure simplement dans la réponse aux observations du contribuable, du 8 octobre 1993, dans laquelle sont indiquées les références des textes et de la doctrine fondant la position du vérificateur ;

- qu'est sans incidence sur cette irrégularité, la circonstance que des contribuables ne se soient pas trompés sur la signification de redressement ;

- que sur le fond, ce redressement n'est pas fondé ; qu'en effet et contrairement à ce que soutient le vérificateur, l'évaluation des travaux en cours n'a pas été insuffisamment prise en compte ; que la différence de 639 260 F provient des travaux de toiture, nécessaires, et que ces travaux étaient des travaux improductifs ;

- que dès l'année 1989, M. X ayant constaté les désordres affectant la toiture, a tenté d'en obtenir réparation auprès d'un sous-traitant ; que, compte tenu de la carence de l'entrepreneur, il a déclaré, en sa qualité de maître de l'ouvrage, le sinistre auprès de sa compagnie d'assurances, et a obtenu de celle-ci le règlement d'une indemnité de 484 993,60 F, ce qui a été inscrit au grand livre des comptes généraux du 1er au 31 décembre 1993, puis déclaré en produit exceptionnel au titre de la même année 1993 ; qu'à à cette somme, il faut ajouter le coût de la réfection des plafonds, ainsi que les dépenses d'architecte ; qu'il en résulte finalement qu'ils justifient les dépenses de réparation de cette voiture, à hauteur de la somme de 710 930 F HT, ce qui correspond d'ailleurs à l'avis émis par la commission départementale des impôts ; que c'est la raison pour laquelle M. X a enregistré cette dépréciation au titre des travaux en cours, en constituant une provision pour risques et charges, de 750 000 F, au bilan clôt le 31 décembre 1992 ; qu'il en résulte que le redressement, n'est pas fondé ;

- qu'enfin, le maintien de cette imposition revient à imposer deux fois les contribuables pour la même somme, dès lors que ceux-ci ont déclaré le remboursement d'assurance résultant du sinistre ;

- qu'ils maintiennent donc leur demande de décharge de cette somme, et sollicitent le sursis de paiement des impositions litigieuses ;

Vu enregistré le 21 mars 2003, le mémoire en réplique présenté par le ministre de l'économie des finances et de l'industrie ; le ministre conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures par les mêmes moyens et par les moyens :

- que la notification de redressements du 17 décembre 1992 était suffisamment motivée ;

- que le fait que l'entrevue avec l'interlocuteur départemental ait eu lieu le jour-même de la demande formulée par M. X, soit le 10 novembre 1993 n'est pas irrégulier aucune disposition n'imposant à l'administration d'accorder un délai au contribuable avant d'accorder cet entretien ; que par ailleurs cette entrevue ayant eu lieu, s'agissant de 1989 avant la mise en recouvrement des impositions litigieuses et après la confirmation des redressements, aucune irrégularité n'a été commise ; qu'enfin la circonstance que l'inspecteur départemental n'ait pas formalisé par écrit les résultats de l'entrevue ne constitue pas une irrégularité ;

- que l'appel de l'administration ne concernant que l'impôt sur le revenu 1989, les développements de M. et Mme X relativement aux années 1990 et 1991 sont dépourvus d'objet ;

- que les conclusions incidentes de M. et Mme X relativement aux années 1990 et 1991 sont irrecevables car portant sur une autre année que celle du recours du ministre et sont au surplus la simple copie de leur mémoire de première instance ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 mars 2003 :

- le rapport de Mme PAIX, premier conseiller ;

- les observations de M. X ;

- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant qu'à la suite de la vérification de comptabilité dont a fait l'objet M. X, au titre des exercices 1989, 1990, et 1991, à raison de son activité d'entrepreneur du bâtiment, M. et Mme X ont fait l'objet de redressements, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ; que par jugement en date du 8 février 2000, le Tribunal administratif de Nice a accordé au requérant la décharge des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu, établies au titre de l'année 1989, correspondant à une réduction de 639 260 F des bases d'imposition, et a rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme X ; que le ministre de l'économie des finances de l'industrie interjette régulièrement appel de ce jugement, et demande que les contribuables soient rétablis dans les bases d'impositions au titre desquelles le tribunal administratif a fait droit à leur demande ; que M. et Mme X, par la voie de l'appel incident, demandent la décharge totale des impositions résultant des redressements ;

Sur la recevabilité et le champ d'application du litige :

Considérant que les conclusions en décharge, présentées par M. et Mme X après expiration des délais de recours contentieux doivent s'analyser comme des conclusions d'appel incident ; que le recours du ministre étant relatif à la seule décharge accordée par les premiers juges au titre de l'année 1989, les conclusions formées au titre des années 1990 et 1991 par les contribuables constituent un litige distinct et ne peuvent par suite être accueillies ;

Considérant que s'agissant de l'année 1989 le Tribunal administratif de Nice qui a accordé la décharge des impositions sollicitées par les contribuables, n'avait pas à examiner les autres moyens de leur requête ; que le jugement est donc, s'agissant de cette année, et contrairement à ce que soutiennent les contribuables, suffisamment motivé ;

Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L.57 du livre des procédures fiscales : L'administration adresse au contribuable une notification de redressement qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler des observations ou de faire connaître son acceptation ; qu'aucune disposition du livre des procédures fiscales ne fait obligation à l'administration fiscale de viser les textes sur lesquels elle se fonde, dans la notification de redressements ; qu'il résulte de l'instruction que la notification de redressements adressée à M. et Mme X au titre de l'année 1989 mentionnait le montant des travaux en cours évalués au 31 décembre 1988, au 31 décembre 1989, la variation comptabilisée, ainsi que le montant des travaux réalisés ; que si le document ne mentionnait pas le contenu des dispositions législatives et réglementaires relatives aux travaux en cours, une telle omission n'est pas de nature, dans la mesure où la notification s'adressait à un professionnel du bâtiment, ayant lui-même fait application de ces règles, à constituer une insuffisance de motivation ; que dans ces conditions la notification de redressements satisfaisait donc aux prescriptions de l'article L.57 du livre des procédures fiscales ; qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que par le jugement attaqué le Tribunal administratif de Nice s'est fondé sur l'insuffisance de motivation de la notification de redressements adressée à M. et Mme X, pour décharger ceux-ci des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu auxquelles ils avaient été assujettis au titre de l'année 1989 ;

Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. et Mme X devant le Tribunal administratif de Nice ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant que M. et Mme X soutiennent que la procédure d'imposition serait irrégulière, le déroulement de l'entretien qu'ils ont eu, à la suite de la demande d'interlocution départementale, n'ayant pas préservé leurs garanties ; qu'il résulte de l'instruction, que les contribuables ont formulé une demande verbale d'interlocution le 10 novembre 1993 ; que l'entretien leur a été accordé par l'interlocuteur départemental le même jour ; qu'aucune disposition de la charte du contribuable vérifié n'imposant à l'administration fiscale de respecter un délai entre la demande d'interlocution, et le jour du déroulement de celle-ci, M. et Mme X ne peuvent invoquer ce motif pour soutenir qu'ils auraient été privés de la garantie de la présence de leur conseil ; que, de même, aucune disposition du livre des procédures fiscales n'impose à l'administration fiscale de formaliser par écrit l'issue de cet entretien ; que, dans ces conditions, les contribuables ne sont pas fondés à soutenir que la procédure suivie aurait été irrégulière de ce fait ;

Sur le bien-fondé des impositions :

Considérant qu'aux termes de l'article 38 du code général des impôts : 1... le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises... - 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt... - 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient ; qu'il résulte de ces dispositions que les travaux en cours, exécutés à la demande de certains clients mais non encore facturés à ces derniers, constituent des valeurs d'actif qui doivent figurer au bilan à leur prix de revient ; que si M. X soutient que certains travaux de toiture, pour un montant de 639 260 F comportaient d'importantes malfaçons, cette circonstance ne l'autorisait pas à diminuer le montant des travaux en cours de celui des travaux comportant des malfaçons ; qu'il lui appartenait seulement, le cas échéant de constituer une provision du montant de la perte probable occasionnée par les malfaçons ; qu'enfin si M. X fait état de la double imposition à laquelle il se trouve soumis dès lors qu'il a déclaré au titre de l'année 1993 le revenu correspondant à l'indemnité versée par sa compagnie d'assurance, cette circonstance est sans incidence sur le bien-fondé des impositions de l'année 1989, seules en litige ;

Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre de l'économie des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nice a accordé à M. et Mme X une réduction de 639 260 F en base de l'impôt sur le revenu mis à leur nom au titre de l'année 1989 ;

D E C I D E :

Article 1er : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Nice, n° 9701784, en date du 8 février 2000 sont annulés.

Article 2 : M. X d'une part, et les époux X d'autre part, seront rétablis au rôle de l'impôt sur le revenu au titre, respectivement, de la période du 1er janvier au 10 juin 1989 et de la période du 11 juin au 31 décembre 1989 à raison des réductions prononcées en première instance.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident présentées par M. et Mme X, au titre de l'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1990 et 1991, sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme X, et au ministre de l'économie des finances et de l'industrie.

Délibéré à l'issue de l'audience du 25 mars 2003, où siégeaient :

M. BERNAULT, président de chambre,

M. DUCHON-DORIS, président assesseur,

Mme PAIX, premier conseiller,

assistés de Mme GIORDANO, greffier ;

Prononcé à Marseille, en audience publique le 8 avril 2003.

Le président, Le rapporteur,

Signé Signé

François BERNAULT Evelyne PAIX

Le greffier,

Signé

Danièle GIORDANO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

2

N° 00MA01652


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4 eme chambre
Numéro d'arrêt : 00MA01652
Date de la décision : 08/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Mme PAIX
Rapporteur public ?: M. BEDIER
Avocat(s) : COURTIGNON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2003-04-08;00ma01652 ?
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