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27/12/2001 | FRANCE | N°98MA01169

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2e chambre, 27 décembre 2001, 98MA01169


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 juillet 1998 sous le n° 98MA01169, présentée par M. Jean X..., , mandataire de l'équipe X..., Z..., A..., B..., C..., D... ;
M. X... demande que la Cour :
1°/ annule le jugement du 30 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Corse en date du 11 juillet 1997 attribuant à l'équipe de concepteurs conduite par M. Y... le marché de maîtrise d'oeuvre de la construction du pôle universit

aire Grossetti à Corte, à ce que son projet soit déclaré le seul rece...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 juillet 1998 sous le n° 98MA01169, présentée par M. Jean X..., , mandataire de l'équipe X..., Z..., A..., B..., C..., D... ;
M. X... demande que la Cour :
1°/ annule le jugement du 30 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur de l'académie de Corse en date du 11 juillet 1997 attribuant à l'équipe de concepteurs conduite par M. Y... le marché de maîtrise d'oeuvre de la construction du pôle universitaire Grossetti à Corte, à ce que son projet soit déclaré le seul recevable et à sa désignation en tant que lauréat de la consultation ;
2°/ annule la décision du 11 juillet 1997 et la délibération du 9 juin 1997 par laquelle le jury a désigné l'équipe Y... comme lauréate du concours ;
3°/ condamne l'Etat à lui verser la somme de 20.000 F en application du l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée ;
Vu le décret n° 93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 décembre 2001:
- le rapport de M. TROTTIER, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Considérant qu'à l'issue du concours d'architecture et d'ingénierie organisé en vue de l'étude et de la réalisation, sur le site de l'ancien établissement régional du matériel du pôle universitaire Grossetti à Corte, d'une bibliothèque et d'un centre culturel universitaires, de locaux administratifs ainsi que de l'aménagement des abords et du front urbain, le recteur de l'académie de Corse a, le 11 juillet 1997, attribué ce marché de maîtrise d'oeuvre à l'équipe de concepteurs représentée par M. Y... ; que M. X..., mandataire d'une des trois autres équipes en compétition, fait appel du jugement du 30 avril 1998 par lequel le Tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du recteur et à la désignation de sa propre équipe en tant que lauréate du concours ;
Considérant qu'en vertu de l'article 2 de la loi du 12 juillet 1985 susvisée il appartient au maître de l'ouvrage public, après s'être assuré de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération envisagée, d'en déterminer la localisation, d'en définir le programme, d'en arrêter l'enveloppe financière prévisionnelle ; qu'aux termes de l'article 3 du décret du 29 novembre 1993 : "Les études d'esquisse ont pour objet : a) De proposer une ou plusieurs solutions d'ensemble, traduisant les éléments majeurs du programme, d'en indiquer les délais de réalisation et d'examiner leur compatibilité avec la partie de l'enveloppe financière prévisionnelle retenue par le maître de l'ouvrage et affectée aux travaux ; b) De vérifier la faisabilité de l'opération au regard des différentes contraintes du programme et du site" ; qu'aux termes de l'article 107 du code des marchés publics alors en vigueur : "Les marchés d'études sont dits *de maîtrise d'oeuvre+ lorsqu'ils ont pour objet, conformément aux dispositions de l'article 7 de la loi nE 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée, d'apporter une réponse architecturale, technique et économique au programme défini par le maître de l'ouvrage" ; qu'aux termes de l'article 108 ter du même code : "Les concours de maîtrise d'oeuvre sont organisés dans les conditions suivantes ( ...) Le dossier de consultation comporte notamment le programme de l'opération et le règlement du concours. Les marchés passés après concours de maîtrise d'oeuvre donnent lieu à l'exécution de prestations déterminées par le règlement de la consultation et destinées à permettre au jury de se prononcer sur les projets. L'attribution du marché de maîtrise d'oeuvre est prononcée par la personne responsable du marché après avis du jury. Le jury dresse un procès-verbal dans lequel il relate les circonstances de son examen et formule son avis ..." ;
Sur la légalité de la décision du recteur de l'académie de Corse et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que le règlement du concours d'architecture et d'ingénierie en litige prévoyait qu'il s'agissait d'un "concours à un degré sur esquisse" dont les principaux critères de jugement étaient "le respect du programme, sous ses aspects quantitatifs, fonctionnels et de prise en compte des exigences, la qualité architecturale, le traitement des espaces intérieurs et extérieurs, l'économie du projet : niveau de prestations dans le respect de l'enveloppe prévisionnelle ..." ; que le programme architectural et technique de consultation précisait que "l'alignement le long des voies est impératif sur les façades demandées" mais que "l'implantation des bâtiments à l'intérieur des polygones proposés est libre" ; que le même document mentionnait quatre polygones d'emprise, le premier de forme carrée d'une superficie de 2.500 m5 pour la bibliothèque universitaire, le deuxième également carré d'une superficie de 625 m5 pour le centre culturel universitaire, le troisième en forme de L d'une superficie de 750 m5 pour le bâtiment à usage administratif et le quatrième de forme triangle et à la surface non précisée pour un bâtiment appelé "services" ; qu'au cours d'une réunion avec les candidats intervenue le 7 avril 1997, les représentants du maître de l'ouvrage ont rappelé que le programme architectural et technique de consultation avait valeur réglementaire et qu'il s'agissait pour les concurrents "notamment de respecter l'implantation des bâtiments : polygones d'emprise et obligation d'alignement dans l'esprit du parti d'aménagement avec une certaine souplesse formelle" ; qu'il était également souligné que le bâtiment appelé "services" concernait un "espace sur lequel la construction de petits commerces de proximité pourra être autorisée" et que si "ces services ne font pas partie du concours, leur éventualité doit être prise en compte dans le projet et intégrée à la réflexion ..." ; qu'enfin l'enveloppe à la disposition du maître de l'ouvrage pour la réalisation des travaux, initialement fixée à 47 millions de F.HT, était ramenée à la somme de 46 millions de F.HT ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de l'équipe Y... comporte deux bâtiments, l'un regroupant la bibliothèque et le centre culturel universitaires et l'autre à usage de bâtiment administratif ; que l'implantation de ces bâtiments est située en grande partie en dehors des limites des polygones d'emprise mentionnés au programme architectural et technique de consultation ; que par ailleurs, ce projet, prévoyant un montant de travaux de 47 millions de F.HT, excède le coût prévisionnel du programme et ne prend absolument pas en compte le bâtiment "services" ;
Considérant que le choix d'un tel projet qui, indépendamment de ses qualités novatrices, ne respecte pas le règlement et le programme du concours, est illégal ; que, dès lors, M. X... est fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 11 juillet 1997 par laquelle le recteur de l'académie de Corse a attribué le marché de maîtrise d'oeuvre du pôle universitaire Grossetti de Corte à l'équipe de concepteurs représentée par M. Y... ;
Sur les conclusions dirigées contre la délibération du jury de concours :

Considérant qu'en vertu des dispositions précitées de l'article 108 ter du code des marchés publics, le jury de concours de maîtrise d'oeuvre n'émet qu'un avis destiné à la personne responsable du marché qui dispose du pouvoir d'attribuer ledit marché au nom du maître de l'ouvrage ; que, par suite, l'avis ne constitue qu'un acte préparatoire à la décision d'attribution du marché et n'est pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que les conclusions susvisées doivent donc être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'attribution du marché à l'équipe représentée par M. X... :
Considérant que l'annulation de la décision attribuant le marché de maîtrise d'oeuvre à l'équipe de concepteurs représentée par M. Y... implique simplement pour le maître de l'ouvrage de reprendre la procédure d'attribution du marché et non pour le juge administratif de se substituer à l'administration dans le choix du maître d'oeuvre ; qu'ainsi, les conclusions susvisées doivent être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ont été reprises à l'article L.761-1 du code de justice administrative ; qu'aux termes de ce dernier article : "Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation." ;
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à payer à M. X... la somme de 6.000 F au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du 30 avril 1998 du Tribunal administratif de Bastia est annulé.
Article 2 : La décision du recteur de l'académie de Corse en date du 11 juillet 1997 est annulée.
Article 3 : L'Etat versera à M. X... la somme de 6.000 F(six mille francs) en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. X..., au ministre de l'éducation nationale, et à la SARL JODRY.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 98MA01169
Date de la décision : 27/12/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-02-02-06 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - FORMATION DES CONTRATS ET MARCHES - MODE DE PASSATION DES CONTRATS - MARCHES D'ETUDES


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code des marchés publics 107, 108 ter
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 93-1268 du 29 novembre 1993 art. 3
Loi 85-704 du 12 juillet 1985 art. 2


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. TROTTIER
Rapporteur public ?: M. BOCQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2001-12-27;98ma01169 ?
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