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20/11/2001 | FRANCE | N°97MA01831;97MA01867

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3e chambre, 20 novembre 2001, 97MA01831 et 97MA01867


Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, les requêtes présentées pour M. Z... et pour ELECTRICITE DE FRANCE ;
Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 août 1997 sous le n° 97LY01831, présentée pour M. Jean Z..., demeurant quartier Paradis à Le Luc-en-Provence (83340), par Me X..., avocat ;
M. Z... demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement

n° 93-2493 du Tribunal administratif de Nice en date du 23 mai 1997 en tant...

Vu l'ordonnance en date du 29 août 1997 par laquelle le président de la Cour administrative d'appel de Lyon a transmis à la Cour administrative d'appel de Marseille, en application du décret n° 97-457 du 9 mai 1997, les requêtes présentées pour M. Z... et pour ELECTRICITE DE FRANCE ;
Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 7 août 1997 sous le n° 97LY01831, présentée pour M. Jean Z..., demeurant quartier Paradis à Le Luc-en-Provence (83340), par Me X..., avocat ;
M. Z... demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement n° 93-2493 du Tribunal administratif de Nice en date du 23 mai 1997 en tant que ce jugement exonère ELECTRICITE DE FRANCE d'une partie de sa responsabilité et met hors de cause l'Etat ;
2°/ de condamner solidairement ELECTRICITE DE FRANCE et l'Etat à lui verser une indemnité de 1 500 000 F avec intérêts de droit à compter de la date d'assignation devant le Tribunal de grande instance de Draguignan ;
3°/ et à titre subsidiaire, de nommer un nouvel expert avec allocation d'une provision de 100 000 F ;
4°/ de condamner ELECTRICITE DE FRANCE et l'Etat à lui verser la somme de 15 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
5°/ de condamner solidairement ELECTRICITE DE FRANCE et l'Etat aux dépens ainsi qu'aux frais de l'expertise ordonnée en première instance liquidés à la somme de 2 000 F ;
Vu 2°) la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 18 août 1997 sous le n° 97LY01867, présentée pour ELECTRICITE DE FRANCE - GAZ DE FRANCE dont le siège est ..., par Me A..., avocat ;
ELECTRICITE DE FRANCE-GAZ DE FRANCE demande à la Cour :
1°/ de réformer le jugement n° 93-2493 du Tribunal administratif de Nice en date du 23 mai 1997 en tant que ce jugement retient sa responsabilité partielle ;
2°/ et à titre subsidiaire de juger qu'une part plus importante de responsabilité doit être reconnue à la victime ;
3°/ de condamner tout succombant aux dépens ainsi qu'au versement de la somme de 10 000 F en application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'urbanisme ;
Vu la loi du 15 juin 1906 ;
Vu l'arrêté interministériel du 13 février 1970 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel en vigueur jusqu'au 31 décembre 2000, ensemble le code de justice administrative entré en vigueur le 1er janvier 2001 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 novembre 2001 ;

- le rapport de Mme PAIX, premier conseiller ;
- les observations de Me X... pour M. Z... ;
- les observations de Me Y... substituant Me A... pour ELECTRICITE DE FRANCE ;
- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;

Considérant que les requêtes susvisées de M. Z... et d'ELECTRICITE DE FRANCE sont dirigées contre le même jugement et présentent à juger les mêmes questions ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Considérant que M. Z..., alors qu'il se trouvait le 13 mars 1989 sur le toit de serres utilisées dans le cadre de son activité d'exploitant horticole pour procéder au changement de certaines vitres cassées, a été victime d'un accident consécutif à la formation d'un arc électrique entre l'échelle métallique dont il se servait et une ligne électrique à moyenne tension ; que, par jugement en date du 23 mai 1997, le Tribunal administratif de Nice, après avoir considéré que la faute commise par M. Z... justifiait que soit laissée à sa charge un tiers des conséquences dommageables de l'accident, a condamné ELECTRICITE DE FRANCE à verser à l'intéressé la somme de 136 610,55 F et à la Mutualité sociale agricole du département du Var la somme de 264 168,33 F ; que M. Z... relève appel de ce jugement en demandant qu'aucune faute ne soit retenue contre lui, que l'indemnisation de son préjudice soit portée à la somme de 1 500 000 F et que les services de l'Etat soient condamnés à lui verser cette somme solidairement avec ELECTRICITE DE FRANCE ; qu'il est également relevé appel du jugement du 23 mai 1997 par ELECTRICITE DE FRANCE qui demande à la Cour d'être exonérée de toute responsabilité ;
Sur le principe de la responsabilité d'ELECTRICITE DE FRANCE :
Considérant que les propriétaires d'ouvrages publics sont responsables, même en l'absence de faute, des dommages que les ouvrages dont ils ont la garde peuvent causer aux tiers tant en raison de leur existence que de leur fonctionnement ; qu'ils ne peuvent dégager leur responsabilité à l'égard des victimes que s'ils établissent que ces dommages résultent de la faute de la victime ou d'un cas de force majeure ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport établi le 10 mai 1989 par les services de gendarmerie que la ligne à moyenne tension qui se trouve à l'origine de l'accident dont M. Z... a été victime se trouvait à une distance de 2 m 45 du toit de la serre sur lequel se trouvait l'intéressé alors que, ce que ne conteste pas ELECTRICITE DE FRANCE, la réglementation applicable prévoit une distance minimale de trois mètres entre les lignes électriques du type de celle qui est impliquée dans l'accident et les immeubles les plus proches ;
Considérant toutefois que, pour s'exonérer de toute responsabilité, ELECTRICITE DE FRANCE soutient que M. Z... a commis une faute en manoeuvrant une échelle métallique, à proximité d'une ligne électrique dont il ne pouvait ignorer l'existence et qu'au surplus, l'accident est survenu alors que la victime se trouvait sur un immeuble construit irrégulièrement et que ses services n'avaient pas reçu du constructeur l'information obligatoire prévue à l'article 12 de la loi du 13 juin 1906, sur les distributions d'énergie qui aurait permis de mettre en conformité les lignes qui sont à l'origine de l'accident ;

Considérant que, s'il est exact que M. Z... a commis une faute en manoeuvrant un engin métallique à proximité immédiate d'un ouvrage dont il ne pouvait ignorer le caractère dangereux nonobstant l'absence d'une signalisation de ce danger, ELECTRICITE DE FRANCE ne saurait être exonérée en totalité de sa responsabilité à raison de la faute de la victime dès lors que les lignes électriques qui se trouvent à l'origine de l'accident ne se trouvaient pas à la distance de l'immeuble prévue par la réglementation et que, à supposer même que cet immeuble ait été édifié irrégulièrement, ses services avaient été largement mis à même, compte tenu du laps de temps écoulé entre l'édification des serres en 1972 et la date de l'accident, de mettre la ligne en conformité avec les prescriptions de sécurité ; qu'en outre, la circonstance que la construction sur laquelle se trouvait M. Z... au moment de l'accident aurait été édifiée irrégulièrement n'est pas de nature à aggraver la faute de la victime dès lors qu'il est constant que celle-ci n'est pas propriétaire de l'immeuble en cause et ne saurait être tenue pour responsable ni de sa situation par rapport aux lignes électriques ni de l'absence d'information des services d'ELECTRICITE DE FRANCE ; que, compte tenu de ce qui précède, les premiers juges ont fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en laissant à la charge de M. Z... le tiers des conséquences dommageables de son accident ; qu'il y a donc lieu de rejeter les conclusions d'ELECTRICITE DE FRANCE tendant à être exonérée de toute responsabilité ainsi que les conclusions de M. Z... et de la Mutualité sociale agricole tendant à ce qu'aucune faute ne soit imputée à la victime ;
Sur le principe de la responsabilité de l'Etat :
Considérant, en premier lieu, que M. Z... soutient que les services de l'Etat auraient commis une faute en ne faisant pas régulariser, lors de la délivrance du certificat de conformité de la serre, la hauteur de la ligne électrique qui est à l'origine de son accident ; que, toutefois, la délivrance d'un certificat de conformité a pour seul objet, en vertu de l'article L. 460-2 du code de l'urbanisme, de constater la conformité des travaux réalisés avec le respect du permis de construire n'implique aucune vérification par les services compétents de l'implantation de lignes électriques ;
Considérant, en second lieu, que si M. Z... soutient également que les services de l'Etat auraient commis une faute en ne faisant pas régulariser la hauteur de la ligne électrique, lors de l'instruction du dossier relatif à une subvention accordée pour la construction de cette ligne et, plus généralement, en ne délivrant pas d'avis à propos de la construction de la ligne en cause, le requérant n'indique pas à la Cour quelles obligations fixées par des dispositions législatives ou réglementaires auraient été méconnues par les services de l'Etat ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Z... n'est pas fondé à demander que l'Etat soit condamné solidairement avec ELECTRICITE DE FRANCE à réparer les conséquences dommageables de son accident ;
Sur le montant du préjudice subi par M. Z... :

Considérant que M. Z... conteste le taux d'incapacité permanente partielle retenu par l'expert désigné par le juge des référés du Tribunal administratif à hauteur de 20 % ; que le requérant, qui avait déjà contesté devant les premiers juges le taux d'incapacité permanente partielle retenu par l'expert, est recevable à contester de nouveau ce taux en appel ; qu'en outre, le requérant, qui produit au dossier à l'appui de sa contestation, quatre rapports médicaux doit être regardé comme présentant devant le juge d'appel des éléments suffisants pour justifier que soit ordonnée une nouvelle expertise ; qu'il y a lieu de limiter la mission confiée à l'expert à l'évaluation de l'incapacité permanente partielle de M. Z..., qui est seule mise en cause par l'intéressé ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu d'accorder à M. Z... la provision qu'il demande ;
Sur les conclusions de M. Z... tendant à la condamnation solidaire d'EDF et de l'Etat à payer l'expertise ordonnée par les premiers juges :
Considérant que, par l'article 3 de son jugement, le tribunal administratif a mis les frais d'expertise a la charge d'ELECTRICITE DE FRANCE ; que l'Etat étant mis hors de cause par le présent arrêt, les conclusions de M. Z... tendant à la condamnation solidaire d'ELECTRICITE DE FRANCE et de l'Etat à payer les frais en cause doivent être rejetées ;
Sur les conclusions des parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de M. Z..., d'ELECTRICITE DE FRANCE et de la Mutualité sociale agricole du département du Var tendant à l'application de cet article ;
Article 1er : La requête d'ELECTRICITE DE FRANCE est rejetée.
Article 2 : La requête de M. Z... et les conclusions incidentes de la Mutualité sociale agricole du département du Var sont rejetées en tant qu'elles demandent qu'ELECTRICITE DE FRANCE soit déclarée entièrement responsable de l'accident subi par M. Z....
Article 3 : Il sera, avant de statuer sur la demande d'indemnité de M. Z..., procédé par un expert désigné par le président de la cour administrative d'appel à une expertise en vue de déterminer le taux d'incapacité permanente partielle de l'intéressé.
Article 4 : L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Le rapport d'expertise sera déposé au greffe de la Cour dans le délai de trois mois suivant la prestation de serment de l'expert.
Article 5 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.
Article 6 : Les conclusions de M. Z..., d'ELECTRICITE DE FRANCE et de la Mutualité sociale agricole du département du Var tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à M. Z..., à ELECTRICITE DE FRANCE, à la Mutualité sociale agricole du Var, au ministre de l'équipement, du transport et du logement et à l'expert.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 97MA01831;97MA01867
Date de la décision : 20/11/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

67-02-02-03 TRAVAUX PUBLICS - REGLES COMMUNES A L'ENSEMBLE DES DOMMAGES DE TRAVAUX PUBLICS - REGIME DE LA RESPONSABILITE - QUALITE DE TIERS


Références :

Code de justice administrative L761-1
Code de l'urbanisme L460-2
Loi du 13 juin 1906 art. 12


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme PAIX
Rapporteur public ?: M. BEDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2001-11-20;97ma01831 ?
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