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20/02/2001 | FRANCE | N°98MA00542;98MA00590

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2e chambre, 20 février 2001, 98MA00542 et 98MA00590


Vu, 1°/, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 avril 1998 sous le n° 98MA00542, présentée pour M. Claude Y..., demeurant ... à CARRY LE ROUET (13620), par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2 et 4 du jugement en date du 5 février 1998 rendu dans les instances n° 95-6538 et 96-2438 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a limité à 70.000 F l'indemnisation allouée en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité des décisions de mutation d'office dont il a fait l'obj

et les 30 juin et 7 août 1995 et rejeté le surplus de ses conclusions ;
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Vu, 1°/, la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 avril 1998 sous le n° 98MA00542, présentée pour M. Claude Y..., demeurant ... à CARRY LE ROUET (13620), par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 2 et 4 du jugement en date du 5 février 1998 rendu dans les instances n° 95-6538 et 96-2438 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a limité à 70.000 F l'indemnisation allouée en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité des décisions de mutation d'office dont il a fait l'objet les 30 juin et 7 août 1995 et rejeté le surplus de ses conclusions ;
2°) de condamner l'Etat (MINISTRE DE L'INTERIEUR) :
- à lui payer, en raison de l'annulation des arrêtés litigieux, les sommes de 86.493,11 F au titre du différentiel de traitement pendant 17 mois, 63.597,90 F au titre de la fraction non versée de primes d'éloignement, 70.000 F au titre des frais occasionnés par son déménagement ;
- à lui octroyer du fait de la nécessaire reconstitution de sa carrière 5 mois et 20 jours d'ancienneté pour le calcul de sa retraite ;
3°) d'enjoindre au MINISTRE DE L'INTERIEUR de procéder à la reconstitution de sa carrière ;
4°) de le condamner, en outre, à verser à M. Y... la somme de 25.000 F sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu, 2°/, le recours enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 22 avril 1998, présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR qui demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 2 du jugement en date du 5 février 1998, rendu dans les instances n° 95!6538 et 96-2438, par lequel le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à M. Y... la somme de 70.000 F en réparation du préjudice subi du fait des frais engagés pour son déménagement consécutif à sa mutation d'office ;
2°) de rejeter les conclusions de M. Y... tendant à l'octroi d'une indemnité de 70.000 F ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Vu le décret n° 53-1266 du 22 décembre 1953 ;
Vu le décret n° 89-271 du 12 avril 1989
Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 janvier 2001 :
- le rapport de Mme NAKACHE, premier conseiller ;
- les observations de Me X... pour M. Y... ;
- et les conclusions de M. BOCQUET, premier conseiller ;

Sur la jonction :
Considérant que la requête susvisée de M. Y... et le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR sont dirigés contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;
Sur la recevabilité du recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le MINISTRE DE L'INTERIEUR a reçu le 20 février 1998 notification du jugement attaqué du Tribunal administratif de Marseille en date du 5 février 1998 ; que son recours, adressé par télécopie, a été enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 16 avril 1998 et régularisé par la production du mémoire original le 22 avril 1998 ; que la Cour a donc été valablement saisie dudit recours par la télécopie enregistrée dans le délai d'appel de 2 mois institué par l'article R.229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel alors applicable ; que, par suite, M. Y... n'est pas fondé à soutenir que le recours susvisé du MINISTRE DE L'INTERIEUR est tardif et dès lors irrecevable ;
Sur l'étendue du litige :
Considérant que par l'article 1er du jugement attaqué du 5 février 1998 le Tribunal administratif de Marseille a annulé les arrêtés du MINISTRE DE L'INTERIEUR des 15 juin et 7 août 1995 prononçant la mutation d'office de M. Y... ; qu'il a, par l'article 2 dudit jugement, condamné l'Etat à payer à M. Y... la somme de 70.000 F, en réparation du préjudice matériel subi par l'intéressé du fait de ces décisions illégales, mais a rejeté par l'article 4 le surplus de la demande de l'intéressé ;
Considérant que devant la Cour le MINISTRE DE L'INTERIEUR ne conteste pas l'annulation des arrêtés litigieux mais fait exclusivement appel de l'article 2 du jugement attaqué qui accorde à M. Y... ladite indemnité de 70.000 F ;
Considérant que M. Y... conteste également les articles 2 et 4 du jugement attaqué du 5 février 1998 en tant qu'ils ont limité l'indemnité allouée à l'intéressé à la somme de 70.000 F et écarté les autres chefs d'indemnisation qu'il réclamait ; que sa requête n'est recevable qu'à ce titre ; qu'il est, par contre, sans intérêt pour demander à la Cour de condamner l'Etat à lui verser la somme de 70.000 F au titre des frais engagés pour son déménagement dans la mesure où le tribunal administratif lui a, par l'article 2 du jugement attaqué, donné satisfaction sur ce point ; qu'en revanche il est recevable à demander à la Cour, si elle lui donne satisfaction, de faire application de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel devenu l'article L.911-1 du code de justice administrative et d'enjoindre au MINISTRE DE L'INTERIEUR de faire droit à l'ensemble de ses demandes indemnitaires ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué ;
En ce qui concerne l'indemnité allouée au titre des frais de déménagement :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des pièces produites par le MINISTRE DE L'INTERIEUR devant la Cour que M. Y... a bénéficié à l'occasion de son retour en métropole, du remboursement de ses frais de changement de résidence par le versement de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article 19 du décret du 12 avril 1989 ; que la somme de 21.568,80 F lui a été versée à ce titre le 8 août 1995 ;
Considérant, en premier lieu, que même si le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'a pas, dans sa défense devant le tribunal administratif, précisément contesté la somme réclamée par M. Y... au titre de ses frais de déménagement, il est recevable à le faire devant la Cour dans la mesure où le défendeur de première instance peut soulever tout moyen devant la juridiction d'appel ; que, de même, la circonstance qu'il n'ait pas fait appel du jugement du Tribunal administratif de Strasbourg en date du 12 novembre 1996, donnant satisfaction à un autre fonctionnaire de police, collègue de M. Y... et objet d'une mutation illégale analogue, en lui allouant pour ce chef de préjudice la somme de 70.000 F que l'intéressé réclamait, n'est pas de nature à priver le MINISTRE DE L'INTERIEUR de la possibilité de contester ledit chef de préjudice devant la Cour de céans dans la mesure où la condamnation prononcée par le tribunal de Strasbourg n'est pas revêtue de l'autorité absolue de chose jugée ;
Considérant, en second lieu, que ni devant le tribunal administratif ni devant la Cour, M. Y... ne justifie avoir engagé pour son déménagement et son retour en métropole des frais excédant le montant de l'indemnité forfaitaire qui lui a été réglementairement allouée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR est fondé à soutenir que c'est à tort que par l'article 2 du jugement attaqué le Tribunal administratif de Marseille a condamné l'Etat à verser à M. Y... une indemnité de 70.000 F ;
En ce qui concerne les autres indemnités demandées par M. Y... :
Considérant que M. Y... avait été affecté, par arrêté du 11 décembre 1992 au SRPJ Antilles-Guyane en résidence à Cayenne pour un séjour de quatre ans à compter du 20 janvier 1993 ; que du fait de l'illégalité des décisions du 15 juin et 7 août 1995 le mutant d'office en métropole, il prétend au versement d'indemnités représentatives du différentiel de salaire pendant les 17 mois restant à courir sur la durée normale de son séjour outre-mer, et de la dernière fraction de la prime d'éloignement ;
Considérant que l'ensemble des rémunérations susmentionnées est directement lié à l'affectation et à l'exercice effectif des fonctions outre-mer et vise à compenser le surcoût ou les frais résultant de l'exercice des fonctions dans le département concerné ; que dès lors que du fait de sa mutation, même illégale, M. Y... a cessé à compter du 1 août 1995 d'exercer ses fonctions au SRPJ Antilles-Guyane en résidence à Cayenne et est revenu en métropole à Versailles puis à Marseille, il ne saurait prétendre à être indemnisé de leur perte ;

Considérant, en outre, qu'en exécution de l'article 1er du jugement du 5 février 1998 le MINISTRE DE L'INTERIEUR a, par arrêté du 15 juillet 1998 réaffecté M. Y... au SRPJ Antilles-Guyane en résidence à Cayenne à compter du 1er août 1998 aux fins de terminer son séjour de quatre ans outre-mer, ses nouveaux frais de changement de résidence étant pris en charge par l'Etat et son indemnité d'éloignement calculée au prorata du séjour restant à accomplir ; que M. Y... ne justifie plus dès lors d'aucun préjudice ;
Considérant que la circonstance que le Tribunal administratif de Strasbourg ait, par le jugement susmentionné du 12 novembre 1996 devenu définitif, accordé au collègue de M. Y... l'intégralité des sommes réclamées n'est pas de nature à conférer à ce dernier un droit au versement desdites indemnités sur le fondement du principe d'égalité de traitement entre fonctionnaires, celui-ci ne trouvant à s'apprécier que dans le cadre de la législation et de la réglementation statutaire applicable ; qu'en outre, ledit jugement a été rendu entre parties différentes et n'a pas autorité absolue de chose jugée ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice lié à la perte des indemnités et majoration de traitement litigieuses ;
En ce qui concerne la majoration d'ancienneté :
Considérant qu'aux termes de l'article R.11 du code des pensions civiles et militaires de retraite : "la bonification de dépaysement prévue à l'article L.12 attribuée au fonctionnaire civil qui accomplit des services hors d'Europe est égale au tiers de la durée desdits services" ; qu'il ressort des termes mêmes de ce texte que le bénéfice de la bonification d'ancienneté est lié à l'exercice effectif des fonctions outre-mer et à la durée dudit séjour ; que si l'annulation des décisions de mutation illégale des 15 juin et 7 août 1995 faisait obligation au MINISTRE DE L'INTERIEUR de replacer M. Y... dans la situation qui était la sienne avant l'intervention des décisions litigieuses, ce que le ministre a d'ailleurs fait par arrêté du 15 juillet 1998, elle n'impliquait pas que l'intéressé bénéficie d'une bonification d'ancienneté de 5 mois et 20 jours, correspondant aux 17 mois de séjour non effectués en raison desdites mutations ; qu'il s'ensuit que M. Y... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sur ce point sa demande ;
Sur l'application de l'article L.911-1 du code de justice administrative :
Considérant que l'appel de M. Y... étant rejeté et le recours du ministre accueilli, la présente décision n'implique aucune obligation pour l'administration de verser les indemnités ou d'accorder la majoration d'ancienneté réclamées ; que les conclusions de l'intéressé tendant à l'application de l'article L.8-2 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, devenu l'article L.911-1 du code de justice administrative, doivent donc être rejetées ;
Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. Y..., partie perdante, bénéficie du remboursement de ses frais d'instance ;
Article 1er : L'article 2 du jugement susvisé du Tribunal administratif de Marseille en date du 5 février 1998 est annulé.
Article 2 : Les demandes à fin d'indemnité et d'octroi de majoration d'ancienneté et les conclusions de la requête d'appel de M. Y... sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. Y... et au MINISTRE DE L'INTERIEUR.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 98MA00542;98MA00590
Date de la décision : 20/02/2001
Type d'affaire : Administrative

Analyses

36-13-03 FONCTIONNAIRES ET AGENTS PUBLICS - CONTENTIEUX DE LA FONCTION PUBLIQUE - CONTENTIEUX DE L'INDEMNITE


Références :

Code de justice administrative L911-1, L761-1
Code des pensions civiles et militaires de retraite R11
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R229, L8-2
Décret 89-271 du 12 avril 1989 art. 19


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme NAKACHE
Rapporteur public ?: M. BOCQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2001-02-20;98ma00542 ?
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