Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 8 juin 1999 sous le n° 99MA01033, présentée pour Mme Rabia Y..., demeurant chez M. et Mme Abbas Z... - 56, bd Villecroze Bât. A5 à Marseille (13014), par Me X..., avocat ;
Mme Y... demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 98.6961-98.6962 en date du 30 mars 1999 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a refusé de faire droit à sa demande tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision en date du 29 juillet 1998 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui accorder un titre de séjour en qualité de visiteur ;
2°/ d'annuler pour excès de pouvoir ladite décision ;
3°/ d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer un titre de séjour d'un an, dans un délai d'un mois, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 F par jour de retard ;
4°/ de lui allouer 5.000 F au titre des frais irrépétibles ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2001 :
- le rapport de M. DUBOIS, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. DUCHON-DORIS, premier conseiller ;
Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : "1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ( ...) 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui" ; qu'il ressort des pièces du dossier que Mme Y..., après s'être séparée de son mari qui est resté au Maroc, est venue en France rejoindre sa famille composée, à la date de la décision attaquée de ses deux fils, dont l'un au moins a la nationalité française, de sa fille, son gendre et trois de ses petits enfants ; qu'elle affirme sans être contredite par l'administration qu'elle n'a plus d'attache dans son pays d'origine ; que dans ces conditions, la décision attaquée a porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels a été prise la mesure attaquée ; qu'ainsi les dispositions précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ont été méconnus ; que, dès lors, Mme Y... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a refusé de faire droit à sa demande en annulation de la décision lui refusant le titre sollicité ;
Sur la demande d'injonction :
Considérant qu'aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution." ;
Considérant que le présent arrêt implique nécessairement pour son exécution que Mme Y... soit autorisée à séjourner en France ; qu'en conséquence il y a lieu seulement de prescrire au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour d'un an, dans un délai d'un mois, à compter de la notification du présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire droit aux conclusions de Mme Y... tendant à l'application des dispositions susvisées de l'article L.761-1 du code de justice administrative et de condamner l'Etat à lui payer la somme de 5.000 F qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement n° 98.6961-98.6962 en date du 30 mars 1999 du Tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : La décison susvisée en date du 29 juillet 1998 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant un titre de séjour d'un an à Mme Y... est annulée.
Article 3 : Le préfet des Bouches-du-Rhône délivrera à Mme Y... un titre de séjour d'un an, dans un délai d'un mois, à compter de la notification du présent arrêt.
Article 4 : L'état est condamné à payer à Mme Y... une somme de 5.000 F (cinq mille francs) au titre des frais irrépétibles.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Y... et au MINISTRE DE L'INTERIEUR.