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06/07/2023 | FRANCE | N°22LY02169

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 7ème chambre, 06 juillet 2023, 22LY02169


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le préfet de l'Ardèche lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire.

Par un jugement n° 2109490 du 4 mars 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée

le 16 juillet 2022, Mme B..., représentée par Me Lantheaume, demande à la cour :

1°) d'annuler c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme E... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2021 par lequel le préfet de l'Ardèche lui a refusé un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé la destination d'éloignement en cas de non-respect de ce délai de départ volontaire.

Par un jugement n° 2109490 du 4 mars 2022, le tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 16 juillet 2022, Mme B..., représentée par Me Lantheaume, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté susmentionné ;

2°) d'enjoindre au préfet de l'Ardèche de lui délivrer une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de l'arrêt, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans le même délai ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est irrégulier, il est insuffisamment motivé en ce qui concerne la réponse au moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée en ce qui concerne sa demande présentée au titre de l'article L. 426-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et elle est entachée d'une erreur de droit en l'absence d'examen réel et sérieux de sa situation ; elle est entachée d'une erreur de droit dès lors qu'elle méconnaît le point 2.1.1 de la circulaire du 28 novembre 2012 ; elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et celles de l'article L. 435-1 du même code et est, à cet égard, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale, par voie d'exception, du fait de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ; elle est insuffisamment motivée et méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- les décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de destination sont illégales par exception d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français.

La requête de Mme B... a été communiquée au préfet de l'Ardèche qui n'a pas produit d'observations.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 6 juillet 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Le rapport de Mme Djebiri, première conseillère, ayant été entendu au cours de l'audience publique ;

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante indienne née en 1983 entrée sur le territoire français le 18 février 2016 munie d'un titre de séjour grec, relève appel du jugement du 4 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation présentée à l'encontre de l'arrêté du 26 octobre 2021 du préfet de l'Ardèche lui refusant un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur la régularité du jugement :

2. Le tribunal administratif n'était pas tenu de répondre à tous les arguments de Mme B... venant au soutien du moyen tiré du défaut de motivation de la mesure d'éloignement qu'elle avait invoqué. Les premiers juges ont, en particulier, mentionné que " la décision attaquée vise les textes dont elle fait application, notamment (...) les dispositions utiles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " et ont ainsi répondu au moyen tiré du défaut de motivation au regard de l'article L. 426-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dont il n'a pas été fait application. Ils ont ainsi suffisamment motivé leur réponse à ce moyen.

Sur le refus de séjour :

3. Si Mme B... soutient que la décision est insuffisamment motivée en droit dès lors que le préfet n'a pas examiné sa demande au regard de l'article L. 426-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'établit pas avoir effectué une telle demande dans les trois mois suivant son entrée sur le territoire français, le préfet n'était donc pas tenu de motiver en droit un tel refus. Par ailleurs, la décision est suffisamment motivée en fait, le préfet n'était pas tenu de reprendre tous les éléments de la vie privée et familiale de Mme B... qu'elle estime lui être favorable. Par suite le moyen tiré du défaut de motivation est écarté.

4. Compte-tenu de la situation de Mme B... au regard du droit à l'entrée et au séjour en France, et eu égard à la motivation de la décision contestée, il n'est pas établi que le refus de titre de séjour n'a pas été précédé d'un examen particulier de la situation personnelle de l'intéressée.

5. En instituant le mécanisme de garantie de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, le législateur n'a pas permis de se prévaloir d'orientations générales dès lors que celles-ci sont définies pour l'octroi d'une mesure de faveur au bénéfice de laquelle l'intéressé ne peut faire valoir aucun droit, alors même qu'elles ont été publiées sur l'un des sites mentionnés à l'article D. 312-11 du même code. S'agissant des lignes directrices, le législateur n'a pas subordonné à leur publication sur l'un de ces sites la possibilité pour toute personne de s'en prévaloir, à l'appui d'un recours formé devant le juge administratif. Dès lors qu'un étranger ne détient aucun droit à l'exercice par le préfet de son pouvoir de régularisation, il ne peut utilement se prévaloir, sur le fondement de ces dispositions, des orientations générales contenues dans la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 pour l'exercice de ce pouvoir. Par suite, le moyen est écarté comme inopérant.

6. Mme B... n'était présente en France que depuis cinq ans à la date de la décision qu'elle conteste alors qu'elle a passé la majorité de son existence dans son pays d'origine, elle s'est maintenue sur le territoire français après avoir fait l'objet, le 17 août 2018, d'une décision du préfet de l'Isère portant obligation de quitter le territoire français, dont la légalité a été confirmée tant par un jugement du tribunal administratif de Grenoble du 28 mars 2019 que par un arrêt de la cour du 15 janvier 2020 et à laquelle elle s'est soustraite et rien ne s'oppose à ce qu'elle poursuive sa vie privée et familiale avec son mari et ses enfants dans leur pays d'origine, alors même que son mari a obtenu un titre de séjour pluriannuel postérieurement à la décision en litige et que son dernier fils n'a pas vécu en Inde. Ainsi, et alors même que Mme B... a réalisé des efforts pour s'insérer socialement, la décision contestée ne porte pas au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis. Elle ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. Aux termes de son article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile: " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'État. "

8. La carrière professionnelle du mari de la requérante et la scolarisation de ses enfants en France ne relèvent d'aucune nécessité impérieuse susceptible d'être regardée comme un motif humanitaire au sens des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition, et de l'erreur manifeste d'appréciation dirigé contre le refus de séjour, doit être écarté.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

9. Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.

10. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. " Toutefois, aucune circonstance ne fait obstacle à la poursuite de sa vie familiale hors de France. Dès lors, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de l'Ardèche n'aurait pas porté l'attention requise à l'intérêt supérieur de ses enfants. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant doit, par suite, être écarté.

Sur la fixation du délai de départ volontaire et du pays de destination :

11. Mme B... n'est pas fondée à soutenir que les décisions fixant le délai de départ volontaire et fixant le pays de destination doivent être annulées par voie de conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français.

12. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 26 octobre 2021. Dès lors, la requête de Mme B... doit dans l'ensemble de ses conclusions, y compris celles tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie en sera adressée au préfet de l'Ardèche.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2023 à laquelle siégeaient :

M. Seillet, président ;

M. Chassagne, premier conseiller ;

Mme Djebiri, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.

La rapporteure,

C. DjebiriLe président,

Ph. Seillet

La greffière,

A. Le Colleter

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 22LY02169

ap


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 22LY02169
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. SEILLET
Rapporteur ?: Mme Christine DJEBIRI
Rapporteur public ?: M. RIVIERE
Avocat(s) : LANTHEAUME

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-06;22ly02169 ?
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