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06/07/2023 | FRANCE | N°21LY02142

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre, 06 juillet 2023, 21LY02142


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Caratelli a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie, d'une part, dans les rôles de la commune de Crolles au titre des années 2014 à 2016 et, d'autre part, dans les rôles de la commune de Meyzieu au titre des années 2013 à 2016.

Par un jugement n° 1801696-1801889 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge de ces impositions.

Procédur

e devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2021, le ministre de l'économie,...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

La SAS Caratelli a demandé au tribunal administratif de Grenoble de prononcer la décharge des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie, d'une part, dans les rôles de la commune de Crolles au titre des années 2014 à 2016 et, d'autre part, dans les rôles de la commune de Meyzieu au titre des années 2013 à 2016.

Par un jugement n° 1801696-1801889 du 2 mars 2021, le tribunal administratif de Grenoble a prononcé la décharge de ces impositions.

Procédure devant la cour

Par une requête, enregistrée le 30 juin 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de remettre à la charge de la SAS Caratelli les suppléments de cotisations foncières des entreprises au titre des années 2013 à 2016 pour l'établissement de Meyzieu et au titre des années 2014 à 2016 pour l'établissement de Crolles.

Il soutient que :

- l'outillage spécialisé occupe, dans les établissements de la SAS Caratelli situés à Meyzieu et à Crolles, un rôle prépondérant au regard de l'activité qui y est déployée ;

- la vocation principale du site de Crolles est la fabrication, les bureaux concourant, au sens de l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts, à la même exploitation que l'unité de fabrication ;

- à supposer même qu'une activité mixte soit exercée dans l'établissement de Crolles, le critère de la prépondérance de l'outillage est rempli pour l'ensemble du site.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 octobre 2021, la SAS Caratelli, représentée par Me Coumert, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'économie, des finances et de la relance ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pin, premier conseiller,

- et les conclusions de Mme Lesieux, rapporteure publique ;

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Caratelli, qui exerce une activité de travaux d'installation de structures métalliques, chaudronnées et de tuyauterie, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle l'administration a estimé que deux établissements, situés l'un à Meyzieu (Rhône) et l'autre à Crolles (Isère) qu'elle prenait en location auprès, respectivement, de la SCI Monge et de la SCI du Rocher, revêtaient le caractère d'établissements industriels au sens des articles 1499 et 1500 du code général des impôts et l'a, en conséquence, assujettie à des cotisations supplémentaires de cotisation foncière des entreprises au titre des années 2013 à 2016 s'agissant de l'établissement situé à Meyzieu et au titre des années 2014 à 2016 s'agissant de l'établissement situé à Crolles. Le ministre de l'économie, des finances et de la relance relève appel du jugement du 2 mars 2021 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a déchargé la SAS Caratelli de ces impositions.

Sur le motif de décharge retenu par le tribunal administratif :

2. En vertu de l'article 1467 du code général des impôts, pour le calcul de la cotisation foncière des entreprises, la valeur locative des biens passibles d'une taxe foncière est calculée suivant les règles fixées pour l'établissement de cette taxe. Les règles suivant lesquelles est déterminée la valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties sont définies à l'article 1496 du code général des impôts pour les " locaux affectés à l'habitation ou servant à l'exercice soit d'une activité salariée à domicile, soit d'une activité professionnelle non commerciale au sens du 1 de l'article 92 ", à l'article 1498 pour " tous les biens autres que les locaux visés au I de l'article 1496 et que les établissements industriels visés à l'article 1499 " et à l'article 1499 pour les " immobilisations industrielles ". Revêtent un caractère industriel, au sens de ces articles, les établissements dont l'activité nécessite d'importants moyens techniques, non seulement lorsque cette activité consiste dans la fabrication ou la transformation de biens corporels mobiliers, mais aussi lorsque le rôle des installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre, fût-ce pour les besoins d'une autre activité, est prépondérant.

En ce qui concerne l'application de la méthode comptable pour l'établissement situé à Meyzieu :

3. Il résulte de l'instruction que la SAS Caratelli dispose, sur le site de Meyzieu pris en location auprès de la SCI Monge, de locaux constitués d'un atelier métallique, de deux bâtiments à usage de bureaux et de vestiaire, ainsi que d'une aire de circulation et de stationnement dans lesquels elle exerce principalement une activité de sidérurgie pour des équipements de radioprotection consistant en la préparation de panneaux par l'encollage de plaques de plomb sur des cadres métalliques, lesquels sont ensuite peints. Elle dispose, dans ces locaux, de divers outillages, notamment des presses plieuses, une poinçonneuse et une scie à ruban ainsi qu'un engin de levage à ventouse utilisant une force motrice. La valeur des immobilisations inscrites dans la comptabilité de l'entreprise en tant que " matériels industriels ", au compte 2154, au titre des exercices clos en 2011 à 2014, années de référence pour l'établissement des impositions en litige, était, s'agissant de l'établissement de Meyzieu supérieure à 72 000 euros en 2011, à 75 000 euros en 2012 et à 80 000 euros en 2013 et 2014. Si la SAS Caratelli fait valoir que son activité se déploie essentiellement sur des chantiers et non dans ses locaux de Meyzieu, où seulement trois à quatre personnes étaient employées, que la majorité de ses salariés intervient sur ces chantiers et qu'elle ne réalise, dans cet établissement, qu'une activité à partir de produits semi-finis, il convient de s'attacher à l'importance des moyens techniques de production dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est utilisé. Eu égard à la nature des installations en cause, à leur spécificité et à leur valeur, les moyens techniques que nécessite l'activité exercée dans le bâtiment doivent être regardés comme importants.

4. Dans le cadre de l'activité de radioprotection exercée dans l'établissement de Meyzieu, la SAS Caratelli assure, outre la préparation, l'usinage, l'assemblage et la peinture en atelier des éléments métalliques, la pose des équipements de radioprotection sur les chantiers. Elle dispose, dans les locaux en litige, composés de trois bâtiments distincts, de deux bâtiments à usage de bureaux et de vestiaire qui n'apparaissent pas être exclusivement dédiés à la fabrication des équipements métalliques de radioprotection. Elle ne peut, dès lors, être regardée comme se livrant exclusivement à la fabrication ou à la transformation de biens corporels mobiliers. Son établissement ne peut ainsi être regardé comme revêtant un caractère industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, que si le rôle des installations techniques, ainsi que des matériels et outillages qu'elle met en œuvre, peut être regardé comme prépondérant dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est utilisé.

5. Il résulte de l'instruction que les matériels et outillages décrits au point 3 permettent, en n'employant, ainsi que la société l'indique elle-même, qu'un très faible nombre de salariés, de préparer et d'assembler l'ensemble des éléments de structures métalliques des équipements de radioprotection qui seront posées sur les chantiers, cette activité représentant environ 15 % de son chiffre d'affaires. Ces moyens techniques, nonobstant la circonstance qu'ils ne représenteraient pas, au plan comptable, une part prépondérante du total des immobilisations servant à l'exploitation, jouent ainsi un rôle prépondérant dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est utilisé. Par suite, et sans que la société puisse utilement faire valoir que son activité consiste principalement dans la réalisation de travaux sur mesure et qu'elle ne dispose pas d'une chaîne d'assemblage automatisée, l'établissement dont dispose la SAS Caratelli à Meyzieu doit, comme l'a estimé l'administration, être qualifié d'industriel.

En ce qui concerne l'application de la méthode comptable pour l'établissement situé à Crolles :

6. Aux termes de l'article 1494 du code général des impôts : " La valeur locative des biens passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties, de la taxe d'habitation ou d'une taxe annexe établie sur les mêmes bases est déterminée, conformément aux règles définies par les articles 1495 à 1508, pour chaque propriété ou fraction de propriété normalement destinée à une utilisation distincte ". Aux termes de l'article 324 A de l'annexe III au code général des impôts, pour l'application des dispositions de l'article 1494 du même code, " on entend : 1° Par propriété normalement destinée à une utilisation distincte : (...) b. En ce qui concerne les établissements industriels, l'ensemble des sols, terrains, bâtiments et installations qui concourent à une même exploitation et font partie du même groupement topographique (...) ".

7. Il résulte de l'instruction que la SCI du Rocher donne en location des locaux situés à Crolles à la SAS Caratelli, qui y exerce une activité de préparation et d'assemblage de pièces métalliques destinés à des charpentes et de préfabrication de tuyauterie. Ces locaux d'une superficie totale de 2 040 m² sont constitués d'un atelier de 1 050 m², de locaux à usage de bureaux, de réfectoire et de vestiaire de 700 m² et d'un parking non couvert de 290 m². La société requérante dispose, pour les besoins de cette activité, de divers outillages, et notamment, de scies, de chanfreineuses, d'automates, de postes de soudure, d'un pont roulant, d'un compresseur, d'un centre d'usinage, de deux chariots élévateurs, de cintreuses, de presses plieuses, de plusieurs ponts roulants et d'une cabine automatisée de peinture. Ces moyens techniques, dont la valeur comptable s'élevait à 262 829 euros au 31 décembre 2012, 281 079 euros au 31 décembre 2013 et 532 079 euros au 31 décembre 2014, doivent être regardés comme importants.

8. La SAS Caratelli, outre la préparation et l'assemblage d'éléments métalliques pour former des sections de charpentes et de tuyauterie, assure la pose sur les chantiers de ces équipements. Elle dispose, dans les locaux en litige, outre d'un atelier, de locaux à usage de bureaux et de vestiaire qui n'apparaissent pas être exclusivement dédiés à la fabrication des éléments métalliques destinés à des charpentes et tuyauteries. Elle ne peut, dès lors, être regardée comme se livrant exclusivement à la fabrication ou à la transformation de biens corporels mobiliers. Son établissement ne peut ainsi être regardé comme revêtant un caractère industriel, au sens et pour l'application de l'article 1499 du code général des impôts, que si le rôle des installations techniques, ainsi que des matériels et outillages qu'elle met en œuvre, peut être regardé comme prépondérant dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est utilisé.

9. Il résulte de l'instruction que les locaux à usage d'atelier destiné à l'assemblage des charpentes et des tuyauteries occupent la majeure partie de l'immeuble. Les locaux à usage de bureaux et de vestiaire, qui concourent à la même exploitation que l'atelier et font partie du même groupement topographique, ne constituent pas une propriété destinée à une utilisation distincte au sens et pour l'application des dispositions citées au point 6. Les installations techniques, matériels et outillages mis en œuvre pour les besoins de cette activité, qui représente près de la moitié du chiffre d'affaires de la SAS Caratelli, permettent, en n'employant, ainsi que la société l'indique elle-même, qu'une petite partie des salariés, soit 7 sur un effectif de 80 employés environ sur le site de Crolles, d'assembler, de modifier et d'adapter des éléments métalliques pour construire des charpentes et équipements de tuyauterie qui seront installés sur les chantiers. Ces matériels et outillages, dont il ne résulte pas de l'instruction, eu égard à leur nature et à leur importance, qu'ils ne seraient utilisés, contrairement à ce que soutient la société intimée, qu'à titre marginal à des fins de reprise de malfaçons des équipements livrés par ses fournisseurs, doivent être regardés, ainsi que le relève le ministre en appel, comme jouant un rôle prépondérant dans les opérations pour lesquelles l'immeuble à évaluer est utilisé. Par suite, et sans que la société puisse utilement soutenir qu'elle ne procède pas à la fabrication complète des charpentes métalliques, qu'elle sous-traite une partie de l'activité de découpe et d'usinage et que ses employés sont majoritairement occupés sur les chantiers, les locaux dont dispose la société à Crolles revêtent un caractère industriel au sens de l'article 1499 du code général des impôts et leur valeur locative devait être déterminée, en application de l'article 1500 du même code, selon la méthode comptable définie à cet article.

10. Il suit de là que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a retenu que les établissements de Meyzieu et de Crolles ne revêtaient pas un caractère industriel.

11. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la SAS Caratelli devant le tribunal administratif.

Sur les autres moyens soulevés par la SAS Caratelli :

12. En premier lieu, lorsqu'une imposition est, telle la cotisation foncière des entreprises, assise sur la base d'éléments qui doivent être déclarés par le redevable, l'administration ne peut établir, à la charge de celui-ci, des droits excédant le montant de ceux qui résulteraient des éléments qu'il a déclarés qu'après l'avoir, conformément au principe général des droits de la défense, mis à même de présenter ses observations. Les dispositions de l'article L. 56 du livre des procédures fiscales, en vertu desquelles la procédure de redressement contradictoire prévue par les articles L. 55 à L. 61 de ce livre n'est pas applicable en matière d'impositions directes perçues au profit des collectivités locales, ont pour seul effet d'écarter cette procédure de redressement contradictoire mais ne dispensent pas du respect des obligations qui découlent du principe général des droits de la défense.

13. L'administration fiscale a informé la SAS Caratelli, à la suite de la vérification de comptabilité, de ce qu'elle envisageait de rehausser les bases d'imposition à la cotisation foncière des entreprises résultant de ses déclarations pour les années 2013 à 2016 s'agissant de l'établissement de Meyzieu et pour les années 2014 à 2016 s'agissant de l'établissement de Crolles, par une lettre du 22 juillet 2016. Cette lettre cite les textes applicables, indique que les établissements exploités par la SAS Caratelli à Meyzieu et à Crolles, dans lesquels la société exerce une activité de menuiserie métallique et de tuyauterie, revêtent un caractère industriel de sorte que la valeur locative cadastrale de ces locaux doit être déterminée selon la méthode comptable, précise les années d'imposition concernées et les bases d'imposition rectifiées et invite la société à faire valoir ses observations sur ces rectifications de bases imposables dans un délai de trente jours. Dans ces conditions, cette lettre contenait les motifs de droit et de fait sur lesquels l'administration s'est fondée pour opérer les rehaussements envisagés. En conséquence, la SAS Caratelli doit être regardée comme ayant été mise à même de présenter utilement ses observations conformément au principe général des droits de la défense.

14. En deuxième lieu, l'administration a, dans ses décisions 19 janvier 2018 rejetant les réclamations contentieuses de la société, justifié les suppléments de cotisation foncières des entreprises en litige au motif que les établissements en cause devaient être regardés comme industriels par nature. Ce motif, invoqué dans le cadre de la procédure contentieuse, et se rattachant, au demeurant, à la même base légale, a pu être régulièrement formulé par l'administration pour la première fois lors du rejet des réclamations contentieuses sans avoir privé la société de la possibilité de contester utilement les impositions litigieuses ni porté atteinte aux droits de la défense.

15. En troisième lieu, ainsi qu'il a été dit plus haut, la SCI du Rocher, qui n'est pas soumise aux obligations prévues à l'article 53 A du code général des impôts, a donné en location à la SAS Caratelli des bâtiments, situés à Crolles, pour les besoins de son activité industrielle. La société requérante, qui est soumise aux obligations déclaratives énoncées par ce même article, a procédé à la réalisation d'agencements fonciers sur ces biens pris à bail qu'elle a inscrits à l'actif de son bilan. L'administration a évalué la valeur locative de ces agencements en la calculant, non pas suivant les règles spécifiques définies à l'article 1498 du code général des impôts, mais selon la méthode comptable prévue à l'article 1499 de ce code pour les établissements industriels, ce que la société requérante conteste en relevant que l'ensemble immobilier constitue une unité foncière unique pour en déduire que les agencements doivent être évalués de manière identique aux constructions sauf à conduire à une double imposition.

16. Aux termes de l'article 1499 du code général des impôts, applicable au présent litige : " La valeur locative des immobilisations industrielles passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est déterminée en appliquant au prix de revient de leurs différents éléments, revalorisé à l'aide des coefficients qui avaient été prévus pour la révision des bilans, des taux d'intérêt fixés par décret en Conseil d'Etat (...) ". L'article 1500 du même code dispose notamment que les bâtiments et terrains industriels sont évalués selon les règles fixées à l'article 1499 lorsqu'ils figurent l'actif du bilan de leur propriétaire ou de leur exploitant et que celui-ci est soumis aux obligations définies à l'article 53 A et selon les règles fixées à l'article 1498 lorsque ces conditions ne sont pas satisfaites. Il résulte de ces dernières dispositions que, dès lors que le propriétaire ou l'exploitant de bâtiments et de terrains industriels passibles de la taxe foncière sur les propriétés bâties est soumis aux obligations déclaratives définies à l'article 53 A du code général des impôts et que ces immobilisations industrielles figurent à l'actif de son bilan, la valeur locative de ces immobilisations est établie selon les règles fixées à l'article 1499 du même code. Néanmoins, lorsque le propriétaire de ces bâtiments ou terrains industriels n'est pas soumis aux obligations prévues à l'article 53 A, à la différence de l'exploitant, et que ce dernier n'a inscrit à l'actif de son bilan qu'une partie des immobilisations afférentes à ces bâtiments ou terrains sans que cette inscription partielle procède d'une méconnaissance, par celui-ci, de ses obligations comptables, il y a lieu de n'appliquer la méthode comptable de l'article 1499 précité qu'à ces seuls éléments et de procéder, pour l'évaluation de la partie qui ne figure pas à l'actif du bilan de l'exploitant, selon la méthode prévue à l'article 1498 du code général des impôts, alors même que l'ensemble formerait une propriété destinée à une même utilisation, au sens des articles 1494 du code général des impôts et 324 A de l'annexe III à ce code.

17. Il suit de là que le moyen tiré de ce que la méthode comparative appliquée aux bâtiments appartenant à la SCI du Rocher aurait dû être mise en œuvre pour le calcul de la valeur locative des agencements réalisés par la SAS Caratelli dans ces bâtiments et inscrits à l'actif de son bilan ne peut qu'être écarté.

18. En dernier lieu, aux termes de l'article 1381 du code général des impôts : " Sont également soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties : 1° Les installations destinées à abriter des personnes ou des biens ou à stocker des produits ainsi que les ouvrages en maçonnerie présentant le caractère de véritables constructions tels que, notamment, les cheminées d'usine, les réfrigérants atmosphériques, les formes de radoub, les ouvrages servant de support aux moyens matériels d'exploitation ; (...) ". Les bâtiments mentionnés au 1° de l'article 1381 comprennent également les aménagements faisant corps avec eux.

19. La SAS Caratelli soutient qu'une partie des immobilisations inscrites à l'actif de son bilan relatives aux locaux qu'elle exploite à Meyzieu doit être exclue du champ d'application de la taxe foncière dès lors qu'elles présentent un caractère mobilier. Il résulte toutefois de l'instruction que ces immobilisations, qui concernant des cloisons, des faux plafonds ainsi que des rails d'allumage, font corps avec les bâtiments et forment un tout indissociable de la construction. Il suit de là que ces éléments de l'immeuble litigieux ne pouvaient pas être exclus des bases imposables à la cotisation foncière des entreprises mise à la charge de la SAS Caratelli.

20. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de la relance est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a déchargé la SAS Caratelli, en droits et pénalités, des suppléments de cotisation foncière des entreprises auxquels elle a été assujettie, d'une part, dans les rôles de la commune de Crolles au titre des années 2014 à 2016 et, d'autre part, dans les rôles de la commune de Meyzieu au titre des années 2013 à 2016.

Sur les frais liés au litige :

21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, dans la présente instance, la somme que demande la SAS Caratelli au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1801696-1801889 du tribunal administratif de Grenoble du 2 mars 2021 est annulé.

Article 2 : Les compléments de cotisation foncière des entreprises auxquels la SAS Caratelli a été assujettie d'une part, dans les rôles de la commune de Crolles au titre des années 2014 à 2016 et, d'autre part, dans les rôles de la commune de Meyzieu au titre des années 2013 à 2016, ainsi que les majorations correspondantes, sont remis à sa charge.

Article 3 : Les conclusions de la SAS Caratelli tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique et à la SAS Caratelli.

Délibéré après l'audience du 15 juin 2023, à laquelle siégeaient :

M. Pruvost, président de chambre,

Mme Courbon, présidente-assesseure,

M. Pin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2023.

Le rapporteur,

F.-X. Pin

Le président,

D. PruvostLa greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02142


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02142
Date de la décision : 06/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Analyses

19-03-045-03-01 Contributions et taxes. - Impositions locales ainsi que taxes assimilées et redevances.


Composition du Tribunal
Président : M. PRUVOST
Rapporteur ?: M. François-Xavier PIN
Rapporteur public ?: Mme LESIEUX
Avocat(s) : CABINET VIA JURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-06;21ly02142 ?
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