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04/07/2023 | FRANCE | N°21LY02872

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 04 juillet 2023, 21LY02872


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. J... D..., Mme V... I..., M. G... D..., Mme N... D..., Mme R... H..., Mme P... A..., Mme S... K..., Mme O... B..., M. F... D..., Mme C... M..., Mme E... W..., M. L... U... et Mme Q... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le maire de Villars a refusé d'accorder à la société Cogecoop un permis de construire pour l'édification de 29 logements individuels, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2

002432 du 29 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à leur ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. J... D..., Mme V... I..., M. G... D..., Mme N... D..., Mme R... H..., Mme P... A..., Mme S... K..., Mme O... B..., M. F... D..., Mme C... M..., Mme E... W..., M. L... U... et Mme Q... D... ont demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 7 octobre 2019 par lequel le maire de Villars a refusé d'accorder à la société Cogecoop un permis de construire pour l'édification de 29 logements individuels, ainsi que la décision implicite rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 2002432 du 29 juin 2021, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à leur demande d'annulation de ces décisions.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 août 2021 et le 11 avril 2022, la commune de Villars, représentée par Me Mouseghian, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 juin 2021 ;

2°) de rejeter la demande de M. D... et autres ;

3°) de mettre une somme de 3 000 euros à la charge de l'indivision D... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal a commis une erreur de droit en jugeant qu'un permis tacite était né le 11 octobre 2019 ;

- le refus est légalement fondé sur l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, le projet de construction nécessitant une extension du réseau public d'électricité, qui n'est pas programmée ;

- à titre subsidiaire, une substitution de motifs est sollicitée, fondée sur la méconnaissance de l'article UCb7 du règlement du plan local d'urbanisme, plus particulièrement par les maisons individuelles n° 17 et 1 avec la limite séparative nord et n° 18 à 20 avec la limite séparative ouest.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 novembre 2021, le 19 avril 2023, et le 12 mai 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. D... et autres, représentés par Me Petit, concluent à la confirmation du jugement et, à titre subsidiaire, à l'annulation du refus de permis de construire, et à ce que soit mise à la charge de la commune de Villars une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les moyens soulevés par la commune de Villars ne sont pas fondés, la décision contestée devant être qualifiée de retrait de permis tacite ;

- subsidiairement, le refus de permis de construire ne pouvait légalement être fondé sur l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, s'agissant d'un simple raccordement au réseau électrique, de travaux relevant de l'article L. 342-11 du code de l'énergie et ne nécessitant par suite aucune contribution financière pour la commune, et l'absence de servitude de passage ne pouvant être utilement invoquée ;

- la substitution de motifs sollicitée par la commune ne peut être accueillie, les dispositions de l'article UCb7 du règlement du plan local d'urbanisme n'étant pas méconnues, le calcul de la hauteur se faisant à l'égout du toit.

La cour a informé les parties le 16 mars 2023 de ce qu'elle pourrait retenir le vice tiré de ce que, dans l'hypothèse où la cour retiendrait que la décision de refus de permis de construire doit être regardée comme le retrait d'un permis de construire tacite, la commune se trouverait en situation de compétence liée au regard des dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, et, le cas échéant, de l'article UCb7 du règlement du PLU, pour retirer le permis de construire tacite, et que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de la procédure contradictoire serait inopérant.

La commune de Villars a produit des observations en réponse le 22 mars 2023.

M. D... et autres ont produit des observations en réponse le 23 mars 2023.

La cour a tenu le 24 mai 2023 une séance orale d'instruction sur le fondement de l'article R. 625-1 du code de justice administrative. Un compte-rendu a été dressé et communiqué aux parties.

M. D... et autres ont produit des observations en réponse le 2 juin 2023.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de l'énergie ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. François Bodin-Hullin, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Jean Simon Laval, rapporteur public ;

- les observations de Me Guérin substituant Me Mouseghian pour la commune de Villars ainsi que celles de Me Roussel substituant Me Petit pour M. D... et autres.

Considérant ce qui suit :

1. La société Cogecoop a sollicité un permis de construire pour l'édification de 29 maisons individuelles et groupées pour un total de 20 lots, pour une surface de plancher de 2 994,33 m², sur une parcelle cadastrée section ..., d'une superficie de 10 009 m², située rue de Rochefoy à Villars, au lieu-dit La Boutonne. Par un arrêté du 7 octobre 2019, le maire de Villars a refusé d'accorder ce permis de construire en se fondant sur les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, le projet nécessitant d'étendre le réseau électrique sans que les travaux n'aient été programmés, qu'un délai n'ait été fixé pour leur réalisation ou que la commune ne soit en mesure de prendre en charge le coût de cette extension. La commune de Villars relève appel du jugement du tribunal administratif de Lyon du 29 juin 2021 qui a fait droit à la demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la qualification de la décision en litige :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; / b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; (...) ". La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

3. Selon l'article R. 423-19 de ce code : " Le délai d'instruction court à compter de la réception en mairie d'un dossier complet. " En outre, aux termes de l'article R. 423-23 du même code : " Le délai d'instruction de droit commun est de : (...) b) Deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle (...). / c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire (...) ". Aux termes de l'article R. 423-41 dudit code : " Une demande de production de pièce manquante notifiée après la fin du délai d'un mois prévu à l'article R. 423-38 ou ne portant pas sur l'une des pièces énumérées par le présent code n'a pas pour effet de modifier les délais d'instruction définis aux articles R. 423-23 à R*423-37-1 et notifiés dans les conditions prévues par les articles R. 423-42 à R. 423-49. ". Aux termes de l'article R. 424-1 du même code : " A défaut de notification d'une décision expresse dans le délai d'instruction déterminé comme il est dit à la section IV du chapitre III ci-dessus, le silence gardé par l'autorité compétente vaut, selon les cas : (...) b) Permis de construire (...) ".

4. Il résulte des articles R. 423-22, R. 423-23, R. 423-38, R. 423-39, R. 423-41 et R. 424-1 du code de l'urbanisme qu'à l'expiration du délai d'instruction tel qu'il résulte de l'application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code relatives à l'instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. En application de ces dispositions, le délai d'instruction n'est ni interrompu, ni modifié par une demande, illégale, tendant à compléter le dossier par une pièce qui n'est pas exigée en application du livre IV de la partie réglementaire du code de l'urbanisme. Dans ce cas, une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite naît à l'expiration du délai d'instruction, sans qu'une telle demande puisse y faire obstacle.

5. Il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire déposée le 11 juillet 2019 par la société Cogecoop porte sur la réalisation de 29 maisons individuelles et groupées de quatre types différents. Par courrier du 22 juillet 2019, les services instructeurs de la commune ont sollicité la production du plan de toutes les façades avec l'indication du terrain naturel afin de déterminer le sol existant. La commune soutient dans sa requête, d'une part, que les plans de façades ne mentionnaient pas le terrain naturel existant, mention qui ne figurait que sur certains plans en coupe, qui n'identifiaient pas en outre clairement le numéro de logement en cause et dont tous n'avaient pas été produits, et, d'autre part, que les plans PC 5 (élévations 1 et 2) produits ne comportaient pas toutes les façades des constructions, et notamment celles des façades Sud pour les logements 3-6-9-16, des façades Nord pour les logements 4 et 7, des façades Nord et Sud pour les maisons individuelles 17 à 24, et elle ajoute enfin que les plans génériques produits ne lui permettaient pas d'apprécier l'implantation des différents bâtiments, le respect des règles de hauteur et des règles relatives à l'aspect extérieur et à l'insertion des bâtiments imposées par le règlement de la zone UCb. Le dossier déposé par la société pétitionnaire comprenait toutefois, à l'échelle, quatre planches graphiques représentant les façades nord, sud, est et ouest de chacune des typologies de logements projetés et un plan P5 élévations comportant toutes les façades, ainsi que, sur ce dernier plan ou d'autres plans produits comme les plans de masse ou de coupe, les indications nécessaires relatives au terrain naturel existant. Le courrier adressé le 22 juillet 2019 par le service instructeur de la commune sollicitant un plan de façade comportant l'indication du terrain naturel n'a dès lors pas interrompu le délai d'instruction de trois mois, sans que la commune puisse en tout état de cause utilement relever d'autres incomplétudes ou omissions qu'elle n'avait pas relevées dans son courrier de demande de pièces complémentaires.

6. Dans ces circonstances, la décision contestée du 7 octobre 2019, qui n'a été notifiée que le 14 octobre 2019, refusant le permis de construire à la société Cogecoop, doit être regardée comme rapportant le permis de construire tacitement accordé le 11 octobre 2019, à l'issue du délai d'instruction de trois mois suivant le dépôt du dossier complet.

Sur la légalité de la décision en litige :

7. En premier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 1, par arrêté du 7 octobre 2019, le maire de Villars a refusé d'accorder le permis de construire sollicité en se fondant sur les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme en ce que le projet nécessite d'étendre le réseau électrique sans que les travaux n'aient été programmés, qu'un délai n'ait été fixé pour leur réalisation ni que la commune ne soit en mesure de prendre en charge le coût de cette extension.

8. D'une part, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés. / Lorsqu'un projet fait l'objet d'une déclaration préalable, l'autorité compétente doit s'opposer à sa réalisation lorsque les conditions mentionnées au premier alinéa ne sont pas réunies. / Les deux premiers alinéas s'appliquent aux demandes d'autorisation concernant les terrains aménagés pour permettre l'installation de résidences démontables constituant l'habitat permanent de leurs utilisateurs. / Un décret en Conseil d'Etat définit pour ces projets les conditions dans lesquelles le demandeur s'engage, dans le dossier de demande d'autorisation, sur le respect des conditions d'hygiène et de sécurité ainsi que les conditions de satisfaction des besoins en eau, assainissement et électricité des habitants, le cas échéant, fixées par le plan local d'urbanisme. ". Lorsqu'un projet de construction nécessite des travaux d'extension des réseaux publics et que la commune n'est pas à même, à la date à laquelle elle se prononce, de fixer un délai pour la réalisation des travaux, elle est tenue, en application de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, de refuser le permis de construire.

9. D'autre part, selon l'article L. 332-15 du même code : " L'autorité qui délivre l'autorisation de construire, d'aménager, ou de lotir exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, du terrain aménagé ou du lotissement, notamment en ce qui concerne la voirie, l'alimentation en eau, gaz et électricité, les réseaux de télécommunication, l'évacuation et le traitement des eaux et matières usées, l'éclairage, les aires de stationnement, les espaces collectifs, les aires de jeux et les espaces plantés. / Les obligations imposées par l'alinéa ci-dessus s'étendent au branchement des équipements propres à l'opération sur les équipements publics qui existent au droit du terrain sur lequel ils sont implantés et notamment aux opérations réalisées à cet effet en empruntant des voies privées ou en usant de servitudes. / Toutefois, en ce qui concerne le réseau électrique, le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition est redevable de la part de la contribution prévue au troisième alinéa du II de l'article 4 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 (1) relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, correspondant au branchement et à la fraction de l'extension du réseau située sur le terrain d'assiette de l'opération, au sens de cette même loi et des textes pris pour son application. / L'autorisation peut également, avec l'accord du demandeur et dans les conditions définies par l'autorité organisatrice du service public de l'eau ou de l'électricité, prévoir un raccordement aux réseaux d'eau ou d'électricité empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures. / En cas de classement ultérieur dans la voirie et les réseaux publics, les travaux exigés au titre des équipements propres n'ouvrent pas droit à l'action en répétition prévue à l'article L. 332-30. / L'autorité qui approuve le plan de remembrement peut imposer les mêmes obligations aux associations foncières urbaines de remembrement autorisées ou constituées d'office. ".

10. Et, enfin, selon l'article L. 342-11 du code de l'énergie : " La contribution prévue à l'article L. 342-6 pour le raccordement des consommateurs au réseau de distribution est versée, dans des conditions, notamment de délais, fixées par les cahiers des charges des concessions ou les règlements de service des régies ou, à défaut, par décret en Conseil d'Etat, par les redevables mentionnés aux 1°, 2°, 3°, 4° et 5° suivants : 1° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération ayant fait l'objet d'un permis de construire, d'un permis d'aménager ou d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable, située en dehors d'une zone d'aménagement concerté et ne donnant pas lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels ou à la participation pour voirie et réseaux mentionnées à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution correspondant aux équipements mentionnés au troisième alinéa de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme est versée par le bénéficiaire du permis ou de la décision de non-opposition. / La part de contribution correspondant à l'extension située hors du terrain d'assiette de l'opération reste due par la commune ou l'établissement public de coopération intercommunale compétent pour la perception des participations d'urbanisme. / Toutefois, les coûts de remplacement ou d'adaptation d'ouvrages existants ou de création de canalisations en parallèle à des canalisations existantes afin d'en éviter le remplacement, rendus nécessaires par le raccordement en basse tension des consommateurs finals, ne sont pas pris en compte dans cette part. Ces coûts sont couverts par le tarif d'utilisation des réseaux publics de distribution mentionné à l'article L. 341-2 lorsque ce raccordement est effectué par le gestionnaire du réseau de distribution ; 2° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par une opération donnant lieu à la participation spécifique pour la réalisation d'équipements publics exceptionnels mentionnée à l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, la contribution est versée par le bénéficiaire de l'autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol ; 3° Lorsque l'extension est rendue nécessaire par l'aménagement d'une zone d'aménagement concerté, la contribution correspondant aux équipements nécessaires à la zone est versée par l'aménageur ; 4° Lorsque le propriétaire acquitte la participation pour voirie et réseaux en application de la dernière phrase du troisième alinéa de l'article L. 332-11-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014, directement à l'établissement public de coopération intercommunale ou au syndicat mixte compétent, ou lorsque le conseil municipal a convenu d'affecter au financement de ces travaux d'autres ressources avec l'accord de cet établissement public de coopération intercommunale ou de ce syndicat mixte, celui-ci est débiteur de la contribution relative à l'extension ; 5° Lorsque l'extension de ces réseaux est destinée au raccordement d'un consommateur d'électricité en dehors d'une opération de construction ou d'aménagement autorisée en application du code de l'urbanisme, la contribution correspondant à cette extension est versée par le demandeur du raccordement. ".

11. En vertu des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, les bénéficiaires d'autorisations de construire peuvent être tenus de réaliser et de financer les équipements propres à l'opération autorisée mentionnés à l'article L. 332-15. Il résulte de ces dispositions que seul peut être mis à la charge du bénéficiaire d'une autorisation de construire le coût des équipements propres à sa construction. Dès lors que des équipements excèdent, par leurs caractéristiques et leurs dimensions, les seuls besoins constatés, ils ne peuvent, par suite, être regardés comme des équipements propres au sens de l'article L. 332-15, leur coût ne peut être, même pour partie, supporté par le constructeur. Relèvent des équipements propres à l'opération ceux qui sont nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction ou du terrain jusqu'au branchement sur le réseau public qui existe au droit du terrain, en empruntant, le cas échéant, des voies privées ou en usant de servitudes, ou, dans les conditions définies au quatrième alinéa de l'article L. 332-15 précité, en empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve dans ce dernier cas que le raccordement n'excède pas cent mètres. En revanche, pour l'application de ces dispositions, les autres équipements de raccordement aux réseaux publics, notamment les ouvrages d'extension et, le cas échéant, le renforcement des réseaux existants, ont le caractère d'équipements publics.

12. En l'espèce, il ressort d'une lecture combinée des pièces du dossier, éclairées par la séance orale d'instruction tenue par la cour et dont le compte-rendu a été communiqué aux parties, d'une part que la société ENEDIS entend simplement renforcer la charge du compteur électrique existant et, d'autre part, que le projet ne nécessite de créer, en dehors du terrain d'assiette du projet, qu'une ligne de raccordement électrique passant sous la voie publique, d'une longueur inférieure à cent mètres, et dont la charge peut être supportée par le pétitionnaire en application des dispositions précitées au titre des équipements propres de l'opération, l'ensemble n'étant enfin destiné qu'aux besoins exclusifs du projet en litige et n'étant pas destiné à desservir d'autres constructions existantes ou futures. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier, eu égard à ces caractéristiques, que l'autorité compétente devrait supporter une extension ou un renforcement des réseaux publics de distribution d'électricité pour assurer la desserte du projet en litige ni ne pourrait indiquer dans quel délai et par quelle personne le raccordement et la modification du transformateur seront pris en charge.

13. Il suit de là que la commune de Villars ne pouvait légalement se fonder sur les dispositions de cet article L. 111-11 du code de l'urbanisme pour refuser le permis de construire sollicité.

14. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable. ". Aux termes de l'article L. 211-2 du même code : " (...) doivent être motivées les décisions qui : / (...) 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits ; (...) ".

15. La décision portant retrait d'un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle doit, par suite, être précédée d'une procédure contradictoire, permettant au titulaire du permis de construire d'être informé de la mesure qu'il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d'un délai suffisant pour présenter ses observations. Les dispositions précitées font également obligation à l'autorité administrative de faire droit, en principe, aux demandes d'audition formées par les personnes intéressées en vue de présenter des observations orales, alors même qu'elles auraient déjà présenté des observations écrites. Ce n'est que dans le cas où une telle demande revêtirait un caractère abusif qu'elle peut être écartée.

16. Le respect du caractère contradictoire de la procédure prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l'administration constitue une garantie pour le titulaire de la décision de non-opposition à déclaration préalable que l'autorité administrative entend retirer. Eu égard à la nature et aux effets d'un tel retrait, le délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme oblige l'autorité administrative à mettre en œuvre cette procédure de manière à éviter que le bénéficiaire du permis de construire ne soit privé de cette garantie.

17. En l'espèce, il est constant qu'aucune procédure contradictoire n'est intervenue préalablement au retrait du permis de construire tacite, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, qui est une formalité substantielle.

18. En dernier lieu, la décision de retrait contestée étant entachée d'illégalité en raison de la méconnaissance de la procédure contradictoire, la commune ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article UCb7 du règlement du plan local d'urbanisme, étant relevé que le retrait d'un permis de construire illégal n'est qu'une simple faculté en l'absence de demande d'un tiers. Il ne peut ainsi être fait droit à la demande de substitution de motifs présentée sur ce fondement.

19. Il résulte de ce qui précède que la commune de Villars n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a fait droit à la demande de M. D... et autres.

Sur les frais liés au litige :

20. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par l'ensemble des parties au titre des frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Villars est rejetée.

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Villars, à M. J... D..., désigné comme représentant unique des intimés en application de l'article R. 751-3 du code de justice administrative. Copie en sera adressée à la société Cogecoop.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2023 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

M. François Bodin-Hullin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 juillet 2023.

Le rapporteur,

F. Bodin-Hullin

La présidente,

M. T...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 21LY02872


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21LY02872
Date de la décision : 04/07/2023
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: M. François BODIN-HULLIN
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : ADALTYS AFFAIRES PUBLIQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 10/08/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2023-07-04;21ly02872 ?
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