La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/06/2013 | FRANCE | N°13LY00544

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3ème chambre - formation à 3, 27 juin 2013, 13LY00544


Vu la requête, enregistrée à la Cour le 1er mars 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202463-1202464, du 31 janvier 2013, du Tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne, du 4 octobre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmenti

onnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temp...

Vu la requête, enregistrée à la Cour le 1er mars 2013, présentée pour M. A...B..., domicilié... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1202463-1202464, du 31 janvier 2013, du Tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de l'Yonne, du 4 octobre 2012, lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et désignant le pays à destination duquel il serait reconduit ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Yonne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard et, durant cet examen, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au profit de son conseil, en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Il soutient que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour n'est pas motivée en droit et est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation ; que la décision fixant le pays de destination, qui prescrit son éloignement dans un pays dont sa concubine n'a pas la nationalité, est entachée d'un défaut d'examen particulier de sa situation et provoquerait un éclatement de la cellule familiale ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré à la Cour le 24 mai 2013, présenté pour le préfet de l'Yonne qui conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge du requérant de la somme de 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que la décision de refus de délivrance de titre de séjour contestée est régulièrement motivée ; que la décision désignant le pays de renvoi a été prise après examen de la situation personnelle du requérant et ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'enfin, il n'est pas établi que son épouse et lui ne seraient pas légalement admissibles dans le même pays ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public,

- et les observations de Me Blanchon, avocat du préfet de l'Yonne ;

Sur la décision de refus de délivrance de titre de séjour :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision en litige a été prise en réponse à la demande d'admission au séjour au titre de l'asile présentée par M.B..., de nationalité serbe ; que sa demande d'admission au bénéfice de l'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 9 août 2011, confirmée le 26 mars 2012 par la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande de réexamen de sa demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, par décision du 12 juin 2012 ; que, dès lors que le bénéfice de la protection subsidiaire ou la reconnaissance de la qualité de réfugié avait été refusé au requérant, le préfet de l'Yonne était tenu de refuser à ce dernier la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-13 ou du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans avoir à porter une appréciation sur les faits de l'espèce ; que le préfet de l'Yonne se trouvant ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, les moyens tirés du défaut de motivation en droit et du défaut d'examen particulier de la situation de M. B...ne sont pas opérants ; qu'en conséquence, ces moyens doivent être écartés ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour par décision du préfet de l'Yonne, du 4 octobre 2012 ; qu'ainsi, à la date de la décision d'éloignement contestée du même jour, il était dans le cas prévu par les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où le préfet peut faire obligation à un étranger de quitter le territoire français ;

Sur la décision désignant le pays de destination :

4. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de l'Yonne se serait abstenu de procéder à un examen particulier de la situation de M. B...avant de fixer le pays de renvoi ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

6. Considérant que la décision du 4 octobre 2012 par laquelle le préfet de l'Yonne a désigné le pays à destination duquel M. B...pourrait être éloigné d'office mentionne que l'intéressé, de nationalité serbe, pourra être reconduit d'office à destination du pays dont il a la nationalité ou de tout autre pays où il établirait être légalement admissible ; que l'arrêté similaire concernant sa concubine prévoit que cette dernière, de nationalité kosovare, pourra être reconduite d'office à destination du pays dont elle a la nationalité ou de tout autre pays où elle établirait être légalement admissible ; que chacun des deux arrêtés, faute de limiter l'éloignement de l'étranger vers les pays où son concubin ainsi que ses enfants sont légalement admissibles, permet de renvoyer les concubins dans des pays différents, ce qui aurait nécessairement pour effet de séparer, même provisoirement, les membres de la cellule familiale ; qu'ainsi, la décision fixant le pays à destination duquel M. B...pourrait être éloigné d'office, en tant qu'elle rend possible son éloignement dans un pays différent de celui à destination duquel sa concubine pourrait être reconduite d'office, porte à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts poursuivis et méconnaît, par suite, les stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que cette décision doit donc être annulée dans cette mesure ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 4 octobre 2012 fixant le pays de renvoi, en tant qu'elle rend possible son éloignement dans un pays différent de celui à destination duquel sa concubine pourrait être reconduite d'office ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Yonne de délivrer un titre de séjour à M. B...ou de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation administrative doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat quelque somme que ce soit au profit de M.B..., sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions du préfet de l'Yonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre quelque somme que ce soit à la charge du requérant, au profit de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1202463-1202464, rendu le 31 janvier 2013 par le Tribunal administratif de Dijon est annulé en ce qu'il a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Yonne, du 4 octobre 2012, désignant le pays à destination duquel il serait reconduit d'office, en tant que cette décision rend possible son éloignement dans un pays différent de celui à destination duquel sa concubine pourrait être elle-même reconduite d'office.

Article 2 : La décision du préfet de l'Yonne, du 4 octobre 2012, désignant le pays à destination duquel serait reconduit M. B...est annulée en tant que cette décision rend possible son éloignement dans un pays différent de celui à destination duquel sa concubine pourrait être elle-même reconduite d'office.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par le préfet de l'Yonne sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de l'Yonne.

Délibéré après l'audience du 13 juin 2013 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Rabaté, président assesseur,

M. Clément, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2013,

''

''

''

''

1

5

N° 13LY00544


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13LY00544
Date de la décision : 27/06/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : DUFAY-SUISSA-CORNELOUP-WERTHE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-06-27;13ly00544 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award