Vu la requête, enregistrée le 8 août 2012, présentée pour la commune d'Avrieux (73500), représentée par son maire en exercice ;
La commune d'Avrieux demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800135 du 8 juin 2012 en tant que le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser à Mme B...une somme de 4 930 euros en réparation des préjudices résultant pour elle d'infiltrations d'eau dans sa maison depuis la voie publique ;
2°) de rejeter la demande de Mme B...devant le Tribunal et, subsidiairement, d'exonérer la commune d'au moins 50 % des conséquences dommageables des infiltrations et encore plus subsidiairement, condamner la société Sacer Sud Est à la relever et garantir de toute condamnation à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de Mme B...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- il est impossible de dissocier les dommages consécutifs aux seules infiltrations d'eau de la vétusté des locaux elle-même ;
- les dommages sont très localisés ;
- ni l'existence des préjudices, ni leur quantum ne sont démontrés ;
- la condamnation prononcée par le Tribunal équivaut à une véritable amélioration de l'étanchéité qui n'a jamais été réalisée par l'intéressée ;
- le lien de causalité entre le défaut d'étanchéité et les travaux reprochés à la commune n'est pas démontré ;
- aucun préjudice de jouissance n'est établi, ni d'ailleurs le lien de causalité avec les travaux ;
- la faute de la victime, qui est propriétaire de son immeuble depuis 1991, a contribué à la survenance du dommage ;
- le merlon mis en place en 2005 a été mal réalisé et la société Sacer Sud Est a donc contribué à la survenance du dommage ;
- sa responsabilité est engagée au titre de la garantie décennale ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire, enregistré le 27 septembre 2012, présenté pour Mme A...B..., domiciliée..., qui conclut au rejet de la requête, à ce que la commune d'Avrieux soit condamnée à réaliser les travaux préconisés par l'expert sous astreinte de 150 euros par jour de retard ainsi qu'à lui verser des indemnités de 5 500 euros HT au titre des travaux de réfection du bâtiment et de 10 000 euros pour les troubles de jouissance et qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Avrieux sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- à la date de saisine du Tribunal, malgré le protocole du 21 octobre 2005, l'enrobé n'avait toujours pas été repris et la grille de récupération des eaux pas installée ;
- les travaux d'enrobé ont été mal réalisés et les désordres en résultant s'élèvent à 5 550 euros ;
- la grille de ventilation autrefois existante a été obstruée lors de la mise en place d'un nouvel enrobé rue "Vie Neuve " et le bâtiment a supporté outre les eaux collectées par cette dernière voie, celles provenant de la route reliant l'église au pont sur l'Arc ;
Vu l'ordonnance du 12 février 2013 fixant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture de l'instruction au 1er mars 2013 ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 février 2013, présenté pour la société Sacer Sud Est, qui conclut à la confirmation du jugement attaqué et, subsidiairement, au rejet des conclusions d'appel en garantie dirigées à son encontre ainsi que, en toute hypothèse, à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de la commune d'Avrieux au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- l'appel en garantie est irrecevable, tout rapport contractuel avec le maître de l'ouvrage ayant cessé ;
- aucun lien de causalité n'est démontré entre le dommage et les travaux réalisés ;
- le dommage a pour origine une faute exclusive de la commune ;
Vu le courrier du 4 mars 2013 par lequel, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, les parties ont été informées de ce qu'était susceptible d'être soulevé d'office le moyen tiré de ce que les conclusions de la commune d'Avrieux tendant à mettre en cause la garantie décennale de la société Sacer Sud Est étaient irrecevables car nouvelles en appel ;
Vu l'ordonnance du 4 mars 2013 reportant, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, la date de clôture de l'instruction au 22 mars 2013 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code civil ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 mars 2013 :
- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;
- et les observations de Me Cordel, avocat de Mme B...et de Me Lapessé, avocat de la société Sacer Sud Est ;
1. Considérant que Mme B...est propriétaire sur le territoire de la commune d'Avrieux d'une maison d'habitation implantée en bordure d'une voie communale dénommée " Vie Neuve ", située en surplomb ; qu'à la suite d'infiltrations d'eau dans sa maison, qu'elle impute à cette voie, elle a obtenu de la commune qu'elle s'engage, dans un protocole d'accord signé le 21 octobre 2005, à remédier à ces désordres avant la fin du mois de décembre 2005 par la pose d'une grille de récupération des eaux en partie supérieure de la voie et la réalisation d'un " merlon " en goudron de 40 cm de large le long du bâtiment pour renvoyer les eaux à l'écart de la façade ; que malgré une mise en demeure adressée à la commune le 20 avril 2006, seuls les travaux d'enrobé ont été réalisés, qui se sont avérés défectueux ; qu'à la demande de Mme B..., le juge des référés du Tribunal administratif de Grenoble a désigné un expert qui a remis son rapport le 30 octobre 2007, la commune ayant, entre temps, mis en place une grille de récupération des eaux ; que, par un jugement du 8 juin 2012, le Tribunal a condamné la commune à payer à Mme B...une indemnité de 4 930 euros en réparation des frais de réparation des désordres résultant des infiltrations et de ses troubles de jouissance et a fait injonction à la commune de procéder à la réfection du " merlon " conformément aux préconisations de l'expert ; que la commune, qui relève appel de ce jugement uniquement en tant que le Tribunal a retenu sa responsabilité, conclut, à titre principal, à sa mise hors de cause et, subsidiairement à ce qu'elle soit garantie par la société Sacer Sud Est ; que Mme B...demande incidemment la majoration de l'indemnité allouée et que la société Sacer Sud Est conclut à sa mise hors de cause ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert, que les infiltrations d'eau dont se plaint Mme B...ont principalement pour origine d'importants ruissellements d'eau qui se produisent en périodes d'intempéries, provenant en partie de la route reliant l'église au pont d'Arc, située en amont de son débouché sur la voie " Vie Neuve " et qui, du fait du dévers de la chaussée de cette dernière voie, sont détournés contre le mur de façade de sa maison ; que si, comme le prévoyait le protocole d'accord du 21 octobre 2005, la commune a finalement installé en 2007 une grille de récupération des eaux en amont de la propriété, l'expert relève que le " merlon " réalisé en 2005, qui adhère mal au revêtement enrobé de la chaussée de la voie " Vie Neuve ", ne peut correctement canaliser ces eaux de ruissellement en les éloignant de la façade ; que bien que ne disposant pas, compte tenu de son ancienneté, de protections spécifiques contre toutes les infiltrations d'eau, la maison de Mme B...se trouve ainsi exposée, selon l'expert, à des ruissellements d'eau excédant ceux qu'elle devrait normalement supporter si seules étaient en cause les eaux collectées par la voie " Vie Neuve " ; que le dommage anormal en résultant pour MmeB..., qui a la qualité de tiers par rapport à la voie publique, est donc de nature à engager la responsabilité de la commune d'Avrieux à son égard ;
3. Considérant que si le bâtiment de MmeB..., comme toute construction ancienne, ne dispose pas de revêtement d'étanchéité sur la face extérieure des murs enterrés et se trouve ainsi soumis à des migrations d'eau à travers la maçonnerie, il résulte de l'instruction que l'exposition de ce bâtiment au surcroît de masses d'eau collectées par la route reliant l'église au " pont sur l'Arc ", et donc l'aggravation des dommages consécutifs à l'apport d'eau depuis la voie publique, est du seul fait de la commune ; qu'au demeurant, les infiltrations en provenance de cette voie sont apparues au fils du temps, le goudron disposé contre la façade s'étant rétracté, sans pouvoir être précisément datées ; que, dans ces conditions, la commune n'est pas fondée à soutenir que MmeB..., en ne se manifestant qu'en 2005, alors qu'elle était propriétaire de la maison depuis 1991, aurait commis une faute exonératoire de sa responsabilité, même partiellement ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les infiltrations d'eau consécutives à la configuration de la voie publique imposent un renforcement des conditions d'étanchéité du mur enterré de la maison de MmeB... ; qu'en fixant à 2 930 euros le montant des travaux mis à la charge de la commune, le Tribunal ne s'est pas, en l'espèce, livré à une appréciation inexacte de ce chef de préjudice ;
5. Considérant que si du fait, notamment, de leur vétusté, de leur manque de ventilation et de l'absence de tout dispositif d'étanchéité sur la face extérieure des murs, les locaux en sous-sol de la maison de MmeB..., en particulier le séjour et la cuisine, souffrent de dégradations provoquées par l'humidité ambiante des lieux, il résulte de l'instruction que le surcroît d'infiltrations généré par les conditions d'écoulement des eaux sur la voie publique en a aggravé l'état ; que c'est par une juste appréciation des circonstances de l'espèce que le Tribunal a arrêté à la somme de 2 000 euros le montant de l'indemnité mise à la charge de la commune au titre des troubles de jouissance endurés par MmeB... ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, la commune d'Avrieux n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à payer la somme de 4 930 euros à MmeB... ; que, d'autre part, celle-ci n'est pas fondée à demander la majoration de cette indemnité ;
7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir l'injonction aux fins de réalisation des travaux prononcée par le Tribunal à l'encontre de la commune d'Avrieux d'une astreinte ;
8. Considérant que devant le Tribunal, la commune d'Avrieux, qui se bornait à appeler en garantie la société Sacer Sud Est en soutenant que le " merlon " réalisé par cette dernière était défectueux, n'a présenté aucune conclusion à fin de condamnation de cette société en application des principes dont s'inspirent les dispositions des articles 1792 et 2270 du code civil ; que ses conclusions tendant à la condamnation de cette société au titre de la garantie décennale, qu'elle présente devant la Cour, qui sont nouvelles en appel, sont donc irrecevables ;
9. Considérant que les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 809,62 euros, doivent être laissés à la charge de la commune d'Avrieux ;
10. Considérant que les conclusions de la commune d'Avrieux, qui est la partie perdante dans la présente instance, tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune d'Avrieux le paiement à Mme B...d'une somme de 1 000 euros et la même somme à la société Sacer Sud Est, sur ce même fondement ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la commune d'Avrieux est rejetée.
Article 2 : La commune d'Avrieux versera à Mme B...une somme de 1 000 euros et à la société Sacer Sud Est une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions de Mme B...est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune d'Avrieux, à Mme A...B...et à la société Sacer Sud Est.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2013 à laquelle siégeaient :
M. Clot, président de chambre,
M. Seillet, président-assesseur,
M. Picard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 18 avril 2013.
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N° 12LY02243