La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2011 | FRANCE | N°10LY02169

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 24 novembre 2011, 10LY02169


Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2010, présentée pour la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON, dont le siège est 70 quai Charles de Gaulle à Lyon (69006) ;

La SOCIETE GRAND CASINO DE LYON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807256 du 29 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 août 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspectrice du travail du Rhône en date du 20 février 2008

autorisant le licenciement de Mme A, salariée protégée ;

2°) d'annuler cett...

Vu la requête, enregistrée le 7 septembre 2010, présentée pour la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON, dont le siège est 70 quai Charles de Gaulle à Lyon (69006) ;

La SOCIETE GRAND CASINO DE LYON demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0807256 du 29 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 14 août 2008 par laquelle le ministre du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité a annulé la décision de l'inspectrice du travail du Rhône en date du 20 février 2008 autorisant le licenciement de Mme A, salariée protégée ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) d'enjoindre à l'administration de réexaminer sa demande d'autorisation de licenciement de Mme A ;

4°) de mettre à la charge de Mme A une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- la décision du ministre est entachée d'une erreur de visa ;

- cette décision n'est pas suffisamment motivée, car ne mentionnant pas les propositions de reclassement interne faites à Mme A et n'ayant pas tenu compte des activités d'un casino ni repris l'ensemble des démarches entreprises pour ce reclassement ;

- le Tribunal n'a pas répondu aux arguments soulevés à l'appui du moyen tiré d'une insuffisance de motivation ;

- cinq propositions de postes en interne, en journée, ont été faites à Mme A qui les a refusées en raison notamment d'une rémunération insuffisante ;

- l'intéressée a limité un éventuel reclassement en externe à la région Rhône-Alpes, souhaitant un reclassement au casino de la Tour de Salvagny ;

- aucun poste compatible avec ses compétences et son état de santé n'était disponible dans ce dernier casino ni d'ailleurs dans la région ou dans la Loire ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 janvier 2011, présenté pour Mme Soraya A, domiciliée 58 E rue Carnot à Saint-Fons (69190), qui conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- l'erreur de visa commise par le ministre est purement matérielle ;

- la décision ministérielle, qui vise le caractère incomplet de la décision de l'inspecteur du travail, l'inaptitude à un travail de nuit et l'absence de recherche exhaustive de reclassement, est suffisamment motivée ;

- rien ne permet de justifier d'une recherche exhaustive de reclassement, notamment dans les hôtels ou sociétés thermales du groupe ;

Vu le mémoire, enregistré le 24 janvier 2011, présenté par la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON, qui conclut aux mêmes fins que le requête par les mêmes moyens ;

Elle soutient en outre que le mémoire produit par Mme A ne pouvait donner lieu à réouverture de l'instruction et à communication ;

Vu l'ordonnance du 14 décembre 2010, prise sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative, fixant au 14 janvier 2011 la date de clôture de l'instruction ;

Vu l'ordonnance en date du 21 janvier 2011, prise sur le fondement de l'article R. 613-4 du code de justice administrative, portant réouverture de l'instruction ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 novembre 2011 :

- le rapport de M. Picard, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

Considérant que Mme A était salariée de la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON depuis le 1er avril 2000, occupait le poste de chef de partie boule, et exerçait les fonctions de déléguée syndicale désignée le 17 juin 2006 et de membre du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail depuis le 26 juillet 2007 ; que le 30 octobre 2007, le médecin du travail l'a déclarée inapte au travail régulier de nuit et a proposé son reclassement sur un poste de jour ; que compte tenu du refus opposé par Mme A à ces propositions de reclassement et jugeant qu'aucun poste de reclassement n'était plus disponible, la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON a engagé une procédure de licenciement de l'intéressée ; que par une décision du 20 février 2008, l'inspectrice du travail a autorisé le licenciement de Mme A, qui a été prononcé le 26 février suivant pour impossibilité de reclassement faisant suite à une inaptitude ; que sur recours hiérarchique de l'intéressée, le ministre du travail a, par une décision du 14 août 2008, annulé la décision de l'inspectrice du travail et refusé l'autorisation de la licencier ; que la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON a contesté la décision ministérielle devant le Tribunal administratif de Lyon qui, par un jugement du 29 juin 2010, a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'en estimant que la décision litigieuse était suffisamment motivée dès lors qu'elle précisait que cette société n'avait pas valablement satisfait à l'obligation lui incombant de rechercher les possibilités de reclasser Mme A, les premiers juges ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré du manque de motivation de cette décision ; qu'en particulier, pour se prononcer sur le caractère suffisant de la motivation de cette décision, le Tribunal n'était pas tenu de répondre aux arguments tirés par la société requérante de ce que le ministre n'avait pas mentionné la spécificité de l'activité du casino ou les démarches entreprises pour rechercher un poste dans le groupe ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le jugement attaqué serait irrégulier ne peut qu'être écarté ;

Sur la légalité de la décision ministérielle :

Considérant que si la décision en litige mentionne par erreur que la décision de l'inspecteur du travail a été prise le 20 avril 2008 au lieu du 20 février 2008, cette erreur matérielle reste, dans les circonstances de l'espèce, sans incidence sur sa légalité ;

Considérant que le ministre, après avoir cité les dispositions applicables et relevé que l'inaptitude de Mme A à un poste de travail de nuit était avérée, a motivé sa décision en considérant que les deux propositions de reclassement faites à cette dernière le 9 novembre 2007 emportaient une déqualification et que, quelle que soit la position restrictive qu'elle avait adoptée dans un courrier du 26 novembre 2007, l'employeur n'était pas dispensé de la poursuite d'une recherche exhaustive de reclassement au sein de l'ensemble du groupe Partouche auquel appartient l'entreprise, ou à tout le moins, dans l'ensemble de ses entreprises de tous les départements de la région Rhône-Alpes, de telle sorte qu'il ne pouvait être regardé comme ayant totalement satisfait à l'obligation de reclassement qui lui incombait ; que cette décision, qui précise les éléments de droit et les circonstances de fait sur lesquelles elle s'appuie, est suffisamment motivée alors même qu'elle ne vise pas expressément les propositions de reclassement interne faites à Mme A, les démarches entreprises pour rechercher un poste dans le groupe ou la spécificité de l'activité du casino ;

Considérant qu'aux termes de L. 122-24-4 du code du travail, alors applicable : A l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident, si le salarié est déclaré par le médecin du travail inapte à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur est tenu de lui proposer un autre emploi approprié à ses capacités, compte tenu des conclusions écrites du médecin du travail et des indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; qu'il appartient à l'inspecteur du travail, et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si l'inaptitude du salarié est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé, compte tenu des possibilités de reclassement du salarié dans l'entreprise ou d'adaptation de son poste de travail ;

Considérant que les postes que la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON a proposés à Mme A dans le casino qu'elle gère, dont deux lors de sa mise en inaptitude définitive, comportaient des qualifications ainsi qu'une rémunération moindres, et que les démarches que la société requérante a effectuées auprès de deux sociétés du groupe Partouche auquel elle appartient, situées dans la région Rhône-Alpes, sont restées sans résultat ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait entrepris de rechercher dans toutes les entreprises du groupe, même en région Rhône-Alpes, un emploi équivalent à celui que Mme A occupait précédemment et compatible avec ses aptitudes physiques ; qu'ainsi, et alors même que le 26 novembre 2007, Mme A avait indiqué qu'elle ne souhaitait pas travailler en dehors de la région Rhône-Alpes, c'est légalement que le ministre a refusé l'autorisation de licencier l'intéressée ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal a rejeté sa demande ; que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de la requête tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de réexaminer la demande d'autorisation de licenciement de Mme A doivent être rejetées ; que les conclusions qu'elle a formées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge le paiement à Mme A d'une somme de 1 500 euros sur ce même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON est rejetée.

Article 2 : La SOCIETE GRAND CASINO DE LYON versera à Mme A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SOCIETE GRAND CASINO DE LYON, au ministre du travail, de l'emploi et de la santé et à Mme A Soraya.

Délibéré après l'audience du 3 novembre 2011 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

Mme Steck-Andrez, président-assesseur,

M. Picard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 novembre 2011.

''

''

''

''

1

2

N° 10LY02169


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07 Travail et emploi. Licenciements.


Références :

Publications
RTFTélécharger au format RTF
Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Vincent-Marie PICARD
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : ALART ET ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 24/11/2011
Date de l'import : 02/07/2015

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 10LY02169
Numéro NOR : CETATEXT000024910335 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2011-11-24;10ly02169 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award