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19/05/2010 | FRANCE | N°09LY01566

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2ème chambre - formation à 3, 19 mai 2010, 09LY01566


Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2009 à la Cour, présentée pour Mme Falka A, domicilié ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900420, en date du 28 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Nièvre, du 21 janvier 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour

elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était f...

Vu la requête, enregistrée le 7 juillet 2009 à la Cour, présentée pour Mme Falka A, domicilié ... ;

Mme A demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0900420, en date du 28 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Nièvre, du 21 janvier 2009, portant refus de délivrance d'un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai d'un mois et désignation du pays à destination duquel elle serait reconduite à l'expiration de ce délai, à défaut pour elle d'obtempérer à l'obligation de quitter le territoire français qui lui était faite ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, les décisions susmentionnées ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Nièvre de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale avec autorisation de travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient remplir les conditions prévues à l'article 7 de la directive européenne n° 2004/38 du 29 avril 2004 permettant de bénéficier d'un droit au séjour de plus de trois mois en France ; que, dès lors que ses attaches familiales se situent en France où résident sa fille et son conjoint, qui ont tous les deux la nationalité belge, les décisions contestées ont porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que les mêmes décisions, dont l'exécution entraînerait la séparation de son enfant de l'un de ses parents, ont méconnu les stipulations des articles 3-1, 7-1 et 9-1 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 7 septembre 2009, présenté par le préfet de la Nièvre, qui conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que Mme A n'établit pas qu'elle est entrée en France le 28 décembre 2008 pour rejoindre son compagnon ; qu'elle n'a pas sollicité un titre de séjour du fait de la présence de son concubin en France ; qu'à la date de la décision attaquée, la requérante n'établit pas que son compagnon exerçait une activité professionnelle en France ; que si la requérante allègue s'être mariée avec son concubin selon le droit coutumier africain, ce type de mariage n'est pas reconnu par les autorités administratives en France ; que le dossier de demande de titre ne contenait aucun élément relatif à un projet de mariage et qu'à la date de l'arrêté en litige, Mme A n'était pas mariée avec son compagnon ; qu'un projet de mariage civil a été déposé à la mairie de Nevers le 23 février 2009 et qu'à la date du présent mémoire, elle n'est toujours pas mariée ; qu'ainsi, la requérante ne peut pas être considérée comme membre de la famille d'un ressortissant de l'Union européenne ; qu'elle ne peut pas prétendre à l'obtention d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 4° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle ne peut pas soutenir être à la charge de sa fille, de nationalité belge et née le 17 juillet 2007, et qu'elle n'est pas titulaire d'un visa de long séjour ; que l'arrêté du 21 janvier 2009 n'a pas violé les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant dès lors que son exécution n'implique pas une séparation définitive de l'intéressée de sa fille et de son concubin ; que Mme A ne peut pas utilement se prévaloir des stipulations des articles 7 et 9 de la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant ; que la décision n'a pas violé les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que la requérante était présente en France depuis moins d'un mois, qu'elle peut revenir en France sous couvert d'un visa de long séjour et qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine, où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt-et-un ans ; que l'article 7 de la directive n° 2004/38 du 29 avril 2004 a été transposé en droit interne sous la forme du 4° de l'article L. 121-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que Mme A ne remplit pas les conditions pour recevoir un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

Vu la convention des Nations-Unies sur les droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 mai 2010 :

- le rapport de M. Le Gars, président,

- et les conclusions de M. Reynoird, rapporteur public ;

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 288 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne: Pour exercer les compétences de l'Union, les institutions adoptent des règlements, des directives, des décisions, des recommandations et des avis. (...) La directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre, tout en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens. (...) ; qu'aux termes de l'article 7 de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des Etats membres : 1. Tout citoyen de l'Union a le droit de séjourner sur le territoire d'un autre État membre pour une durée de plus de trois mois (...) 2. Le droit de séjour prévu au paragraphe 1 s'étend aux membres de la famille n'ayant pas la nationalité d'un État membre lorsqu'ils accompagnent ou rejoignent dans l'État membre d'accueil le citoyen de l'Union (...) ;

Considérant que tout justiciable peut se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; qu'en l'espèce, comme l'a relevé le Tribunal administratif de Dijon, la directive 2004/38/CE du Parlement et du Conseil du 29 avril 2004 susmentionnée a été transposée par l'article 23 de la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 relative à l'immigration et à l'intégration et le décret n° 2007-371 du 21 mars 2007, repris aux articles L. 121-1 et suivants et R. 121-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, Mme A, qui ne soutient pas que ces dispositions seraient incompatibles avec la directive n° 2004/38/CE, ne saurait utilement invoquer directement cette directive à l'encontre de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour en litige ;

Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ;

Considérant que Mme A, ressortissante de la République démocratique du Congo, fait valoir qu'elle est mariée selon le droit coutumier africain avec M. Mendo B, de nationalité belge, depuis mars 2007, que son mari est installé en France depuis la fin de l'année 2008, qu'ils ont une fille, qui est née le 17 juillet 2007, et qu'elle est entrée en France le 28 décembre 2008 pour rejoindre son compagnon ; que toutefois, la requérante ne résidait en France avec le père de son enfant que depuis trois semaines et demie à la date de l'arrêté attaqué ; que, compte tenu de la brièveté de la vie commune de Mme A et de son compagnon en France et de la possibilité pour la requérante de revenir régulièrement en France sous couvert d'un visa de long séjour en qualité de conjoint d'un ressortissant de l'Union européenne lorsqu'elle aura concrétisé son projet de mariage civil avec son concubin, l'arrêté attaqué n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et n'a donc pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1° de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant : Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait (...) des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ;

Considérant que la requérante fait valoir qu'il est de l'intérêt supérieur de sa fille d'être élevée par son père, qui peut séjourner régulièrement en France, et par sa mère ; que toutefois, la décision refusant un titre de séjour à Mme A n'a pas, par elle-même, pour effet de séparer l'enfant de ses parents ; que Mme A peut poursuivre sa vie familiale avec sa fille et le père de cette dernière dans son pays d'origine, dans tout autre pays où ils seraient admissibles, ou même en France, dès lors que, comme il a été dit plus haut, la possibilité lui est ouverte de revenir en France sous couvert d'un visa de long séjour après avoir concrétisé son projet de mariage ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la violation, par les décisions en litige, des stipulations précitées de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté ;

Considérant, en quatrième lieu, que les stipulations invoquées des 1° des articles 7 et 9 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 créent seulement des obligations entre Etats sans ouvrir de droits aux intéressés ; que la requérante ne peut donc pas utilement se prévaloir de ces stipulations pour demander l'annulation des décisions attaquées ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et de mise à la charge de l'Etat des frais exposés par elle et non compris dans les dépens doivent être rejetées par voie de conséquence ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire. Copie en sera adressée au préfet de la Nièvre.

Délibéré après l'audience du 5 mai 2010 à laquelle siégeaient :

M. Le Gars, président de la Cour,

M. Chanel, président de chambre,

M. Monnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 mai 2010.

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N° 09LY01566


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 09LY01566
Date de la décision : 19/05/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. LE GARS
Rapporteur ?: M. Jean Marc LE GARS
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : ISABELLE MAUGUERE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-05-19;09ly01566 ?
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