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01/04/2010 | FRANCE | N°08LY01269

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 01 avril 2010, 08LY01269


Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2008 au greffe de la Cour, présentée pour la SARL BSR, représentée par son gérant en exercice et dont le siège est 99 chemin du Charbonnier à Saint-Priest (69800) ;

La SARL BSR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601776, en date du 18 mars 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et contributions additionnelles de 10 % à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exerc

ices clos en 1997, 1998 et 1999, et des pénalités y afférentes, ainsi que de l'amend...

Vu la requête, enregistrée le 3 juin 2008 au greffe de la Cour, présentée pour la SARL BSR, représentée par son gérant en exercice et dont le siège est 99 chemin du Charbonnier à Saint-Priest (69800) ;

La SARL BSR demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0601776, en date du 18 mars 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et contributions additionnelles de 10 % à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1997, 1998 et 1999, et des pénalités y afférentes, ainsi que de l'amende prévue à l'article 1763 A du code général des impôts qui lui a été réclamée au titre de l'exercice 1998 ;

2°) de prononcer la réduction demandée ;

3°) de condamner l'Etat aux dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros, à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

- c'est à tort que l'administration fiscale a remis en cause la déduction des commissions versées aux capitaines des navires sur lesquels elle a effectué des réparations au cours de l'exercice 1997 ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur d'appréciation, en ce qu'il n'a pas pris en compte les pièces et explications apportées par elle, et d'une erreur de droit, en ce qu'il s'appuie sur une prétendue absence de déclaration des commissions en litige ;

- elle a adressé aux services fiscaux la déclaration des commissions, par lettre simple, en même temps que la déclaration annuelle des données sociales ; aucune disposition n'impose que cette déclaration soit faite par lettre recommandée avec accusé de réception ;

- en tout état de cause, l'absence de déclaration des commissions dans les délais n'est pas de nature à influer sur leur caractère déductible ;

- l'intérêt, pour elle, de procéder au versement de ces commissions aux capitaines des navires, qui correspond à un usage de longue date, ainsi qu'en atteste un échange de correspondance avec l'administration des douanes, et conditionne l'obtention de commandes de travaux, est suffisamment établi et a, d'ailleurs, été reconnu par l'administration ;

- cette pratique n'avait pas été remise en cause auparavant et ne l'a pas été pour ce qui concerne l'exercice clos en 1998, sur lequel portait pourtant aussi le contrôle ;

- la liste complète des commissions déduites au titre de l'exercice clos en 1997 a été fournie devant le tribunal administratif ;

- les commissions en litige ont, de manière générale, été refacturées aux armateurs et propriétaires des navires et majorent en conséquence son résultat imposable ;

- les pénalités pour mauvaise foi qui ont été appliquées ne sont pas justifiées en l'absence d'intention frauduleuse de sa part ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 décembre 2008, présenté par le ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, tendant au rejet de la requête de la SARL BSR ; le ministre soutient qu'il résulte des dispositions des articles 87, 238, 240-1, 240-1 bis et 241-2 du code général des impôts que les personnes qui n'ont pas déclaré les commissions versées à des tiers, lorsque ces commissions dépassent la somme de 500 francs par an pour un même bénéficiaire, perdent leur droit de porter ces dépenses en frais professionnels ; que la société requérante ne produit aucun élément ni aucune pièce justificative de nature à démontrer que les commissions en litige ont été déclarées dans les délais légaux ; que ces déclarations n'ont été enregistrées à la recette des impôts de Marseille que le 14 novembre 2000, soit après le début des opérations de contrôle ; que la réalité du paiement des commissions à des capitaines de navires étrangers n'est pas établie, dès lors que, d'après les recoupements bancaires effectués, les chèques concernés ont été libellés au profit de personnes de la région de Marseille ; que les documents fournis ne permettent pas de procéder à l'identification des bénéficiaires de ces commissions, soit qu'ils fassent seulement référence au navire et au grade, soit qu'ils ne permettent pas d'identifier le nom et les coordonnées du bénéficiaire ; que la refacturation de ces commissions aux armateurs et propriétaires des navires paraît paradoxale, dans la mesure où il est prétendu qu'elles sont destinées à obtenir des commandes de travaux auprès des capitaines des navires ; qu'il n'est donc pas démontré que les sommes déduites correspondent à des charges exposées dans l'intérêt de l'entreprise ; que la doctrine dont la société entend se prévaloir sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, prévoyant une tolérance administrative admettant la déduction, même en l'absence de justifications suffisantes, pour les commissions et gratifications que les entreprises d'avitaillement versent aux capitaines de navires non domiciliés en France, dont elles assurent l'approvisionnement, dans la limite de 5 % de la valeur des fournitures correspondantes, ne peut trouver à s'appliquer en l'espèce dans la mesure où elle ne concerne que les sociétés d'avitaillement et est soumise au respect du dépôt de la déclaration des versements dans les délais légaux ; que la société requérante ne peut davantage utilement se prévaloir d'une correspondance des services douaniers de Marseille, en date du 29 octobre 1985, qui n'émane pas d'une autorité fiscale, a été adressée à une autre société et prévoit, en outre, le respect de diverses formalités dont il n'est pas justifié qu'elles ont été satisfaites en l'espèce ; que la comptabilisation systématique, par la société requérante, d'achats ou de frais généraux non justifiés, dont la nature même suffit à démontrer qu'ils n'ont manifestement pas été exposés dans l'intérêt de l'entreprise, traduit une volonté délibérée d'éluder l'impôt, justifiant l'application d'une amende pour mauvaise foi ; que la demande relative à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée par voie de conséquence ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 mars 2010 :

- le rapport de M. Montsec, président-rapporteur ;

- les observations de Me Farhat, avocat de la SARL BSR ;

- et les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

- la parole ayant été de nouveau donnée à Me Farhat, avocat de la SARL BSR ;

Considérant qu'à la suite de la vérification de sa comptabilité portant sur les exercices clos en 1997, 1998 et 1999, la SARL BSR, qui a pour objet la réparation et l'équipement de navires, s'est vu notifier divers redressements qui sont à l'origine, notamment, d'impositions supplémentaires en matière d'impôt sur les sociétés et de contribution additionnelle de 10 %, auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 1997 et 1998 ; que cette société fait appel du jugement, en date du 18 mars 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon ne lui a accordé qu'une décharge partielle de ces impositions ; qu'elle ne conteste ce jugement qu'en tant qu'il a rejeté sa demande portant, d'une part, sur la fraction des cotisations mises à son nom au titre de l'exercice clos en 1997 issue de la réintégration dans ses résultats d'une somme de 317 300 francs (48 372 euros) représentant des commissions qui auraient été versées à des responsables de navires, capitaines ou officiers, en vue de faciliter l'apport d'affaires à l'entreprise, et, d'autre part, sur l'application de la majoration pour mauvaise foi au taux de 40 % sur les redressements restant à sa charge ;

Sur la réintégration de la somme de 317 300 francs (48 372 euros) :

Considérant qu'aux termes de l'article 240 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux exercices litigieux : 1. Les personnes physiques qui, à l'occasion de l'exercice de leur profession, versent à des tiers des commissions, courtages, ristournes commerciales ou autres, vacations, honoraires occasionnels ou non, gratifications et autres rémunérations, doivent déclarer ces sommes dans les conditions prévues aux articles 87, 87 A et 89, lorsqu'elles dépassent 500 francs par an pour un même bénéficiaire (...) ; qu'aux termes de l'article 238 du même code, alors en vigueur : Les personnes physiques et les personnes morales qui n'ont pas déclaré les sommes visées au premier alinéa du 1 de l'article 240 perdent le droit de les porter dans leurs frais professionnels pour l'établissement de leurs propres impositions (...) ; qu'il résulte de ces dispositions que le droit de déduire des commissions versées à des intermédiaires à l'occasion d'opérations commerciales est subordonné à la double condition que ces sommes aient été régulièrement déclarées et qu'elles soient justifiées dans leur principe et leur montant ;

Considérant que la SARL BSR n'est pas en mesure d'établir qu'elle a adressé à l'administration fiscale la déclaration des commissions ou honoraires en litige, versés aux capitaines ou officiers des navires sur lesquels ou au profit desquels elle effectuait des réparations, ainsi qu'elle l'affirme, dans les conditions prévues aux articles 87, 87 A et 8 du code général des impôts et notamment dans les délais prévus par ces dispositions, alors que l'administration fiscale le conteste, en faisant valoir que cette déclaration n'a été enregistrée à la recette des impôts de Marseille que le 14 novembre 2000, soit après le début des opérations de contrôle ; qu'ainsi, quoiqu'il en soit de l'utilité pour son exploitation du versement de ces sommes, elle n'était pas en droit, au plan de la stricte application de la loi fiscale, de les porter en déduction ; que les circonstances que ces sommes aient été par ailleurs mentionnées distinctement dans les factures adressées aux armateurs et qu'elles aient été intégrées aux bases déclarées pour l'impôt sur les sociétés sont, à cet égard, sans incidence ;

Considérant que la SARL BSR invoque, par ailleurs, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'instruction parue au BOCD de 1954, 2ème partie, annexe 6, page 77, selon laquelle les commissions et gratifications que les entreprises d'avitaillement versent aux capitaines de navires non domiciliés en France, dont elles assurent l'approvisionnement, peuvent, dans la limite de 5 % de la valeur des fournitures correspondantes, être admises en déduction, même en l'absence de justifications suffisantes lorsqu'eu égard aux circonstances de fait, la réalité du paiement ne paraît pas discutable ; que, cependant, n'exploitant pas une entreprise d'avitaillement, la société requérante ne saurait utilement se prévaloir de cette doctrine ; qu'elle ne peut non plus se prévaloir d'une correspondance adressée par le directeur régional des douanes de Marseille à une entreprise marseillaise, indiquant que peuvent bénéficier de la même tolérance tous les intervenants portuaires autres que les avitailleurs , dès lors qu'elle n'établit pas, en tout état de cause, remplir les conditions de forme tenant à la tenue d'états récapitulatifs mensuels, prévues par ce document ;

Considérant qu'ainsi, c'est à bon droit que le service des impôts et le Tribunal administratif de Lyon ont refusé à la SARL BSR la déduction de la somme de 317 300 francs (48 372 euros) ;

Sur la majoration pour mauvaise foi :

Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en ce qui concerne ceux des rehaussements demeurant en litige, qui portent sur des achats de matériels électriques, des charges d'entretien afférentes à trois véhicules non inscrits à l'actif du bilan de l'entreprise, des dépenses de fourniture n'ayant pas de lien avec l'objet social (matériel de cuisine ou électroménager, papier peint, vêtements, cabines de douche, livres, barbecue...), des frais de téléphone, de voyage, de transport et d'hébergement engagés par une personne qui n'était ni salariée ni associée de l'entreprise, ni mandatée par elle, des frais de restaurant engagés au profit de tiers, un achat de moteur pour radeau de marque Yamaha, des frais d'achat de cartes grises et de vignettes de véhicules appartenant à des tiers, la société n'a pu présenter de justifications du caractère utile des frais en cause ; qu'elle doit ainsi, pour ces dépenses, être regardée comme ayant volontairement sous-évalué ses résultats et s'être ainsi sciemment soustraite à l'impôt ;

Considérant, en revanche, qu'en ce qui concerne ceux des rehaussements demeurant en litige qui portent sur des cadeaux, d'un montant total de 5 153,30 francs (785,62 euros), effectués au profit de membres d'équipage de navires clients et d'inspecteurs de compagnies navales clientes, ainsi que sur la prise en charge financière d'amendes routières infligées à des membres d'équipage de navires clients, la circonstance que la société n'ait pas pu suffisamment démontrer l'utilité pour l'exploitation de ces dépenses, si elle est susceptible d'autoriser leur remise en cause, qui n'est d'ailleurs plus contestée par la SARL BSR, sur le fondement de l'article 39 du code général des impôts, n'implique pas que cette prise en charge ait été faite dans le but d'éluder l'impôt dû ; que la société est donc fondée à demander à être déchargée de la majoration de 40 % appliquée aux cotisations procédant de ces rehaussements ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SARL BSR est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande en tant qu'elle portait sur l'application de la majoration de 40 % aux cotisations issues de la réintégration dans ses résultats des cadeaux, d'un montant total de 5 153,30 francs (785,62 euros), effectués au profit de membres d'équipage de navires clients et d'inspecteurs de compagnies navales clientes, et des frais d'amendes routières infligées à des membres d'équipage de navires clients ;

Sur les conclusions de la SARL BSR tendant à la condamnation de l'Etat aux dépens :

Considérant que la présente instance ne comporte pas de dépens ; que les conclusions sus-analysées sont, par suite, sans objet, et, partant, irrecevables et doivent être rejetées comme telles ;

Sur les conclusions de la SARL BSR tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, au profit de la SARL BSR, la somme qu'elle demande au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La SARL BSR est déchargée de la majoration de 40 % appliquée aux cotisations supplémentaires mises à son nom au titre des exercices clos en 1997 et 1998, issues de la réintégration dans ses résultats des cadeaux, d'un montant total de 5 153,30 francs (785,62 euros), effectués au profit de membres d'équipage de navires clients et d'inspecteurs de compagnies navales clientes, et des frais d'amendes routières infligées à des membres d'équipage de navires clients.

Article 2 : Le jugement n° 0601776, du 18 mars 2008, du Tribunal administratif de Lyon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la SARL BSR est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL BSR et au ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2010, à laquelle siégeaient :

M. Montsec, président,

Mme Jourdan et Mme Besson-Ledey, premiers conseillers.

Lu en audience publique, le 1er avril 2010.

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N° 08LY01269


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY01269
Date de la décision : 01/04/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. MONTSEC
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : LAMY LEXEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-04-01;08ly01269 ?
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