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07/01/2010 | FRANCE | N°08LY00853

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 07 janvier 2010, 08LY00853


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 avril 2008, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701367, en date du 14 février 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé pour excès de pouvoir sa décision du 28 décembre 2006 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. Adel A, lui a fait injonction de délivrer à ce dernier, dans un délai de deux mois, un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale et a mis à la charge de l'Etat l

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 11 avril 2008, présentée pour le PREFET DU RHONE ;

Le PREFET DU RHONE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0701367, en date du 14 février 2008, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé pour excès de pouvoir sa décision du 28 décembre 2006 rejetant la demande de titre de séjour présentée par M. Adel A, lui a fait injonction de délivrer à ce dernier, dans un délai de deux mois, un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale et a mis à la charge de l'Etat la somme de 800 euros à verser à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon ;

3°) de mettre à la charge de M. A une somme de 1 000 euros, à verser à l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreurs de fait, dans la mesure où, contrairement à ce qu'ont considéré les premiers juges, le demandeur n'a pas établi la réalité de sa vie commune avec Mme B depuis 2002 et, par voie de conséquence, l'existence d'une situation de concubinage ancienne et stable à la date de la décision attaquée, alors que Mme B a épousé un tunisien en 2000, demandé pour celui-ci un regroupement familial et perçu l'allocation parent isolé ;

- le jugement est également entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de la vie privée et familiale de l'intéressé, qui ne justifie pas de l'ancienneté d'une vie enracinée sur le territoire français, n'est entré en France qu'à l'âge de 25 ans, s'y est maintenu en situation irrégulière et conserve des attaches familiales sur le territoire algérien où résident ses parents et ses frères et soeurs ; la vie familiale pouvait se poursuivre hors de France ; le Tribunal a tenu compte à tort de la situation de Mme B, alors que la décision ne la concerne pas et qu'il n'est pas établi que la présence de M. A à ses cotés soit nécessaire eu égard à son état de santé, l'enfant pouvant au besoin être confié à ses grands parents maternels ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 8 janvier 2009, le mémoire en défense présenté pour M. Adel A, tendant au rejet de la requête du PREFET DU RHONE et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 300 euros, à lui verser sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que :

- il a suffisamment établi l'ancienneté et l'intensité de sa vie familiale en France, et notamment la réalité de sa vie commune avec sa concubine depuis 2002, celle-ci ayant divorcé le 2 mai 2002 de son précédant époux avec lequel elle n'avait eu aucune communauté de vie ;

- il exerce l'autorité parentale sur leur enfant né le 17 décembre 2003 ;

- il a également établi la santé fragile de sa compagne, nécessitant sa présence auprès d'elle et de leur enfant ;

- la reconstitution de l'unité familiale en Algérie est impossible eu égard à la situation de sa compagne, qui est entrée en France à l'âge d'un an, est titulaire d'un certificat de résidence de dix ans et dont toute la famille vit en France ;

- la demande du préfet au titre de l'article L. 761-1 n'est pas justifiée ;

Vu, enregistré le 27 février 2009, le mémoire complémentaire présenté pour le PREFET DU RHONE, tendant aux mêmes fins que précédemment et portant sa demande de paiement des frais irrépétibles à la somme de 1 200 euros, par les mêmes moyens ;

Vu, enregistré le 15 mai 2009, le mémoire en défense complémentaire présenté pour M. A, tendant aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré après clôture de l'instruction le 8 décembre 2009, présenté pour M. A ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 décembre 2009 :

- le rapport de M. Montsec, président-assesseur ;

- les observations de Me Petit substituant Me Couderc, avocat de M. A ;

- les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

- la parole ayant été donnée à nouveau à Me Petit substituant Me Couderc, avocat de M. A ;

Considérant que M. Adel A, ressortissant algérien né le 20 juillet 1975, est entré en France le 20 juin 2000, muni d'un visa de 30 jours ; que, suite à la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, en date du 20 novembre 2001, il a été invité le 10 juin 2002, par le PREFET DU RHONE, à quitter le territoire et a fait l'objet d'une décision de reconduite à la frontière le 21 juillet 2003 ; que, malgré le rejet, par le Tribunal administratif de Lyon, par un jugement du 23 juillet 2003, de sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 21 juillet 2003, celle-ci n'a fait l'objet d'aucune exécution ; que, par une nouvelle décision en date du 28 décembre 2006, le PREFET DU RHONE a rejeté la demande de délivrance d'un titre de séjour à titre exceptionnel présentée par M. A, sur le fondement des dispositions de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien ; que, par le jugement attaqué, en date du 14 février 2008, le Tribunal administratif de Lyon a, d'une part, annulé pour excès de pouvoir cette décision du 28 décembre 2006 et a, d'autre part, fait injonction au PREFET DU RHONE de délivrer à l'intéressé, dans un délai de deux mois, un certificat de résidence d'un an portant la mention vie privée et familiale ;

Sur la légalité de la décision du PREFET DU RHONE en date du 28 décembre 2006 :

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A est entré en France le 20 juin 2000 à l'âge de 25 ans et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où sont restés ses parents, deux frères et une soeur ; que, s'il résidait en France depuis environ 6 années et demi à la date de la décision attaquée, c'est en se dérobant à l'exécution d'une décision de reconduite à la frontière prise par le PREFET DU RHONE dès le 21 juillet 2003 ; que M. A fait valoir par ailleurs qu'il vit en concubinage avec une compatriote, Mme B, divorcée Mejri, depuis 2002, alors même que cette dernière a bénéficié en 2006 de l'allocation pour parent isolé, qu'un enfant est né de cette relation le 17 décembre 2003, qu'il a reconnu de façon anticipée le 23 juin 2003, et que sa présence est nécessaire auprès de cet enfant, en particulier lors des périodes d'hospitalisation de sa compagne, qui souffre de plusieurs pathologies ; que, cependant, alors même que Mme B est titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, vit en France depuis l'âge d'un an et que sa propre famille réside régulièrement en France, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'unité familiale ne pourrait pas, au besoin, être reconstituée en Algérie ; que, dans ces conditions, c'est à tort que, pour annuler la décision en litige, les premiers juges se sont fondés sur le motif qu'elle aurait porté au droit de l'intéressé à la protection de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise et comme ayant méconnu en conséquence les stipulations susmentionnées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'en l'absence d'autres moyens soulevés par M. A en première instance, qu'il conviendrait d'examiner par l'effet dévolutif de l'appel, il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU RHONE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé sa décision du 28 décembre 2006 et lui a en conséquence enjoint de délivrer à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'en conséquence de ce qui précède, les conclusions de M. A tendant à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A la somme demandée par le préfet sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0701367 du Tribunal administratif de Lyon, en date du 14 février 2008, est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du PREFET DU RHONE est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au PREFET DU RHONE, à M. Adel A et au ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2009, à laquelle siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 7 janvier 2010.

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N° 08LY00853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 08LY00853
Date de la décision : 07/01/2010
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: M. Pierre MONTSEC
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : JEAN PAUL TOMASI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2010-01-07;08ly00853 ?
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