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24/11/2009 | FRANCE | N°07LY00884

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5ème chambre - formation à 3, 24 novembre 2009, 07LY00884


Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 24 avril 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501388 - 0503425 du 19 décembre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a réduit les bases d'imposition de M. Patrick A à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, à hauteur de 236 023 francs pour 1996 et de 747 256 francs pour 1998, et l'a déchargé des droits et pénalités correspondants ;

2°)

de rejeter la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Lyon...

Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour le 24 avril 2007, présenté par le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0501388 - 0503425 du 19 décembre 2006, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a réduit les bases d'imposition de M. Patrick A à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, à hauteur de 236 023 francs pour 1996 et de 747 256 francs pour 1998, et l'a déchargé des droits et pénalités correspondants ;

2°) de rejeter la demande de M. A présentée devant le Tribunal administratif de Lyon, de rétablir, à la charge de M. A, les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les contributions sociales au titre des années 1996 et 1998, à raison des droits et intérêts de retard dont la décharge a été accordée par les premiers juges et de prononcer le remboursement de la somme de 800 euros versée à M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE soutient que le Tribunal a omis de se prononcer sur la nature des distributions occultes, au sens de l'article 111 c du code général des impôts, soutenue par l'administration dès le stade de la notification de redressement et dans ses écritures devant les premiers juges ; qu'il n'a pas énoncé les motifs lui permettant de qualifier d'avances, au regard de l'article 111 a du même code, l'ensemble des sommes versées sur le compte courant d'associé de M. A ; qu'il a également omis de répondre aux moyens tirés, en défense, de ce que s'agissant de distributions occultes, l'attribution des dividendes et la rémunération de gérance portées au crédit du compte courant le jour de la clôture de l'exercice ne pouvaient être regardées comme des remboursements au titre de l'année 1996 et, de ce qu'au titre de l'année 1998, la compensation invoquée par le contribuable ne pouvait être admise s'agissant notamment de sommes n'ayant pas fait l'objet d'une autorisation de l'assemblée générale des associés des sociétés concernées, étant rappelé que la fusion entre les deux sociétés le 24 décembre 1999 n'avait eu d'effet rétroactif qu'au 1er janvier 1999 ; que le jugement est entaché d'erreur de fait dans la mesure où il mentionne à tort que la fusion a eu lieu le 1er janvier 1998 ; que faute d'avoir respecté les formalités de publicité prévues à l'article 1690 du code civil, l'acte de cession de créances n'est pas opposable à l'administration ; qu'au cas où la Cour ne retiendrait pas la présomption de distribution résultant de l'application de l'article 111 c, l'administration entend subsidiairement demander que l'article 109-1 2° soit substitué à l'article 111 c, dès lors que le contribuable n'est privé d'aucune garantie et que les sommes mises à la disposition des associés et non prélevées sur les bénéfices sont considérées comme revenus distribués ; que le compte courant dont bénéficiait le contribuable en tant qu'associé était débiteur à la clôture de l'exercice ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 juillet 2007, présenté pour M. Patrick A, tendant au rejet du recours du ministre et à la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient que l'administration n'a pas invoqué l'article 109-1 à l'appui des redressements ; qu'en l'absence de motivation, dans la notification de redressement du 22 décembre 1999, de la raison pour laquelle certaines sommes inscrites au débit de son compte courant devaient être qualifiées de distributions anticipées de produits en application de l'article 111 a tandis que d'autres devaient être regardées comme des distributions occultes au sens de l'article 111 c, c'est à bon droit que le Tribunal s'est fondé sur le seul article 111 a, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'article 111 c ; que le transfert de sa créance à la société Dima Participation résulte d'une novation de créance prévue à l'article 1271 2° du code civil et non d'une cession de créance comme l'affirme l'administration, dans la mesure où il était lui-même débiteur de ladite société à hauteur de 307 747 francs tandis que la société Dima était débitrice à son égard à concurrence de 439 509,99 francs ; qu'au demeurant, un transfert de créance pouvait être retenu même en l'absence de l'accomplissement des formalités prévues à l'article 1690 du code civil ; que lorsque les avances n'ont pas été constatées dans un acte de prêt mais que le remboursement a été opéré à une date antérieure à la clôture de l'exercice au cours duquel elles ont été consenties, la preuve contraire peut être considérée comme rapportée, de même qu'il n'y a pas distribution de revenus s'il apparaît que le remboursement a été opéré avant la réception de l'avis de vérification ou le contrôle inopiné ; qu'il était fondé à obtenir la décharge des redressements en établissant que les sommes avancées au cours des années 1996 et 1998 avaient fait l'objet d'un remboursement au plus tard au 1er janvier 1999, sans qu'importe l'indication erronée dans le jugement de la date du 1er janvier 1998 ; que la substitution de base légale demandée par l'administration aurait pour effet de le priver de la possibilité de faire valoir ses observations après la notification de redressement ; que les sommes ayant été remboursées, il n'y a pas eu revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Vu le mémoire, enregistré le 19 septembre 2007, présenté par le MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS ET DE LA FONCTION PUBLIQUE, tendant aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens ;

Il soutient, en outre, qu'il y a bien eu transfert de créance et non pas novation, dans la mesure où le redressement porte sur l'inscription au crédit du compte courant détenu par l'intéressé dans la société Dima Participation de la somme de 139 519,99 francs correspondant au solde du compte courant détenu par lui dans la société Dima ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 octobre 2009 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Raisson, rapporteur public ;

Considérant que, par un jugement du 19 décembre 2006, dont le MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE relève appel, le Tribunal administratif de Lyon a réduit les bases d'imposition de M. Patrick A à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales, à hauteur de 236 023 francs pour 1996 et de 747 256 francs pour 1998, et l'a déchargé des droits et pénalités correspondants ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que, pour conclure au rejet de la demande de M. A, l'administration soutenait devant les premiers juges que les impositions litigieuses trouvaient leur base dans les dispositions tant du a que du c de l'article 111 du code général des impôts ; qu'il ressort des termes mêmes du jugement attaqué que le Tribunal administratif de Lyon a omis de statuer sur le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré des dispositions de l'article 111 c dudit code ; qu'il y a lieu, ainsi que le demande le ministre, d'annuler ledit jugement et de statuer immédiatement, par voie d'évocation, sur la demande présentée par M. A devant les premiers juges ;

En ce qui concerne les revenus de capitaux mobiliers :

Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : Sont notamment considérés comme revenus distribués : a) Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) c) Les rémunérations ou avantages occulte (...) ;

Pour les impositions relatives à l'année 1996 :

Considérant que M. A a été assujetti, au titre de l'année 1996, sur le fondement des dispositions précitées de l'article 111 c du code général des impôts, à des suppléments d'impôt sur le revenu à raison, d'une part, d'une somme de 32 288 francs, correspondant à un prélèvement d'actif, inscrite au 31 décembre 1996 au débit de son compte courant d'associé ouvert dans les écritures de la SARL Dima Participation, dont il est le gérant et associé majoritaire, et, d'autre part, d'une somme de 203 735 francs, inscrite au crédit de ce même compte le 31 décembre 1996 et correspondant à un transfert, à son profit, d'une créance détenue sur la SARL Dima, filiale de la SARL Dima Participation ; que le prélèvement d'actif pour un montant de 32 288 francs fait au profit d'un associé doit, en l'absence de justifications particulières, s'analyser comme un avantage consenti à ce dernier ; que, par ailleurs, le transfert de la créance d'un montant de 203 735 francs s'est traduit par une augmentation de la créance d'associé de M. A, sans entrée correspondante d'un nouvel élément d'actif dans le bilan de la société, puisque la fusion entre les sociétés Dima Participation et Dima n'a eu lieu qu'à compter du 1er janvier 1999 ; qu'il constitue donc pour M. A un enrichissement ; que l'inscription de ces sommes de 32 288 francs et 203 735 francs aux débit et crédit du compte courant d'associé de M. A n'ont fait l'objet d'aucune déclaration ni approbation par l'assemblée générale des associés de la SARL Dima Participation ou de sa filiale, ni même de comptabilisation dans les écritures desdites sociétés ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration les a regardées, en application des dispositions de l'article 111 c du code général des impôts, comme ayant un caractère occulte et les a réintégrées dans les bases d'imposition de M. A pour être imposées à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Pour les impositions relatives à l'année 1998 :

Considérant que M. A a été assujetti, au titre de l'année 1998, à des suppléments d'impôt sur le revenu, sur le fondement des dispositions de l'article 111 a du code général des impôts, à raison du solde débiteur de son compte courant d'associé au 31 décembre 1998, au sein de la SARL Dima Participation, pour un montant de 307 747 francs et sur le fondement de l'article 111 c du même code, à raison de l'inscription d'une somme de 439 510 francs au crédit de ce même compte courant ;

Considérant, en premier lieu, que l'inscription au compte courant de M. A de la somme de 439 510 francs, qui ne revêt pas le caractère d'un jeu d'écriture artificiel, a rendu positif le solde de ce compte courant ; que la circonstance que cette écriture ne soit pas constitutive d'une avance, et qu'elle puisse représenter une distribution opérée au profit de M. A est à cet égard sans incidence ; que ce dernier ne saurait donc être imposé, au titre de l'année 1998, à raison d'un solde négatif de 307 747 francs de son compte courant dans les écritures de la SARL Dima Participation ;

Considérant, en second lieu, qu'à supposer que, par l'effet de la fusion de la SARL Dima par la SARL Dima Participation, intervenue le 24 décembre 1999, M. A soit devenu, en 1999, créancier sur la SARL Dima Participation de la somme de 439 510 francs, l'inscription de cette somme au crédit de son compte courant d'associé dès 1998, qui se présentait, à l'époque, comme une opération définitive, ne peut être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme une avance consentie en 1998 par la SARL Dima Participation ; que M. A n'est donc pas fondé à se prévaloir de son remboursement en invoquant, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'instruction du 19 septembre 1957 ; que l'inscription de cette somme au crédit de son compte courant représente donc, en l'absence de créance réelle et actuelle de ce montant sur la société justifiant cette écriture, une distribution imposable entre les mains de l'intéressé ; que l'administration était, dès lors, fondée, au titre de l'article 111 c du code général des impôts à la réintégrer dans les bases d'imposition de M. A pour être imposée à l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Considérant que les intérêts de retard prévus par le premier alinéa de l'article 1727 du code général des impôts s'appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l'administration fiscale sur le comportement du contribuable et n'ont, dès lors, pas le caractère d'une sanction mais d'une réparation du préjudice subi par le Trésor, à raison du non-respect par le contribuable de ses obligations déclaratives même pour la part qui excèderait l'application du taux de l'intérêt légal ; que, par suite, le requérant ne peut utilement se prévaloir de leur caractère excessif ; qu'ainsi les intérêts de retard litigieux qui lui ont été appliqués sur le fondement de cette disposition, qui ne résulte ni d'une accusation en matière pénale, ni d'une contestation sur des droits et obligations de caractère civil, n'entrent pas dans le champ d'application de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A est seulement fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des pénalités y afférentes, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998, dans la mesure d'une réduction de base de 307 747 francs ;

Sur les autres conclusions du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE :

Considérant que l'Etat détient le pouvoir d'émettre un titre exécutoire à l'effet de fixer les sommes qui lui sont dues ; qu'ainsi, les conclusions du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE tendant à ce que la Cour condamne M. A à rembourser à l'Etat la somme de 800 euros qu'il lui a versée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en application du jugement susvisé, annulé par le présent arrêt de la Cour, sont irrecevables ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat au bénéfice de M. A la somme de 1 500 euros au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon nos 0501388 - 0503425 du 19 décembre 2006 est annulé.

Article 2 : Il est accordé à M. A la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales, auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1998, dans la mesure d'une réduction de base de 307 747 francs, ainsi que des pénalités y afférentes.

Article 3 : M. A est rétabli au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre des années 1996 et 1998, à hauteur des droits et pénalités dont la décharge a été prononcée par le Tribunal administratif de Lyon après réduction de ses bases d'imposition de 236 023 francs pour 1996 et de 439 510 francs pour 1998.

Article 4 : L'Etat versera à M. A la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 5 : Le surplus des conclusions du recours du MINISTRE DE L'ECONOMIE, DES FINANCES ET DE L'INDUSTRIE et le surplus des conclusions de M. A présentées devant le Tribunal administratif de Lyon sont rejetés.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. Patrick A et au MINISTRE DU BUDGET, DES COMPTES PUBLICS, DE LA FONCTION PUBLIQUE ET DE LA REFORME DE L'ETAT.

Délibéré après l'audience du 22 octobre 2009 à laquelle siégeaient :

M. Bernault, président de chambre,

M. Montsec, président-assesseur,

Mme Besson-Ledey, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 novembre 2009.

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N° 07LY00884


Type d'affaire : Administrative

Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: M. RAISSON
Avocat(s) : ADREM AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 24/11/2009
Date de l'import : 14/10/2011

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 07LY00884
Numéro NOR : CETATEXT000021749996 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2009-11-24;07ly00884 ?
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