La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

29/06/2007 | FRANCE | N°06LY01757

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, Juge unique - 3ème chambre, 29 juin 2007, 06LY01757


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 août 2006, présentée pour M. Bachir X, domicilié ..., par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603174 du 10 juillet 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 21 juin 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de

destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de po...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 16 août 2006, présentée pour M. Bachir X, domicilié ..., par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0603174 du 10 juillet 2006 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Isère du 21 juin 2006 ordonnant sa reconduite à la frontière et de la décision du même jour fixant l'Algérie comme pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté et cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de deux jours et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 820 euros à verser à son conseil, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

…………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié, réglementant les conditions d'entrée et de séjour des étrangers en France ;

Vu l'arrêté du 8 juillet 1999 relatif aux conditions d'établissement des avis médicaux concernant les étrangers malades prévus à l'article 7-5 du décret n° 46-1574 du 30 juin 1946 modifié ;

Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 2007 :

- le rapport de M. Fontanelle, président ;
- et les conclusions de M. Reynoird, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (...) 3° Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (...). » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification de la décision du préfet de l'Isère du 4 janvier 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'ainsi à la date de l'arrêté attaqué, le 21 juin 2006, il se trouvait dans le cas où, en application des dispositions précitées du 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut décider la reconduite d'un étranger à la frontière ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : « (…) Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit :(…) 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (…) » ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 8 juillet 1999 susvisé : « Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin inspecteur de santé publique de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; - si l'intéressé peut effectivement ou non bénéficier d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire ; - et la durée prévisible du traitement. Il indique, en outre, si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers son pays de renvoi. Cet avis est transmis au préfet par le directeur départemental des affaires sanitaires et sociales. » : qu'enfin l'article R. 4127-76 du code de la santé publique prévoit que « tout document délivré par un médecin doit (…) permettre l'identification du praticien dont il émane et être signé par lui » ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision du 4 janvier 2006 du préfet de l'Isère refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. X en tant qu'étranger malade a été prise au vu d'un avis du médecin inspecteur de la santé publique du 26 octobre 2005 mentionnant que l'état de santé du requérant nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences et qu'il devrait pouvoir bénéficier d'une prise en charge adaptée dans son pays d'origine, sous réserve d'un accès effectif et réel aux soins ; qu'au préalable, le médecin inspecteur de la santé publique avait, par trois avis des 19 août 2004, 1er février et 22 juillet 2005, indiqué que l'état de santé de M. X nécessitait une prise en charge spécialisée dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne pouvait bénéficier d'une prise en charge adaptée dans son pays d'origine; que l'avis du 26 octobre 2005, comme les précédents, comporte une signature illisible et ne mentionne pas les nom et prénom de son auteur ; qu'il n'est allégué par l'administration aucune circonstance qui aurait permis en l'espèce d'identifier l'auteur de cet avis médical, lequel est donc irrégulier au regard des dispositions précitées de l'article R. 4127-76 du code de la santé publique ; que la décision du 4 janvier 2006, qui a été prise au vu de cet avis, est elle-même entachée d'irrégularité et que l'arrêté de reconduite à la frontière du 21 juin 2006, qui a été pris sur le fondement de ce refus de séjour illégal, est, par suite, entaché d'illégalité ; qu'il en est de même, par voie de conséquence, de la décision du même jour désignant l'Algérie comme destination de la reconduite ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

Considérant qu'à la suite de l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière, il incombe au préfet, en application des dispositions de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, non seulement de munir l'intéressé d'une autorisation provisoire de séjour, mais aussi, qu'il ait été ou non saisi d'une demande en ce sens, de se prononcer sur son droit à un titre de séjour ; que, dès lors, il appartient au juge administratif, lorsqu'il prononce l'annulation d'un arrêté de reconduite à la frontière et qu'il est saisi de conclusions en ce sens, d'user des pouvoirs qu'il tient de l'article L. 911-2 du code de justice administrative pour fixer le délai dans lequel la situation de l'intéressé doit être réexaminée, au vu de l'ensemble de la situation de droit et de fait existant à la date de ce réexamen ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'enjoindre au préfet de l'Isère de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. X et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que M. X a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat au profit de Me Claude Coutaz, conseil du requérant, la somme de 820 euros qu'il demande, sous réserve qu'il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0603174 du 10 juillet 2006 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Grenoble, l'arrêté du préfet de l'Isère du 21 juin 2006 prononçant la reconduite à la frontière de M. X et la décision du même jour désignant le pays de destination de la reconduite, sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Isère de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Me Claude Coutaz, avocat, la somme de 820 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.
1

2
N° 06LY01757


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : Juge unique - 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 06LY01757
Date de la décision : 29/06/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Guy FONTANELLE
Rapporteur public ?: M. REYNOIRD
Avocat(s) : COUTAZ CLAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-06-29;06ly01757 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award