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10/05/2007 | FRANCE | N°06LY01841

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4ème chambre - formation à 3, 10 mai 2007, 06LY01841


Vu la requête, enregistrée le 29 août 2006, présentée pour M. Abdelhakim X, domicilié, maison des associations CIIC 6 bis rue Berthe de Boissieux à Grenoble (38100) par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0400748 et 0400749, en date du 30 juin 2006, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 18 août 2003 lui refusant le bénéfice de l'asile territorial et de la décision du 8 septembre 2003 du

préfet de l'Isère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

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Vu la requête, enregistrée le 29 août 2006, présentée pour M. Abdelhakim X, domicilié, maison des associations CIIC 6 bis rue Berthe de Boissieux à Grenoble (38100) par Me Coutaz, avocat au barreau de Grenoble ;

M. X demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 0400748 et 0400749, en date du 30 juin 2006, par lequel le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur du 18 août 2003 lui refusant le bénéfice de l'asile territorial et de la décision du 8 septembre 2003 du préfet de l'Isère lui refusant la délivrance d'un titre de séjour ;

2°) d'annuler ces décisions et d'enjoindre d'une part, au ministre de l'intérieur soit de l'admettre au bénéfice de l'asile territorial soit de prendre une nouvelle décision dans un délai de trente jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard et d'autre part, au préfet de l'Isère soit de lui délivrer un certificat de résidence d'un an avec autorisation de travail soit de prendre une nouvelle décision, dans un délai de trente jours et sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;
3°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 820 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve qu'il renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
Vu la loi n° 52-893 du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ;
Vu le décret n° 98-503 du 23 Juin 1998 ;
Vu l'ordonnance n°45-2658 du 2 novembre 1945 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 mars 2007 :

- le rapport de Mme Besson-Ledey, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Besle, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. X, de nationalité algérienne, est entré en France le 15 septembre 2002 sous couvert d'un visa de court séjour ; que le 30 septembre 2002 il a sollicité le bénéfice de l'asile territorial qui lui a été refusé par une décision du ministre de l'intérieur, le 18 août 2003 ; que, par une décision du 8 septembre 2003, le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour et l'a invité à quitter le territoire ; que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté les demandes de M. X tendant à l'annulation des décisions du ministre de l'Intérieur et du préfet de l'Isère ;

Sur la décision du ministre de l'intérieur du 18 août 2003 :

Considérant que Mme Hélène Sekutowicz-Le Brigant, chef du bureau de l'asile territorial à la sous-direction de l'asile et de l'immigration au ministère des affaires étrangères, bénéficiait, en vertu de l'arrêté du 28 novembre 2002 régulièrement publié le 30 novembre 2002 au Journal officiel, d'une délégation de signature du ministre des affaires étrangères pour signer les avis rendus en vertu du décret du 23 juin 1998 relatif à l'asile territorial pris pour l'application de la loi du 25 juillet 1952 modifiée ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que Mme Hélène Sekutowicz-Le Brigant n'aurait pas été compétente pour signer l'avis rendu au nom du ministre des affaires étrangères sur la demande d'asile territorial de M. X manque en fait ;

Considérant qu'il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges d'écarter les moyens tirés de ce que la décision du ministre de l'intérieur serait entachée d'un vice de procédure ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation et méconnaîtrait les dispositions de l'article 13 de la loi susvisée du 25 juillet 1952 modifiée relative au droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision du préfet de l'Isère du 8 septembre 2003 :

Sur la régularité du jugement :

Considérant qu'il résulte de la lecture du jugement attaqué en date du 30 juin 2006, ainsi que le soutient M. X, que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de ce que la décision du préfet de l'Isère serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ; que cette omission à statuer sur un moyen qui n'était pas inopérant a entaché d'irrégularité le jugement susvisé du Tribunal administratif de Grenoble ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen d'irrégularité, il y a lieu d'annuler le jugement en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Isère du 8 septembre 2003 et, par la voie de l'évocation, de statuer sur cette demande présentée en première instance et reprise en appel ;

Sur les conclusions d'annulation :

Considérant que la décision litigieuse énonce l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des motifs de la décision litigieuse que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé et ne s'est pas estimé lié par la décision de refus d'asile pour rejeter la demande de titre de M. X ; que, par suite, il n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence ni commis d'erreur de droit ;

Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : « 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui » ; et qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien modifié par le troisième avenant, entré en vigueur le 1er janvier 2003 : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 5°) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (…) » ;

Considérant qu'en relevant notamment que l'intéressé était célibataire et que sa famille proche était en Algérie, le préfet de l'Isère s'est livré, au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à un examen suffisant de la vie privée et familiale de l'intéressé qui d'ailleurs n'allègue pas que ledit préfet aurait omis de prendre en compte certains éléments de sa vie privée qu'il aurait invoqués à l'appui de sa demande de titre ;

Considérant que si M. X fait valoir qu'il ne peut vivre une vie privée et familiale normale en Algérie en raison des risques qu'il y encourt et qu'il a tissé des relations personnelles en France où il aurait des perspectives professionnelles, il n'a assorti ses allégations d'aucun justificatif probant ; que, s'il fait également valoir qu'il bénéficie en France de soins nécessaires à son état de santé, il n'établit pas qu'à la date de la décision attaquée cette prise en charge médicale ne pouvait être dispensée qu'en France ; que, dans les circonstances de l'espèce, la décision du préfet de l'Isère lui refusant un titre de séjour n'a pas porté au droit de M. X au respect d'une vie privée et familiale normale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle n'a, par suite, méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni celles du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

Considérant qu'eu égard aux circonstances sus-énoncées, le préfet de l'Isère n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Considérant qu'aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 : « Les étrangers sont, en ce qui concerne leur séjour en France, soumis aux dispositions de la présente ordonnance, sous réserve des conventions internationales » ; que si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titre de séjour ; qu'au nombre de ces dispositions, figurent notamment celles qui résultent des dispositions combinées du 7° de l'article 12 bis et de l'article 12 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui prévoient que le préfet doit consulter la commission du titre de séjour lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour à un étranger dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que ce refus porterait au droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; que le préfet n'est, toutefois, tenu de saisir la commission que du seul cas des étrangers qui remplissent effectivement cette condition, et non de celui de tous les étrangers qui s'en prévalent ;

Considérant, ainsi qu'il vient d'être dit, que le préfet de l'Isère n'a pas porté une atteinte excessive au droit de M. X au respect de sa vie privée et familiale, au sens des stipulations du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ainsi que de celles de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article 12 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945 alors applicable ; que, dès lors, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour préalablement à sa décision ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par la décision du 8 septembre 2003 le préfet de l'Isère lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte présentées par M. X sur le fondement des articles L. 911-1, L. 911-2 et L. 911-3 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions relatives à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. X présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;



DECIDE :


Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Grenoble est annulé en tant qu'il a rejeté la demande de M. X tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Isère du 8 septembre 2003.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête et la demande de M. X présentée devant le Tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation de la décision du préfet de l'Isère du 8 septembre 2003 sont rejetés.
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N° 06LY01841


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 06LY01841
Date de la décision : 10/05/2007
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. GRABARSKY
Rapporteur ?: Mme Laurence BESSON-LEDEY
Rapporteur public ?: M. BESLE
Avocat(s) : COUTAZ CLAUDE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2007-05-10;06ly01841 ?
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