Vu, I, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 4 avril 2006, sous le n° 06LY00703, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;
Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601127 du 17 mars 2006 en tant que par ce jugement le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, annulé sa décision du 20 février 2006 fixant la Bosnie-Herzégovine comme pays de destination de la reconduite à la frontière de M. Arsen X et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer une autorisation provisoire de séjour à l'intéressé ;
2°) de rejeter les conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Grenoble par M. X ;
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Vu, II, le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Lyon le 4 avril 2006, sous le n° 06LY00704, présenté par le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE ;
Le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE demande à la Cour d'ordonner que, jusqu'à ce qu'il ait été statué sur le recours n° 06LY00703, il soit sursis à l'exécution du jugement du 17 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 octobre 2006 :
- le rapport de M. du Besset, président ;
- et les conclusions de M. Puravet, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les recours susvisés présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'ils fassent l'objet d'un seul arrêt ;
Sur le recours n° 06LY00703 :
Considérant que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE a, par arrêté du 20 février 2006, ordonné la reconduite à la frontière de M. X et par décision distincte du même jour, fixé la Bosnie-Herzégovine comme pays de destination de cette reconduite ; qu'étant saisi par l'intéressé de conclusions tendant à l'annulation tant de l'arrêté de reconduite à la frontière que de la décision fixant le pays de destination, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble, qui a rejeté les conclusions dirigées contre l'arrêté susmentionné, a, par les articles 1er et 2 du jugement attaqué, annulé la décision fixant le pays de renvoi et enjoint au PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE de délivrer à M. X une autorisation provisoire de séjour dans l'attente d'une exécution de l'arrêté de reconduite à la frontière à destination d'un pays autre que la Bosnie-Herzégovine ; que le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE fait appel de ce jugement en tant qu'il a prononcé cette annulation assortie d'injonction ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : «(…) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950» et que ce dernier texte énonce que «Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants.» ; que ces dispositions font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un Etat pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet Etat, soit même du fait de personnes ou groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'Etat de destination ne sont pas en mesure de prévenir un tel risque par une protection appropriée ;
Considérant que M. X, dont la demande d'asile a été rejetée par décision de l'office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 juin 2004, confirmée par décision de la commission des recours des réfugiés du 21 juillet 2005, a fait valoir devant le tribunal administratif qu'il a, avec son épouse et leur enfant, vécu chez ses parents durant de nombreux mois ; que son père, invalide de guerre et souffrant de problèmes psychologiques, a, du fait de son appartenance politique, fait à plusieurs reprises usage d'armes à feu contre des Serbes ; que devant les mauvais traitements et les menaces exercées par celui-ci sur son épouse et craignant qu'il s'en prenne à son fils, il a décidé de fuir avec son épouse ; que son père aurait projeté de les tuer ; que M. X se prévalait également de la situation générale en Bosnie-Herzégovine liée aux conflits entre les différentes communautés et à ce que ce pays n'a pas été reconstruit après la guerre ; que, toutefois, ni son récit ni les pièces produites à l'appui de ses allégations ne permettent d'établir que sa vie ou sa liberté seraient menacées, en cas de retour en Bosnie-Herzégovine, ou qu'il serait exposé à des peines ou traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'ainsi, alors que M. X ne pouvait pas, en tout état de cause, se prévaloir utilement des décisions de la commission des recours des réfugiés accordant le bénéfice de l'asile à son frère et à sa belle-soeur, qui reposent sur des faits en partie autres que ceux qu'il invoquait, c'est à tort que le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a estimé qu'était fondé le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en l'absence d'autres moyens susceptibles d'être examinés dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, le PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du jugement du 17 mars 2006, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble a, d'une part, annulé sa décision du 20 février 2006 fixant la Bosnie-Herzégovine comme pays de destination de la reconduite de M. Arsen X et, d'autre part, lui a enjoint de délivrer à celui-ci une autorisation provisoire de séjour ;
Sur le recours n° 06LY00704 :
Considérant que, par le présent arrêt, la Cour statue sur le recours n° 06LY00703 du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE tendant à l'annulation des articles 1er et 2 du jugement du 17 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble ; que, par suite, son recours n° 06LY00704 tendant à ce que la Cour ordonne le sursis à exécution des mêmes articles de ce jugement devient sans objet ;
DECIDE :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du 17 mars 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Grenoble sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande de M. X présentées devant le Tribunal administratif de Grenoble tendant à l'annulation de la décision du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE du 20 février 2006 fixant la Bosnie-Herzégovine comme pays de destination de sa reconduite à la frontière, et celles à fins d'injonction, sont rejetées.
Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur le recours n° 06LY00704 du PREFET DE LA HAUTE-SAVOIE.
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