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23/02/2006 | FRANCE | N°00LY02614

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 5eme chambre - formation a 3, 23 février 2006, 00LY02614


Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2000, présentée par la SCI DU BEC DE L'AIGLE, dont le siège est Lasfargues à Sansac de Marmiesse (15130), représentée par son gérant en exercice ;

La SCI DU BEC DE L'AIGLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9900426 du 17 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de l'année 1994, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée

;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 447 francs au titre des frais expos...

Vu la requête, enregistrée le 14 décembre 2000, présentée par la SCI DU BEC DE L'AIGLE, dont le siège est Lasfargues à Sansac de Marmiesse (15130), représentée par son gérant en exercice ;

La SCI DU BEC DE L'AIGLE demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9900426 du 17 octobre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de l'année 1994, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 8 447 francs au titre des frais exposés dans l'instance et non compris dans les dépens ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 2 février 2006 :

- le rapport de Mlle Vinet, conseiller ;

- et les conclusions de M. Pourny, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que le jugement attaqué était fondé sur les dispositions des articles 256 et 271 du code général des impôts, ainsi que sur celles des articles 209 et 210 de l'annexe II audit code, applicables en l'espèce ; que, dès lors, la circonstance que le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand ait surabondamment cité les dispositions, non applicables en l'espèce, du 1° de l'article 238 à l'annexe II au code général des impôts, est sans influence sur la régularité dudit jugement ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

Considérant qu'aux termes du I de l'article 256 du code général des impôts : « Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens meubles et les prestations de services effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. » ; qu'aux termes de l'article 260 du même code : « Peuvent sur leur demande acquitter la taxe sur la valeur ajoutée : (…) 2° Les personnes qui donnent en location des locaux nus pour les besoins de l'activité d'un preneur assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée ou, si le bail est conclu à compter du 1er janvier 1991, pour les besoins de l'activité d'un preneur non assujetti. » ; qu'aux termes du 1. du I de l'article 271 : « La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération » ; que selon les termes de l'article 209 de l'annexe II au code général des impôts : « Les assujettis qui réalisent exclusivement des opérations ouvrant droit à déduction sont autorisés à déduire la totalité de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les biens constituant des immobilisations. » ; qu'aux termes de l'article 210 de la même annexe : « I. Lorsque des immeubles sont cédés ou apportés avant le commencement de la neuvième année qui suit celle de leur acquisition ou de leur achèvement et que la cession ou l'apport ne sont pas soumis à la taxe sur le prix total ou la valeur totale de l'immeuble, l'assujetti est redevable d'une fraction de la taxe antérieurement déduite. Cette fraction est égale au montant de la déduction diminuée d'un dixième par année civile ou fraction d'année civile écoulée depuis la date à laquelle l'immeuble a été acquis ou achevé. Sont assimilés à une cession ou un apport, la cessation de l'activité ou la cessation des opérations ouvrant droit à déduction ainsi que le transfert entre différents secteurs d'activités d'un assujetti prévus à l'article 213. (…) II. Les dispositions du I s'appliquent aux autres biens constituant des immobilisations qui sont cédés, apportés ou ont disparu avant le commencement de la quatrième année qui suit celle de leur acquisition, de leur importation ou de leur première utilisation. Toutefois, la diminution est d'un cinquième au lieu d'un dixième par année civile ou fraction d'année civile. » ;

Considérant qu'il résulte, en premier lieu, de l'instruction que la SCI DU BEC DE L'AIGLE a, par acte du 5 avril 1987, acquis un terrain à bâtir dans la commune de Laveissière afin d'y édifier un immeuble à usage d'hôtel-café-restaurant ; que ce bien a été donné à bail à la SARL Hôtel du Bec de l'Aigle aux termes d'un contrat en date du 16 juin 1987 moyennant le versement par le preneur d'un loyer annuel de 510 000 francs HT ; que la SCI DU BEC DE L'AIGLE a opté le 1er octobre 1987 pour son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'il est constant qu'elle a porté en déduction au titre de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat du terrain et la construction, les sommes de 651 274 francs au titre de l'année 1988, 16 695 francs au titre de l'année 1990 et de 6 038 francs au titre de l'année 1991 ; que l'administration a remis en cause une fraction de cette déduction au motif que la SCI ne pouvait être regardée comme exerçant une activité économique au sens de l'article 256 du code général des impôts en raison de la perception de loyers d'un montant très inférieur à celui fixé par le bail au cours des années 1989, 1990 et 1991 et de l'absence de perception des loyers à compter de l'année 1992 ;

Considérant, d'une part, que les biens en cause n'ont pas cessé, de 1988, année de leur réalisation ou de leur acquisition, jusqu'en 2000, année de leur cession, d'être utilisés par la SARL locataire pour ses activités hôtelières, et que la société civile immobilière requérante et cette SARL ont continué d'être liées par un contrat de bail commercial stipulant le paiement par la preneuse de loyers annuels d'un montant de 510 000 francs ; que, d'autre part, il est vrai, les loyers payés en 1988, 1989, 1990, 1991 ont été d'un montant, quoique significatif, inférieur aux montants stipulés, et ont été nuls pendant les quatre années 1992 à 1995, leur paiement ayant repris de 1996 à 2000, pour un montant total de 534 272 francs ; que cependant la société civile immobilière requérante expose qu'il existait des motifs, tenant à la situation financière de la SARL, qui connaissait une situation nette négative de - 3 113 521 francs au 30 novembre 1993, et à une conjoncture locale difficile dans le secteur d'activité considéré, pour qu'elle ne réclamât pas le paiement intégral et immédiat des loyers dus et ne tentât pas une substitution de locataire ; que, quelle que soit la qualité de leur pertinence au regard d'une gestion commerciale optimale, ces motifs qui n'étaient pas étrangers à la gestion de l'entreprise, n'étaient ni abusifs ni frauduleux et, dans les circonstances sus-relatées de l'espèce, ne traduisaient pas une volonté de cesser l'exploitation ; qu'ainsi la circonstance que la société civile immobilière requérante n'a pas réclamé l'intégralité des loyers contractuellement dus par la société preneuse, et que celle-ci a constaté dans les écritures de l'exercice clos en 1994 l'extinction de sa dette, ne peuvent être regardées comme impliquant que la société requérante avait cessé en 1994 d'exercer une activité économique, ou qu'elle avait cessé d'affecter les biens en cause à une telle activité ; que, dès lors, l'administration ne pouvait remettre en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée opérée par la société sur le fondement des dispositions précitées du code général des impôts ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SCI DU BEC DE L'AIGLE est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand a rejeté sa demande tendant à la réduction des impositions litigieuses ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales : « Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration des impôts à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. Lorsque les sommes consignées à titre de garanties en application des articles L. 277 et L. 279 doivent être restituées en totalité ou en partie, la somme à rembourser est augmentée des intérêts prévus au premier alinéa. Si le contribuable a constitué des garanties autres qu'un versement en espèces, les frais qu'il a exposés lui sont remboursés dans les limites et conditions fixées par décret. » ; qu'il résulte de ces dispositions que le paiement d'intérêts moratoires sur les sommes remboursées au contribuable lorsque l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par une décision de justice et, le cas échéant, le remboursement des frais exposés pour la constitution de garanties, autres qu'une consignation, est de droit ; que, toutefois, la SCI DU BEC DE L'AIGLE n'allègue pas l'existence d'un litige né et actuel l'opposant au comptable chargé du recouvrement des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles elle a été assujettie ; qu'il suit de là que les conclusions de sa requête tendant à la condamnation de l'Etat au versement d'intérêts moratoires sont irrecevables et ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la SCI DU BEC DE L'AIGLE et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1 : Le jugement du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand en date du 17 octobre 2000 est annulé.

Article 2 : La SCI DU BEC DE L'AIGLE est déchargée du complément de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de l'année 1994.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 000 euros à la SCI DU BEC DE L'AIGLE au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus de la requête de la SCI DU BEC DE L'AIGLE est rejeté.

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N° 00LY02614


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 5eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 00LY02614
Date de la décision : 23/02/2006
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Fiscal

Composition du Tribunal
Président : M. BERNAULT
Rapporteur ?: Melle Camille VINET
Rapporteur public ?: M. POURNY

Origine de la décision
Date de l'import : 04/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2006-02-23;00ly02614 ?
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