Vu, I, sous le n° 03LY00061, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 2003, présentée pour l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION (OPAC) DE SAINT-ÉTIENNE REGION, représenté par son président dûment habilité par délibération du conseil d'administration du 30 janvier 2003, par Me Méténier, avocat au barreau de Saint-Étienne ;
L'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 9900389, en date du 15 novembre 2002, par lequel le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la condamnation du CENTRE REGIONAL DES ŒUVRES UNIVERSITAIRES ET SCOLAIRES (CROUS) DE LYON - SAINT-ÉTIENNE à lui payer la somme de 154 712,60 euros (1 014 848,14 francs), assortie des intérêts au taux légal, au titre des loyers impayés, la somme de 921 849,78 euros (6 046 938,15 francs), assortie des intérêts au taux légal, en réparation du préjudice que lui a occasionné la résiliation anticipée du contrat de bail conclu le 2 octobre 1989 et la somme de 1 525 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
2°) de faire droit à ses conclusions présentées devant le Tribunal administratif de Lyon ou, subsidiairement, de procéder à un partage équitable des conséquences financières de la résiliation de la convention ;
3°) de condamner le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Classement CNIJ : 39-04-02-01 39-04-02-03
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Vu, II, sous le n° 03LY00323, la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 21 février 2003, présentée pour l'OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION (OPAC) DE SAINT-ÉTIENNE REGION, représenté par son président dûment habilité par délibération du conseil d'administration du 30 janvier 2003, par Me Méténier, avocat au barreau de Saint-Étienne ;
L'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION demande au juge des référés de la Cour, en application de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner le CROUS DE LYON - SAINT-ETIENNE à lui verser une provision de 154 712,60 euros (1 014 848,14 francs) au titre des loyers impayés et la somme de 921 849,78 euros (6 046 938,15 francs) au titre de l'indemnité de résiliation anticipée à valoir sur le montant de l'indemnité demandée dans sa requête susvisée n° 03LY00061 ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 février 2004 :
- le rapport de M. Besle, premier conseiller ;
- les observations de Me Méténier, avocat de l'OPAC DE SAINT-ETIENNE REGION et de Me Philippe, avocat du CROUS DE LYON - SAINT ETIENNE ;
- et les conclusions de Mme Richer, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes susvisées de l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION tendent à la réparation du même dommage ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;
Sur la recevabilité de la requête n° 03LY00061 :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4. ; que le jugement attaqué du 15 novembre 2002 a été notifié à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION le 25 novembre 2002 ; que sa requête dirigée contre ledit jugement a été enregistrée au greffe de la Cour le 16 janvier 2003, dans le délai d'appel ; que, par suite, la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté soulevée par le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE doit être écartée ;
Sur les conclusions tendant à la condamnation du CROUS :
Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que dans le cadre de la réhabilitation d'un immeuble situé dans le quartier de Montchovet à Saint-Étienne, dans le but notamment de procéder à une diversification de la population et de résorber les logements vacants, l'OFFICE PUBLIC D'HABITATIONS A LOYER MODERE DE SAINT-ÉTIENNE REGION, transformé depuis en OFFICE PUBLIC D'AMENAGEMENT ET DE CONSTRUCTION (OPAC), a conclu, le 2 octobre 1989, avec le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE une convention d'une durée de quinze ans pour la location de 120 logements répartis sur treize étages de l'immeuble et spécialement réhabilités pour être affectés au service public du logement des étudiants ; que, toutefois, confronté à une désaffection des étudiants pour ces logements imputée au niveau élevé d'insécurité dans le quartier, le CROUS a décidé, en 1993 et en 1994, une restitution partielle des logements situés sur huit étages de l'immeuble, puis, par lettre du 29 juin 1995, la résiliation unilatérale et sans indemnité de la convention à compter du 1er septembre 1995 ; que l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION a alors saisi le Tribunal administratif de Lyon d'une demande tendant à la condamnation du CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE à lui payer, d'une part, une somme de 921 849,78 euros correspondant aux annuités restant dues au 1er septembre 1995, date de la résiliation totale, de l'emprunt d'un montant de 4 385 000 francs qu'il avait contracté auprès de la Caisse des dépôts et consignations pour financer les travaux de réhabilitation des logements et, d'autre part, une somme 154 712,60 euros correspondant aux loyers que le CROUS aurait dû lui payer pendant les années 1993 à 1995 pour les logements qui lui avaient été restitués ; que par le jugement attaqué, en date du 15 novembre 2002, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande d'indemnisation au motif que la résiliation de la convention était justifiée par un cas de force majeure ;
En ce qui concerne le principe de la responsabilité :
Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention susmentionnée du 2 octobre 1989 : En cas de résiliation du bail par le CROUS avant l'expiration de la période contractuelle prévue à l'article 4, le CROUS s'engage à verser à l'OPHLM des indemnités annuelles correspondant au montant des annuités (intérêts et capital), restant à courir à ladite date, des emprunts contractés par l'OPHLM pour le financement des travaux de réhabilitation et de transformation des logements ;
Considérant, en premier lieu, que pour refuser d'indemniser l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION, le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE soutient que la résiliation du bail est motivée par un cas de force majeure résultant des conditions d'insécurité dans le quartier qui étaient imprévisibles lors de la signature du contrat, extérieures à la volonté des parties et devenues incompatibles avec le logement d'étudiants ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE avait accepté de louer des logements pour accueillir des étudiants dans un quartier qui était déjà confronté, lors de la signature du bail en 1989, à des problèmes de délinquance ; qu'en dépit des efforts de réhabilitation de ce quartier, la persistance d'une situation d'insécurité, qui d'ailleurs est restée stable, dissuadant les étudiants de venir s'y installer, ne pouvait pas être imprévisible au moment de la signature du bail ; que, par suite, le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE n'est pas fondé à soutenir que le niveau d'insécurité dans le quartier était un événement imprévisible constitutif d'un cas de force de majeure pour justifier la résiliation sans indemnité du bail le liant à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION ;
Considérant, en deuxième lieu, que la circonstance que l'avenant prévu par le dernier alinéa de l'article 6 de la convention pour prendre acte du coût des travaux, estimés alors à 6 millions de francs, et du montant des annuités d'emprunt contracté par l'OPHLM, n'ait pas été signé par les parties, ne fait pas obstacle à l'indemnisation de l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION dès lors qu'il résulte de l'instruction que ce dernier a effectivement contracté un prêt pour le financement de la rénovation dans les limites de l'enveloppe de 6 millions de francs qui avait été fixée ;
Considérant, en troisième lieu, que le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE soutient que l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION a commis une faute dans l'exécution du contrat en n'assurant pas une occupation paisible des locaux loués, notamment en cessant de louer les premiers étages aux services de police pour les remplacer par des appelés du contingent chargés de l'îlotage dans le quartier ; que, toutefois, la convention du 2 octobre 1989, qui rappelait dans son préambule ce projet d'accueil des services de police, ne comportait aucun engagement contractuel sur ce point à l'égard du CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE ; que ce dernier ne saurait non plus imputer à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION, qui n'est pas chargé du maintien de l'ordre dans le quartier, un manquement à ses obligations contractuelles pour s'être abstenu de prendre des mesures contre l'insécurité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION est fondé à soutenir que la résiliation anticipée par le CROUS de la convention du 2 octobre 1989 engage sa responsabilité et que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande de condamnation du CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE ;
En ce qui concerne le montant de l'indemnité :
Considérant qu'il résulte des stipulations précitées de l'article 6 de la convention qu'en cas de résiliation anticipée l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION peut seulement prétendre obtenir le versement des annuités d'emprunt, en intérêts et capital, restant à courir à la date de la résiliation du bail ; que, la circonstance que l'immeuble faisant l'objet du bail ait été détruit en 1999 est sans incidence sur la portée de cette clause contractuelle ; qu'en revanche, l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION n'est pas fondé à demander le remboursement des loyers que le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE aurait dû lui payer pendant les années 1993 à 1995 pour les logements qui lui avaient été restitués au cours de cette période dès lors qu'une telle indemnité n'était pas stipulée ;
Considérant que, par suite, il y a lieu de condamner le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE à payer à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION la somme de 921 849,78 euros qu'il demande au titre des annuités de l'emprunt restant à payer au 1er septembre 1995, date de la résiliation de la convention ; que ladite somme portera intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 1999, date de la demande introductive d'instance devant le tribunal administratif ;
Sur la demande de provision :
Considérant que le présent arrêt se prononçant sur le fond du litige, il n'y a plus lieu de statuer sur la demande de provision présentée dans la requête susvisée n° 03LY00323 ;
Sur les conclusions tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer au CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE la somme qu'il demande au titre des frais exposés par celui-ci et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu en revanche de condamner le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE à payer à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION une somme de 1 000 euros sur le fondement de ces dispositions ;
DÉCIDE :
Article 1 : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 15 novembre 2002 est annulé.
Article 2 : Le CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE est condamné à verser à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION la somme de 921 849,78 euros avec intérêts au taux légal à compter du 26 janvier 1999.
Article 3 : Le CROUS DE LYON - SAINT ETIENNE versera à l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION une somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions du CROUS DE LYON - SAINT-ÉTIENNE et le surplus des conclusions de la requête n° 03LY00061 de l'OPAC DE SAINT-ÉTIENNE REGION sont rejetés.
Article 5 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 03LY00323.
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N°03LY00061 - N°03LY00323