La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/07/2003 | FRANCE | N°97LY02460

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4eme chambre - formation a 5, 24 juillet 2003, 97LY02460


Vu sous le n°97LY02460, le recours, enregistré au greffe de la Cour le 25 septembre 1997, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Le ministre demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n°9202536 en date du 26 juin 1997 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat solidairement avec la SOCIETE SOGEA et la SOCIETE BRUNEL ET FILS à payer au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ la somme de 4 230 017,25 francs et à garantir la SOCIETE SOGEA à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre ;

-

-----------------------

Classement CNIJ : 39-06-01-02-005

-----------------...

Vu sous le n°97LY02460, le recours, enregistré au greffe de la Cour le 25 septembre 1997, présenté par le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE ;

Le ministre demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n°9202536 en date du 26 juin 1997 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a condamné l'Etat solidairement avec la SOCIETE SOGEA et la SOCIETE BRUNEL ET FILS à payer au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ la somme de 4 230 017,25 francs et à garantir la SOCIETE SOGEA à hauteur de 50 % des condamnations prononcées à son encontre ;

------------------------

Classement CNIJ : 39-06-01-02-005

------------------------

2') de surseoir à l'exécution du jugement ;

3°) d'ordonner une nouvelle expertise ;

.................................................................................................................

II°) Vu sous le n° 97LY02489, la requête et le mémoire ampliatif enregistrés les 29 septembre et 21 novembre 1997 au greffe de la Cour, présentés pour la SOCIETE BRUNEL ET FILS, dont le siège est situé ..., B.P.75, 42602 Montbrison CEDEX, par Me Y..., avocat au barreau de Lyon ;

La SOCIETE BRUNEL ET FILS demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n°9202536 en date du 26 juin 1997 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée solidairement avec la SOCIETE SOGEA et l'Etat à payer au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ la somme de 4 230 017,25 francs et les frais d'expertise ;

2') de surseoir à l'exécution du jugement ;

3°) de rejeter la demande du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ;

4°) à titre subsidiaire d'ordonner une expertise aux fins de déterminer les travaux à exécuter et leur coût ;

5°) de condamner l'Etat à la garantir de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

6°) de condamner le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ou qui mieux le devra à lui payer la somme de 20 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

................................................................................................................

III°) Vu sous le n° 97LY02494, la requête enregistrée le 30 septembre 1997 au greffe de la Cour, présentée pour la SOCIETE SOGEA, dont le siège est situé ..., par Me X..., avocat au barreau de Lyon ;

La SOCIETE SOGEA demande à la Cour :

1') d'annuler le jugement n°9202536 en date du 26 juin 1997 par lequel le Tribunal administratif de Lyon l'a condamnée solidairement avec la SOCIETE BRUNEL ET Fils et l'Etat à payer au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ la somme de 4 230 017,25 francs et les frais d'expertise ;

2') de surseoir à l'exécution du jugement ;

3°) de rejeter la demande du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ;

4°) à titre subsidiaire à la réformation du jugement en tant qu'il a limité à 50 % la garantie de l 'Etat ;

5°) de condamner l'Etat à la garantir intégralement de toutes les condamnations prononcées à son encontre ;

6°) d'ordonner une expertise aux fins de déterminer les travaux à exécuter et leur coût ;

7°) de condamner le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ à lui payer la somme de 10 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

.................................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu le code civil ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 juin 2003 :

- le rapport de Mme RICHER, premier conseiller ;

- les observations de Me BORDET, avocat du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ, de Me ARNOULD, avocat de la SOCIETE SOGEA, et de Me FEUILLET-LAUFER, avocat de la SOCIETE BRUNEL ET FILS ;

- et les conclusions de M. BOURRACHOT, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :

Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre un même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

Sur la fin de non recevoir opposée par le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ aux requêtes de la SOCIETE BRUNEL ET FILS et de la SOCIETE SOGEA :

Considérant que la SOCIETE BRUNEL ET FILS et la SOCIETE SOGEA, qui sont deux sociétés anonymes sont représentées à l'instance par leur président-directeur général ; que celui-ci a qualité pour agir au nom de la société en application de l'article 113 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales ; que dès lors, et contrairement à ce que soutient le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ, les requêtes de la SOCIETE BRUNEL ET FILS et de la SOCIETE SOGEA sont recevables ;

Sur la responsabilité des sociétés SOGEA et BRUNEL et fils :

En ce qui concerne la responsabilité contractuelle :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens des requêtes :

Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 2-I de la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions, rendues applicables aux syndicats mixtes associant des collectivités territoriales, des groupements de collectivités territoriales et d'autres personnes de droit public en vertu de l'article 56 de la même loi, les actes pris par les autorités des communes et de leurs établissements publics locaux sont exécutoires de plein droit dès lors qu'il a été procédé à leur publication ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans le département ; que l'absence de transmission de la délibération autorisant le président d'un syndicat mixte à signer un contrat avant la date à laquelle le président procède à sa conclusion entraîne la nullité dudit contrat ; qu'entaché de nullité, un tel contrat de droit public ne peut être régularisé ultérieurement par la seule transmission au préfet de la délibération du conseil syndical ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le marché passé entre le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ et le groupement d'entreprises SOGEA- BRUNEL n'a été approuvé que le 9 juin 1987 par délibération du comité syndical, soit le jour même de sa signature ; que, dès lors, à la date de la signature du marché, le président du syndicat ne pouvait légalement engager le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ; que la transmission ultérieure de la délibération autorisant le président à signer n'a pas eu pour effet de couvrir le vice d'incompétence entachant le contrat de nullité ; que, par suite, le marché n'a pu faire naître aucune obligation à la charge des SOCIETES SOGEA et BRUNEL ET FILS ; qu'ainsi, la SOGEA et la SOCIETE BRUNEL ET FILS sont fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon les a condamnées à indemniser le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ;

En ce qui concerne la garantie décennale :

Considérant que l'obligation de garantie qui pèse sur les constructeurs en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ne joue qu'entre les personnes qui ont été liées par un contrat de louage d'ouvrage ; qu'en raison de la nullité des marchés passés avec les SOCIETES SOGEA et BRUNEL ET FILS, le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ n'est pas fondé à rechercher leur responsabilité décennale ;

En ce qui concerne la répétition de l'indu :

Considérant que lorsque le juge saisi d'un litige engagé sur le terrain de la responsabilité contractuelle est conduit à constater d'office, comme c'est le cas en l'espèce, la nullité du contrat, les cocontractants peuvent poursuivre le litige qui les oppose en invoquant, y compris pour la première fois en appel, des moyens relevant d'une autre cause juridique ; que, toutefois, de telles conclusions ne sont pas recevables, car constituant une demande nouvelle, si l'objet du litige devant le juge d'appel n'est pas identique à celui soumis au premier juge ; que les conclusions du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ tendant à la répétition des sommes indûment versées aux deux sociétés en application de contrats de nul effet n'ont pas le même objet que les conclusions tendant à la condamnation des mêmes sociétés à réparer les malfaçons de l'ouvrage qu'elles ont construit ; que, par suite, lesdites conclusions constituent une demande nouvelle en appel et sont dès lors irrecevables ;

En ce qui concerne la responsabilité pour faute non contractuelle :

Considérant qu'un maître d'ouvrage est recevable, après constatation par le juge de la nullité du marché le liant à un constructeur, à invoquer pour la première fois en appel les fautes qu'aurait commises ce constructeur, en livrant en dehors de toute obligation contractuelle régulière mais contre paiement de ses prestations un ouvrage non conforme à sa destination pour avoir été construit en méconnaissance des règles de l'art même sans contrat ;

Considérant que si le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ fait valoir que les SOCIETES SOGEA et BRUNEL ET FILS auraient commis des fautes , il ne met pas le juge à même de se prononcer sur la méconnaissance des règles de l'art en l'absence de toute précision sur ces fautes ;

Sur la responsabilité de l'Etat :

Considérant, d'une part, qu'il n'est pas contesté que les désordres affectant la qualité de l'eau traitée par l'usine de Pleuvey à Savigneux, qui compte tenu de son goût est difficilement buvable sont de nature à rendre l'ouvrage impropre à sa destination ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert désigné en référé par le Tribunal administratif de Lyon, que la qualité de l'eau provenant du canal du Forez s'est sensiblement dégradée après la réception des travaux, au cours de la période de 1989 à 1992 ; que les désordres sont dus non à un vice de conception imputable aux services de l'Etat, qui étaient chargés de la maîtrise d'oeuvre des travaux, mais à l'erreur commise par le maître de l'ouvrage dans le choix des ressources en eau, dont les effets ont été aggravés par l'augmentation de la turbidité liée à un phénomène de sécheresse ; qu'il s'ensuit qu'il ne peut être remédié aux désordres affectant la qualité de l'eau traitée que par des ouvrages non prévus au marché ; qu'ainsi, la responsabilité de l'Etat ne peut être recherchée sur le fondement des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil ;

Considérant, d'autre part, qu'il résulte de ce qui vient d'être dit ci-dessus que les désordres qui résultent d'une dégradation de la qualité de l'eau traitée n'étaient pas apparents lors de la réception des travaux ; qu'ainsi, le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ n'est, en tout état de cause, pas fondé à soutenir que les services de l'Etat auraient commis une faute dans l'exercice de leur mission de conseil du maître de l'ouvrage lors de la réception des travaux ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'AGRICULTURE ET DE LA PECHE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a condamné l'Etat à indemniser le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre les frais d'expertise à la charge du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ ;

Sur les frais exposés non compris dans les dépens :

Considérant que, d'une part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, reprenant les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, font obstacle à ce que la SOCIETE SOGEA, la SOCIETE BRUNEL ET FILS et l'Etat, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, soient condamnés à payer au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ et à la S.A.U.R une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; que, d'autre part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ à payer une somme de 1000 euros chacune à la SOCIETE SOGEA et à la SOCIETE BRUNEL ET FILS sur le fondement des mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

ARTICLE 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon en date du 26 juin 1997 est annulé en tant qu'il a condamné solidairement la SOCIETE SOGEA, la SOCIETE BRUNEL et l'Etat à verser au SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ les sommes de 4 230 017,25 francs et de 57 681,94 francs.

ARTICLE 2 : La demande présentée par le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ devant le Tribunal administratif de Lyon est rejetée.

ARTICLE 3 : Les frais d'expertise d'un montant de 57 681,94 francs (8793,56 euros) sont mis à la charge du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ.

ARTICLE 4 : Le SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ est condamné à payer la somme de 1 000 euros à la SOCIETE SOGEA d'une part, et à la SOCIETE BRUNEL ET FILS d'autre part.

ARTICLE 5 : Les conclusions d'appel incident du SYNDICAT MIXTE D'IRRIGATION ET DE MISE EN VALEUR DU FOREZ et les conclusions de la S.A.U.R. présentées sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 97LY02460 - 97LY02489 - 97LY02494 7


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4eme chambre - formation a 5
Numéro d'arrêt : 97LY02460
Date de la décision : 24/07/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. JOUGUELET
Rapporteur ?: Mme RICHER M
Rapporteur public ?: M. BOURRACHOT
Avocat(s) : SCP VERNE BORDET PERRIER PIQUET -GAUTHIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2003-07-24;97ly02460 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award