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03/06/2003 | FRANCE | N°96LY00624

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3eme chambre - formation a 3, 03 juin 2003, 96LY00624


Vu, en date du 2 mai 2001, l'arrêt par lequel la Cour administrative d'appel de céans, avant de statuer sur la requête de M. Christophe X tendant à l'annulation du jugement n°94673 du 11 janvier 1996 du Tribunal administratif de Grenoble et enregistrée au greffe de la Cour sous le n°96LY00624, a ordonné avant dire droit une expertise ;

Vu le rapport enregistré au greffe de la Cour le 6 décembre 2002, déposé par M. SAVORNIN, expert désigné par le président de la Cour le 15 mai 2001 ;

Vu, enregistré le 22 avril 2003, le mémoire présenté pour M. X par Me X, avocat

, qui demande la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER à lui ver...

Vu, en date du 2 mai 2001, l'arrêt par lequel la Cour administrative d'appel de céans, avant de statuer sur la requête de M. Christophe X tendant à l'annulation du jugement n°94673 du 11 janvier 1996 du Tribunal administratif de Grenoble et enregistrée au greffe de la Cour sous le n°96LY00624, a ordonné avant dire droit une expertise ;

Vu le rapport enregistré au greffe de la Cour le 6 décembre 2002, déposé par M. SAVORNIN, expert désigné par le président de la Cour le 15 mai 2001 ;

Vu, enregistré le 22 avril 2003, le mémoire présenté pour M. X par Me X, avocat, qui demande la condamnation du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER à lui verser les sommes, assorties des intérêts à compter de sa demande introductive d'instance puis capitalisés, de 3 812 euros au titre de l'incapacité permanente partielle, 1 525 euros au titre de la gêne fonctionnelle, 7 623 euros au titre du préjudice esthétique et psychologique et 2 000 euros au titre des souffrances endurées, de condamner le dit centre hospitalier aux dépens et à lui verser la somme de 2 600 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Classement CNIJ : 60-02-01-01

Vu, enregistré le 24 avril 2003 le mémoire présenté pour le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER par Me le Prado, avocats aux conseils, qui conclut au rejet de la requête ;

Vu, enregistré le 24 avril 2003, le mémoire présenté pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE par Me de Laborie, avocat, qui demande la condamnation du centre hospitalier à lui verser le montant des prestations en nature qui lui sont dues, soit 2 458,18 euros, le montant des arrérages échus de rente d'accident du travail, soit 16 709,29 euros et au montant du capital de cette même rente, soit 24 112,19 euros, et demande la condamnation du centre hospitalier à lui verser l'indemnité forfaitaire due en application de l'article L 376-1 alinéa 5 du code de la sécurité sociale ainsi que la somme de 800 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu en date du 24 avril 2003 le courrier par lequel le président de la 3ème chambre a, sur le fondement de l'article R. 611-7 du code de justice administrative informé les parties de ce que la Cour était susceptible de se fonder sur un moyen soulevé d'office et tiré de ce que les conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE tendant à l'application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, sont nouvelles en appel et par suite irrecevables ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2003 :

- le rapport de M. d'HERVE, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. CLOT, commissaire du gouvernement ;

Sur la responsabilité du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER :

Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment des conclusions de l'expert missionné par la Cour que le délai qui s'est écoulé le 30 mai 1991 entre le sectionnement accidentel de la première phalange de l'index droit de M. X et le début de la tentative de réimplantation effectuée au centre hospitalier de Grenoble n'était pas à lui seul susceptible de compromettre le succès de cette opération, qui dépendait essentiellement en l'espèce des conditions dans lesquelles le segment amputé avait été conservé et transporté ; qu'il est constant également que l'opération menée au centre hospitalier de Grenoble l'a été conformément aux règles de l'art ; qu'il est cependant admis pour de telles opérations de réimplantation d'un doigt amputé un taux moyen de réussite de 50 % lorsque les conditions optimales sont réunies ; qu'ainsi la faute commise par le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER, qui, ainsi qu'il ressort des énonciations de l'arrêt avant dire droit susvisé de la Cour, a commis des erreurs dans le conditionnement et le transport du segment amputé, a compromis le succès de l'opération en faisant perdre une chance à M. X de conserver l'intégrité de son index ;

Sur l'évaluation du préjudice imputable au centre hospitalier :

Considérant en premier lieu qu'il sera fait une juste appréciation des frais médicaux et pharmaceutiques et de l'incapacité temporaire totale dont il a souffert qui ont en lien direct avec les conséquences de l'échec de la réimplantation de la phalange de M. X en les fixant au quart du préjudice total subi de ce chef à l'occasion de son accident de travail, soit la somme de 1 229 euros ;

Considérant, en deuxième lieu, que l'amputation rendue nécessaire par l'échec de la réimplantation est la cause d'une incapacité permanente partielle résiduelle de 10% alors que selon les conclusions concordantes des experts le taux de cette incapacité n'aurait été que de 5% en cas de succès de l'opération ; que cette part de préjudice peut être fixé à 5 336 euros, dont 3 811 euros à titre de réparation des seuls troubles physiologiques ;

Considérant, en troisième lieu, que les souffrances physiques et morales supplémentaires liées à l'échec de la réimplantation, qualifiées de légères par l'expert, ainsi que le préjudice esthétique léger constaté peuvent être évalués à 3 049 euros ;

Considérant qu'au regard du taux de risque d'échec admis dans ce type d'opération, la réparation par le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER du dommage subi par M. X, qui a du être réamputé au tiers distal de la phalange moyenne de l'index, doit être fixé à une fraction des différents chefs de préjudice subis ; qu'eu égard à ce qui précède, il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'espèce en fixant cette fraction à la moitié, soit la somme de 2 520 euros au titre de l'atteinte à l'intégrité physique et à 2 287 euros au titre des autres dommages ;

Sur les droits de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 454-1, alinéa 3, du code de la sécurité sociale applicable aux accidents du travail : Si la responsabilité du tiers auteur de l'accident est entière ou si elle est partagée avec la victime, la caisse est admise à poursuivre le remboursement des prestations mises à sa charge à due concurrence de la part d'indemnité mise à la charge du tiers qui répare l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, à l'exclusion de la part d'indemnité, de caractère personnel, correspondant aux souffrances physiques ou morales par elle endurées et au préjudice esthétique et d'agrément ... ; qu'il résulte de ces dispositions que le recours de la caisse s'exerce sur les sommes allouées à la victime en réparation de la perte d'une chance d'éviter l'aggravation de son préjudice corporel, la part d'indemnité personnelle étant seule exclue de ce recours ;

Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE a droit dans les limites ainsi indiquées au remboursement des sommes qu'elle a versées à M. X, dans la mesure seulement où ces frais sont imputables à la faute du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER ; qu'il résulte de ce qui précède que les frais médicaux remboursés par la caisse d'assurance maladie et les indemnités journalières qu'elle a versées à la victime en lien avec cette faute peuvent être fixés à 1 229 euros ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la faute commise par le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER a entraîné une aggravation de l'incapacité permanente partielle de la victime et qu'en l'absence d'une telle faute, cette incapacité n'aurait été que de 5 % ; que la CPAM qui a accordé à la victime une rente d'accident du travail correspondant à une incapacité permanente partielle de 10 %, peut prétendre au remboursement, d'une part, de 50 % des arrérages échus au 4 février 2003, dernière date à laquelle la caisse a indiqué ce montant, de la rente versée à M. X et, d'autre part, non pas, en l'absence d'accord du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER, du capital constitutif de la rente correspondant aux arrérages à échoir, mais seulement au remboursement, au fur et à mesure de leurs échéances, de la moitié des arrérages d'une rente, déterminée par application des barèmes fixant le capital représentatif d'une rente d'accident du travail, dont le capital constitutif ne pourrait être supérieur à la différence entre la part d'indemnité mise à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER sur laquelle peut s'exercer la créance de la caisse et le montant des sommes versées par la caisse au 4 février 2003 ;

Considérant que le total des débours que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE a exposés s'élève à la somme de 9 583,50 euros au titre des seules prestations et arrérages de rente qu'elle a versées à M. X, somme déjà supérieure à celle de 2 520 euros sur laquelle elle peut exercer son recours ; qu'il y a lieu dès lors de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER à verser une somme de 2 520 euros à la CPAM de Grenoble ; que cette somme portera intérêts à compter du 9 septembre 1994 ; que la capitalisation des intérêts a été demandée par mémoire du 19 juillet 2000 et qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette même date ;

Considérant que les conclusions de la caisse tendant à la condamnation du centre hospitalier intercommunal de Créteil à lui verser l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 alinéa 5 du code de la sécurité sociale ont été présentées pour la première fois en cause d'appel et sont, par suite, irrecevables ;

Sur les droits de M. X :

Considérant que les droits de la caisse primaire ci dessus déterminés absorbant l'intégralité de la somme sur laquelle peut s'exercer la créance de la caisse, M. X ne peut prétendre qu'à la réparation de son préjudice esthétique et des douleurs endurées et à la part d'indemnité pour troubles dans ses conditions d'existence ne réparant pas des troubles physiologiques, soit au paiement d'une somme totale de 2 287 euros ; que cette somme portera intérêts à compter du 4 mars 1994 ; que si la capitalisation des intérêts a été demandée par mémoire du 22 décembre 1994, les intérêts n'étaient pas dus à cette date pour au moins une année entière ; qu'une nouvelle demande a été formulée le 15 mars 1996 et qu'à cette date les intérêts étaient dus pour au moins une année entière ; qu'il y a lieu dès lors de faire droit à cette demande tant à cette date qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette même date ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande ;

Sur les frais d'expertise :

Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais de l'expertise organisée en première instance, qui s'élevaient à un montant de 381,12 euros, à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER ; que les frais de l'expertise organisée par l'arrêt avant dire droit suvisé de la Cour, liquidés et taxés à la somme de 926,50 euros, seront également mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER ;

Sur l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ; qu'il y a lieu sur le fondement de ces dispositions de condamner le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT -VALLIER à payer, d'une part, la somme de 1 000 euros à M. X et d'autre part, la somme de 457 euros à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE ;

DÉCIDE :

ARTICLE 1er : Le jugement n° 94673 en date du 11 janvier 1996 du tribunal administratif de Grenoble est annulé.

ARTICLE 2 : Le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER versera à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE la somme de 2 250 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 9 septembre 1994 ; les intérêts échus à la date du 19 juillet 2000, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts ;

ARTICLE 3 : Le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER versera à M. X la somme de 2 287 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 4 mars 1994 ; les intérêts échus à la date du 15 mars 1996, puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

ARTICLE 4 : Le CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER versera par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la somme de 1 000 euros à M. X et celle de 457 euros à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE.

ARTICLE 5 : Le surplus de la requête de M. X et le surplus des conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE de GRENOBLE sont rejetés.

ARTICLE 6 : Les frais d'expertise exposés devant le Tribunal administratif à hauteur de 381,12 euros et devant la Cour administrative d'appel à hauteur de 926,50 euros sont mis à la charge du CENTRE HOSPITALIER DE SAINT-VALLIER.

N° 96LY00624 - 2 -

N° 96LY00624 - 6 -


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 96LY00624
Date de la décision : 03/06/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme JOLLY
Rapporteur ?: M. D'HERVE
Rapporteur public ?: M. CLOT
Avocat(s) : DURAND

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2003-06-03;96ly00624 ?
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