Vu, enregistrée au greffe de la Cour le 28 février 2001, sous le n° 01LY00432, le recours présenté par le MINISTRE DE L'INTERIEUR ;
Le ministre demande à la Cour :
1') d'annuler le jugement n° 992633/001690 du 12 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé deux arrêtés des 15 octobre 1999 et 16 mai 2000 du préfet de la zone de défense centre-est, plaçant M. X en congé longue durée du 29 septembre 1999 au 28 septembre 2000 ;
2') de rejeter la demande de M. X ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
Classement CNIJ : 36-09-02-01
Vu le décret n° 86-442 du 14 mars 1986 ;
Vu le décret n° 95-654 du 9 mai 1995 ;
Vu le décret n° 95-1000 du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 6 mai 2003 :
- le rapport de M. BEAUJARD, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. CLOT, commissaire du gouvernement ;
Considérant que le MINISTRE DE L'INTERIEUR conteste un jugement en date du 12 décembre 2000 par lequel le Tribunal administratif de Dijon a annulé les deux arrêtés des 15 octobre 1999 et 16 mai 2000 du préfet de la zone de défense centre-est, plaçant M. X, fonctionnaire de la police nationale, en congé longue durée du 29 septembre 1999 au 28 septembre 2000 ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par M. X :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : 'La juridiction est saisie par requête. La requête ... contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge' ; que le recours du ministre contient un exposé suffisant des moyens exigés par les dispositions de l'article R. 411-1 précité ; que la fin de non-recevoir de M. X doit dès lors être écartée ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant que le ministre soutient que le Tribunal administratif n'a pas mis l'administration en état d'apporter la preuve de la légalité des décisions attaquées en ne prenant en compte que les seuls certificats produits par le demandeur ; que, toutefois, le Tribunal n'avait pas l'obligation de requérir des parties la communication de documents qu'il n'estimait pas utile à la vérification de leurs allégations ; qu'il était toujours loisible à l'administration de proposer à l'intéressé, selon des modalités compatibles avec la déontologie médicale s'agissant de pièces couvertes par le secret médical, la communication des documents qui lui paraissaient nécessaire à la manifestation de la vérité ; qu'ainsi, les premiers juges n'ont pas méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure, ni négligé d'exercer l'un de leurs pouvoirs ;
Sur la légalité :
Considérant qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : Le fonctionnaire en activité a droit : .... 4' A un congé de longue durée en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis... ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X a produit plusieurs attestations médicales aux termes desquelles il n'était atteint d'aucune des affections visées à l'article 34-4 précité de la loi du 11 janvier 1984 ; que ces seuls documents, postérieurs à la date de chacune des décisions attaquées, à laquelle doit s'apprécier leur légalité, ne permettaient pas d'établir qu'à l'une et l'autre de ces dates, l'intéressé n'était pas atteint de l'une desdites affections ; que, dès lors, le ministre est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon, se fondant sur le motif tiré de ce que ce fonctionnaire ne présentait aucune de ces affections, a annulé les arrêtés attaqués ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. X devant le Tribunal administratif de Dijon ;
En ce qui concerne l'arrêté du 15 octobre 1999 :
Considérant que, dans le cas où l'état du dossier ne lui permet pas de se prononcer sur la régularité d'une décision, il appartient au juge administratif de requérir des administrations compétentes la production de tous les documents qu'il juge de nature à permettre la vérification des allégations des parties en cause, à la seule exception de ceux de ces documents dont la communication contreviendrait à une prescription législative ; que si le respect du secret médical s'oppose à ce que le juge demande directement à l'administration la communication de documents couverts par un tel secret, il peut, en revanche, enjoindre à l'administration de communiquer son dossier médical au requérant, selon des modalités compatibles avec les prescriptions du code de déontologie médicale, afin de lui permettre le cas échéant d'en révéler lui-même le contenu au juge administratif en vue de l'exercice par celui-ci de son contrôle de la légalité de la décision attaquée ;
Considérant que le MINISTRE DE L'INTERIEUR s'est fondé sur le dossier médical du requérant pour prendre la décision attaquée en date du 15 octobre 1999 ; que l'état du dossier ne permet pas à la Cour d'apprécier si l'état de santé de M. X justifiait légalement la décision attaquée ; que, dès lors, il y a lieu, avant de statuer sur le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR, d'enjoindre à celui-ci de communiquer au médecin que M. X désignera le dossier médical au vu duquel la décision litigieuse a été prise, afin que l'intéressé décide, le cas échéant, d'autoriser la Cour à en prendre connaissance ;
En ce qui concerne la décision du 16 mai 2000 :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 : ... doivent être motivées les décisions qui : ... refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir... ; que le refus d'un congé de longue maladie est au nombre des décisions qui doivent être motivées ; que le respect des règles relatives au secret médical ne saurait avoir pour effet d'exonérer le préfet de l'obligation d'énoncer les éléments de fait et de droit sur lesquels il fonde sa décision ; qu'en se bornant à viser l'avis émis par le comité médical interdépartemental du secrétariat général pour l'administration de la police de Dijon, l'administration n'a pas satisfait aux dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le MINISTRE DE L'INTERIEUR n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Dijon a annulé l'arrêté du 16 mai 2000 du préfet de la zone de défense centre-est plaçant M. X en congé longue durée du 21 mars au 28 septembre 2000 ;
DÉCIDE :
ARTICLE 1er : Les conclusions du recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR à fin d'annulation du jugement du Tribunal administratif de Dijon en tant qu'il a annulé l'arrêté du 16 mai 2000 sont rejetées.
ARTICLE 2 : Avant dire-droit sur le recours du MINISTRE DE L'INTERIEUR concernant l'arrêté du 15 octobre 1999, il est enjoint au ministre de procéder, dans le délai de deux mois à compter de la notification de la présente décision, à la communication au médecin que M. X désignera du dossier médical sur lequel le ministre s'est fondé pour prendre la décision en litige.
ARTICLE 3 : Tous droits et moyens des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.
N° 01LY00432 - 2 -
N° 01LY00432 - 4 -