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01/04/1999 | FRANCE | N°98LY02313

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 01 avril 1999, 98LY02313


Vu la requête et le mémoire, enregistrés au greffe de la cour le 10 juin 1998 et le 13 juillet 1998, présentés pour M. Omer X..., demeurant ..., par Me Neyret, avocat au barreau de Lyon ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) de prescrire les mesures d'exécution de son arrêt du 20 février 1998 en ordonnant, à peine d'une astreinte de 1. 000 francs par jour de retard, au ministre de l'intérieur de lui restituer le titre de séjour dont il était bénéficiaire avant son expulsion et au ministre des affaires étrangères de lui délivrer un visa pour permettre son retour sur le terr

itoire français ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5. ...

Vu la requête et le mémoire, enregistrés au greffe de la cour le 10 juin 1998 et le 13 juillet 1998, présentés pour M. Omer X..., demeurant ..., par Me Neyret, avocat au barreau de Lyon ;
M. X... demande à la Cour :
1 ) de prescrire les mesures d'exécution de son arrêt du 20 février 1998 en ordonnant, à peine d'une astreinte de 1. 000 francs par jour de retard, au ministre de l'intérieur de lui restituer le titre de séjour dont il était bénéficiaire avant son expulsion et au ministre des affaires étrangères de lui délivrer un visa pour permettre son retour sur le territoire français ;
2 ) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 5. 000 francs en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu les articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et l'article 10 de la loi n 77-1468 du 30 décembre 1977, complétés par l'article 44 de la loi n 93-1352 du 30 décembre 1993 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du18 mars 1999 :
- le rapport de M. BOURRACHOT, premier conseiller ;
- les observations de Me LEDOUBLE substituant Me NEYRET, avocat de M. X... ;
- et les conclusions de M. BEZARD, commissaire du gouvernement ;

Sur l'exécution :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 8-4 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt définitif, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. En cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. Si le jugement ou l'arrêt dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ... " ; qu'il appartient à la Cour, lorsqu'elle est saisie, sur le fondement des dispositions précitées, de conclusions tendant à ce que soit prescrite une mesure d'exécution dans un sens déterminé, de statuer sur ces conclusions en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision ;
Considérant que par un arrêt en date du 19 février 1998 la Cour a annulé l'arrêté du ministre de l'Intérieur du 2 août 1996 ordonnant l'expulsion du territoire français de M. Omer X... au motif que cette décision était intervenue en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il résulte de l'instruction que le ministre de l'intérieur, sans déclarer s'opposer au retour en France de M. X..., n'a cependant pris aucune mesure d'exécution de l'arrêt susvisé ; que le ministre des affaires étrangères, saisi de plusieurs demandes de visa, subordonne l'établissement d'un tel document, à la délivrance par les services préfectoraux d'une autorisation de regroupement familial ;
Considérant, d'une part, que l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté d'expulsion fait revivre à la date de cet arrêté et pour la durée qui restait à courir à cette date le titre de séjour ou le récépissé de demande de titre de séjour en tenant lieu que l'expulsion avait abrogé ; qu'elle permet donc, en principe et dans cette mesure, le retour en France de l'intéressé pendant toute la période de validité de ce titre ou de ce récépissé ; que toutefois, à l'expiration du titre ou du récépissé ainsi remis en vigueur, le renouvellement ou la délivrance du titre demandé sont subordonnés aux conditions prévues par la loi ; que la carte de résident dont bénéficiait le requérant remise en vigueur par l'arrêt de la Cour est expirée le 4 décembre 1997 ; que, toutefois, ce titre de séjour était renouvelable de plein droit en vertu des dispositions de l'article 16 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et n'a pu être renouvelé du fait de l'arrêté d'expulsion annulé par la Cour ; que, dans ces conditions et eu égard au motif de cette annulation, le requérant est fondé à soutenir que l'exécution de la chose jugée implique nécessairement que lui soit renouvelé son titre de séjour ;

Considérant, d'autre part, que l'annulation d'un arrêté d'expulsion fait disparaître rétroactivement l'interdiction de présence sur le territoire qui s'attachait à cet arrêté aussi longtemps qu'il demeurait en vigueur et a pour effet, dans le cas où l'intéressé disposerait d'un titre de séjour en cours de validité, de dispenser de visa l'éventuel retour de l'intéressé lorsque la possession d'un tel document est requise pour entrer en France ; que, cependant, le renouvellement de la carte de résident auquel a droit M. X... et la remise matérielle de ce titre impliquent nécessairement la délivrance d'un visa d'entrée en France ; que M. X... se trouvant dans sa situation administrative antérieure à l'arrêté d'expulsion annulée, les dispositions de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatives au regroupement familial ne lui sont pas applicables et le ministre des affaires étrangères ne peut valablement exiger la production d'une autorisation d'entrer en France au titre du regroupement familial ; qu'ainsi, le requérant est fondé à soutenir que l'exécution de la chose jugée impose nécessairement qu'il lui soit accordé un visa d'entrée en France ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu d'enjoindre aux autorités compétentes, d'une part, de délivrer à M. X... un visa d'entrée en France dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et, d'autre part, de procéder au renouvellement de la carte de résident de M. X... dans le délai d'un mois à compter de son entrée en France ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'assortir ces injonctions d'une astreinte d'un montant de 500 francs par jour de retard à compter de l'expiration de ces délais ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel de condamner l'Etat à payer à M. Omer X... la somme de 5. 000 francs qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Il est enjoint aux autorités compétentes de délivrer à M. X... un visa d'entrée en France dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 2 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'Etat en cas d'inexécution de l'injonction visée à l'article 1er. Le taux de cette astreinte est fixé à 500 francs par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant la notification du présent arrêt.
Article 3 : Il est enjoint aux autorités compétentes de procéder au renouvellement de la carte de résident de M. X... dans le délai d'un mois à compter de son entrée sur le territoire français.
Article 4 : Une astreinte est prononcée à l'encontre de l'Etat en cas d'inexécution de l'injonction visée à l'article 3. Le taux de cette astreinte est fixé à 500 francs par jour de retard à compter de l'expiration d'un délai d'un mois suivant l'entrée de M. X... sur le territoire français.
Article 5 : L'Etat est condamné à verser à M. Omer X... la somme de cinq mille francs (5.000 F.) en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 98LY02313
Date de la décision : 01/04/1999
Sens de l'arrêt : Injonction astreinte
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Recours pour excès de pouvoir

Analyses

- RJ1 ETRANGERS - ENTREE EN FRANCE - VISAS - Délivrance de plein droit en exécution d'un arrêt ayant annulé un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.

335-005-01, 335-02 Annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le renouvellement de la carte de résident auquel a droit l'intéressé et la remise matérielle de ce titre impliquent nécessairement la délivrance d'un visa d'entrée en France. L'intéressé se trouvant dans sa situation administrative antérieure à l'arrêté d'expulsion annulé (1), les dispositions de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatives au regroupement familial ne lui sont pas applicables et le ministre des affaires étrangères ne peut valablement exiger la production d'une autorisation d'entrée en France au titre du regroupement familial. Ainsi, le requérant est fondé à soutenir que l'exécution de la chose jugée impose nécessairement qu'il lui soit accordé un visa d'entrée en France.

- RJ1 ETRANGERS - EXPULSION - Annulation d'un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme - Conséquence - Droit à la délivrance d'un visa d'entrée sur le territoire français - Existence en l'espèce.

54-06-07-005, 54-06-07-008 Arrêt prononçant l'annulation pour excès de pouvoir d'un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La carte de résident dont bénéficiait le requérant remise en vigueur par cet arrêt était expirée avant cette décision. Toutefois, ce titre de séjour était renouvelable de plein droit en vertu des dispositions de l'article 16 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée et n'a pu être renouvelé du fait de l'arrêté d'expulsion annulé. La remise matérielle de ce titre implique nécessairement la délivrance d'un visa d'entrée en France, sans que le ministre puisse valablement opposer le défaut d'autorisation d'entrée sur le territoire national au titre du regroupement familial, dès lors que l'intéressé, se trouvant replacé dans sa situation administrative antérieure à l'arrêté d'expulsion (1), ne peut se voir opposer les dispositions de l'article 29 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 modifiée relatives au regroupement familial. Dans ces conditions et eu égard au motif de cette annulation, l'exécution de la chose jugée implique nécessairement que soit renouvelé le titre de séjour. Il y a lieu d'enjoindre aux autorités compétentes, d'une part, de délivrer à l'intéressé un visa d'entrée en France dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et, d'autre part, de procéder au renouvellement de sa carte de résident dans le délai d'un mois à compter de son entrée en France.

- RJ1 PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - EFFETS D'UNE ANNULATION - Annulation d'un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.

- RJ1 PROCEDURE - JUGEMENTS - EXECUTION DES JUGEMENTS - PRESCRIPTION D'UNE MESURE D'EXECUTION - Annulation d'un arrêté d'expulsion pour violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.


Références :

Arrêté du 02 août 1996
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-4, L8-1
Ordonnance 45-2658 du 02 novembre 1945 art. 16, art. 29

1.

Cf. CE, Section, 1994-11-04, Al Joujo, p. 492 ;

CE 1996-01-15, Guedili et autres, T. p. 938 et 1112


Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: M. Bourrachot
Rapporteur public ?: M. Bézard

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1999-04-01;98ly02313 ?
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