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17/07/1998 | FRANCE | N°95LY00461

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 17 juillet 1998, 95LY00461


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 mars 1995, présentée pour la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX (Haute-Savoie), représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 16 février 1995, par Me X..., avocat au barreau de Bonneville ;
La COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 911219-911696 et 941114 en date du 16 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a accordé à Mme Y..., Messieurs Jérôme et Daniel D..., Mme D'Agostino et à M. A... la décharg

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 mars 1995, présentée pour la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX (Haute-Savoie), représentée par son maire en exercice à ce dûment habilité par délibération du conseil municipal en date du 16 février 1995, par Me X..., avocat au barreau de Bonneville ;
La COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 911219-911696 et 941114 en date du 16 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a accordé à Mme Y..., Messieurs Jérôme et Daniel D..., Mme D'Agostino et à M. A... la décharge des sommes qui leur étaient réclamées par les titres de recettes émis le 23 octobre 1990 à l'encontre des trois premiers demandeurs et le 12 octobre 1993 à l'encontre du dernier pour le recouvrement de redevances fondées sur les articles L. 34 et L. 35-4 du code de la santé publique ;
2 ) de rejeter les demandes de Mme Y..., de Messieurs Jérôme et Daniel D..., de Mme D'Agostino et de M. A... devant le tribunal administratif ;
3 ) de condamner in solidum Mme Y..., Messieurs Jérôme et Daniel D..., Mme D'Agostino et M. A... à lui payer la somme de 8. 000 francs en application des dispositions de l'article L 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ; Vu la loi du 28 pluviôse an VIII ;
Vu le décret n 62-1587 du 29 décembre 1962 modifié ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu les articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et l'article 10 de la loi n 77-1468 du 30 décembre 1977, complétés par l'article 44 de la loi n 93-1352 du 30 décembre 1993 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 juillet 1998 :
- le rapport de M. BOURRACHOT, premier conseiller ;
- les observations de la SCP BRIFFOD-PUTHOD BASTID, avocat de la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX, de Me DOITRAND substituant Me BAVEREZ, avocat de Mme DINO Y..., M. Jérôme C..., M. Daniel C..., Mme D'AGOSTINO et de M. Z... ;
- et les conclusions de M. BEZARD, commissaire du gouvernement ;

Sur les fins de non recevoir opposées par la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX :
Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel : "Sauf en matière de travaux publics, le tribunal administratif ne peut être saisi que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée" ; qu'il résulte de cette disposition que le délai de deux mois qu'elle fixe n'est pas applicable aux demandes dirigées contre les actes tendant à percevoir tout ou partie des sommes nécessaires au financement de travaux publics ; que, dès lors, la commune de Monnetier-Mornex n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont écarté sa fin de non recevoir tirée de la tardiveté des demandes ;
Considérant, d'autre part, que pour ce qui concerne le recouvrement des créances des collectivités territoriales secondaires et de leurs établissements publics, aucune disposition législative ou réglementaire, ni aucun principe de procédure, ne prévoient l'obligation pour le débiteur de saisir le comptable chargé du recouvrement de la créance préalablement à la saisine du juge ; qu'il suit de là que la fin de non recevoir opposée en appel par la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX et tirée d'un défaut de réclamation préalable doit être écartée ;
Sur l'exception d'illégalité de la délibération du 17 mai 1990 Considérant que si le délai de deux mois fixé par les dispositions susrappelées de l'article R. 102 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel s'applique, en revanche, aux demandes tendant à l'annulation des délibérations par lesquelles le conseil municipal décide, sur le fondement des prescriptions de l'article L. 34 du code de la santé publique, d'instituer une participation financière des propriétaires intéressés au financement de travaux publics, un tel délai ne fait pas obstacle à ce que les débiteurs de ce remboursement puissent utilement invoquer l'illégalité de cette délibération à l'appui de leurs demandes tendant à la décharge de l'obligation de payer les sommes qui leur sont réclamées par le comptable du trésor public ;

Considérant qu'aux termes de l'article L. 33 du code de la santé publique : "Le raccordement des immeubles aux égouts disposés pour recevoir les eaux usées domestiques et établis sous la voie publique à laquelle ces immeubles ont accès ... est obligatoire ... dans le délai de deux ans à compter de la mise en service de l'égout" et qu'aux termes de l'article L. 34 du même code : "Lors de la construction d'un nouvel égout ... la commune peut exécuter d'office les parties des branchements situés sous la voie publique, jusque et y compris le regard le plus proche des limites du domaine public ... Ces parties de branchement sont incorporées au réseau public, propriété de la commune qui en assure désormais l'entretien. La commune est autorisée à se faire rembourser, par les propriétaires intéressés tout ou partie des dépenses entraînées par ces travaux, diminuées des subventions éventuellement obtenues et majorées de 10 % pour frais généraux, suivant des modalités à fixer par délibération du conseil municipal ..." ; qu'il résulte de ces dispositions que les communes qui mettent en service un nouvel égout sont en droit d'imposer aux propriétaires intéressés le remboursement de tout ou partie des dépenses entraînées par les travaux de construction des parties des branchements situées sous la voie publique ; que, lorsque le conseil municipal a décidé de l'instituer, ce remboursement est exigible des propriétaires de tous les immeubles de la commune, même s'ils ont été édifiés antérieurement à la mise en service de l'égout et avaient été préalablement dotés d'installations individuelles d'évacuation ou d'épuration des eaux usées domestiques ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, si les dispositions de l'article L. 34 du code de la santé publique font obligation au conseil municipal de respecter les règles qu'elles fixent pour la liquidation du remboursement du par les propriétaires, les mêmes dispositions n'ont ni pour objet, ni pour effet de lui imposer d'indiquer précisément les modalités d'établissement du prélèvement qu'il institue ;
Considérant que le fait que le conseil municipal de Monnetier-Mornex a institué, par la délibération du 17 mai 1990, "une participation pour raccordement à l'égout", d'un montant forfaitaire de 1.700 francs pour les maisons individuelles implantées dans un lotissement et de 3. 400 francs pour les autres maisons individuelles, lesquelles se trouvent dans une situation différente, ne méconnaît pas, en tout état de cause, le principe d'égalité des citoyens devant les charges publiques ; que le caractère forfaitaire du remboursement exigible des propriétaires n'est pas, par lui même, de nature à entacher cette délibération d'illégalité ; que les demandeurs, qui se méprennent sur la portée des indications du devis qu'ils ont produit, n'établissent pas que le montant du remboursement de 3 400 francs qui leur est demandé serait supérieur au coût unitaire hors taxes des travaux d'un branchement, diminué des subventions éventuellement obtenues et majoré de 10 % pour frais généraux ;
Sur les autres moyens :

Considérant que si les demandeurs allèguent que certains propriétaires auraient bénéficié d'exonérations du montant de leur participation aux dépenses de raccordement à l'égout, cette circonstance, à la supposer établie, n'est pas davantage de nature à justifier la décharge d'une somme qui leur est légalement réclamé ;
Considérant que faute pour Mme D'Agostino d'apporter des précisions suffisantes sur le nombre et la nature des travaux d'assainissement qu'aurait financé sa mère en 1979, elle n'établit pas qu'ils correspondraient aux travaux de branchement dont le remboursement lui est demandé par la commune et dont elle ne conteste pas la réalité alors qu'il est constant que la commune a bien réalisé le branchement des canalisations construites par sa mère, Mme B..., au réseau séparatif d'assainissement réalisé sous le chemin départemental n 41, branchement dont elle a bénéficié ; que si Mme D'Agostino, qui ne conteste pas être propriétaire de la canalisation raccordée, fait valoir que deux autres remboursements de 3. 400 francs chacun auraient été également demandés à deux propriétaires raccordées à ce même branchement, elle n'établit pas, par les moyens qu'elle invoque, le caractère excessif de la somme mise à sa charge ; qu'il résulte de ce qui précède que la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a, par le jugement attaqué, accordé à Mme D'Agostino la décharge de la somme qui lui était réclamée par le titre de recettes émis le 23 octobre 1990 ;
Considérant, en revanche, que si la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX fait valoir qu'elle a réalisé le raccordement de cinq villas dont quatre appartiennent à Mme Y... et la cinquième à M. Serge Y..., il résulte de l'instruction, notamment des plans produits au dossier, que seuls deux branchements ont été réalisés alors qu'un remboursement a été demandé à M. Serge Y... et quatre autres à Mme Y... ; que dans ces conditions, il y avait seulement lieu de décharger Mme Y... de l'obligation de payer la somme totale de 10. 200 francs représentant le montant des trois remboursements de 3. 400 francs ne correspondant à aucun branchement et non de la totalité du montant des quatre remboursements comme l'ont fait à tort les premiers juges ; que les travaux réalisés par Mme Y... postérieurement aux travaux de branchement dont le remboursement lui est demandé sont sans influence sur le bien fondé de la somme demeurant à sa charge ; que, dès lors, la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a, par le jugement attaqué, accordé à Mme Y... la décharge totale de la somme qui lui était réclamée par le titre de recettes émis le 23 octobre 1990 et à demander le rétablissement de son obligation de payer dans la limite de 3. 400 francs ;

Considérant de même qu'il résulte de l'instruction , notamment du plan de récolement produit au dossier, que la construction appartenant de manière indivise à Messieurs Jérôme et Daniel D... n'est desservie que par un seul raccordement alors que deux remboursements leurs ont été réclamés ; que dans ces conditions, il y a seulement lieu de décharger Messieurs Jérôme et Daniel D... de l'obligation de payer la somme de 3. 400 francs représentant le montant du second remboursement ne correspondant à aucun branchement et non de la totalité du montant des deux remboursements comme l'ont fait à tort les premiers juges ; que, dès lors, la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Grenoble a, par le jugement attaqué, accordé à Messieurs Jérôme et Daniel D... la décharge totale de la somme qui leur était réclamée par les titre de recettes émis le 23 octobre 1990 et à demander le rétablissement de leur obligation de payer dans la limite de 3. 400 francs, soit 1. 700 francs pour chacun ;
Considérant, enfin, que M. A... fait valoir sans être contredit que sa construction n'a fait l'objet d'aucun branchement ; que, dès lors, sa propriété ne peut être regardée comme ayant fait l'objet de travaux exécutés d'office susceptibles de donner lieu à remboursement en application des dispositions de l'article L. 34 du code de la santé publique et de la délibération du 17 mai 1990 ; que, dès lors, la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX n'est pas fondée à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Grenoble a accordé à M. A... la décharge de la somme qui lui était réclamée par le titre de recettes émis le 12 octobre 1993 à son encontre ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par Mme Y..., Mme D'Agostino et Messieurs Jérôme et Danile D... contre la commune de Monnetier-Mornex, doivent dès lors être rejetées ; que les conclusions présentées à ce titre par la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX contre M. A... ne peuvent qu'être rejetées ;
Considérant qu'en l'absence de toute disposition ou stipulation instituant une solidarité entre eux, et en l'absence de toute action commune en première instance, la seule circonstance que les défendeurs en appel sont représentés par le même mandataire ne permet pas au juge de prononcer à leur encontre une condamnation solidaire à rembourser les frais exposés à l'occasion du litige et non compris dans les dépens au bénéfice d'une autre partie ; que, dès lors, les conclusions de la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX tendant à la condamnation conjointe et solidaire de Mme Y..., Mme D'Agostino et Messieurs Jérôme et Daniel D... ne peuvent qu'être rejetées ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'un d'entre eux à verser à la commune de Monnetier-Mornex une somme quelconque en application des mêmes dispositions ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de condamner la COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX à payer à M. A... la somme de 2. 000 francs au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 16 décembre 1994 est annulé en tant qu'il a accordé à Mme D'Agostino la décharge totale de la somme qui lui était réclamée par le titre de recettes émis le 23 octobre 1990.
Article 2 : L'obligation de payer mise à la charge de Mme D'Agostino et de Mme Y... par les titres de perception émis le 23 octobre 1990 est rétablie à hauteur de trois mille quatre cent francs (3. 400 F.) chacune.
Article 3 : L'obligation de payer mise à la charge de Messieurs Jérôme et Daniel D... par les titres de perception émis le 23 octobre 1990 est rétablie à hauteur de mille sept cent francs (1. 700 F.) chacun.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble en date du 16 décembre 1994, en tant qu'il concerne Mme Y... et MM. Jérôme et Daniel D..., est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 2 et 3 ci-dessus.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête, la demande de Mme D'Agostino devant le tribunal administratif, le surplus des demandes présentées par Mme Y... et MM. Jérôme et Daniel D... devant le tribunal administratif, les conclusions de Mme D'Agostino et le surplus des conclusions de Mme Y... et de M. Jérôme et Daniel D... sont rejetés.
Article 6 : La COMMUNE DE MONNETIER-MORNEX est condamnée à payer à M. Z... la somme de deux mille francs (2. 000 F.) en application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95LY00461
Date de la décision : 17/07/1998
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

COLLECTIVITES TERRITORIALES - COMMUNE - ATTRIBUTIONS - SERVICES COMMUNAUX - ASSAINISSEMENT ET EAUX USEES.

CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOSITIONS LOCALES AINSI QUE TAXES ASSIMILEES ET REDEVANCES - AUTRES TAXES OU REDEVANCES - REDEVANCES D'ASSAINISSEMENT.

PROCEDURE - JUGEMENTS - FRAIS ET DEPENS - REMBOURSEMENT DES FRAIS NON COMPRIS DANS LES DEPENS.


Références :

Code de la santé publique L34, L33
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R102, L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. BOURRACHOT
Rapporteur public ?: M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1998-07-17;95ly00461 ?
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