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07/07/1998 | FRANCE | N°95LY00265

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1e chambre, 07 juillet 1998, 95LY00265


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 février 1995, présentée pour la BANQUE RHONE-ALPES, dont le siège social est ..., représentée par son président directeur général en exercice, par Me X..., avocat au barreau de GRENOBLE ;
la BANQUE RHONE-ALPES demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 913769 en date du 23 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser à la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE (Savoie) la somme de 183. 355,60 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 août 1991 et la som

me de 3. 000 francs au titre des frais non compris dans les dépens ;
2 ) d...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 15 février 1995, présentée pour la BANQUE RHONE-ALPES, dont le siège social est ..., représentée par son président directeur général en exercice, par Me X..., avocat au barreau de GRENOBLE ;
la BANQUE RHONE-ALPES demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement n 913769 en date du 23 décembre 1994 par lequel le tribunal administratif de Grenoble l'a condamnée à verser à la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE (Savoie) la somme de 183. 355,60 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 août 1991 et la somme de 3. 000 francs au titre des frais non compris dans les dépens ;
2 ) de rejeter la demande de la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE ;
3 ) de condamner la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE à lui payer la somme de 10. 000 francs en application des dispositions de l'article L 8-1 du Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code civil ;
Vu la loi n 85-98 du 25 janvier 1985 modifiée ;
Vu le décret n du 27 décembre 1985 ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu les articles 1089 B et 1090 A du code général des impôts et l'article 10 de la loi n 77-1468 du 30 décembre 1977, complétés par l'article 44 de la loi n 93-1352 du 30 décembre 1993 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 juin 1998 :
- le rapport de M. BOURRACHOT, premier conseiller ;
- les observations de Me MEDINA, avocat de la BANQUE RHONE-ALPES et de Me LOUCHET, avocat de la COMMUNE DE MONTVALEZAN-LA-ROSIERE ;
- et les conclusions de M. BEZARD, commissaire du gouvernement ;

Considérant qu'en vue de la réalisation d'un télésiège de quatre places à pinces fixes aux Ecudets, la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE (Savoie) a conclu, le 31 août 1988, un marché avec les établissements MONTAZ MAUTINO et les établissements JOLY et PHILIPPE, la maîtrise d'oeuvre étant assurée par la société MDP Ingénierie Conseil ; que, conformément aux stipulations de l'article 5-1 de l'additif au cahier des clauses administratives particulières du marché conclu avec les deux entreprises, la BANQUE RHONE-ALPES, le 17 octobre 1988, s'est portée caution des établissements MONTAZ MAUTINO pour un montant de 404. 924,13 francs ; que la société MONTAZ MAUTINO a été déclarée en redressement judiciaire le 24 novembre 1989 ; que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a condamné la BANQUE RHONE-ALPES à verser à la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE la somme de 183. 355,60 francs augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 août 1991 pour le remplacement des banquettes défectueuses du télésiège et la somme de 3. 000 francs au titre des frais non compris dans les dépens ;
Sur les effets de l'absence de déclaration de la créance de la commune au représentant des créanciers des établissement MONTAZ-MAUTINO :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article 322 du code des marchés publics et des stipulations de l'acte de caution qu'elle a signé le 17 octobre 1988, la banque Rhône-Alpes s'est engagée, à l'égard de la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE, "à effectuer sur ordre de versement de l'administration contractante le versement des sommes dont le titulaire serait débiteur au titre de ce marché, jusqu'à concurrence de la somme garantie ..." ;
Considérant, d'une part, que l'action engagée par un maître d'ouvrage public à l'encontre de la personne qui s'est portée caution de l'entreprise avec laquelle il a contracté, ne se rattache pas à la détermination des modalités de règlement des créances, mais tend à la constatation de l'existence d'une obligation autonome de la caution née d'un contrat de droit public qui ne disparaît pas du fait de la mise en redressement judiciaire de l'entreprise défaillante ;
Considérant, d'autre part, que l'engagement pris à l'égard d'un maître d'ouvrage par la personne qui s'est portée caution au profit d'une entreprise couvre, dans la limite du montant prévu par l'acte de caution, l'ensemble des obligations contractuelles de cette entreprise, et notamment celles découlant de la garantie de parfait achèvement prévue par les stipulations du marché passé entre le maître d'ouvrage et l'entreprise ;

Considérant, ainsi, que la banque Rhône-Alpes, caution de l'entreprise défaillante, et qui ne se trouve d'ailleurs pas elle même en redressement judiciaire, ne peut utilement invoquer la double circonstance que la collectivité publique n'aurait pas déclaré sa créance éventuelle dans le délai fixé à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 et n'aurait pas demandé à être relevée de la forclusion dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 70 du décret du 27 décembre 1985, pour établir que sa propre obligation à l'égard du maître d'ouvrage serait éteinte ;
Sur les effets de l'engagement de caution de la BANQUE RHONE-ALPES :
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 44.1 du cahier des clauses administratives générales auquel se réfère l'article 2.B du cahier des clauses administratives particulières visé par l'acte d'engagement du marché signé le 31 août 1988 : "Le délai de garantie est, sauf stipulation différente du marché ... d'un an à compter de la date d'effet de la réception, ou de six mois à compter de cette date si le marché ne concerne que des travaux d'entretien ou de terrassements. Pendant le délai de garantie ... l'entrepreneur est tenu à une obligation dite « obligation de parfait achèvement » au titre de laquelle il doit : ... b) remédier à tous les désordres signalés par le maître de l'ouvrage ou le maître d'oeuvre, de telle sorte que l'ouvrage soit conforme à l'état où il était lors de la réception ou après correction des imperfections constatées lors de celle-ci ;" qu'aux termes des stipulations de l'article 8.2 de l'additif au cahier des clauses administratives particulières du même marché : " Le délai de garantie est fixé à 2 ans à compter de la date du procès-verbal de réception des travaux" ;
Considérant que la réception du télésiège des Ecudets s'est faite sous réserves le 30 janvier 1989 ; qu'alors même que les désordres dont la commune a demandé réparation ne figuraient pas au nombre de ces réserves, il résulte de l'instruction que dès le 10 avril 1990, l'entreprise MDP ingénierie Conseil, maître d'oeuvre, a écrit à l'entreprise MONTAZ-MAUTINO pour lui rappeler l'existence de réserves non levées et pour y ajouter des réserves relatives à des désordres survenus après la première saison d'exploitation dans la boulonnerie serties à l'intérieur de la mousse des banquettes du télésiège ; qu'ainsi, il a bien été demandé à l'entrepreneur de remédier à ces désordres de telle sorte que l'ouvrage soit conforme à l'état où il était lors de la réception dans le délai de garantie de deux ans ; qu'eu égard à la nature de ces avaries et aux conditions dans lesquelles elles sont apparues, la BANQUE RHONE-ALPES n'établit pas que la défectuosité des banquettes serait due aux mauvaises conditions atmosphériques de l'hiver 1989-1990 ; qu'elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir qu'elle n'est pas tenue à la réparation de ces désordres en vertu de son engagement de caution ;
Sur le montant des réparations :

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE est assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée du fait de son service de remontées mécaniques ; qu'ainsi, compte tenu du régime fiscal de cette activité, la commune est susceptible d'imputer ou de se faire rembourser tout ou partie de la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les travaux de réparation ; que, par suite, il y a lieu de ramener le montant des réparations auquel la BANQUE RHONE-ALPES doit être condamné de la somme de 183. 355,60 francs toutes taxes comprises à la somme de 154. 600 francs hors taxes ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel et de faire droit aux conclusions de la Banque Rhône-Alpes présentées au titre des sommes exposées par elle et non comprises dans les dépens ;
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE doivent dès lors être rejetées ;
Article 1er : La somme de cent quatre vingt trois mille trois cent cinquante cinq francs et soixante centimes (183. 355,60 francs) que la BANQUE RHONE-ALPES a été condamnée à verser à la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE par le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 décembre 1994 est ramenée à cent cinquante quatre mille six cent francs (154. 600 francs).
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Grenoble du 23 décembre 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la BANQUE RHONE-ALPES est rejeté.
Article 4 : Les conclusions de la commune de MONTVALEZAN-LA-ROSIERE tendant à l'application de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1e chambre
Numéro d'arrêt : 95LY00265
Date de la décision : 07/07/1998
Sens de l'arrêt : Réformation réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 - RJ2 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - EXECUTION FINANCIERE DU CONTRAT - NANTISSEMENT ET CAUTIONNEMENT - CAUTIONNEMENT - OBLIGATIONS ET DROITS DE LA CAUTION (1) Caution constituée en remplacement de la retenue de garantie sur acomptes (article 322 du code des marchés publics alors en vigueur) - Redressement judiciaire de l'entreprise - Commune n'ayant pas déclaré sa créance dans les délais fixés par la loi du 25 janvier 1985 ni demandé à être relevée de la forclusion - Conséquence - Absence - Possibilité pour le juge de condamner la caution à honorer ses engagements - (2) Etendue des obligations contractuelles couvertes par la caution.

39-05-04-02-01(1) L'action engagée par un maître d'ouvrage public à l'encontre de la personne qui s'est portée caution de l'entreprise avec laquelle il a contracté et qui se trouve déclarée en redressement judiciaire ne se rattache pas à la détermination des modalités de règlement des créances sur l'entreprise défaillante (1), mais tend à la constatation de l'existence d'une obligation autonome née d'un contrat de droit public qui ne disparaît pas du fait de la mise en redressement judiciaire de l'entreprise défaillante. La caution de l'entreprise défaillante, qui ne se trouve d'ailleurs pas elle-même en redressement judiciaire, ne peut utilement invoquer la double circonstance que la collectivité publique n'aurait pas déclaré sa créance éventuelle dans le délai fixé à l'article 66 du décret du 27 décembre 1985 et n'aurait pas demandé à être relevée de la forclusion dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 70 du décret du 27 décembre 1985, pour établir que sa propre obligation à l'égard du maître d'ouvrage serait éteinte (2).

39-05-04-02-01(2) L'engagement pris à l'égard d'un maître d'ouvrage par la personne qui s'est portée caution au profit d'une entreprise couvre, dans la limite du montant prévu par l'acte de caution, l'ensemble des obligations contractuelles de cette entreprise, et notamment celles découlant de la garantie de parfait achèvement prévu par les stipulations du marché passé entre le maître d'ouvrage et l'entreprise.


Références :

Code des marchés publics 322
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel L8-1
Décret 85-1388 du 27 décembre 1985 art. 66, art. 70
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 53

1. Comp. CE, 1981-05-15, S.A. Geep Industries et ville de Besançon, p. 225. 2. Solution confirmée par CE, 2000-06-14, Banque Rhône-Alpes, n° 199585, à publier au Recueil


Composition du Tribunal
Président : M. Jouguelet
Rapporteur ?: M. Bourrachot
Rapporteur public ?: M. Bézard

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1998-07-07;95ly00265 ?
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