Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 24 août 1995, présentée pour la commune de Saint-Remeze (Ardèche) et le syndicat intercommunal de la vallée de l'Ardèche (SIVA), par Me X..., avocat;
La commune de Saint-Remeze et le SIVA demandent à la cour:
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lyon du 21 juin 1995 en tant que, à la demande de l'association pour la protection des gorges de l'Ardèche (APGA), il a annulé le permis de construire délivré au SIVA le 9 décembre 1993 par le maire de Saint-Remeze et les a condamnés à verser une somme de 2 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;
2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par l'APGA, et de condamner cette dernière à leur verser une somme de 12 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;
Vu les autres pièces du dossier;
Vu le code de l'urbanisme;
Vu le code rural;
Vu la loi n°76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature;
Vu le décret n° 80-27 du 14 janvier 1980 portant création de la réserve naturelle des gorges de l'Ardèche;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 novembre 1997 :
- le rapport de M. GAILLETON, conseiller;
- les observations de M. PIVERT, président de l'association pour la protection des gorges de l'Ardèche ;
- et les conclusions de M. VESLIN, commissaire du gouvernement;
Sur la fin de non recevoir opposée à la demande de première instance :
Considérant que le syndicat intercommunal de la vallée de l'Ardèche n'établit pas plus en appel qu'en première instance que l'affichage sur le terrain du permis de construire que lui a délivré le 9 décembre 1993 le maire de Saint-Remeze aurait été maintenu de manière continue pendant le délai de deux mois prescrit par l'article R.490-7 du code de l'urbanisme; que, par suite, le délai de recours contentieux n'ayant pas couru à l'égard des tiers, la fin de non recevoir tirée de la tardiveté de la demande présentée devant le tribunal administratif de Lyon par l'association pour la protection des gorges de l'Ardèche (APGA) ne peut qu'être écartée;
Sur la légalité du permis de construire :
Considérant qu'aux termes de l'article L.242-9 du nouveau code rural : "Les territoires classés en réserve naturelle ne peuvent être ni détruits ni modifiés dans leur état ou dans leur aspect, sauf autorisation spéciale de l'autorité administrative délivrée selon des modalités fixées par décret en Conseil d'Etat prévoyant, notamment, la consultation préalable des organismes compétents." ; qu'aux termes de l'article R.242-19 du même code : "La demande d'autorisation de modification à l'état ou à l'aspect d'une réserve naturelle ou de destruction, prévue à l'article L.242-9, est adressée au préfet qui en accuse réception. Elle doit être accompagnée ( ...) 4 . D'une étude permettant d'apprécier leurs conséquences sur le territoire protégé ou son environnement." ; que l'article 11 du décret du 14 janvier 1980 portant création de la réserve naturelle des gorges de l'Ardèche prévoit en outre : "Tout travail public ou privé, toute construction nouvelle susceptible de modifier l'état ou l'aspect de la réserve sont interdits à l'exception ( ...) des travaux d'aménagements autorisés par le ministre chargé de la protection de la nature après avis du comité consultatif de la réserve ..." ; qu'enfin, aux termes de l'article R.421-38-7 du code de l'urbanisme : "Lorsque la construction est en raison de sa situation sur un territoire en instance de classement ou classé en réserve naturelle, soumise à l'autorisation du ministre chargé de la protection de la nature ( ...), le permis de construire ne peut être délivré qu'avec l'accord exprès de ce ministre ou de son délégué." ;
Considérant que si le dossier de la demande de permis déposée par le SIVA en vue de l'extension des sanitaires de l'aire de bivouac de Gournier, située dans le périmètre de la réserve naturelle des gorges de l'Ardèche, comprenait les documents visés aux alinéas 1° à 3° de l'article R.242-19 précité, permettant ainsi à l'autorité administrative de connaître la nature exacte des travaux et leur étendue, elle n'était pas, en revanche, accompagnée de l'étude exigée par le 4° du même article, qui aurait seule permis d'apprécier les conséquences du projet sur l'environnement d'un territoire protégé; qu'alors qu'ils portaient notamment sur des aménagements importants des systèmes d'approvisionnement en eau potable, d'assainissement, de décantation et d'épandage, et qu'ils devaient par ailleurs avoir nécessairement pour effet d'augmenter la fréquentation d'une aire naturelle déjà soumise à une forte pression touristique, la commune de Saint-Remeze et le SIVA ne sauraient soutenir que ces travaux ne pouvaient avoir aucune influence sur l'environnement; que, dès lors, l'accord sur le projet donné le 22 octobre 1992 par le ministre de l'environnement, qui a d'ailleurs lui-même relevé que le dossier ne détaillait pas les travaux de rénovation des réseaux d'eau potable, et souligné que les carences sur les réseaux actuels devaient être comblées en concertation avec la direction départementale des affaires sanitaires et sociales, a été donné au vu d'un dossier incomplet; que, par suite, le maire de Saint-Remeze et le SIVA, qui ne peuvent par ailleurs se prévaloir d'un précédent jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 22 juin 1994 rejetant comme irrecevable une demande présentée par une autre association à l'encontre du permis susvisé, auquel ne s'attache aucune autorité de la chose jugée dans le présent litige, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a annulé ledit permis;
Sur les conclusions de l'APGA :
Considérant que les conclusions de l'APGA tendant à ce que la cour confirme l'annulation du permis par adoption d'une motivation différente de celle retenue par le tribunal administratif ne sont pas recevables; que celles tendant à ce que la cour modifie la date du permis litigieux ne peuvent être accueillies, ledit permis ayant bien été délivré le 9 décembre 1993; qu'enfin, celles tendant à voir ordonner la remise en état des lieux doivent en tout état de cause être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître;
Sur les frais non compris dans les dépens :
Considérant que les dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel font obstacle à ce que l qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, soit condamné à payer à la commune de Saint-Remeze et au SIVA la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens; qu'il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de condamner ces derniers à payer chacun à ce titre une somme de 2 500 francs à l'APGA;
Article 1ER : La requête de la commune de Saint-Remeze et du SIVA est rejetée.
Article 2: La commune de Saint-Remeze et le SIVA sont condamnés à verser chacun une somme de 2 500 francs à l'APGA au titre de l'article L.8-1.
Article 3 : Le surplus des conclusions de l'APGA est rejeté.