Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 13 juin 1995 présentée pour M. Y... HOSPITAL demeurant ... par Me X..., avocat ;
M. HOSPITAL demande à la cour :
1 ) d'annuler le jugement en date du 8 mars 1995 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à la décharge du complément de taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été réclamé pour la période du 1er janvier 1981 au 30 avril 1985 ;
2 ) de prononcer la décharge de cette imposition et condamner l'Etat à lui verser 30 000 francs sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n 45-1484 du 30 juin 1945 ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 septembre 1997 :
- le rapport de M. MILLET, conseiller ;
- les observations de Me X... pour M. HOSPITAL ;
- et les conclusions de M. BONNAUD, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que le 12 décembre 1984, puis les 19 février, 23 avril et 6 mai 1985, lors de visites domiciliaires effectuées chez M. HOSPITAL, fondeur en métaux précieux, des agents d'une brigade d'intervention interrégionale dépendant de la direction nationale d'enquêtes fiscales ont saisi, agissant à la requête du directeur général de la concurrence et de la consommation sur le fondement de l'ordonnance n 45-1484 du 30 juin 1945 alors en vigueur, des bons de livraisons, des factures de travail à façon et des fiches-clients retraçant la comptabilité matière ; qu'après avoir procédé au dépouillement de 167 comptes et constaté qu'à un moment ou à un autre, ou même continûment, ces comptes matières avaient enregistré des soldes débiteurs, ils ont dressé le 26 juin 1985 un procès-verbal relevant, à l'encontre de M. HOSPITAL, des infractions aux articles 46 à 49 de l'ordonnance de l'ordonnance n 45-1483 du 30 juin 1945 relative à la constatation, la poursuite et la répression des infractions à la législation économique ; qu'à la suite de ce procès-verbal et d'une vérification de comptabilité effectuée du 6 juin 1985 au 28 mars 1986, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1981 au 30 avril 1985 à M. HOSPITAL qui en demande la décharge ;
Considérant que si le procès-verbal de perquisition mentionne que celle-ci tendait à effectuer un contrôle de facturation, il n'indique pas à partir de quels indices cette opération a été décidée ; qu'il est constant qu'aucune poursuite pour infraction à la législation économique n'a été engagée contre M. HOSPITAL qui a reconnu la matérialité de faits consistant en l'avance de matière première à ses clients pour la fabrication de certains bijoux en or et a signé une "transaction sans paiement" proposée par le directeur départemental de la concurrence et de la consommation dans son courrier du 30 septembre 1985 ; qu'il résulte de l'instruction que les rehaussements litigieux ont été établis à partir des investigations réalisées sur les mêmes documents que ceux saisis dans le cadre du contrôle économique, dont le vérificateur s'etait fait communiquer le dossier sur le fondement de l'article L.83 du livre des procédures fiscales, et ont porté sur les mêmes opérations ;
Considérant qu'en l'absence de toute indication, devant le juge de l'impôt, sur la nature et le sérieux des soupçons d'infraction à la législation économique qui auraient été nécessaires pour légitimer une intervention administrative forcée au domicile du contribuable et alors que les opérations de perquisition se sont soldées par une procédure de "transaction sans paiement", sans poursuites correctionnelles malgré la nature et l'importance des infractions relevées, supérieures à 200 millions de francs, il ressort manifestement de l'ensemble des circonstances ci-dessus rappelées que l'administration fiscale, qui ne disposait au moment où elle l'a engagée d'aucune procédure légale de visite domiciliaire pour les contrôles en matière de taxe sur la valeur ajoutée, a, en réalité, utilisé la procédure susmentionnée de l'ordonnance du 30 juin 1945 à seule fin de rechercher des preuves de manquements à la législation relative à la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'elle a ainsi commis un détournement de procédure qui entache d'irrégularité la procédure à la suite de laquelle ont été établies les impositions litigieuses ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. HOSPITAL est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande ;
Considérant que si M. HOSPITAL n'est pas recevable à demander pour la première fois en appel la condamnation de l'Etat à lui verser une indemnité sur le fondement de l'article L.8-1 du livre des procédures fiscales pour les frais exposés avant et après l'introduction de sa demande, il y a lieu, toutefois, dans les circonstances de l'espèce et pour la présente instance de condamner l'Etat à lui allouer sur le même fondement la somme de 5 000 francs ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Lyon en date du 8 mars 1995 est annulé.
Article 2 : M. HOSPITAL est déchargé, en droits et pénalités, des compléments de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er janvier 1981 au 30 avril 1985.
Article 3 : L'Etat (ministre de l'économie, des finances et de l'industrie) versera cinq mille francs (5 000 francs) à M. HOSPITAL en application de l'article L 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel.