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09/10/1996 | FRANCE | N°94LY01652

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 4e chambre, 09 octobre 1996, 94LY01652


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 octobre 1994, présentée pour M. Daniel Y... demeurant "Le Manhattan" ..., par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement, en date du 20 mai 1994, par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981 à 1984 dans les rôles de la commune de Nice ainsi que des pénalitées dont ils ont été assortis ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
Vu les autres pièce

s du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fisca...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 octobre 1994, présentée pour M. Daniel Y... demeurant "Le Manhattan" ..., par Me X..., avocat ;
M. Y... demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement, en date du 20 mai 1994, par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande en décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels il a été assujetti au titre des années 1981 à 1984 dans les rôles de la commune de Nice ainsi que des pénalitées dont ils ont été assortis ;
2°) de prononcer la décharge de ces impositions ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 1996 :
- le rapport de M. MILLET, conseiller ;
- et les conclusions de M. BONNET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que M. Daniel Y..., qui exerçait une activité d'agent immobilier au sein de la SARL "Grande Agence de Commerce" (GAC), dont il était le principal associé, et qui était également associé et gérant de la SARL "La Foncière de Placement", a fait l'objet d'une vérification approfondie de sa situation fiscale d'ensemble au titre des années 1981 à 1984 ; qu'il en est résulté des rehaussements prononcés selon la procédure de taxation d'office en ce qui concerne les revenus d'origine inexpliquée et selon la procédure contradictoire en ce qui concerne ses revenus professionnels ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée de l'année 1981 :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : "En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration ... peut demander ... au contribuable ... des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ..." ; qu'en vertu de l'article L. 69 du même livre, est taxé d'office, sous réserve des règles propres à la détermination de certaines catégories de revenus, le contribuable qui s'est abstenu de répondre aux demandes de justifications de l'administration ;
Considérant que l'administration demeure en droit, après avoir procédé à une vérification approfondie de la situation fiscale d'ensemble d'un contribuable, laquelle ne revêt pour celui-ci aucun caractère contraignant, de lui demander, au vu des renseignements qu'elle a obtenus, tant à la suite de cette vérification qu'en vertu du droit de communication prévu par les dispositions de l'article L. 83 du livre des procédures fiscales applicable en l'espèce, et sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 16 du même livre, des justifications relatives à ses revenus d'origine inexpliquée et, en cas de réponse insuffisante de l'intéressé, de recourir à la procédure de taxation d'office ; que, toutefois, elle ne peut, eu égard à la sanction qui par l'effet des dispositions de l'article L. 69, est attachée au défaut de production, par le contribuable, dans le délai assigné, des justifications qui lui sont demandées, adresser à ce contribuable, la demande de justifications prévue par l'article L. 16 que si elle a, au préalable, restitué à l'intéressé les documents que celui-ci lui a remis à l'occasion de la vérification approfondie de sa situation fiscale ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur s'est fait remettre, contre reçu, divers relevés bancaires de M. Y... ; que si l'administration soutient avoir restitué ces pièces avant l'envoi de la demande de justifications, elle ne l'établit pas en se bornant à produire une copie d'une lettre faisant état de cette restitution sur laquelle le vérificateur a indiqué avoir remis les documents au concierge de l'immeuble ; qu'elle ne justifie pas davantage que le contribuable aurait conservé les originaux ou la copie de ces pièces ; que la réponse du contribuable à la demande de justifications ou sa demande de restitution ne peuvent être regardées comme démontrant que l'intéressé avait récupéré les relevés bancaires en cause ; qu'ainsi, le ministre n'apporte pas la preuve dont la charge lui incombe que la demande de justifications a été faite dans des conditions qui permettaient à M. Y... de faire valoir pleinement ses droits ; qu'elle se trouve, de ce fait, entachée d'une irrégularité de nature à vicier la procédure d'imposition et les redressements qui en sont issus ;
En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée des années 1982, 1983 et 1984 :
S'agissant du moyen tiré de l'irrégularité de la mise en oeuvre de la demande d'éclaircissements ou de justifications :
Considérant que les crédits apparus sur les comptes bancaires du contribuable, pour les années 1982 à 1984, s'élevaient, hors dépôts d'espèces, à respectivement 199 322 francs, 326 626 francs et 151 297 francs pour des revenus déclarés de 46 060 francs, 39 600 francs et 55 000 francs ; que, par suite, c'est à bon droit que le service, qui avait de surcroît établi des balances-espèces dont les soldes étaient créditeurs hors dépenses de train de vie, a pu lui adresser, début novembre 1985, des demandes d'éclaircissements ou de justifications dans les conditions prévues à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors applicable ;
S'agissant du moyen tiré de l'absence de restitution des pièces communiquées dans le cadre du contrôle :
Considérant que M. Y... ne conteste pas s'être abstenu de retirer le pli contenant la demande de justifications relative aux années 1982 à 1984 ; que, par suite, la circonstance que le vérificateur ne lui aurait pas restitué, préalablement à cette demande, les relevés bancaires que lui avait confiés M. Y... est restée sans incidence sur la faculté, dont il s'est lui-même privé, de présenter utilement des observations et, partant, sur la régularité de la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne les revenus professionnels :
Sur la procédure d'imposition :
Considérant que si les dispositions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales font obligation à l'administration de répondre aux observations du contribuable à la suite de l'envoi d'une notification de redressements, en revanche, elle n'est pas tenue de répondre à une demande du contribuable tendant à l'octroi de délais supplémentaires pour lui permettre de formuler des observations à la suite de la réception d'une confirmation des redressements ;

Considérant que tant les différends qui s'élèvent pour l'application de l'article 62 du code général des impôts sur la qualification à donner aux rémunérations servies aux gérants des sociétés à responsabilité limitée, que ceux relatifs au revenu global et au quotient familial d'imposition, ne sont au nombre des litiges visés à l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales pour lesquels la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires est compétente ; que, par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en rayant, sur la confirmation de redressements du 27 février 1986, la mention que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires pouvait être saisie en cas de désaccord persistant entre le contribuable et l'administration, le vérificateur l'a privé d'une garantie légale ;
Sur le bien-fondé :
Considérant qu'aux termes de l'article 62 du code général des impôts : "Les traitements, remboursements forfaitaires de frais et toutes autres rémunérations allouées ... aux gérants majoritaires des sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes ... sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs bénéficiaires s'ils sont admis en déduction des bénéfices soumis à l'impôt sur les sociétés par application de l'article 211 ..." ;
Considérant qu'en se bornant à faire valoir que M. Y..., qui possédait les trois quarts du capital de la SARL "GAC" disposait d'une délégation de signature sur les deux comptes bancaires de la société, signait les déclarations de chiffre d'affaires ainsi que les déclarations de vente des véhicules, le service n'établit pas que les attributions de M. Y..., alors même qu'elles auraient comporté des responsabilités de gestion du personnel, étaient de nature à l'associer à l'administration de l'entreprise et à lui permettre d'exercer un contrôle effectif et constant sur la gestion de la société ; que, par suite, les rémunérations qu'il a perçues de la société au cours des années 1981 à 1984 sont imposables dans la catégorie des traitements et salaires et non suivant les règles déterminées par l'article 62 du code général des impôts ; qu'il y a lieu, en conséquence, de prononcer le dégrèvement correspondant ;
En ce qui concerne les pénalités
Sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête :
Considérant qu'en relevant uniquement l'importance des discordances constatées, pour chacune des années vérifiées, entre les revenus déclarés et les sommes dont l'origine est demeurée inexpliquée et l'absence de toute tentative d'explication sérieuse, l'administration ne peut être regardée comme établissant la mauvaise foi du contribuable ; qu'il convient, dès lors, de substituer aux pénalités qui ont été assignées à M. Y..., dans la limite de leur montant, les intérêts de retard prévus aux articles 1727 et 1728 du code général des impôts ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. Y... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté la totalité de sa demande ;
Article 1er : La base d'imposition de M. Y... à l'impôt sur le revenu de l'années 1981 est réduite à concurrence de trois cent quatorze mille neuf cent soixante-huit francs (314 968 francs).
Article 2 : La catégorie des traitements et salaires est substituée à celle de l'article 62 du code général des impôts pour les revenus perçus par M. Y... en qualité de gérant de la SARL "GAC".
Article 3 : Les intérêts de retard sont substitués, dans la limite de leur montant, aux pénalités de mauvaise foi au titre des années 1982 à 1984.
Article 4 : M. Y... est déchargé de la différence entre les impositions mises à sa charge et celles résultant des articles 1, 2 et 3 ci-dessus.
Article 5 : Le jugement du tribunal administratif de Nice en date du 20 mai 1994 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la requête de M. Daniel Y... est rejeté.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 4e chambre
Numéro d'arrêt : 94LY01652
Date de la décision : 09/10/1996
Sens de l'arrêt : Réduction
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-05-02-02 CONTRIBUTIONS ET TAXES - IMPOTS SUR LES REVENUS ET BENEFICES - REGLES GENERALES - IMPOT SUR LE REVENU - ETABLISSEMENT DE L'IMPOT - TAXATION D'OFFICE - POUR DEFAUT DE REPONSE A UNE DEMANDE DE JUSTIFICATIONS (ARTICLES L.16 ET L.69 DU LIVRE DES PROCEDURES FISCALES) -Conditions de la demande de justifications - Conditions de forme et de procédure - Restitution préalable de ses documents au contribuable - Contribuable n'ayant pas retiré le pli contenant la demande.

19-04-01-02-05-02-02 Le défaut de restitution de documents emportés par le vérificateur est sans influence sur la régularité de la procédure d'imposition dès lors que le contribuable vérifié n'a pas réclamé le pli contenant la demande d'éclaircissement et de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales et s'est ainsi lui-même privé de la faculté de présenter utilement ses observations.


Références :

CGI 62, 1727, 1728
CGI Livre des procédures fiscales L16, L69, L83, L57, L59 A


Composition du Tribunal
Président : M. Megier
Rapporteur ?: M. Millet
Rapporteur public ?: M. Bonnet

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1996-10-09;94ly01652 ?
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