La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

23/06/1994 | FRANCE | N°93LY00741

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 2e chambre, 23 juin 1994, 93LY00741


Vu, enregistrée au greffe de la cour le 17 mai 1993 la requête présentée pour le Centre hospitalier régional universitaire de Nice par Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation ;
Le Centre hospitalier demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 9 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamné à payer à M. Antoine X... une indemnité de 511 615 francs, à Mme Denise X..., 50 000 francs et à M. Frédéric X... et à M. Stéphane X... chacun 5 000 francs et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes Maritimes

650 726 francs ;
2°) de réduire à de plus justes proportions les indemni...

Vu, enregistrée au greffe de la cour le 17 mai 1993 la requête présentée pour le Centre hospitalier régional universitaire de Nice par Me LE PRADO, avocat au Conseil d'Etat et à la cour de cassation ;
Le Centre hospitalier demande à la cour :
1°) de réformer le jugement en date du 9 mars 1993 par lequel le tribunal administratif de Nice l'a condamné à payer à M. Antoine X... une indemnité de 511 615 francs, à Mme Denise X..., 50 000 francs et à M. Frédéric X... et à M. Stéphane X... chacun 5 000 francs et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes Maritimes 650 726 francs ;
2°) de réduire à de plus justes proportions les indemnités allouées ;
Vu les autres pièces du dossier ; Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 juin 1994 :
- le rapport de M. FONTBONNE, conseiller ;
- les observations de Me CAYSAC, substituant Me ROSTAGNO-BERTHIER, avocat de M. Antoine X..., de Mme Denise X..., de M. Frédéric X... et de M. Stéphane X..., de Me COHENDY, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes ;
- et les conclusions de Mme HAELVOET, commissaire du gouvernement ;

Considérant que par le jugement attaqué en date du 9 mars 1993 le tribunal administratif de Nice a condamné le Centre hospitalier régional universitaire de Nice à verser à M. Antoine X... une indemnité de 511 615 francs, 50 000 francs à Mme X... son épouse et 5 000 francs à chacun de ses deux enfants ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes Maritimes a obtenu une indemnité de 650 726 francs ; que le Centre hospitalier régional universitaire qui ne remet pas en cause le principe de son entière responsabilité conteste ledit jugement en tant qu'il aurait fait une évaluation excessive des préjudices subis ; qu'il demande, d'une part, que l'évaluation du préjudice de M. X... soit réduite de 398 000 francs avec toutes les conséquences sur la répartition de l'indemnité entre la victime et la CPAM et, d'autre part, qu'aucune indemnité ne soit allouée à Mme X... et à ses deux enfants ; que par appel incident, la CPAM des Alpes Maritimes demande que l'indemnité que le Centre hospitalier régional universitaire a été condamné à lui payer, soit portée à 688 192 francs ;
Sur la recevabilité de l'appel principal :
Considérant que la notification du jugement attaqué a été reçue par le Centre hospitalier régional universitaire de Nice le 16 mars 1993 ; que sa requête enregistrée au greffe de la cour le lundi 17 mai 1993 a été présentée dans le délai franc de deux mois prévu par les dispositions des articles R.106 et R.229 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; que les intimés ne sont, dès lors, pas fondés à soutenir que sa requête ne serait pas recevable comme tardive ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'il résulte de l'examen du dossier de première instance que le tribunal administratif a répondu en motivant suffisamment sa décision à l'ensemble des moyens et conclusions qui lui étaient soumis ; que le Centre hospitalier régional universitaire de Nice n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué aurait été irrégulièrement rendu ;
Sur l'évaluation du préjudice :
Considérant qu'il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise qu'à la suite des fautes engageant la responsabilité du Centre hospitalier régional universitaire de Nice, M. X... alors âgé de 47 ans a dû subir le 18 février 1982 l'amputation du tiers moyen de la jambe droite ;
Considérant que M. X... a subi une incapacité temporaire totale pendant 5 mois ; qu'il est resté atteint d'une incapacité permanente partielle de 30 % dont il n'est pas sérieusement contesté qu'elle s'opposait à la poursuite de son activité professionnelle de platrier-peintre ; qu'il n'est pas davantage contesté qu'il n'était titulaire d'aucune autre qualification professionnelle lui permettant d'occuper un nouvel emploi ; que la sécurité sociale a d'ailleurs, en ce qui la concerne, reconnu que cette situation le rendait inapte au travail et justifiait l'octroi d'une rente d'invalidité ; qu'il en a été de même de la caisse nationale de prévoyance des ouvriers du bâtiment qui lui a également accordé une rente d'invalidité ;

Considérant que M. X... percevait au moment de l'accident un salaire mensuel de l'ordre de 7 500 francs ; qu'il pouvait ainsi espérer continuer à percevoir une rémunération calculée au moins sur cette base jusqu'à l'âge de 60 ans et le cas échéant au-delà ; que le tribunal administratif n'a dans ces conditions pas fait une évaluation excessive de l'ensemble des pertes de revenus qu'il a subies à partir du jour de l'accident en lui accordant à ce titre une indemnité de 698 000 francs dès lors que s'agissant de déterminer le préjudice de la victime avant imputation des droits de la caisse de sécurité sociale il n'y a pas lieu à ce moment de tenir compte des versements de toute nature effectués par ladite caisse ;
Considérant que les souffrances physiques subies par M. X... ainsi que son préjudice esthétique ont été qualifiés d'importants par l'expert ; que dans ces conditions le tribunal administratif n'a pas fait une évaluation excessive tant de ces deux chefs de préjudice que des troubles dans les conditions d'existence qu'il a subi et subira en lui accordant à ce titre une indemnité globale de 250 000 francs dont 50 000 francs en réparation des troubles physiologiques qu'il a supportés ;
Considérant qu'il y a lieu d'ajouter à ces sommes, les indemnités journalières et les frais médicaux d'hospitalisation et d'appareillage pris en charge par la sécurité sociale pour respectivement 44 759 francs, 123 564 francs et 46 018 francs ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préjudice global subi par M. X... doit comme l'a jugé le tribunal administratif être fixé à 1 162 341 francs ; que la requête du centre hospitalier régional universitaire de Nice tendant à sa réduction doit en conséquence être rejetée ;
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes :
Considérant que la caisse primaire a versé au requérant 44 759 francs d'indemnités journalières ; qu'elle a pris en charge 123 564 francs de frais médicaux et d'hospitalisation et 46 018 francs de frais d'appareillage ; que les arrérages déjà versés et le capital représentatif des sommes qu'elle sera amenée à verser au requérant au titre de la rente d'invalidité qu'elle lui a accordé, s'élèvent dans le dernier état de ses écritures à 473 851 francs ; que la créance totale de la caisse s'établit à 688 192 francs ;

Considérant que ces dépenses ne peuvent, en vertu de l'article L.376-1 du code de la sécurité sociale, s'imputer que sur la part de la condamnation assurant la réparation de l'atteinte à l'intégrité physique de la victime, c'est-à-dire sur les indemnités allouées en remboursement des frais médicaux et d'hospitalisation ainsi que sur la fraction de l'indemnité accordée en réparation des troubles dans les conditions d'existence qui couvre l'atteinte à l'intégrité physique de la victime ; que la part ainsi définie s'élève à 962 341 francs ce qui permet de remplir la caisse de la totalité de ses droits ; qu'il convient en conséquence de faire droit à l'appel incident de la caisse et de porter de 650 726 francs à 688 192 francs l'indemnité que le Centre hospitalier régional universitaire de Nice doit être condamné à lui payer ; que la caisse a droit aux intérêts au taux légal à hauteur de 650 728 francs à compter du 9 mars 1992 date d'enregistrement de sa demande au tribunal administratif et pour le surplus de l'indemnité qui lui est due à compter du 5 septembre 1993, date d'enregistrement de ses dernières écritures devant la cour ; que le jugement attaqué doit être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;
Sur les droits de M. X... :
Considérant qu'après prèlèvement sur le montant de 1 162 341 francs représentant la dette du Centre hospitalier régional universitaire de Nice, de la somme revenant à la Caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, l'indemnité que le tribunal administratif a condamné le centre hospitalier à verser à M. X... doit être ramenée de 511 615 francs à 474 149 francs ; qu'il y a lieu de réformer le jugement attaqué et de condamner le Centre hospitalier régional universitaire de Nice à payer à M. Antoine X... une indemnité de 474 149 francs ;
Sur les droits de Mme X... et de ses deux enfants :
Considérant que Mme X... et ses deux enfants ont subi et subiront des troubles multiples dans leurs conditions d'existence du fait de l'infirmité dont M. X... reste atteint ; que l'octroi à ce titre d'une indemnité de 50 000 francs à Mme X... et d'une indemnité de 5 000 francs à chacun de ses deux enfants, ne représente pas une évaluation exagérée de leurs préjudices ; que le Centre hospitalier régional universitaire n'est, en conséquence, pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif a entendu ainsi indemniser à la fois des troubles dans les conditions d'existence et un préjudice moral ; qu'il n'est pas fondé à demander sur ce point la réformation du jugement attaqué ;
Sur les conclusions de M. X..., de Mme X... et ses enfants et de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel :
Considérant que la demande de M. X... ne peut qu'être rejetée dès lors qu'il est la partie perdante ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'accorder à Mme X... et à ses enfants et à la caisse primaire une somme sur le fondement de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La requête du Centre hospitalier régional universitaire de Nice est rejetée.
Article 2 : Le Centre hospitalier régional universitaire de Nice est condamné à payer à M. Antoine X... une indemnité de 474 149 francs.
Article 3 : Le Centre hospitalier régional universitaire de Nice est condamné à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une indemnité de 688 192 francs qui portera intérêts au taux légal à hauteur de 650 726 francs à compter du 9 mars 1992 et pour le surplus à compter du 5 septembre 1993.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 9 mars 1993 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : Les conclusions de M. X..., de Mme X... et de ses enfants, et de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes tendant à l'application de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 2e chambre
Numéro d'arrêt : 93LY00741
Date de la décision : 23/06/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

60-05-04-01-01 RESPONSABILITE DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RECOURS OUVERTS AUX DEBITEURS DE L'INDEMNITE, AUX ASSUREURS DE LA VICTIME ET AUX CAISSES DE SECURITE SOCIALE - DROITS DES CAISSES DE SECURITE SOCIALE - IMPUTATION DES DROITS A REMBOURSEMENT DE LA CAISSE - ARTICLE L.376-1 (ANCIEN ARTICLE L.397) DU CODE DE LA SECURITE SOCIALE


Références :

Code de la sécurité sociale L376-1
Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R106, R229, L8-1


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. FONTBONNE
Rapporteur public ?: Mme HAELVOET

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1994-06-23;93ly00741 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award