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15/06/1994 | FRANCE | N°93LY00696;93LY01721

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 3e chambre, 15 juin 1994, 93LY00696 et 93LY01721


Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 mai 1993 sous le n° 93LY00696, présentée par Mme veuve X... demeurant ... ;
Mme d'ORNANO demande que la cour :
1°) annule le jugement du 2 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du maire d'Ajaccio en date des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 portant délivrance d'un permis de construire à la S.C.I. Palais Grandval II pour l'édification d'un immeuble de seize logements sur un terrain situé à l'angle du cours du général Leclerc et de la ru

e miss Campbell ;
2°) annule lesdits arrêtés des 5 décembre 1991 et 3 fé...

Vu 1°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 7 mai 1993 sous le n° 93LY00696, présentée par Mme veuve X... demeurant ... ;
Mme d'ORNANO demande que la cour :
1°) annule le jugement du 2 avril 1993 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du maire d'Ajaccio en date des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 portant délivrance d'un permis de construire à la S.C.I. Palais Grandval II pour l'édification d'un immeuble de seize logements sur un terrain situé à l'angle du cours du général Leclerc et de la rue miss Campbell ;
2°) annule lesdits arrêtés des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 ;

Vu 2°) la requête, enregistrée au greffe de la cour le 29 octobre 1993 sous le n° 93LY01721, présentée par Mme X... demeurant ... ;
Mme d'ORNANO demande que la cour :
1°) annule le jugement en date du 24 septembre 1993 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du maire d'Ajaccio du 15 février 1993 portant délivrance d'un permis de construire modificatif à la S.C.I. Palais Grandval II et l'a condamnée à verser à ladite S.C.I. la somme de 4 000 francs au titre de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
2°) annule l'arrêté du maire d'Ajaccio du 15 février 1993 ; elle soutient qu'elle a déposé une requête en annulation du permis de construire initial délivré par les arrêtés des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 et qu'elle conteste ledit modificatif afin de préserver ses droits ; que, dans les circonstances de l'espèce, alors qu'elle avait obtenu le sursis à exécution du permis initial par arrêt de la cour administrative de Lyon du 21 janvier 1993 et que la S.C.I. a malgré tout continué les travaux, il lui paraît particulièrement inéquitable de la condamner au versement d'une somme de 4 000 francs au titre de l'article L.8-1 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mai 1994 :
- le rapport de M. VESLIN, conseiller ;
- les observations de Me Y... et de Me GIUSEPPI, avocats de la S.C.I. Palais Grandval II ;
- et les conclusions de M. CHANEL, commissaire du gouvernement ;

Sur la jonction :
Considérant que, par les requêtes n° 93LY00696 et 93LY01721, Mme d'ORNANO demande l'annulation de deux jugements, des 2 avril 1993 et 24 septembre 1993, par lesquels le tribunal administratif de Bastia a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des arrêtés du maire d'Ajaccio en date, d'une part, des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 portant délivrance d'un permis de construire à la S.C.I. Palais Grandval II pour l'édification d'un immeuble collectif d'habitation, d'autre part, du 15 février 1993 portant délivrance d'un permis de construire modificatif à cette S.C.I. ; que ces requêtes présentent à juger des questions connexes ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
En ce qui concerne la requête n° 93LY00696 :
Sur la recevabilité de la requête :
Considérant que la S.C.I. Palais Grandval II soutient que la requête présentée par Mme d'ORNANO est irrecevable au motif que, contenant à la fois des conclusions d'annulation du jugement attaqué et des conclusions tendant à l'octroi du sursis à l'exécution des permis de construire contestés, elle méconnaîtrait les dispositions de l'article R.119 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Considérant que les dispositions invoquées ne sont pas applicables à la procédure suivie devant les cours administratives d'appel ; qu'ainsi la fin de non-recevoir sus-analysée ne peut qu'être écartée ;
Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit sursis à statuer et à ce que l'affaire soit renvoyée au Conseil d'Etat :
Considérant, d'une part, que la faculté de renvoi pour avis au Conseil d'Etat, prévue par l'article 12 de la loi susvisée du 31 décembre 1987, constitue un pouvoir propre du juge administratif ; qu'ainsi les conclusions de la SCI Palais Grandval II tendant à ce que celui-ci mette en oeuvre cette procédure ne sont pas recevables ;
Considérant, d'autre part, que cette même S.C.I. soutient qu'il y aurait lieu de surseoir à statuer dans l'attente de la décision du Conseil d'Etat à intervenir sur le pourvoi en cassation qu'elle a introduit contre l'ordonnance en date du 14 mai 1993, déclarant qu'il n'y a plus lieu de statuer sur l'opposition qu'elle a formée contre l'arrêt de la cour du 21 janvier 1993 prescrivant le sursis à l'exécution des permis de construire délivrés les 5 décembre 1991 et 3 février 1992 ;
Considérant que la circonstance que la S.C.I. se soit pourvue en cassation contre l'ordonnance sus-indiquée ne prive pas cette société de la possibilité d'invoquer dans la présente instance, dès lors que l'arrêt prescrivant un sursis à exécution n'a pas l'autorité de la chose jugée, la forclusion qu'elle a opposée devant le tribunal aux recours en annulation de Mme d'ORNANO lors de l'instruction de la demande de sursis à exécution ; qu'ainsi les conclusions de la SCI tendant à ce qu'il soit sursis à statuer sur les requêtes de Mme d'ORNANO doivent, en tout état de cause, être rejetées ;

Considérant que, si la S.C.I. Palais Grandval II entend invoquer à nouveau cette fin de non-recevoir devant la cour, elle ne l'assortit en appel d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'elle ne peut dès lors qu'être rejetée ;
Sur la légalité des arrêtés des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 :
Considérant qu'aux termes de l'article UB6 du plan d'occupation des sols relatif à l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques, "En secteurs UB1 et UB2, les constructions doivent être implantées dans une bande de quinze mètres de profondeur en arrière de la limite de reculement portée au document graphique ou sinon à partir de l'alignement. Lorsque les constructions existantes sont en recul de plus de cinq mètres par rapport à l'alignement, la bande constructible est reportée en arrière des façades donnant sur la voie principale." ;
Considérant qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'aucune limite de reculement n'est portée sur les documents graphiques du P.O.S. et qu'un nombre significatif de constructions existantes sont déjà implantées à plus de cinq mètres de l'alignement, la bande constructible est reportée en arrière des façades des constructions donnant sur la voie principale ;
Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que l'immeuble dit "Palais Grandval A", auquel doit être accolé le bâtiment projeté, est implanté en recul de plus de cinq mètres par rapport à l'alignement sur le cours du général Leclerc ; que sa façade est prolongée par celle d'un immeuble contigu dit "Palais Grandval C" ; que le linéaire de façades de cet ensemble immobilier se trouve lui-même, de l'autre côté de la rue Miss Campbell après la brève saillie formée par un bâtiment édifié au XIXème siècle dit "Cyrnos Palace", dans le prolongement de la façade importante d'un immeuble récent ; que dans ces conditions, alors même que le Cyrnos Palace est implanté à moins de 5 mètres de l'alignement sur une parcelle située en face de l'opération projetée à l'angle formé par le cours du général Leclerc avec la rue miss Campbell, la bande constructible de 15 mètres, définie par les dispositions du paragraphe 1 de l'article UB6 du P.O.S. d'Ajaccio précité, doit être reportée en arrière des façades de cet ensemble d'immeubles en application des dispositions du paragraphe 2 de ce même article ;

Considérant que le projet de construction de la S.C.I. Palais Grandval II, autorisé par les arrêtés du maire d'Ajaccio des 5 décembre 1991 et 3 février 1992, comporte un porche d'entrée implanté en bordure de l'alignement sur le cours du général Leclerc ; que le reste de la façade donnant sur cette voie dépasse de plusieurs mètres le linéaire de façade déterminé comme il a été dit ci-dessus ; qu'ainsi il est implanté, pour partie, hors de la bande constructible de 15 mètres délimitée par application des dispositions précitées du paragraphe 2 de l'article UB6 du P.O.S. ; que, par suite, Mme d'ORNANO est fondée à soutenir que ces arrêtés méconnaissent les dispositions de cet article et qu'en conséquence, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens qu'elle invoque, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à l'annulation desdits arrêtés ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler le jugement du tribunal administratif du 2 avril 1993 ainsi que les arrêtés du maire d'Ajaccio des 5 décembre 1991 et 3 février 1992 ;
En ce qui concerne la requête n° 93LY01721 :
Considérant que, contrairement à ce que soutient en défense la S.C.I. Palais Grandval II, Mme d'ORNANO ne se borne pas à contester en appel les frais irrépétibles mis à sa charge par le jugement rendu par le tribunal administratif de Bastia le 24 septembre 1993 mais demande l'annulation intégrale dudit jugement qui rejette, par ailleurs, son recours dirigé contre l'arrêté du 15 février 1993 ;
Considérant que l'arrêté du maire d'Ajaccio du 15 février 1993 porte délivrance à la S.C.I. Palais Grandval II d'un permis de construire modificatif aux permis initiaux délivrés les 5 décembre 1991 et 3 février 1992 ; que, par suite de l'illégalité qui entache les permis initiaux, le maire d'Ajaccio ne pouvait légalement délivrer le permis modificatif attaqué ; qu'ainsi Mme d'ORNANO est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 24 septembre 1993, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 février 1993 et l'a condamnée à payer des frais irrépétibles ; qu'il y a lieu en conséquence d'annuler ledit jugement ;
Sur les frais irrépétibles :
Considérant que les conclusions présentées par la S.C.I. Palais Grandval II doivent être examinées sur le fondement des dispositions de l'article L.8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours adminis-tratives d'appel ; que ces dispositions font obstacle à ce que Mme d'ORNANO, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à la S.C.I. Palais Grandval II les sommes qu'elle réclame à ce titre ;
Considérant en revanche qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner la S.C.I. Palais Grandval II à verser à Mme d'ORNANO la somme de 2 000 francs au titre des dispositions de l'article L.8-1 sus-indiquées ;
Article 1er : Les jugements du tribunal administratif de Bastia des 2 avril 1993 et 24 septembre 1993, ensemble les arrêtés du maire d'Ajaccio des 5 décembre 1991, 3 février 1992 et 15 février 1993 portant délivrance d'un permis de construire et d'un permis modificatif à la S.C.I. Palais Grandval II sont annulés.
Article 2 : La S.C.I. Palais Grandval II est condamnée à verser la somme de 2 000 francs à Mme d'ORNANO au titre de l'article L.8-1 du code des tribu-naux administratifs et des cours administratives d'ap-pel.
Article 3 : Les conclusions présentées par la S.C.I. Palais Grandval II tendant à ce qu'il soit sursis à statuer ainsi qu'à la condamnation de Mme d'ORNANO au titre de l'article L.8-1 du code des tribu-naux administratifs et des cours administratives d'ap-pel sont rejetées.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 3e chambre
Numéro d'arrêt : 93LY00696;93LY01721
Date de la décision : 15/06/1994
Type d'affaire : Administrative

Analyses

PROCEDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GENERALES - RENVOI AU CONSEIL D'ETAT D'UNE QUESTION DE DROIT NOUVELLE (ARTICLE 12 DE LA LOI DU 31 DECEMBRE 1987).

URBANISME ET AMENAGEMENT DU TERRITOIRE - PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE INTERNE DU PERMIS DE CONSTRUIRE - LEGALITE AU REGARD DE LA REGLEMENTATION LOCALE - PLAN D'OCCUPATION DES SOLS.


Références :

Code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel R119, L8-1
Loi 87-1127 du 31 décembre 1987 art. 12


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M.VESLIN
Rapporteur public ?: M.CHANEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;1994-06-15;93ly00696 ?
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