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24/05/2022 | FRANCE | N°21DA02575

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre, 24 mai 2022, 21DA02575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., en qualité de représentante légale de son fils A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 17 janvier 2019 par laquelle la rectrice de l'académie de Lille a confirmé la décision par laquelle le conseil de discipline du collège Henri Matisse d'Ostricourt a prononcé l'exclusion définitive de son fils mineur A... B... et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et

L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902291 du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B..., en qualité de représentante légale de son fils A... B..., a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 17 janvier 2019 par laquelle la rectrice de l'académie de Lille a confirmé la décision par laquelle le conseil de discipline du collège Henri Matisse d'Ostricourt a prononcé l'exclusion définitive de son fils mineur A... B... et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1902291 du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 novembre 2021, Mme B..., représentée par Me Faten Fachi-Shalak, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 17 janvier 2019 par laquelle la rectrice de l'académie de Lille a confirmé la décision du conseil de discipline du collège Henri Matisse d'Ostricourt prononçant l'exclusion définitive de son fils mineur A... B... ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son avocat au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 17 janvier 2019 a été prise par une autorité incompétente ;

- l'avis de la commission académique d'appel des conseils de discipline prévu par l'article R. 511-49 du code de l'éducation ne lui a pas été communiqué, ni à son fils, ce qui les a privés d'une garantie et est contraire aux principes du contradictoire et des droits de la défense ;

- il n'est pas établi que la commission académique d'appel des conseils de discipline était régulièrement composée, ni qu'elle ait statué à la majorité conformément aux articles D. 511-51 et D. 511-52 du même code ;

- la sanction est entachée d'une erreur de fait ;

- la sanction est disproportionnée et n'a pas de portée éducative.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2022, la rectrice de l'académie de Lille conclut au rejet de la requête.

Elle s'en rapporte au mémoire en défense produit devant les premiers juges faisant valoir qu'aucun des moyens soulevés par Mme B... n'est fondé.

La demande d'aide juridictionnelle de Mme B... a été constatée caduque par une décision du 3 mars 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'éducation ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Khater, première conseillère,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., né le 13 mars 2004, élève de troisième au collège Henri Matisse d'Ostricourt au cours de l'année scolaire 2018-2019, a comparu le 8 octobre 2018 devant le conseil de discipline de l'établissement pour avoir agressé physiquement un autre élève, refusé de donner son carnet de correspondance à un surveillant, menacé de gifler cette personne, avoir refusé d'obéir au personnel d'éducation et de direction, tutoyé le principal, fait usage de son téléphone portable, tenu des propos injurieux envers le collège et ne pas avoir respecté le règlement intérieur de l'établissement. Par une décision du même jour, le conseil de discipline a prononcé à son encontre la sanction d'exclusion définitive sans sursis. Mme C... B..., sa mère a déféré cette décision à la rectrice de l'académie de Lille qui, après avis de la commission académique du 20 novembre 2018, a, par un arrêté du 17 janvier 2019, confirmé la sanction prononcée par le conseil de discipline. Par un jugement du 1er octobre 2021, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de Mme B... tendant à l'annulation de cet arrêté. Mme B... relève appel de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 511-13 du code de l'éducation, dans sa version en vigueur à la date de la décision attaquée : " I. - Dans les collèges et lycées relevant du ministre chargé de l'éducation, les sanctions qui peuvent être prononcées à l'encontre des élèves sont les suivantes : / 1° L'avertissement ; / 2° Le blâme ; / 3° La mesure de responsabilisation ; / 4° L'exclusion temporaire (...) / 6° L'exclusion définitive de l'établissement (...) / Les sanctions prévues aux 3° à 6° peuvent être assorties du sursis à leur exécution (...) ". Aux termes de l'article R. 511-49 du même code : " Toute décision du conseil de discipline de l'établissement (...) peut être déférée au recteur de l'académie, (...) / Le recteur d'académie décide après avis d'une commission académique. "

3. En premier lieu, c'est par de justes motifs énoncés au point 3 du jugement attaqué, qu'il y a lieu d'adopter, que le tribunal a écarté le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision contestée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article D. 511-51 du code de l'éducation : " La commission académique est présidée par le recteur ou son représentant. / Elle comprend en outre cinq membres : / 1° Un directeur académique des services de l'éducation nationale agissant sur délégation du recteur d'académie ; / 2° Un chef d'établissement ; / 3° Un professeur ; / 4° Deux représentants des parents d'élèves. / Les membres autres que le président sont nommés pour deux ans par le recteur ou son représentant. / Un suppléant est nommé dans les mêmes conditions pour chacun des membres de la commission, à l'exception de son président. / Pour la désignation des représentants des parents d'élèves, le recteur recueille les propositions des associations représentées au conseil académique de l'éducation nationale. " Aux termes de l'article D. 511-52 du même code, dans sa version alors en vigueur : " Les modalités prévues pour le conseil de discipline de l'établissement ou le conseil de discipline départemental en matière d'exercice des droits de la défense par les articles D. 511-31, D. 511-32 et D. 511-38 à D. 511-40 sont applicables à la commission ainsi que les dispositions du deuxième alinéa de l'article D. 511-42, à l'exception de sa dernière phrase. La commission émet son avis à la majorité de ses membres. / La décision du recteur intervient dans un délai d'un mois à compter de la date de réception de l'appel. " Enfin, l'article D. 511-42 du même code, rendu applicable à l'avis de la commission académique, prévoit la notification immédiate à l'élève et à son représentant légal de l'avis émis par la commission et sa confirmation par pli recommandé le jour même.

5. D'une part, aucune disposition législative ou règlementaire, ni aucun principe n'impose la communication à l'élève et à ses représentants légaux de l'avis de la commission académique d'appel des conseils de discipline destiné au recteur d'académie, seule sa notification le jour même étant prévue par les dispositions précitées. Dès lors, Mme B..., qui au surplus, présente avec son fils à la séance de la commission académique d'appel, ne soutient pas que le sens de l'avis émis par la commission ne leur aurait pas été notifié dans les conditions prévues à l'article D. 511-42 du code de l'éducation, ne peut utilement se prévaloir du défaut de communication de l'avis de la commission académique pour soutenir que la décision contestée a été irrégulièrement prise, en méconnaissance des principes du contradictoire et des droits de la défense.

6. D'autre part, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis rendu par la commission académique d'appel des conseils de discipline en sa séance du 20 novembre 2018, produit par la rectrice en première instance que la commission était composée d'un inspecteur d'académie - inspecteur pédagogique régional représentant la rectrice de l'académie, d'un directeur académique adjoint des services de l'éducation nationale du Nord, d'un chef d'établissement, d'un professeur et d'un représentant des parents d'élèves, soit cinq des six membres prévus par les dispositions précitées de l'article D. 511-51 du code de l'éducation et désignés par arrêtés du recteur de l'académie de Lille du 23 janvier 2018 et du 6 septembre 2018 fixant la composition de la commission d'appel des conseils de discipline de l'académie de Lille. Aucune disposition législative ou règlementaire n'impose la présence de l'ensemble des membres de la commission ni ne prévoit de quorum. Il ressort en outre des pièces du dossier que l'avis a été rendu à l'unanimité de ses cinq membres présents. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que la commission académique d'appel des conseils de discipline était irrégulièrement composée et n'aurait pas émis son avis dans les conditions prévues à l'article D. 511-52 du code de l'éducation.

7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier que le 19 septembre 2018, plusieurs incidents sont intervenus dans l'enceinte du collège Henri Matisse d'Ostricourt mettant en cause l'élève Robin B... qui, dans un premier temps, a agressé physiquement un élève de sa classe et a, dans la suite de cette agression, refusé de donner son carnet de correspondance à l'assistant d'éducation. Dans un deuxième temps, dans la cour de récréation, Robin B... a soulevé un élève de sixième au sol et s'en est pris violemment à l'assistant d'éducation alors intervenu, alors que son comparse a immédiatement obtempéré à l'ordre qui lui était donné de cesser ce comportement dangereux. Il a ensuite réitéré ses menaces à l'endroit de l'assistant d'éducation dans le bureau du chef d'établissement où il a tenu des propos injurieux envers le collège, tutoyé le chef d'établissement et menacé de gifler l'assistant d'éducation. Mme B... conteste une partie de ces faits et en particulier l'agression physique d'un autre élève, le refus d'obtempérer aux injonctions du personnel d'éducation et de direction et le tutoiement du chef d'établissement. Toutefois, chacun de ces faits ressort des différents rapports d'incident rédigés par l'assistant d'éducation puis par le chef d'établissement, sans qu'aucun témoignage ne vienne en contredire l'exactitude matérielle. La requérante ne conteste au demeurant pas que son fils a tenu des propos injurieux envers le collège, menacé de gifler un surveillant et fait usage de son téléphone portable pour la prévenir à la suite de cet incident, ces faits constituant à eux seuls des manquements graves au règlement intérieur de l'établissement de nature à justifier légalement une sanction disciplinaire et à ce que soit prononcée une mesure d'exclusion définitive. Il suit de là que les moyens tirés de l'erreur de fait et du caractère disproportionné de la sanction doivent être écartés.

8. En dernier lieu, si la circulaire n° 2014-059 du 27 mai 2014 du ministre de l'éducation nationale évoque la portée éducative de la sanction, ses dispositions sont dépourvues de caractère impératif. Par suite, Mme B... ne peut utilement s'en prévaloir. Le moyen doit par suite être écarté comme inopérant.

9. Il résulte de ce tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande. Il y a donc lieu de rejeter sa requête en toutes ses conclusions, y compris celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B..., au ministre de l'éducation, de la jeunesse et des sports et à Me Faten Chafi-Shalak.

Copie sera adressée à la rectrice de l'académie de Lille.

Délibéré après l'audience publique du 10 mai 2022 à laquelle siégeaient :

- Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme Muriel Milard, première conseillère,

- Mme Anne Khater, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 mai 2022.

La rapporteure,

Signé : A. KhaterLa présidente de la formation de jugement,

Signé : A. Chauvin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière

Anne-Sophie Villette

2

N°21DA02575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 21DA02575
Date de la décision : 24/05/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Chauvin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : CHAFI-SHALAK

Origine de la décision
Date de l'import : 31/05/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2022-05-24;21da02575 ?
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