Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de son renvoi.
Par un jugement n°2101111 du 15 avril 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 9 juillet 2021, M. A..., représenté par Me David Boyle, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement et l'arrêté du préfet de la Seine-Maritime du 8 mars 2021 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Eure de lui délivrer une carte de séjour dans un délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire de réexaminer sa situation, dans le délai de huit jours à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, et lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire, sous la même astreinte ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat, au titre des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 2 000 euros au profit de Me Boyle, qui renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
- contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, il a formé son recours contre la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 10 août 2020, dont il a reçu notification le 7 septembre 2020, dans le délai d'un mois suivant l'admission de sa demande d'aide juridictionnelle déposée le même jour, et il devait en conséquence bénéficier du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de l'ordonnance de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) en application de l'ancien article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ; l'obligation de quitter le territoire français remise le 8 mars 2021, avant que la décision de la CNDA ne lui soit notifiée, était ainsi prématurée ;
- en outre, il n'a pas été averti de la possibilité d'en demander la suspension en vertu de l'article L. 743-3 du même code et le préfet n'a pas visé l'article L. 743-2.
Par un mémoire en défense, enregistré le 26 octobre 2021, le préfet de la Seine-Maritime conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 10 juin 2021.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° n° 91-1266 du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Aurélie Chauvin, présidente-assesseure, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... A..., ressortissant nigérian, né le 26 juin 1975, déclare être entré en France le 22 février 2016. Il a sollicité la reconnaissance de la qualité de réfugié, demande qui a été rejetée par une décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et du droit d'asile (OFPRA) du 27 décembre 2016, devenue définitive. Sa demande de réexamen a également été rejetée par une décision du 10 août 2020 de l'OFPRA à l'encontre de laquelle il a déposé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA). A la suite d'un contrôle de police, M. A... a fait l'objet d'un arrêté du 8 mars 2021 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. A... relève appel du jugement du 15 avril 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. Lorsque, dans l'hypothèse mentionnée à l'article L. 311-6, un refus de séjour a été opposé à l'étranger, la mesure peut être prise sur le seul fondement du présent 6° ; (...) ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. (...) ". Ce principe est assorti de dérogations énumérées à l'article L. 743-2 du même code. À ce titre, le droit au maintien sur le territoire prend fin notamment, selon le 4° de cet article, lorsque " L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement " et selon le 4°bis, sans préjudice du 4°, lorsque l'Office, saisi d'une demande de réexamen, " a pris une décision d'irrecevabilité " au motif qu'elle ne présente pas d'éléments nouveaux augmentant de manière significative la probabilité que le demandeur justifie des conditions requises pour prétendre à une protection.
3. Aux termes de l'article L. 731-2 du même code : " La Cour nationale du droit d'asile statue sur les recours formés contre les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides prises en application des articles L. 711-1 à L. 711-4, L. 711-6, L. 712-1 à L. 712-3, L. 713-1 à L. 713-4, L. 723-1 à L. 723-8, L. 723-11, L. 723-15 et L. 723-16. À peine d'irrecevabilité, ces recours doivent être exercés dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision de l'office, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. " Aux termes de l'article 9-4 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " (...) Si l'aide juridictionnelle est sollicitée en vue d'introduire le recours devant la cour, elle doit être demandée dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'office. Dans le cas contraire, l'aide juridictionnelle peut être demandée lors de l'introduction du recours, exercé dans le délai". Aux termes de l'article 39 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Lorsqu'une demande d'aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en matière civile devant la Cour de cassation est adressée au bureau d'aide juridictionnelle établi près cette juridiction avant l'expiration du délai imparti pour le dépôt du pourvoi ou des mémoires, ce délai est interrompu. Un nouveau délai court à compter du jour de la réception par l'intéressé de la notification de la décision du bureau d'aide juridictionnelle ou, si elle est plus tardive, de la date à laquelle un auxiliaire de justice a été désigné. (...) Les délais de recours sont interrompus dans les mêmes conditions lorsque l'aide juridictionnelle est sollicitée à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat ou une juridiction administrative statuant à charge de recours devant le Conseil d'Etat ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile dont l'article 9-4 précité est issu, que la demande d'aide juridictionnelle présentée en vue d'introduire un recours devant la Cour nationale du droit d'asile n'interrompt le délai d'un mois pour présenter ce recours que si cette demande est adressée au bureau d'aide juridictionnelle dans le délai de quinze jours à compter de la notification de la décision de l'office.
4. Enfin, l'article L. 743-3 du même code, dispose que : " (...) Dans le cas où le droit de se maintenir sur le territoire a pris fin en application des 4° bis ou 7° de l'article L. 743-2 l'étranger peut demander au président du tribunal administratif ou au magistrat désigné statuant sur le recours formé en application de l'article L. 512-1 contre l'obligation de quitter le territoire français de suspendre l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours devant la Cour nationale du droit d'asile ou, si celle-ci est saisie, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la cour, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. Le président du tribunal administratif ou le magistrat désigné à cette fin fait droit à la demande de l'étranger lorsque celui-ci présente des éléments sérieux de nature à justifier, au titre de sa demande d'asile, son maintien sur le territoire durant l'examen de son recours par la cour ".
5. Il ressort des pièces du dossier que la demande initiale d'asile présentée par M. A... a été rejetée par une décision du 27 décembre 2016 de l'OFPRA, notifiée le 6 février 2017. Le 5 août 2020, M. A... a sollicité le réexamen de sa demande d'asile, qui a été rejetée pour irrecevabilité le 10 août 2020, l'Office ayant estimé que les éléments présentés par l'intéressé n'augmentaient pas de manière significative la probabilité qu'il justifie des conditions requises pour prétendre à une protection. M. A..., qui a reçu notification de cette décision le 7 septembre 2020, a immédiatement demandé le bénéfice de l'aide juridictionnelle en vue de déposer un recours devant la CNDA contre cette décision, puis, a saisi, ainsi qu'il est mentionné à l'arrêté contesté, cette Cour le 8 février 2021, soit dans le délai d'un mois prévu par les dispositions précitées de l'article L. 731-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui avait recommencé à courir à compter de la réception de la décision du 14 janvier 2021 du bureau d'aide juridictionnelle. S'il a ainsi introduit son recours devant la CNDA dans les délais prescrits, M. A... ne pouvait toutefois se prévaloir d'un droit au maintien sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de cette dernière dès lors que l'Office avait rejeté sa demande de réexamen pour irrecevabilité au motif de l'absence d'éléments nouveaux augmentant de manière significative la probabilité qu'il justifie des conditions requises pour prétendre à une protection. Par suite, le préfet était légalement fondé à prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français sur le fondement du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, sans attendre que ne lui soit notifié la décision de la CNDA.
6. Si M. A... soutient en second lieu, comme il l'avait fait en première instance, qu'il n'a pas été informé par l'autorité administrative de la possibilité de demander au président du tribunal administratif la suspension de l'exécution de la mesure d'éloignement jusqu'à l'expiration du délai de recours, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me David Boyle.
Copie sera adressée au préfet de la Seine-Maritime.
Délibéré après l'audience publique du 22 mars 2022 à laquelle siégeaient :
- Mme Anne Seulin, présidente de chambre,
- Mme Mme Aurélie Chauvin, présidente assesseure,
- Mme Muriel Milard, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition du greffe le 12 avril 2022.
La présidente-rapporteure,
Signé : A. Chauvin
La présidente de chambre
Signé : A. SeulinLa greffière,
Signé : A.-S. Villette
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
La greffière,
Anne-Sophie Villette
N°21DA01614 2