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22/06/2021 | FRANCE | N°20DA01208

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 22 juin 2021, 20DA01208


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé son pays de destination, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, en cas de reconnaissance du bien-fondé de la requête, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable un an, ou subsidia

irement un récépissé de demande de titre de séjour ou encore plus subsidiairemen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... E... a demandé au tribunal administratif de Rouen d'annuler l'arrêté du 13 février 2020 par lequel le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé l'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé son pays de destination, d'enjoindre au préfet de la Seine-Maritime, en cas de reconnaissance du bien-fondé de la requête, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", valable un an, ou subsidiairement un récépissé de demande de titre de séjour ou encore plus subsidiairement, dans l'hypothèse où seul un moyen de légalité externe serait retenu, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa demande à compter du jugement à intervenir, le tout dans un délai de huit jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2001527 du 10 juillet 2020, le tribunal administratif de Rouen a annulé l'arrêté du 13 février 2020 du préfet de la Seine-Maritime, a enjoint à ce dernier de délivrer à M. E... un titre de séjour valable un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 août 2020, le préfet de la Seine-Maritime demande à la cour d'annuler ce jugement et de rejeter les demandes de première instance de M. E....

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... B..., première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant congolais né à Brazzaville le 13 mai 1983, déclare être entré sur le territoire français le 20 décembre 2013. Après avoir demandé l'asile en France, il a fait l'objet d'une décision de réadmission en Espagne à laquelle il n'a pas déféré. Le 15 septembre 2015, il a sollicité son admission au séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 25 janvier 2016, le préfet de la Seine-Maritime a refusé de lui délivrer un titre de séjour en assortissant ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par un premier jugement du 30 mai 2016, confirmé par la cour administrative d'appel de Douai, la demande de M. E... tendant à l'annulation de cet arrêt a été rejetée. Le 22 novembre 2018, M. E... a sollicité à nouveau son admission au séjour sur les fondements du 7° de l'article L. 313-11 et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 13 février 2020, le préfet de la Seine-Maritime lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination. Par un jugement du 10 juillet 2020, dont le préfet de la Seine-Maritime relève appel, le tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté, a enjoint à ce dernier de délivrer à M. E... un titre de séjour valable un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur le moyen d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. E..., après avoir fait l'objet d'une décision de réadmission en Espagne à laquelle il n'a pas déféré, a conclu, le 23 juin 2015, un pacte civil de solidarité avec une compatriote, Mme F..., elle-même titulaire d'une carte de résident valable jusqu'au 5 mars 2023 et mère de deux enfants de nationalité française. De leurs relations sont issus deux enfants, nés en France en 2015 et 2017. M. E... et sa compagne justifient résider ensemble depuis la conclusion de leur pacte civil de solidarité, soit depuis cinq années à la date de la décision attaquée. M. E... justifie par ailleurs d'une bonne insertion socio-professionnelle alors qu'il a obtenu un certificat d'aptitude professionnelle en électricité, s'investir au sein de la paroisse de Canteleu et surtout, contribuer à l'entretien et à l'éducation de ses deux enfants avec lesquels il vit. M. E... soutient, sans être sérieusement contredit, ne plus être retourné au Congo depuis 2013 et ne plus y entretenir de relations affectives alors que sa compagne d'alors est décédée, ainsi que deux de leurs trois enfants. La production par le préfet d'une attestation du consulat de France au Congo selon laquelle les actes de décès de ces deux enfants ne figurent pas dans les registres du centre d'état civil de Kinkala ne suffit pas à remettre en cause l'appréciation faite par les premiers juges de ce que M. E... a transféré le centre de ses intérêts personnels et familiaux en France depuis cinq ans à la date de l'arrêté attaqué. Dès lors, c'est à juste titre que le tribunal administratif de Rouen a annulé la décision par laquelle le préfet a refusé à M. E... un titre de séjour au motif qu'elle porte à la vie privée et familiale de l'intéressé une atteinte disproportionnée en méconnaissance du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

4. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet de la Seine-Maritime n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé son arrêté du 13 février 2020, lui a enjoint de délivrer à M. E... un titre de séjour valable un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros à verser à Me C..., conseil du requérant, sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que son conseil renonce au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet de la Seine-Maritime est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 1 000 euros à Me C... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, au préfet de la Seine-Maritime à M. G... E..., et à Me D... C....

4

N°20DA01208


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 20DA01208
Date de la décision : 22/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

35-01 Famille. Institutions familiales (loi du 11 juillet 1975).


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SELARL EDEN AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 29/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2021-06-22;20da01208 ?
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