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20/10/2020 | FRANCE | N°19DA02021

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 20 octobre 2020, 19DA02021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à lui verser une somme de 15 000 euros en indemnisation des préjudices subis à la suite de la sanction disciplinaire d'abaissement de deux échelons prise à son encontre le 13 juillet 2015, puis retirée le 10 novembre 2015 et de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administra

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Par un jugement n° 1802227 du 2 juillet 2019, le tribunal adminis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à lui verser une somme de 15 000 euros en indemnisation des préjudices subis à la suite de la sanction disciplinaire d'abaissement de deux échelons prise à son encontre le 13 juillet 2015, puis retirée le 10 novembre 2015 et de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de Compiègne-Noyon une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1802227 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif d'Amiens a condamné le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à verser à M. A... une somme de 3 000 euros en indemnisation de ses préjudices et une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le surplus des conclusions des parties étant rejeté.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 août 2019, M. A... demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a limité l'indemnisation de ses préjudices par le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à la somme de 3 000 euros ;

2°) de condamner le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à lui verser la somme de 15 000 euros en indemnisation du préjudice moral subi du fait de la sanction illégale prononcée à son encontre ;

3°) de condamner le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à lui verser la somme de 3 292 euros en indemnisation du préjudice financier subi du fait de la sanction illégale prononcée à son encontre ;

4°) de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon le versement d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a exercé ses fonctions d'aide-soignant au sein du service de gériatrie " Saint-Romuald " du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon, sur le site de Noyon, depuis 1987. Par décision du 2 avril 2015, le directeur des ressources humaines de cet établissement l'a suspendu de ses fonctions à titre conservatoire à compter du 3 avril 2015, en raison d'une suspicion d'actes de maltraitance commis sur des personnes âgées résidentes. Malgré un avis du 23 juin 2015 rendu par le conseil de discipline du centre hospitalier en défaveur d'une sanction, la directrice du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon a, par une décision du 13 juillet 2015, prononcé à l'encontre de M. A... la sanction d'abaissement de deux échelons. La commission des recours du conseil supérieur de la fonction publique hospitalière s'étant, par un avis du 23 septembre 2015, prononcé en faveur d'une annulation de cette sanction, la directrice du centre hospitalier a retiré la sanction par décision du 10 novembre 2015. Après rejet de sa réclamation préalable, M. A... a saisi le tribunal administratif d'Amiens qui, par un jugement n° 1802227 du 2 juillet 2019, a condamné le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à indemniser M. A... de ses préjudices à hauteur de 3 000 euros, à raison de l'illégalité de la sanction prononcée. M. A..., estimant que la somme qui lui a été allouée est insuffisante, relève appel de ce jugement. Estimant n'avoir commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité, le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon conclut, par la voie de l'appel incident, à l'annulation de ce jugement.

Sur la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon :

2. D'une part, il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 2 à 4 de leur jugement, de juger que la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon est engagée à raison de l'illégalité fautive de la sanction prononcée le 13 juillet 2015 à l'encontre de M. A..., faute pour l'établissement d'avoir apporté la preuve de l'exactitude matérielle des faits imputés à l'intéressé et au titre desquels il a été sanctionné.

3. D'autre part, ainsi que l'a jugé le tribunal, la réintégration de M. A... sur un poste d'aide-soignant au bloc opératoire, décidée au retour du congé de maladie de M. A... et prise dans le seul intérêt du service, indépendamment de la sanction litigieuse qui n'impliquait aucune éviction du service, ne constitue pas une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon.

Sur les préjudices :

En ce qui concerne le préjudice moral :

4. Il résulte de l'instruction que M. A... a fait l'objet d'accusations injustifiées de comportements inadaptés, voire de maltraitance à l'égard des résidents du service de gériatrie au sein duquel il exerçait ses fonctions d'aide-soignant depuis de nombreuses années sans qu'aucun incident ne fût à déplorer jusqu'alors. Pour ces faits, M. A... s'est vu infliger illégalement une sanction du deuxième groupe qui a produit ses effets pendant quatre mois. Il est ainsi fondé à se prévaloir d'un préjudice caractérisé par l'atteinte à son honneur et à sa réputation professionnels résultant de la procédure disciplinaire engagée à son encontre. C'est par une juste appréciation que les premiers juges ont évalué ce préjudice à la somme de 3 000 euros.

5. Si M. A... se prévaut également au titre du préjudice moral, des troubles dans les conditions d'existence et des souffrances morales endurées en raison de la dépression qui a suivi l'engagement de cette procédure disciplinaire, l'attestation du médecin généraliste qui le suit pour une dépression nerveuse depuis le mois d'avril 2015, produite pour la première fois en appel, en l'absence de toute précision sur l'origine de cette dépression, ne permet pas plus que les attestations et témoignages produits devant les premiers juges, de tenir pour établi le lien direct et certain entre cette pathologie et la faute commise par le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon. Par ailleurs, les témoignages de collègues, infirmiers ou aides-soignants, produits pour la première fois en appel, sont insuffisamment précis et circonstanciés pour établir de manière certaine un lien direct et exclusif entre la pathologie de M. A... et la sanction disciplinaire illégalement prononcée. M. A... n'est donc pas fondé à demander l'indemnisation des troubles dans les conditions d'existence et des souffrances morales endurées en raison de la dépression qui a suivi l'engagement de cette procédure disciplinaire.

En ce qui concerne le préjudice économique :

6. S'il résulte de l'instruction qu'à la suite de sa réintégration, M. A... a été affecté au bloc opératoire du site de Noyon, ce qui a entraîné la perte de deux primes liées à sa précédente affectation en service gériatrique, ce changement d'affectation ne procède pas de la sanction illégalement prononcée qui a consisté en un abaissement de deux échelons sans éviction du service et qui, seule, engage la responsabilité du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon. M. A... n'est donc pas fondé à se prévaloir d'une indemnisation au titre de ce préjudice économique.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a limité l'indemnisation de ses préjudices par le centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon à la somme de 3 000 euros. Il en résulte également que l'appel incident du centre hospitalier doit être rejeté.

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon le versement à M. A... d'une somme au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel incident du centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au centre hospitalier intercommunal Compiègne-Noyon.

2

N°19DA02021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 19DA02021
Date de la décision : 20/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Discipline - Motifs - Faits n'étant pas de nature à justifier une sanction.

Responsabilité de la puissance publique - Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité - Responsabilité et illégalité - Illégalité engageant la responsabilité de la puissance publique.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Préjudice - Absence ou existence du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : LANCKRIET

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-20;19da02021 ?
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