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24/10/2018 | FRANCE | N°17DA02248

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 24 octobre 2018, 17DA02248


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société coopérative de bâtiment (Scobat) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille de prescrire une expertise, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, portant sur le marché de conception réalisation pour l'édification de trois structures psychiatriques sur le site de Capelle la Grande.

Par une ordonnance n° 1706768 du 16 novembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à cette deman

de.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2017, l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société coopérative de bâtiment (Scobat) a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Lille de prescrire une expertise, sur le fondement des dispositions de l'article R. 532-1 du code de justice administrative, portant sur le marché de conception réalisation pour l'édification de trois structures psychiatriques sur le site de Capelle la Grande.

Par une ordonnance n° 1706768 du 16 novembre 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 novembre 2017, l'établissement public de santé mentale (EPSM) des Flandres, représenté par Me F...E..., demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance ;

2°) de rejeter la demande de la Scobat ;

3°) subsidiairement, de modifier la mission de l'expert ;

4°) de mettre à la charge de la Scobat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

Sur la compétence de la juridiction administrative :

1. Avant tout procès et avant même que puisse être déterminée, eu égard aux parties éventuellement appelées en la cause principale, la compétence sur le fond du litige, et dès lors que ce dernier est de nature à relever, fût-ce pour partie, de l'ordre de juridiction auquel il appartient, le juge des référés a compétence pour ordonner une mesure d'instruction sans que soit en cause le principe de séparation des autorités administratives et judiciaires. Il n'en va autrement que lorsqu'il est demandé au juge des référés d'ordonner une mesure d'instruction qui porte à titre exclusif sur un litige dont la connaissance au fond n'appartient manifestement pas à l'ordre de juridiction dont il relève.

2. Le fond du litige mettant en jeu la responsabilité éventuelle de la Scobat, mandataire solidaire d'un groupement conjoint d'entreprises, qui a conclu le 11 juillet 2011, un marché public de conception réalisation avec l'EPSM des Flandres, est de nature à relever de la compétence de la juridiction administrative.

Sur les conclusions d'appel principal :

3. Aux termes de l'article L. 555-1 du code de justice administrative : " Sans préjudice des dispositions du titre II du livre V du présent code, le président de la cour administrative d'appel ou le magistrat qu'il désigne à cet effet est compétent pour statuer sur les appels formés devant les cours administratives d'appel contre les décisions rendues par le juge des référés ". Aux termes de l'article R. 532-1 du même code : " Le juge des référés peut, sur simple requête et même en l'absence de décision administrative préalable, prescrire toute mesure utile d'expertise ou d'instruction. (...) ". Il ressort de ces dispositions que l'octroi d'une telle mesure est subordonné à son utilité pour le règlement d'un litige principal appréciée en tenant compte, notamment, de l'existence d'une perspective contentieuse recevable, des possibilités ouvertes au demandeur pour arriver au même résultat par d'autres moyens, de l'intérêt de la mesure pour le contentieux né ou à venir.

4. Par un acte d'engagement du 11 juillet 2011, l'EPSM des Flandres a conclu un marché de conception réalisation en vue de la construction de trois structures de psychiatrie sur le site de Capelle-la-Grande avec un groupement conjoint d'entreprises, dont la Scobat est le mandataire. Par un avenant du 10 octobre 2013, le projet a été réduit à la construction de deux bâtiments. La réception des travaux a été prononcée avec réserves le 18 avril 2016. Par lettre du 18 octobre 2016, l'EPSM des Flandres a mis en demeure la Scobat de lever l'ensemble des réserves pour le 4 novembre 2016 au plus tard. Par lettre du même jour, l'EPSM des Flandres l'a également mise en demeure de mettre en place une procédure de suivi des désordres constatés dans le cadre de la garantie de parfait achèvement. La durée de validité de la durée de cette garantie a été décidée par l'EPSM des Flandres par décision du 14 avril 2017. Par lettre du 30 mai 2017, l'EPSM des Flandres a décidé d'appliquer à la Scobat les pénalités de retard. A la demande de la Scobat, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a prescrit une expertise en vue de donner tous les éléments permettant au juge de déterminer si les travaux ont été effectués conformément au marché de conception réalisation signée avec l'EPSM des Flandres, dans le cas où ils ne seraient pas conformes, de chiffrer le coût pour les rendre conformes aux publications du marché, de donner son avis sur la demande de pénalités de l'EPSM des Flandres au regard du marché et du calcul effectué, et fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer s'il y a lieu les responsabilités encourues et les préjudices subies. L'EPSM des Flandres relève appel de l'ordonnance du 16 novembre 2017 du président du tribunal administratif de Lille, statuant en référé.

En ce qui concerne l'utilité de la mission d'expertise :

5. L'utilité d'une mesure d'instruction ou d'expertise qu'il est demandé au juge des référés d'ordonner sur le fondement de l'article R. 532-1 du code de justice administrative doit être appréciée, d'une part, au regard des éléments dont le demandeur dispose ou peut disposer par d'autres moyens et, d'autre part, bien que ce juge ne soit pas saisi du principal, au regard de l'intérêt que la mesure présente dans la perspective d'un litige principal, actuel ou éventuel, auquel elle est susceptible de se rattacher. A ce dernier titre, il ne peut faire droit à une demande d'expertise lorsque, en particulier, elle est formulée à l'appui de prétentions qui ne relèvent manifestement pas de la compétence de la juridiction administrative, qui sont irrecevables ou qui se heurtent à la prescription.

6. Pour contester l'utilité de la mesure d'expertise ordonnée, l'EPSM des Flandres fait valoir qu'il n'existe aucun litige en cours, ni qu'aucune perspective contentieuse n'a été précisée par la Scobat dans sa demande devant le tribunal administratif. Il résulte toutefois de l'instruction qu'il existe des divergences entre l'EPSM et les différents membres du groupement quant aux travaux réalisés dans le cadre du marché de conception réalisation conclus pour la construction de deux structures psychiatriques. Une mise en demeure de mettre en place une procédure de suivi des désordres constatés dans le cadre de la garantie de parfait achèvement, dont la durée de validité a été prolongée par l'EPSM, a été adressée à la Scobat. Des pénalités de retard ont d'ailleurs été décidées par le maître d'ouvrage. Dès lors, et alors même que la demande d'expertise émane du mandataire du groupement, la mission d'expertise sollicitée présente une utilité pour un éventuel contentieux à venir. Par suite, l'EPSM des Flandres n'est pas fondé à soutenir que la Scobat ne justifie pas de son intérêt, au regard d'une action contentieuse à laquelle la mesure d'expertise demandée est susceptible de se rattacher.

En ce qui concerne la nature des missions confiées à l'expert :

S'agissant de la mission destinée à " donner tous éléments permettant au juge de déterminer si les travaux ont été effectués conformément au marché de conception réalisation signé avec l'EPSM et de chiffrer le cas échéant le coût des travaux pour les rendre conformes aux publications du marché " :

7. Cette mission n'a pas pour objet de confier une question de droit à l'expert mais seulement de permettre de dresser un constat des travaux réalisés par les entreprises du groupement par rapport à ce qui était prévu contractuellement.

S'agissant de la mission consistant à donner son avis sur la demande de pénalités de l'EPSM des Flandres au regard du marché et sur le calcul effectué :

8. La mission consistant à donner un avis sur l'application des pénalités de retard par l'EPSM des Flandres au regard du marché et sur le calcul effectué implique une interprétation des clauses du marché. Elle doit être regardée comme donnant qualité à l'expert pour trancher des questions de droit et ne saurait légalement lui être confiée par le juge des référés en application de l'article R. 532-1 du code de justice administrative. Par suite, l'EPSM des Flandres est fondée à soutenir que c'est à tort que le premier juge a confié à l'expert cette mission. Cependant il convient de substituer à cette mission, celle consistant pour l'expert à donner son avis sur les éléments de fait qui ont conduit le maître d'ouvrage à infliger ces pénalités.

S'agissant de la mission visant à fournir tous éléments techniques et de fait de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer, s'il y a lieu, les responsabilités encourues et les préjudices subis :

9. La mission n'a pas pour objet de demander à l'expert un avis sur les responsabilités encourues mais seulement de fournir des éléments techniques et de fait à partir desquels les responsabilités encourues et les préjudices subis pourront être éventuellement déterminés par le juge. Par suite, le moyen tiré de que la mission porterait sur une question de droit relative à la détermination de la responsabilité des différents acteurs doit être écarté.

Sur la demande d'extension des missions de l'expert demandée à titre subsidiaire par l'EPSM des Flandres :

10. L'extension de la mission de l'expert demandée par l'EPSM tendant à la " constatation relative à l'état des immeubles et ses abords avant les opérations d'expertise " figure d'ores et déjà dans la mission confiée à l'expert, qui doit, en premier lieu, constater l'état des deux structures psychiatriques sur le site. L'identification des dommages pouvant survenir sur les immeubles et ses abords ainsi que la cause et l'étendue des dommages pouvant survenir durant la mission de l'expert constituent un litige distinct de celui susceptible de porter sur la conformité des travaux effectués lors de l'exécution du marché conception réalisation. L'extension de la mission à la constatation relative à la nature des travaux déjà réalisés par le groupement titulaire du marché figure également dans la mission de l'expert qui doit donner tous éléments permettant au juge de déterminer si les travaux ont été effectués conformément au marché de conception réalisation signé par l'EPSM des Flandres. Enfin, l'évaluation des préjudices du fait du retard dans la livraison des ouvrages, de l'absence de levée des réserves et de l'absence de parfait achèvement des ouvrages ne présente pas de caractère utile dès lors que l'expert a déjà pour mission de fournir tous les éléments techniques et de fait pour permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer, s'il y a lieu, les responsabilités encourues et les préjudices subis.

11. Le délai de deux mois demandé par l'EPSM des Flandres pour la réalisation des constats de l'expert, en raison des perturbations pouvant intervenir sur le fonctionnement de l'EPSM des Flandres, ne présente aucun caractère d'utilité compte tenu de la date de la présente ordonnance.

Sur les conclusions d'appel provoqué de l'agence d'architecture Debrock, la société Asphalte Nord, la e e, ux droits de la société SECA santé, à la société DLF iNG2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 17DA02248
Date de la décision : 24/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-03-011 Procédure. Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé tendant au prononcé d'une mesure d'expertise ou d'instruction.


Composition du Tribunal
Avocat(s) : CABINET PEYRICAL et SABATTIER ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 20/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-10-24;17da02248 ?
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