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28/06/2018 | FRANCE | N°17DA00300

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 28 juin 2018, 17DA00300


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...-C... B...a demandé au tribunal administratif de Lille, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 149 295,34 euros sauf à parfaire au regard d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assorties de l'intérêt au taux légal à compter du 27 juin 2012, correspondant à la réparation de son préjudice né du défaut d'affiliation aux régimes général et complémentair

e de retraite.

Par une ordonnance n° 1608761 du 27 janvier 2017, le juge des r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...-C... B...a demandé au tribunal administratif de Lille, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 149 295,34 euros sauf à parfaire au regard d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assorties de l'intérêt au taux légal à compter du 27 juin 2012, correspondant à la réparation de son préjudice né du défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de retraite.

Par une ordonnance n° 1608761 du 27 janvier 2017, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a condamné l'Etat à verser à M. B...une provision de 149 295,34 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 juin 2012.

Procédure devant la cour :

Par un recours et un mémoire enregistrés les 13 février et 22 juin 2017, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour d'annuler l'ordonnance de référé du 27 janvier 2017 du tribunal administratif de Lille.

........................................................................................................

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de la sécurité sociale ;

- loi n° 89-412 du 22 juin 1989 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. A...-lucB..., vétérinaire exerçant en libéral, a été titulaire d'un mandat sanitaire à compter de l'année 1976, au titre duquel il a réalisé des actes de prophylaxie collective dans le département du Nord rémunérés par l'Etat ; M. B...a demandé à l'administration, par lettre du 29 mai 2012, la régularisation de sa situation en raison de l'absence d'affiliation à la Caisse de retraite et de la santé au travail (CARSAT) et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) lors de son activité exercée au titre de son mandat sanitaire ; par une lettre du 22 juillet 2013, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui n'a pas contesté le principe de la responsabilité de l'Etat, lui a communiqué une proposition d'assiette pour calculer les arriérés de cotisations et les indemnités pour minoration de pensions ; que M. B... a saisi le juge des référés du tribunal administratif de Lille d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une provision à valoir sur la réparation du préjudice subi d'un montant de 149 295,34 euros ; le ministre relève appel de l'ordonnance par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Lille a fait droit à la demande de M. B...;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Contrairement à ce que soutient le ministre, le juge des référés du tribunal administratif de Lille a indiqué précisément les motifs sur lesquels il s'est fondé pour estimer que l'existence de l'obligation invoquée par M. B...pouvait être regardée comme non sérieusement contestable ; dès lors, l'ordonnance attaquée est suffisamment motivée ;

Sur le recours du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt :

3. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ; il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude ; dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état ; dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant ;

4. Le préjudice ouvrant droit à réparation au profit de M.B..., qui constitue la créance dont il peut se prévaloir à l'encontre de l'Etat, correspond, d'une part, au montant des cotisations patronales et salariales qu'il aura à acquitter au lieu et place de l'Etat, son employeur, pour la période litigieuse, tant auprès du régime général de retraite que du régime complémentaire et, d'autre part, au montant du différentiel de pensions échues au titre de ces deux régimes de retraite ;

5. Le montant des rémunérations perçues par les vétérinaires libéraux au titre du mandat sanitaire ne saurait se déduire de la seule existence de ce mandat, détenu par la quasi-totalité des vétérinaires à raison d'une activité qui ne revêtait au demeurant qu'un caractère accessoire et complémentaire, en sus de leur activité libérale ; il résulte de l'instruction que M. B...n'apporte pas, s'agissant des années 1976 à 1982, d'éléments de nature à justifier de la réalité de l'exercice de son mandat sanitaire et des revenus qu'il en aurait tirés ; ses allégations générales relatives au rythme d'activité des vétérinaires chargés de la prophylaxie collective et de la police sanitaire ne peuvent démontrer la réalité d'une activité exercée, par lui, au cours de ces années pour une durée d'au moins 90 jours, telle que la prévoient les dispositions de l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale, au titre d'un mandat sanitaire régulièrement délivré lui permettant de bénéficier du recours à l'assiette forfaitaire ; par suite, c'est à tort que le juge des référés de première instance a retenu le montant des salaires avancés au titre des années 1976 à 1982 pour la détermination de l'assiette des cotisations versées au titre de l'exercice du mandat sanitaire détenu par M.B... ;

6. Selon les dispositions de l'article 10 de la loi du 22 juin 1989, modifiant et complétant certaines dispositions du livre II du code rural, ainsi que certains articles du code de la santé publique, applicable à compter du 1er janvier 1990 : " Les rémunérations perçues au titre de l'exercice du mandat sanitaire sont assimilées, pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale " ; qu'il résulte de ces dispositions que toutes les rémunérations perçues à compter du 1er janvier 1990 par les vétérinaires à raison du mandat sanitaire détenu par eux sont, quelle que soit la date de réalisation des prestations auxquelles elles se rapportent, assimilées à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale ; par suite, c'est à tort que le juge des référés a retenu, pour les intégrer à l'assiette de calcul des indemnités dues à M.B..., des " salaires " qui lui auraient été versés au cours des années 1990 et 1991 à raison de l'exercice de son mandat sanitaire avant le 1er janvier 1990 ;

7. Pour procéder au chiffrage de son préjudice devant le premier juge, M. B...s'est appuyé sur la proposition d'assiette des cotisations en litige faite par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt le 22 juillet 2013 et sur des tableaux récapitulatifs établis par ses soins qui tiennent compte des salaires réellement perçus, dans la limite des plafonds de sécurité sociale en vigueur, des taux de cotisations, des coefficients de revalorisation et d'actualisation ; il a déterminé le préjudice qu'il invoque, né de l'absence de versement des pensions par la CARSAT au regard du montant de ses salaires de base, de la moyenne de ses meilleures années de cotisations, du nombre de trimestres de cotisations au régime général de la sécurité sociale, soit 68, et du taux de 50 % ; les cotisations IRCANTEC ont quant à elles été déterminées au vu des montants des tranches de cotisations dues par l'intéressé et l'employeur ; les pensions de retraite dont l'intéressé a été privé sont chiffrées compte tenu des montants des cotisations théoriques, du nombre de " points retraite " en résultant, de la majoration pour service militaire et pour enfant ; ces modalités de calcul ne reposent pas sur les données fournies par la CARSAT ou l'IRCANTEC ; elles ne peuvent donc être regardées comme suffisantes pour déterminer avec certitude le montant total de l'indemnisation à laquelle pourrait prétendre M. B... ; par suite, eu égard notamment à la complexité des modalités de détermination des différents préjudices indemnisables et des motifs cités aux points 5 et 6, c'est à tort que le juge des référés de première instance a accordé à M. B...la totalité de la provision qu'il demandait ;

8. Toutefois, il n'est pas contesté par l'administration que M. B...a subi un préjudice du fait de sa non-affiliation, tant auprès du régime général de retraite que du régime complémentaire, entre 1983 et 1989 ; dès lors, et compte tenu des motifs cités aux points 5 et 6 et des sommes qu'il y a en conséquence lieu de retrancher aux bases de calcul retenues par le premier juge, l'existence de l'obligation dont se prévaut M. B...doit être regardée comme non sérieusement contestable à hauteur de 90 000 euros ;

9. M. B...a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 90 000 euros à compter du 27 juin 2012, date de réception par l'administration de sa demande préalable ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une quelconque somme au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er : La somme de 149 295,34 euros mise à la charge de l'Etat à titre de provision en faveur de M. B...par le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens est ramenée à 90 000 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 27 juin 2012.

Article 2 : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Lille est réformée en ce qu'elle a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : Le surplus des conclusions du ministre ainsi que les conclusions présentées par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et à M. A...-C...B....

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N°17DA00300


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 17DA00300
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP YVES RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-06-28;17da00300 ?
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