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28/06/2018 | FRANCE | N°16DA02360

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 28 juin 2018, 16DA02360


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 295 276,64 euros, sauf à parfaire, au regard d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 23 décembre 2009, correspondant à la réparation de son préjudice né du défaut d'affiliation aux régimes général et complémentair

e de retraite.

Par une ordonnance n° 1602167 du 23 novembre 2016, le juge des r...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif d'Amiens, sur le fondement de l'article R. 541-1 du code de justice administrative, de condamner l'Etat à lui verser la somme provisionnelle de 295 276,64 euros, sauf à parfaire, au regard d'une éventuelle modification à intervenir du taux de rachat des cotisations sociales, assortie de l'intérêt au taux légal à compter du 23 décembre 2009, correspondant à la réparation de son préjudice né du défaut d'affiliation aux régimes général et complémentaire de retraite.

Par une ordonnance n° 1602167 du 23 novembre 2016, le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens a condamné l'Etat à verser à M. A...une somme provisionnelle de 295 276,64 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2009.

Procédure devant la cour :

Par un recours, enregistré le 12 décembre 2016, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt demande à la cour de réformer l'ordonnance de référé du tribunal administratif d'Amiens en limitant le montant de la provision à une somme de 193 083,60 euros.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code rural et de la pêche maritime ;

- le code de la sécurité sociale ;

- loi n° 89-412 du 22 juin 1989 ;

- le code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...A..., vétérinaire exerçant en libéral, a été titulaire d'un mandat sanitaire à compter de 1969, au titre duquel il a réalisé des actes de prophylaxie collective rémunérés par l'Etat dans les départements de l'Aisne et du Nord ; M. A...a demandé à l'administration, par lettre du 14 décembre 2009 reçue le 23 décembre 2009, la régularisation de sa situation en raison de l'absence d'affiliation à la Caisse de retraite et de la santé au travail (CARSAT) et à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC) lors de son activité exercée au titre de son mandat sanitaire ; par une lettre du 29 juillet 2014, le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, qui a reconnu le principe de la responsabilité de l'Etat, lui a communiqué une proposition d'assiette pour calculer les arriérés de cotisations et les indemnités pour minoration de pensions ; M. A...a saisi le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens d'une demande tendant à la condamnation de l'Etat à lui verser une provision à valoir sur la réparation du préjudice subi d'un montant de 295 276,64 euros ; le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt relève appel de l'ordonnance du 23 novembre 2016 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens a fait droit à la demande de M.A... ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Contrairement à ce que soutient le ministre, le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens a indiqué précisément les motifs sur lesquels il s'est fondé pour estimer que l'existence de l'obligation invoquée par M. A...pouvait être regardée comme non sérieusement contestable ; dès lors, l'ordonnance attaquée est suffisamment motivée ;

Sur le recours du ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt :

3. Aux termes de l'article R. 541-1 du code de justice administrative : " Le juge des référés peut, même en l'absence d'une demande au fond, accorder une provision au créancier qui l'a saisi lorsque l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable. Il peut, même d'office, subordonner le versement de la provision à la constitution d'une garantie. " ; il résulte de ces dispositions que, pour regarder une obligation comme non sérieusement contestable, il appartient au juge des référés de s'assurer que les éléments qui lui sont soumis par les parties sont de nature à en établir l'existence avec un degré suffisant de certitude ; dans ce cas, le montant de la provision que peut allouer le juge des référés n'a d'autre limite que celle résultant du caractère non sérieusement contestable de l'obligation dont les parties font état ; dans l'hypothèse où l'évaluation du montant de la provision résultant de cette obligation est incertaine, le juge des référés ne doit allouer de provision, le cas échéant assortie d'une garantie, que pour la fraction de ce montant qui lui parait revêtir un caractère de certitude suffisant ;

4. Le préjudice ouvrant droit à réparation au profit de M.A..., qui constitue la créance dont il peut se prévaloir à l'encontre de l'Etat, correspond, d'une part, au montant des cotisations patronales et salariales qu'il aura à acquitter au lieu et place de l'Etat, son employeur, pour la période litigieuse, tant auprès du régime général de retraite que du régime complémentaire et, d'autre part, au montant du différentiel de pensions échues au titre de ces deux régimes de retraite ;

5. Le montant des rémunérations perçues par les vétérinaires libéraux au titre du mandat sanitaire ne saurait se déduire de la seule existence de ce mandat, détenu par la quasi-totalité des vétérinaires à raison d'une activité qui ne revêtait au demeurant qu'un caractère accessoire et complémentaire, en sus de leur activité libérale ; il résulte de l'instruction que M. A...n'apporte pas, s'agissant des années 1969 et 1970, d'éléments de nature à justifier de la réalité de l'exercice de son mandat sanitaire et des revenus qu'il en aurait tirés ; ses allégations générales relatives au rythme d'activité des vétérinaires chargés de la prophylaxie collective et de la police sanitaire ne peuvent démontrer la réalité d'une activité exercée, par lui, au cours de ces années pour une durée d'au moins 90 jours, telle que la prévoient les dispositions de l'article R. 351-11 du code de la sécurité sociale, au titre d'un mandat sanitaire régulièrement délivré lui permettant de bénéficier du recours à l'assiette forfaitaire, laquelle au demeurant n'a pas été retenue par la circulaire du 24 avril 2012 organisant la procédure amiable de traitement des demandes d'indemnisation des vétérinaires sanitaires ; il n'y a pas lieu en conséquence de prendre en compte dans le cadre du référé provision le montant des salaires retenus par M. A...au titre de ces années pour la détermination de l'assiette des cotisations versées au titre de l'exercice du mandat sanitaire détenu ;

6. Il résulte des dispositions de l'article 10 de la loi n° 89-412 du 22 juin 1989, modifiant et complétant certaines dispositions du livre II du code rural ainsi que certains articles du code de la sante publique, que les rémunérations perçues au titre de l'exercice du mandat sanitaire : " (...) sont assimilées, pour l'application du code général des impôts et du code de la sécurité sociale, à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale. Ces dispositions s'appliquent à compter du 1er janvier 1990. " ; il résulte de ces dispositions que toutes les rémunérations perçues à compter du 1er janvier 1990 par les vétérinaires à raison du mandat sanitaire détenu par eux sont, quelle que soit la date de réalisation des prestations auxquelles elles se rapportent, assimilées à des revenus tirés de l'exercice d'une profession libérale ;

7. En conséquence, le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens ne pouvait pas, pour évaluer le chiffrage de la créance détenue par M. A...sur l'Etat en raison du préjudice qu'il a subi, intégrer à l'assiette du calcul de ce montant, les salaires qui lui auraient été versés au cours des années 1990 et 1991 à raison de l'exercice de son mandat sanitaire avant le 1er janvier 1990 ;

8. Enfin, il résulte de l'instruction, en particulier des documents établis par les organismes de retraite général et complémentaire qui ont été produits en appel par le ministre, et qui, seuls, peuvent servir de base de calcul à l'indemnité due à M.A..., que, d'une part, s'agissant des arriérés de cotisations pour le régime général, le montant des cotisations dues à la CARSAT s'élève à 45 901,23 euros ; par ailleurs, le montant du différentiel de pensions échues pour le régime général pour la période du 1er janvier 2006, date de liquidation de la retraite salarié de M.A..., à la date de la présente ordonnance, s'élève à la somme 24 910,62 ; il s'ensuit que M. A...ne peut prétendre à obtenir une provision s'agissant du régime général que dans la limite de la somme de 70 811,85 euros ; d'autre part, s'agissant des arriérés de cotisations pour le régime complémentaire, il ressort des éléments transmis par l'IRCANTEC que le montant des cotisations dues s'élève à 10 384,31 pour M.A..., à qui il appartient, s'il s'y croit fondé, de demander à cet organisme la prise en compte des points gratuits service militaire ; le montant du différentiel de pensions échues au titre du régime complémentaire pour la période du 1er janvier 2006, date de liquidation de sa retraite complémentaire à la date de la présente ordonnance s'élève à la somme de 128 595,60 ; il suit de là, en l'état de l'instruction, que la somme non contestable à laquelle peut prétendre M. A...doit être fixée à un montant total de 209 791,76 ; il y a lieu de réformer dans cette mesure l'ordonnance attaquée ;

9. L'indemnité provisionnelle due à M.A..., qui a été arrêtée en appel à la somme de 209 791,76 portera intérêts au taux légal à compter du 23 décembre 2009 ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

ORDONNE :

Article 1er : La somme de 295 276,64 euros mise à la charge de l'Etat à titre de provision en faveur de M. A...par le juge des référés du tribunal administratif d'Amiens est ramenée à 209 791,76 euros. Cette somme portera intérêt au taux légal à compter du 23 décembre 2009.

Article 2 : L'ordonnance n° 1602167 du 23 novembre 2016 du juge des référés du tribunal administratif d'Amiens est réformée en ce qu'elle a de contraire à l'article 1er.

Article 3 : Les conclusions présentées en appel par M. A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l'agriculture, et de l'alimentation et à M. B...A....

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N°16DA02360


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Numéro d'arrêt : 16DA02360
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP YVES RICHARD

Origine de la décision
Date de l'import : 31/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2018-06-28;16da02360 ?
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