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06/06/2017 | FRANCE | N°16DA01197

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2ème chambre - formation à 3, 06 juin 2017, 16DA01197


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1303597 du 26 avril 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juin 2016 et le 3 octobre 2016, M. D..., représenté par Me B...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 26 avril 2016 ;

2°) de prononcer la d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Rouen de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009.

Par un jugement n° 1303597 du 26 avril 2016, le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 30 juin 2016 et le 3 octobre 2016, M. D..., représenté par Me B...A..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Rouen du 26 avril 2016 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier pour n'avoir répondu que sur le terrain de l'application de la doctrine fiscale et non au préalable sur celui de la loi fiscale ;

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'il n'a pu bénéficier d'un débat oral et contradictoire effectif avec le vérificateur et qu'il n'a pu se faire assister par un conseil de son choix ;

- il y a lieu de retirer du montant de son chiffre d'affaires de 184 683 euros hors taxes arrêté par l'administration fiscale au titre de l'année 2009, une somme de 106 507 euros correspondant aux cachets qu'il reverse aux artistes se produisant dans les spectacles qu'il organise pour le compte de ses clients ainsi qu'une somme de 11 000 euros correspondant à un prêt familial ;

- certaines factures n'ont pas été prises en compte au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible ;

- il entre dans les prévisions de la documentation administrative au profit des organisateurs de spectacles référencée BOI BNC BASE 20-20-20120912, n° 20.

Par un mémoire en défense et un mémoire, enregistrés le 25 août 2016 et le 12 janvier 2017, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,

- les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public,

- et les observations de Me B... A...représentant M. C...D....

1. Considérant que M. C...D...exerce à titre indépendant la profession de conseil en animation sous l'enseigne commerciale " Conseil Animation Patrice Léry " ; qu'en 2012, il a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur l'imposition de ses bénéfices non commerciaux et sur la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er janvier 2009 au

31 décembre 2011 ; qu'à l'issue des opérations de contrôle, une proposition de rectification lui a été notifiée le 21 décembre 2012 écartant l'application du régime de " micro BNC " et de la franchise TVA en raison du dépassement des seuils fixés par les articles 102 ter du code général des impôts et 293 B du même code ; que M. D...relève appel du jugement du 26 avril 2016 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que lorsqu'un contribuable conteste une imposition en se bornant à invoquer, sur le fondement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'interprétation du texte fiscal qui résulterait d'une instruction ou circulaire administrative, il appartient au juge de l'impôt, au préalable, d'examiner si cette imposition trouve son fondement dans les dispositions de la loi fiscale dont l'administration a entendu faire application à ce contribuable ;

3. Considérant que, dans les motifs de son jugement, le tribunal administratif de Rouen s'est limité à répondre au moyen tiré de la méconnaissance de la documentation administrative au profit des organisateurs de spectacles (BOI BNC BASE 20-20-20120912, n° 20) que M. D... avait soulevé devant lui, sans examiner, au préalable, si l'imposition contestée était légalement fondée au regard des dispositions de l'articles 293 B du code général des impôts, dont l'administration avait fait, en l'espèce, application ; que, dès lors, le jugement du tribunal administratif de Rouen doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Rouen ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu ou une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. / Cet avis doit préciser les années soumises à vérification et mentionner expressément, sous peine de nullité de la procédure, que le contribuable a la faculté de se faire assister par un conseil de son choix. / L'avis envoyé ou remis au contribuable avant l'engagement d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle peut comporter une demande des relevés de compte. / En cas de contrôle inopiné tendant à la constatation matérielle des éléments physiques de l'exploitation ou de l'existence et de l'état des documents comptables, l'avis de vérification de comptabilité est remis au début des opérations de constatations matérielles. L'examen au fond des documents comptables ne peut commencer qu'à l'issue d'un délai raisonnable permettant au contribuable de se faire assister par un conseil " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il est constant que les opérations de contrôle se sont déroulées dans les locaux de l'administration à la demande de M. D...; que si M. D...fait valoir qu'il a reçu l'avis de vérification de comptabilité le 10 décembre 2012 et qu'il n'a rencontré le vérificateur qu'une première fois le 18 décembre 2012 pour lui remettre les documents comptables et bancaires relatifs à son activité et une seconde fois le 21 décembre 2012 pour un entretien pendant lequel le vérificateur lui a présenté les résultats du contrôle, il résulte toutefois de l'instruction que les opérations de contrôle se sont limitées à déterminer les encaissements professionnels du requérant sur ses comptes bancaires et le montant des charges déductibles à partir des factures produites et que ces éléments ont pu être discutés lors de l'entretien du 21 décembre 2012 ; qu'ainsi, eu égard à la nature et à l'importance des opérations de contrôle, M. D...n'a pas été privé d'un débat oral et contradictoire alors même qu'il n'aurait eu que deux entretiens avec le vérificateur ;

6. Considérant en second lieu, que M. D...soutient que compte tenu du délai entre la réception de l'avis de vérification et la notification de la proposition de rectification, il a été privé de la possibilité d'être assisté d'un conseil ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le requérant a été informé par l'avis de vérification reçu le 10 décembre 2012 de la possibilité de se faire assister d'un conseil en vertu des dispositions de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont, en outre, été reproduites au verso ; que le premier entretien avec le vérificateur, initialement fixé au lundi 17 décembre 2012 et reporté à la demande du contribuable, a eu lieu le 18 décembre 2012 ; que le requérant a ainsi bénéficié de plus de cinq jours ouvrés entre la réception effective de l'avis de vérification l'informant de la possibilité d'être assisté d'un conseil et lui demandant la production de documents et le premier entretien, et de trois jours entre ledit entretien et la proposition de rectification ; qu'il n'est dès lors pas fondé à soutenir qu'il a été privé de la possibilité d'être assisté d'un conseil ;

Sur le bien-fondé des impositions :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 293 B du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " I. - 1. Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France, à l'exclusion des redevables qui exercent une activité occulte au sens du deuxième alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales, bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée lorsqu'ils n'ont pas réalisé : / 1° Un chiffre d'affaires supérieur à : a) 80 000 euros l'année civile précédente ; / b) Ou 88 000 euros l'année civile précédente, lorsque le chiffre d'affaires de la pénultième année n'a pas excédé le montant mentionné au a ; / 2° Et un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, supérieur à : / a) 32 000 euros l'année civile précédente ; / b) Ou 34 000 euros l'année civile précédente, lorsque la pénultième année il n'a pas excédé le montant mentionné au a. / II.-1. Le I cesse de s'appliquer : / a) Aux assujettis dont le chiffre d'affaires de l'année en cours dépasse le montant mentionné au b du 1° du I ; / b) Ou à ceux dont le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, dépasse le montant mentionné au b du 2° du I. / 2. Les assujettis visés au 1 deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel ces chiffres d'affaires sont dépassés " ; qu'aux termes du II de l'article 267 du même code : " Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : (...) / 2° Les sommes remboursées aux intermédiaires, autres que les agences de voyage et organisateurs de circuits touristiques, qui effectuent des dépenses au nom et pour le compte de leurs commettants dans la mesure où ces intermédiaires rendent compte à leurs commettants, portent ces dépenses dans leur comptabilité dans des comptes de passage, et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature ou du montant exact de ces débours " ;

8. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. D...soutient qu'il y a lieu de retirer du montant de son chiffre d'affaires de 184 683 euros hors taxes, arrêté par l'administration fiscale au titre de l'année 2009, une somme de 106 507 euros correspondant aux cachets qu'il reverse aux artistes se produisant dans les spectacles qu'il organise pour le compte de ses clients ainsi qu'une somme de 11 000 euros correspondant à un prêt familial ; que, en tout état de cause, et à supposer même que ces sommes soient admises en déduction, le montant du chiffre d'affaires réalisé par M. D...au cours de l'année 2009 est supérieur aux seuils fixés par les dispositions de l'article 293 B du code général des impôts ; que, par suite, M. D...ne pouvait bénéficier du régime prévu par ces dispositions au titre de l'année 2009 ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M.D..., dont la profession consiste notamment à organiser des spectacles pour le compte d'organismes divers, est conduit à encaisser et à reverser des cachets pour le compte des artistes qui ont participé à ces spectacles et à engager, pour le compte de tiers, des frais remboursables ; qu'ainsi, M. D...doit être regardé comme ayant agi comme un intermédiaire ayant engagé ces sommes pour le compte de ses clients qui les lui remboursent ; que, dans ces conditions, ces sommes et ces frais n'ont pas, en application des dispositions précitées du II de l'article 267 du code général des impôts à être incluses dans les bases d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée sous réserve du respect des conditions posées par ces dispositions ; qu'il résulte de l'instruction que M. D...ne dispose d'aucune comptabilité spéciale retraçant les opérations effectuées à la demande de ses clients et ne procède pas à une reddition de compte ; que, les factures qu'il établit à ses clients ne mentionnent pas le montant des cachets qu'il reverse aux artistes ; que, dès lors, M. D...ne remplit pas les conditions exigées par les dispositions du II de l'article 267 du code général des impôts ;

10. Considérant que si M. D...fait valoir que certaines factures n'ont pas été prises en compte au titre de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, il résulte de l'instruction, qu'ainsi que le soutient l'administration fiscale, lesdites factures ont déjà été admises au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, ne sont pas assorties des justifications suffisantes ou correspondent à des prestations non soumises à la taxe sur la valeur ajoutée ;

11. Considérant que M. D...soutient également que les sommes de 4 000 euros, 2 000 euros et 5 000 euros versées sur ses comptes bancaires respectivement les 27 octobre, 5 novembre et 24 novembre 2009 constituent des prêts familiaux consentis par son oncle et sa tante ; que, toutefois, l'administration fiscale fait valoir que ces versements sur les comptes bancaires de M. D...ont été réalisés en espèces ce qui rend impossible l'identification de leur auteur et que l'attestation produite par l'oncle et la tante de M.D..., rédigée après les opérations de contrôle, ne prévoit aucune modalité de remboursement, aucun commencement de remboursement n'étant d'ailleurs intervenu ; que, dans ces conditions, les sommes en litige ne peuvent être regardées comme constituant des prêts familiaux ;

12. Considérant que si M. D...invoque le bénéfice de la documentation administrative au profit des organisateurs de spectacles (BOI BNC BASE 20-20-20120912, n° 20) qui prévoit la non prise en compte au titre des recettes des sommes encaissées puis reversées aux artistes, cette doctrine est relative à l'imposition des bénéfices non commerciaux au titre de l'impôt sur le revenu et non à la taxe sur la valeur ajoutée ; que, par suite, M. D...ne peut utilement s'en prévaloir en application des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2009 ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1303597 du 26 avril 2016 du tribunal administratif de Rouen est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D...devant le tribunal administratif de Rouen et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.

Délibéré après l'audience publique du 23 mai 2017 à laquelle siégeaient :

- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,

- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,

- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 juin 2017.

Le rapporteur,

Signé : R. FERALLa présidente de chambre,

Signé : O. DESTICOURT

Le greffier,

Signé : M.T. LEVEQUE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Le greffier

Marie-Thérèse Lévèque

6

N°16DA01197


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16DA01197
Date de la décision : 06/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme Desticourt
Rapporteur ?: M. Rodolphe Féral
Rapporteur public ?: M. Guyau
Avocat(s) : SELARL GUY FARCY-OLIVIER HORRIE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2017-06-06;16da01197 ?
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