Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme F... C...a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner la communauté de communes Campagne de Caux à lui verser la somme de 25 082,11 euros en remboursement de dépenses de travaux d'assainissement.
Par une ordonnance n° 1303376 du 18 août 2015, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen a rejeté sa demande comme manifestement irrecevable.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 octobre 2015 et le 21 juillet 2016, Mme C..., représentée par Me A...B..., demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance du 18 août 2015 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen ;
2°) à titre principal, de condamner la communauté de communes Campagne de Caux à lui verser la somme de 25 082,11 euros pour faute, à titre subsidiaire, sur le fondement de la responsabilité pour dommages de travaux publics ;
3°) de condamner la communauté de communes Campagne de Caux à lui verser la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
4°) de mettre à la charge de la communauté de communes Campagne de Caux la somme de 7 984,15 euros correspondant aux frais et honoraires de l'expert ;
5°) de mettre à la charge de la communauté de communes Campagne de Caux une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête était recevable car elle se référait au rapport de l'expert qui avait relevé que les travaux relevaient de la communauté de communes Campagne de Caux ;
- celle-ci a commis une faute en ne faisant pas ces travaux, relevant de sa compétence de lutte contre les inondations ;
- elle a la qualité de tiers, son préjudice est anormal et spécial et le lien de causalité est établi entre les inondations qu'elle subit et l'insuffisance ou l'inexistence d'évacuation des eaux pluviales ;
- ses préjudices doivent être réparés par l'octroi de dommages et intérêts.
Par un mémoire en défense, enregistré le 5 novembre 2015, la communauté de communes Campagne de Caux, représentée par Me G...H..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme C... une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête est irrecevable car elle fait l'objet d'une autre requête devant le tribunal administratif de Rouen ;
- la requête de première instance était manifestement irrecevable en l'absence totale de motivation et de fondement juridique de la demande ;
- s'agissant des factures dont le remboursement est demandé, la créance est prescrite à hauteur de la somme de 14 731,75 euros puisqu'elles sont datées de l'année 2001 ;
- le préjudice subi résulte de la survenance d'une situation à laquelle Mme C... s'est sciemment exposée et n'est pas de nature à lui ouvrir droit à réparation ;
- les dépenses faites par Mme C... sont inefficaces et nuisibles, aussi elle ne peut être condamnée à rembourser de telles sommes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que Mme C... relève appel de l'ordonnance du 18 août 2015 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la communauté de communes Campagne de Caux :
2. Considérant que la circonstance que Mme C... ait, après notification de l'ordonnance du 18 août 2015 précitée, déposé une nouvelle requête indemnitaire devant le tribunal administratif de Rouen est sans incidence sur la recevabilité de sa requête d'appel contre l'ordonnance en question ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la communauté de communes Campagne de Caux doit être écartée ;
Sur la régularité de l'ordonnance :
3. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) Les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 411-1 du même code : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. / L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours " ;
4. Considérant que devant le tribunal administratif, Mme C... a indiqué, en se référant explicitement au rapport d'expertise joint à sa demande, que s'agissant des responsabilités suite aux inondations dues au ruissellement des eaux de pluie, elle a dû faire réaliser un fossé sur sa propriété à ses frais, que cette opération relevait de la communauté de communes Campagne de Caux et qu'il était juste d'être remboursée par celle-ci pour des travaux qu'elle a été contrainte de réaliser pour protéger sa propriété ; que sa demande était donc suffisamment motivée au sens de l'article R. 411-1 précité du code de justice administrative ; que, dès lors, en la rejetant comme manifestement irrecevable, sur le fondement des dispositions du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, après avoir relevé que l'intéressée ne s'était fondée sur aucune disposition du code de justice administrative et s'était bornée à s'en remettre au rapport d'expertise pour juger que sa demande était " dépourvue de fondement juridique ", le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen a entaché l'ordonnance attaquée d'irrégularité ; que, par suite, MmeC..., dont la requête devant la cour est suffisamment motivée, est fondée à en demander l'annulation ;
5. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Rouen pour qu'il statue à nouveau sur la demande de Mme C... ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
7. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la communauté de communes Campagne de Caux doivent, dès lors, être rejetées ;
8. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la communauté de communes Campagne de Caux une somme au titre des frais exposés par Mme C... et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du 18 août 2015 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Rouen est annulée.
Article 2 : Mme C... est renvoyée devant le tribunal administratif de Rouen pour qu'il soit statué sur sa demande.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...C..., à la communauté de communes Campagne de Caux et au tribunal administratif de Rouen.
Délibéré après l'audience publique du 24 janvier 2017 à laquelle siégeaient :
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme E...D..., première conseillère,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller,
Lu en audience publique le 7 février 2017.
Le premier conseiller le plus ancien,
Signé : M. D...Le président-assesseur,
Signé : M. I...
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
Marie-Thérèse Lévèque
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N°15DA01654