Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...B...a demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005.
Par un jugement n° 1103004 du 15 mai 2014, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 18 juillet 2014, MmeB..., représentée par Me A...D..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Lille du 15 mai 2014 ;
2°) de prononcer la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'administration fiscale était informée, dès le 9 mai 2007, de sa nouvelle adresse et, ainsi, en lui adressant le 4 juin 2007 l'avis d'examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle et le 5 octobre 2007 la proposition de rectification à son ancienne adresse, l'administration fiscale a méconnu les dispositions des articles L. 47 et L. 76 du livre des procédures fiscales et entaché la procédure d'imposition d'une irrégularité ;
- devenue majeure le 21 mars 2004, elle devait être rattachée de plein droit au foyer fiscal de ses parents au titre de l'impôt sur le revenu de l'année 2004 en application des dispositions des articles 6, 196 et 196 A bis du code général des impôts ;
- les sommes créditées sur les deux comptes bancaires dont elle était titulaire et regardées par l'administration fiscale comme des revenus perçus au titre des années 2004 et 2005 correspondaient aux recettes de deux restaurants dont elle était la gérante de droit mais dont son père était en réalité le gérant de fait ; ses comptes bancaires servaient ainsi au fonctionnement des deux restaurants pour l'encaissement des recettes et le paiement des dépenses ; elle avait donné procuration à son père sur ses comptes bancaires et n'avait jamais utilisé à titre personnel ses comptes bancaires ;
- la mise en demeure de souscrire ses déclarations sur le revenu qui lui a été adressée le 14 avril 2007 l'a été à son ancienne adresse et cette mise en demeure ne comportait pas un certain nombre de mentions exigées par les dispositions de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales et par la documentation de base 13 L. 1551 n° 84 du 1er juillet 2002 ; en conséquence, l'application des pénalités au taux de 40 % prévues par les dispositions de l'article 1728 du code général des impôts est irrégulière.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 octobre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rodolphe Féral, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Jean-Marc Guyau, rapporteur public.
1. Considérant que Mme B...a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle portant sur les années 2004 et 2005 ; que dans le cadre de ce contrôle, l'administration fiscale a procédé, selon la procédure de taxation d'office, à la réintégration dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, des sommes figurant au crédit de deux comptes bancaires appartenant à Mme B...pour des montants de 189 105 euros au titre de l'année 2004 et 98 600 euros au titre de l'année 2005 ; que Mme B...relève appel du jugement du 15 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande tendant à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2005 ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant que la notification d'un avis de vérification ou d'une proposition de rectification, pour être régulière, doit être effectuée à la dernière adresse communiquée par le contribuable à l'administration fiscale ; qu'en cas de changement de domicile, il appartient au contribuable d'établir qu'il a fait les diligences nécessaires pour informer l'administration fiscale de sa nouvelle adresse ;
3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a notifié à Mme B..., le 14 avril 2007, un premier avis de vérification à son adresse 8 rue de la charrette à Orsinval dont l'administration soutient qu'elle constituait alors la dernière adresse connue de ses services ; que le pli a été retourné à l'administration fiscale avec la mention " non réclamé " ; que le 4 juin 2007, l'administration fiscale a adressé à Mme B...un second avis de vérification à cette même adresse qui lui a été retourné avec la mention " n'habite pas à l'adresse indiquée " ; que, le 5 octobre 2007, l'administration fiscale lui a notifié une proposition de rectification qui a été retournée avec la même mention ;
4. Considérant que Mme B...soutient que l'administration fiscale était informée de sa nouvelle adresse, 21 chaussée Brunehaut à Gommegnies, dès le 9 mai 2007 ; qu'il résulte cependant de l'instruction que Mme B...n'a jamais effectué la moindre diligence pour informer l'administration fiscale d'un éventuel changement d'adresse ; qu'à cet égard, si Mme B... se prévaut d'un jugement du tribunal de grande instance d'Avesnes-sur-Helpe du 9 mai 2007 prononçant à son encontre une peine d'amende et mentionnant qu'elle est domiciliée... ; qu'en outre, la communication par le contribuable d'une nouvelle adresse à une autre administration que l'administration fiscale ne peut être regardée comme valant information de cette dernière par le contribuable d'un changement d'adresse ; que si Mme B...se prévaut également d'une déclaration de recette émise le 6 juin 2007 par la trésorerie du Quesnoy indiquant qu'elle est domiciliée... ; que cette information communiquée par une administration tierce au comptable public pour permettre le recouvrement d'une créance non fiscale ne peut davantage être regardée comme valant, de la part du contribuable, information d'un changement d'adresse auprès de l'administration fiscale ; que, par suite, Mme B...n'est pas fondée à soutenir que les notifications de l'avis de vérification et de la proposition de rectification qui lui ont été faites auraient été irrégulières et auraient méconnu les dispositions des articles L. 47 et L. 76 du livre des procédures fiscales ;
Sur le bien-fondé des impositions :
5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 du code général des impôts : " (...) 3. Toute personne majeure âgée de moins de vingt et un ans, ou de moins de vingt-cinq ans lorsqu'elle poursuit ses études, ou, quel que soit son âge, lorsqu'elle effectue son service militaire ou est atteinte d'une infirmité, peut opter, dans le délai de déclaration et sous réserve des dispositions du quatrième alinéa du 2° du II de l'article 156, entre : / 1° L'imposition de ses revenus dans les conditions de droit commun ; / 2° Le rattachement au foyer fiscal dont elle faisait partie avant sa majorité, si le contribuable auquel elle se rattache accepte ce rattachement et inclut dans son revenu imposable les revenus perçus pendant l'année entière par cette personne ; le rattachement peut être demandé, au titre des années qui suivent celle au cours de laquelle elle atteint sa majorité, à l'un ou à l'autre des parents lorsque ceux-ci sont imposés séparément. (...) ; qu'aux termes de l'article 196 du même code : " Sont considérés comme étant à la charge du contribuable, que celle-ci soit exclusive, principale ou réputée également partagée entre les parents, à la condition de n'avoir pas de revenus distincts de ceux qui servent de base à l'imposition de ce dernier : / 1° Ses enfants âgés de moins de 18 ans ou infirmes ; " ; que l'article 196 bis du code général des impôts dispose : " 1. La situation et les charges de famille dont il doit être tenu compte sont celles existant au 1er janvier de l'année de l'imposition (...) " ;
6. Considérant d'une part, que MmeB..., devenue majeure le 21 mars 2004, était avant cette date, en application des dispositions précitées du code général des impôts, rattachée de plein droit au foyer fiscal de ses parents et ne pouvait en conséquence faire l'objet d'une imposition en son nom personnel ; qu'à ce titre, l'administration fiscale, par une décision en date du 15 décembre 2011, a procédé au dégrèvement des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu mises à la charge de Mme B...au titre de la période du 1er janvier au 21 mars 2004 ; que pour la période postérieure au 21 mars 2004, MmeB..., pour pouvoir être rattachée au foyer fiscal de ses parents, devait solliciter ce rattachement dans le délai de déclaration ; que Mme B...n'établit pas avoir sollicité ce rattachement ; qu'à cet égard la circonstance qu'elle ait été rattachée au foyer fiscal de son père pour l'année 2006 n'établit pas qu'elle aurait formulé une demande de rattachement au titre de l'année 2004, les demandes devant être formulées au titre de chaque année d'imposition et la circonstance, à la supposer même établie, que les parents de Mme B...aient mentionné cette dernière comme enfant majeur à charge dans la case prévue à cet effet dans leur déclaration de revenus au titre de l'année 2004 ne saurait suffire à démontrer que Mme B...a sollicité son rattachement fiscal au foyer de ses parents dans le délai de déclaration ;
7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. " ; qu'en application de ces dispositions, il appartient à MmeB..., qui a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, d'apporter devant le juge de l'impôt la preuve que les sommes imposées en tant que revenus d'origine indéterminée soit ne constituent pas des revenus imposables, soit se rattachent à une catégorie précise de revenus ;
8. Considérant que pour contester la réintégration dans ses bases imposables au titre des années 2004 et 2005, en tant que revenus d'origine indéterminée, de différentes sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires, Mme B...fait valoir, d'une part, qu'elle était encore lycéenne et n'avait pas la disposition des sommes inscrites sur ses comptes bancaires, utilisés par son père comme des comptes de passage, et, d'autre part, que les sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires constituaient les recettes de deux restaurants exploités par son père en qualité de gérant de fait alors même qu'elle avait été désignée gérante de droit de ces deux établissements dès sa majorité ; qu'en se bornant toutefois à ne produire à l'appui de ces allégations qu'une procuration établie au profit de son père sur l'un de ses deux comptes bancaires, des attestations de scolarité pour les années en litige et des déclarations de son père, Mme B...n'établit pas l'origine des crédits bancaires et ne démontre ainsi pas que les sommes en cause ne constituaient pas des revenus imposables ou qu'elles se rattachaient à une catégorie précise de revenus ; que, par suite, c'est à bon droit que l'administration fiscale a rehaussé ses bases imposables des sommes figurant au crédit de ses comptes bancaires en tant que revenus d'origine indéterminée ;
Sur les pénalités :
9. Considérant qu'aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : (...) b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai " ;
10. Considérant, en premier lieu, que Mme B...soutient que la mise en demeure de souscrire ses déclarations sur le revenu au titre des années 2004 et 2005 ne lui a pas été adressée à la dernière adresse connue de l'administration fiscale ; que, cependant, pour les mêmes motifs que ceux énoncés aux points 2 à 4, il y a lieu d'écarter ce moyen ;
11. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de l'instruction que la mise en demeure du 12 avril 2007 mentionnait les années d'imposition concernées, indiquait que les déclarations non souscrites par Mme B...concernaient l'impôt sur le revenu, qu'elles devaient être souscrites dans un délai de trente jours auprès du service émetteur dont les coordonnées étaient précisées ; que cette mise en demeure mentionnait également que la souscription de ces déclarations constituait une obligation prévue par la loi dont le manquement, ou le retard à l'accomplir, expose à des sanctions et renvoyait au verso de l'imprimé sur lequel, en dessous du cadre réservé à la réponse du contribuable, était reproduit l'article 170 du code général des impôts ; que, par suite, la mise en demeure contenait l'ensemble des indications de nature à permettre à Mme B...de connaître les obligations déclaratives auxquelles elle était tenue et de mesurer les sanctions auxquelles elle s'exposait en ne les respectant pas ;
12. Considérant enfin que MmeB..., à supposer qu'elle ait entendu invoquer à son profit, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, l'instruction administrative figurant à la documentation de base 13 L-1551 du 1er juillet 2002, ne peut utilement s'en prévaloir dès lors que cette instruction est relative à la procédure d'imposition ;
13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande ; que ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'économie et des finances.
Copie sera adressée à l'administrateur général des finances publiques chargé de la direction spécialisée de contrôle fiscal Nord.
Délibéré après l'audience publique du 4 octobre 2016 à laquelle siégeaient :
- Mme Odile Desticourt, présidente de chambre,
- M. Marc Lavail Dellaporta, président-assesseur,
- M. Rodolphe Féral, premier conseiller.
Lu en audience publique le 18 octobre 2016.
Le rapporteur,
Signé : R. FERALLa présidente de chambre,
Signé : O. DESTICOURT
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier,
Marie-Thérèse Lévèque
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N°14DA01270