Vu, I, sous le n° 07DA00937, la requête, enregistrée le 21 juin 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour Mme Patricia Y, demeurant ..., par la SCP Trussant-Dominguez ; Mme Y demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0305590 du 3 mai 2007 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a limité à la somme de 7 500 euros, en sus de la somme de 5 000 euros versée à titre de provision, assortie des intérêts de droit à compter du 27 novembre 2003, la somme qu'il a condamné l'Etablissement français du sang à lui verser en réparation des préjudices nés de sa contamination par le virus de l'hépatite C à la suite d'une transfusion subie le 8 octobre 1989 ;
2°) de condamner le Centre hospitalier de Valenciennes et l'Etablissement français du sang à lui verser les sommes de 15 000 euros au titre de l'incapacité temporaire totale durant une période de huit mois et deux semaines, de 50 000 euros au titre de la perte définitive de salaire, 8 000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence, 16 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle, au remboursement des frais médicaux, pharmaceutiques et d'hospitalisation, les sommes de 15 000 euros au titre du pretium doloris, 20 000 euros au titre du préjudice moral et 8 000 euros au titre du préjudice d'agrément, assorties des intérêts de droit à compter de la date d'introduction de la demande ;
3°) de condamner les mêmes à la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
4°) de condamner les mêmes aux entiers dépens ;
Elle soutient que l'expert a considéré qu'elle avait subi une incapacité temporaire totale durant huit mois et deux semaines alors qu'elle était aide ménagère pour un salaire de 1 200 euros mensuels, établi par la production de bulletins de salaire ; qu'elle ne travaille plus actuellement du fait de sa pathologie ; que sa contamination, qui a constitué un traumatisme, est à l'origine de difficultés quotidiennes et qu'elle doit subir un traitement médical permanent ; que compte tenu de son âge et des significatives perturbations hépatiques qu'elle subit, son incapacité permanente partielle doit être fixée non à 5 mais à 8 % et donner lieu à une indemnisation de 16 000 euros ; que l'expert a retenu un pretium doloris de 2 sur 7 ; qu'elle est en permanence fatiguée, n'arrive plus à manger et dormir normalement et que son état ne peut que se dégrader ; qu'elle vit dans la crainte pour son avenir et est affectée psychologiquement ; que son état physique s'est détérioré ce qui lui interdit de nombreuses activités sportives ou de loisirs ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2007, présenté pour l'Etablissement français du sang, dont le siège est 96 rue de Jemmapes à Lille Cedex (59012), par Montesquieu avocats, qui conclut à ce que l'indemnisation totale de Mme Y soit limitée à la somme de 12 500 euros ; que compte tenu des fautes commises par le Centre hospitalier de Valenciennes, la moitié des condamnations prononcées au bénéfice de la requérante doit être mise à sa charge ; que son assureur, la Société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM) le garantira de toute condamnation prononcée à son encontre ; qu'il fait valoir qu'il aurait pu établir la preuve de l'innocuité de ses produits si le centre hospitalier avait, comme une circulaire lui en faisait obligation, noté les références des produits de transfusion ; qu'il a ainsi perdu une chance d'établir son absence de responsabilité et que le centre hospitalier doit donc lui verser des dommages-intérêts à ce titre ; que l'intéressée ne produit pas plus en appel qu'en première instance d'éléments de nature à établir qu'au moment où elle a subi un traitement, elle disposait d'un contrat à durée indéterminée lui assurant un salaire de 1 200 euros mensuels ; qu'en seize ans, la maladie n'a pas évolué, ce qui devrait la rassurer pour l'avenir ; que l'intéressée demande sous diverses formes plusieurs fois l'indemnisation du même préjudice ; que l'expert n'a retenu ni préjudice esthétique, ni préjudice d'agrément ; que la Caisse primaire d'assurance maladie de Maubeuge ne justifie pas des frais dont elle demande le remboursement par l'Etablissement ;
Vu le mémoire, enregistré le 17 octobre 2007, présenté pour Mme Y qui persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2007, présenté pour l'Etablissement français du sang, qui persiste dans ses conclusions et fait en outre valoir que la jurisprudence a, à plusieurs reprises, estimé que le marquage des produits sanguins prévu par la circulaire du 30 juin 1980 avait un caractère obligatoire et que son absence engageait la responsabilité de l'établissement de soins ; que Mme Y ne justifie ni d'indemnités journalières, ni d'aucune indemnisation au titre d'arrêts de travail ; que la Caisse primaire d'assurance maladie de Maubeuge persiste à demander le remboursement de frais dont elle ne justifie pas qu'ils sont en lien avec les traitements suivis au titre de l'hépatite C ;
Vu l'ordonnance du 10 décembre 2007 portant la clôture de l'instruction au 25 janvier 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 4 janvier 2008 et régularisé par la production de l'original le 7 janvier 2008, présenté pour le Centre hospitalier de Valenciennes, dont le siège est avenue Desandrouins à Valenciennes (59322) et la Société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM), dont le siège est 74 rue Louis Blanc à Lyon (69066), par Me Le Prado ; le centre hospitalier conclut au rejet de la requête de Mme Y et des conclusions de l'Etablissement français du sang en tant qu'elles sont dirigées contre le centre hospitalier, ainsi qu'au rejet de celles de la Caisse primaire d'assurance maladie de Maubeuge ; la SHAM demande à être mise hors de cause ; le centre hospitalier demande que soit mise à la charge de l'Etablissement français du sang (EFS) la somme de 2 150 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir qu'une circulaire n'a pas de valeur normative et que le centre hospitalier n'avait donc aucune obligation de marquage des produits de transfusion ; que le centre hospitalier a conclu le 21 octobre 1999 avec l'EFS une convention par laquelle il s'engage à le garantir de toute condamnation sauf fraude ou faute intentionnelle, inexistante en l'espèce ; qu'en tout état de cause, et à supposer même que l'absence de marquage ait pu constituer une faute, celle-ci ne présente pas de lien de causalité direct et certain avec les condamnations mises à la charge de l'EFS ; que l'évaluation du préjudice faite par le tribunal est conforme à la jurisprudence ; que Mme Y ne justifie ni être dans l'impossibilité de travailler, ni avoir subi des pertes de revenus durant ses périodes d'invalidité temporaire partielle ; qu'en dehors des deux biopsies, la caisse primaire d'assurance maladie ne justifie pas de lien de causalité direct et certain ; qu'enfin le juge administratif est incompétent pour statuer sur le litige entre la SHAM et l'hôpital ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 14 janvier 2008 et régularisé par la production de l'original le 15 janvier 2008, présenté pour l'Etablissement français du sang qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance du 22 janvier 2008 reportant la clôture de l'instruction au 22 février 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 février 2008 et régularisé par la production de l'original le 20 février 2008, présenté pour le Centre hospitalier de Valenciennes et la Société hospitalière d'assurance mutuelle qui persistent dans leurs conclusions et font en outre valoir que l'EFS n'avait, en première instance, conclut qu'à la condamnation du centre hospitalier à le garantir et présente pour la première fois en appel des conclusions de dommages-intérêts, nouvelles et donc irrecevables ;
Vu l'ordonnance du 29 février 2008 reportant la clôture de l'instruction au 25 mars 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2008, présenté pour l'Etablissement français du sang qui persiste dans ses conclusions et admet que la caisse a versé au dossier des pièces qui justifient le paiement du coût d'une bithérapie durant six mois, soit 8 370,60 euros, qu'il n'entend donc plus contester ;
Vu l'ordonnance du 27 mars 2008 reportant la clôture de l'instruction au 28 avril 2008 à 16 heures 30 ;
Vu, II, sous le n° 07DA01034, la requête, enregistrée le 10 juillet 2007 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE, dont le siège est 24 rue de la Croix à Maubeuge Cedex (59607), par Me Quignon ; la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE demande à la Cour :
1°) de réformer le jugement n° 0305590 du 3 mai 2007 du Tribunal administratif de Lille en tant qu'il a limité à la somme de 849,79 euros, correspondant au coût de deux biopsies, la somme qu'il a condamné l'Etablissement français du sang à lui verser au titre des soins dispensés à Mme Y à la suite de sa contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C ;
2°) de condamner l'Etablissement français du sang à lui verser les sommes de 17 567,20 euros au titre au titre des dépenses de santé actuelles et 10 704,50 euros au titre des dépenses de santé futures, exposées au bénéfice de Mme Y, avec intérêts de droit ;
Elle soutient qu'une ponction biopsie hépatique justifie une incapacité temporaire totale d'une semaine ; que le traitement antiviral génère d'importants effets secondaires justifiant un repos et une surveillance clinique et biologique rapprochée ; que le tribunal a confondu les soins éventuels en cas d'aggravation et la poursuite de la surveillance biannuelle nécessaire alors même que l'état de la patiente est stabilisé dans l'immédiat, laquelle peut être chiffrée à 10 704,59 euros ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 5 septembre 2007, présenté pour l'Etablissement français du sang, dont le siège est 96 rue de Jemmapes à Lille Cedex (59012), par Montesquieu avocats, qui conclut à ce que l'indemnisation totale de Mme Y soit limitée à la somme de 12 500 euros et à ce que le Centre hospitalier de Valenciennes soit condamné à lui rembourser la moitié des condamnations mises à sa charge ; il fait valoir que l'intéressée ne produit pas plus en appel qu'en première instance d'éléments de nature à établir qu'au moment où elle a subi un traitement, elle disposait d'un contrat à durée indéterminée lui assurant un salaire de 1 200 euros mensuels ; qu'en seize ans, la maladie n'a pas évolué, ce qui devrait la rassurer pour l'avenir ; que l'intéressée demande sous diverses formes plusieurs fois l'indemnisation du même préjudice ; que l'expert n'a retenu ni préjudice esthétique, ni préjudice d'agrément ; qu'il aurait pu établir la preuve de l'innocuité de ses produits si le centre hospitalier avait, comme une circulaire lui en faisait obligation, noté les références des produits de transfusion ; qu'il a ainsi perdu une chance d'établir son absence de responsabilité et que le centre hospitalier doit donc lui verser des dommages-intérêts à ce titre ;
Vu le mémoire, enregistré le 6 décembre 2007, présenté pour l'Etablissement français du sang, qui persiste dans ses conclusions et par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance du 10 décembre 2007 portant clôture de l'instruction au 25 janvier 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire en défense, enregistré par télécopie le 4 janvier 2008 et régularisé par la production de l'original le 7 janvier 2008, présenté pour le Centre hospitalier de Valenciennes, dont le siège est avenue Desandrouins à Valenciennes (59322) et la Société hospitalière d'assurance mutuelle (SHAM), dont le siège est 74 rue Louis Blanc à Lyon (69066), par Me Le Prado ; le centre hospitalier conclut au rejet des conclusions de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE et la SHAM demande à être mise hors de cause ; il demande que soit mise à la charge de l'Etablissement français du sang (EFS) la somme de 2 150 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; ils font valoir que l'évaluation du préjudice faite par le tribunal est conforme à la jurisprudence ; que Mme Y ne justifie ni être dans l'impossibilité de travailler, ni avoir subi des pertes de revenus durant ses périodes d'invalidité temporaire partielle ; qu'en dehors des deux biopsies, la caisse primaire d'assurance maladie ne justifie pas de lien de causalité direct et certain ; qu'enfin le juge administratif est incompétent pour statuer sur le litige entre la SHAM et l'hôpital ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 14 janvier 2008 et régularisé par la production de l'original le 15 janvier 2008, présenté pour l'Etablissement français du sang qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;
Vu l'ordonnance du 22 janvier 2008 reportant la clôture de l'instruction au 22 février 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire, enregistré par télécopie le 19 février 2008 et régularisé par la production de l'original le 20 février 2008, présenté pour le Centre hospitalier de Valenciennes et la Société hospitalière d'assurance mutuelle qui persistent dans leurs conclusions ; le centre hospitalier fait en outre valoir que l'EFS n'avait, en première instance, conclut qu'à la condamnation du centre hospitalier à le garantir et présente pour la première fois en appel des conclusions de dommages-intérêts, nouvelles et donc irrecevables ;
Vu le mémoire, enregistré le 22 février 2008, présenté pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE qui persiste dans ses conclusions et précise que le traitement antiviral reçu est particulièrement coûteux et s'élève à la somme de 8 370,60 euros ; qu'elle établit les hospitalisations du 27 au 31 janvier et du 12 au 18 août 2003 ; que les frais de transport s'expliquent par l'utilisation d'un véhicule sanitaire léger pour les hospitalisations et les multiples consultations à Lille ; que le suivi médical est bien effectué par le Dr Z ; que les frais futurs ont été minorés et peuvent être évalués à 10 704,59 euros ; que la caisse produit des pièces justifiant de tous ces frais ;
Vu l'ordonnance du 29 février 2008 reportant la clôture de l'instruction au 25 mars 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire, enregistré le 5 mars 2008, présenté pour l'Etablissement français du sang, qui persiste dans ses conclusions et admet que la caisse a versé au dossier des pièces qui justifient le paiement du coût d'une bithérapie durant six mois, soit 8 370,60 euros, qu'elle n'entend donc plus contester ;
Vu l'ordonnance du 27 mars 2008 reportant la clôture de l'instruction au 28 avril 2008 à 16 heures 30 ;
Vu le mémoire, enregistré le 28 avril 2008, présenté pour la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE qui persiste dans ses conclusions et précise que le traitement antiviral impliquait aussi des soins infirmiers, dont elle justifie le coût à hauteur de 905,08 euros et la prise de médicaments complémentaires pour un coût de 905,73 euros ; que le coût des deux hospitalisations se monte aux sommes de 2 201,40 et 3 463,86 euros ;
Vu l'ordonnance du 13 mai 2008 reportant la clôture de l'instruction au 2 juin 2008 à 16 heures 30 ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 et notamment son article 18 ;
Vu la loi n° 2000-1353 du 30 décembre 2000, et notamment son article 60 ;
Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, et notamment son article 102 ;
Vu l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005, et notamment son article 15 ;
Vu la convention de transfert de biens, droits et obligations, créances et dettes au profit de l'Etablissement français du sang, signée entre cet établissement et, notamment, le Centre hospitalier de Valenciennes, en date du 21 octobre 1999, et notamment son article 9 ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 septembre 2008 à laquelle siégeaient M. Antoine Mendras, président de chambre, Mme Marianne Terrasse, président-assesseur et Mme Elisabeth Rolin, premier conseiller :
- le rapport de Mme Marianne Terrasse, président-assesseur ;
- les observations de Me Bonduelle, pour l'Etablissement français du sang ;
- et les conclusions de M. Patrick Minne, commissaire du gouvernement ;
Considérant que les requêtes n° 07DA00937 et n° 07DA01034 sont dirigées contre le même jugement ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un même arrêt ;
Considérant que Mme Y a reçu une transfusion sanguine à la suite de complications lors d'un premier accouchement le 8 octobre 1989 au Centre hospitalier de Valenciennes ; qu'à l'occasion d'examens réalisés en 1993 lors d'une nouvelle grossesse, une contamination par le virus de l'hépatite C a été découverte ; que par le jugement du 3 mai 2007 le Tribunal administratif de Lille a imputé la contamination à la transfusion réalisée en 1989, a déclaré l'Etablissement français du sang responsable des conséquences dommageables de cette contamination et l'a condamné à verser à Mme Y la somme de 7 500 euros, venant s'ajouter à la somme de 5 000 euros précédemment versée à titre de provision, soit une somme globale de 12 500 euros ; que le montant des sommes exposées au titre des soins en relation avec la contamination dont la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE est en droit de demander à être remboursée a été fixé par le tribunal à la somme de 849,79 euros ; que Mme Y et la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE relèvent l'une et l'autre appel dudit jugement en tant qu'il a limité aux sommes précitées leurs demandes respectives d'indemnisation et de remboursement des débours ; que l'Etablissement français du sang formule en outre des conclusions d'appel provoqué tendant à la réformation du jugement en tant qu'il a écarté son appel en garantie dirigé contre le Centre hospitalier de Valenciennes ;
Sur les droits de Mme Y :
Considérant, en premier lieu, que Mme Y a été contaminée à l'âge de dix-huit ans ; qu'elle a dû subir deux biopsies hépatiques nécessitant chacune une hospitalisation d'une semaine ; que si les examens ont fait apparaître une charge virale et des lésions minimes et un état stable, il lui a néanmoins été prescrit un traitement antiviral par bithérapie durant six mois ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise, qu'un tel traitement, lourd, est générateur d'importants effets secondaires et implique une surveillance clinique et biologique rapprochée ; qu'il n'a apporté aucune amélioration et que l'intéressée demeure atteinte d'une hépatite chronique et est astreinte à un suivi médical régulier ; qu'en outre, elle éprouve des craintes légitimes pour l'avenir, une aggravation de son état ne pouvant être exclue ; que pour ce motif, elle a dû suivre également un traitement antidépresseur ; que le pretium doloris a été évalué à 2/7 par l'expert ; que, dans ces conditions, il sera fait une juste appréciation des troubles de toute nature subis par Mme Y dans ses conditions d'existence à la suite de sa contamination par le virus de l'hépatite C en portant à la somme totale de 50 000 euros l'indemnisation de son préjudice ; que, compte tenu des sommes qui lui ont déjà été allouées à titre de provision et en exécution du jugement attaqué, la somme restant due par l'Etablissement français du sang s'élève donc à 37 500 euros ;
Considérant, en second lieu, que l'intéressée n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause le taux d'incapacité permanente partielle fixé à 5 % par l'expert ; qu'elle ne justifie pas davantage d'un préjudice esthétique, ni d'un préjudice d'agrément particulier ; que si la requérante sollicite une indemnisation au titre de l'incapacité temporaire totale durant les périodes où elle a été hospitalisée ou fait l'objet du traitement par bithérapie, elle ne produit aucun élément de nature à établir avoir dû, du fait de ces soins ou de son incapacité permanente partielle, interrompre une activité salariée ; que le surplus de ses conclusions doit, par suite, être rejeté ;
En ce qui concerne les intérêts :
Considérant que Mme Y a droit aux intérêts au taux légal à compter de la date d'introduction de sa demande soit le 27 novembre 2003 ;
Sur les droits de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE :
En ce qui concerne les frais exposés :
Considérant que la caisse produit en appel les pièces justifiant qu'elle a exposé pour le traitement antiviral de Mme Y, en relation avec la contamination, des frais d'un montant de 8 370,60 euros ; qu'elle n'apporte en revanche aucun élément de nature à établir le montant des autres postes de dépenses dont elle demande le remboursement ; que l'Établissement français du sang doit être condamné à lui verser cette somme en sus de la somme de 849,79 euros accordée en première instance ;
En ce qui concerne des frais futurs :
Considérant que la caisse demande que l'Établissement français du sang soit condamné à lui verser la somme de 10 704,50 euros au titre des frais de la surveillance médicale biannuelle à laquelle devra se soumettre Mme Y sa vie durant, indépendamment de toute aggravation de son état ; que, toutefois, elle ne produit aucun élément précis de nature à justifier le montant demandé ; que ces conclusions doivent en conséquence être rejetées ; qu'il lui appartiendra de demander le remboursement des frais qu'elle engagera dans le futur et impliqués par la contamination par le virus de l'hépatite C au fur et à mesure qu'ils seront exposés ;
En ce qui concerne les intérêts :
Considérant que la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 8 370,60 euros à compter de sa première demande de paiement soit le 9 mai 2006 ;
Sur les conclusions d'appel provoqué de l'Etablissement français du sang :
Considérant que l'Etablissement français du sang demande pour la première fois en appel le versement de dommages-intérêts en réparation de la faute qu'aurait commise le Centre hospitalier de Valenciennes en ne procédant pas au marquage des produits sanguins, ce qui l'aurait ainsi privé d'une chance d'identifier les produits transfusés à Mme Y et donc d'être exonéré de toute responsabilité ; que, toutefois, devant les premiers juges, l'établissement s'était borné à demander à être garanti par l'hôpital des condamnations qui pourraient être prononcées contre lui sur le fondement des stipulations de la convention de transfert susvisée du 21 octobre 1999 conclue entre lui-même et le centre hospitalier ; que la demande de dommages-intérêts, qui est fondée sur une cause juridique distincte, est donc nouvelle en appel et doit en conséquence être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Établissement français du sang la somme de 1 500 euros chacun au titre des frais exposés par Mme Y et par le Centre hospitalier de Valenciennes, et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'Etablissement français du sang est condamné à verser à Mme Y la somme globale de 50 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 27 novembre 2003.
Article 2 : L'Etablissement français du sang est condamné à verser à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE la somme de 8 370,60 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 9 mai 2006.
Article 3 : Le jugement du Tribunal administratif de Lille du 3 mai 2007 est réformé en tant qu'il est contraire au présent arrêt.
Article 4 : Les conclusions d'appel provoqué de l'Etablissement français du sang sont rejetées.
Article 5 : Le surplus des conclusions des requêtes de Mme Y et de la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE est rejeté.
Article 6 : L'Etablissement français du sang versera à Mme Y et au Centre hospitalier de Valenciennes une somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme Patricia Y, au Centre hospitalier de Valenciennes, à la CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE MAUBEUGE, à l'Etablissement français du sang et à la Société hospitalière d'assurance mutuelle.
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Nos07DA00937,07DA01034