Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2006 au greffe de la Cour administrative d'appel de Douai, présentée pour M. Benaouda X, demeurant ..., par Me Lec ; M. X demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0601666 du 18 juillet 2006 par lequel le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Somme du 7 juillet 2006 décidant sa reconduite à la frontière ;
2°) d'annuler cet arrêté pour excès de pouvoir ;
Il soutient que l'arrêté portant refus de délivrance d'un titre de séjour est illégal dans la mesure où il est toujours marié avec une ressortissante de nationalité française, même si son épouse a engagé une procédure de divorce ; que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien, eu égard à sa nouvelle relation avec une ressortissante française, avec qui il vit en concubinage depuis mars 2006, et au fait qu'il bénéficie d'un emploi stable ;
Vu le jugement et la décision attaqués ;
Vu l'ordonnance en date du 2 août 2006 fixant la clôture de l'instruction au 13 août 2006 ;
Vu le mémoire, enregistré le 11 août 2006, présenté pour M. X, par Me Caron ; il conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
Vu l'examen des pièces du dossier desquelles il ressort que la requête a été communiquée au préfet de la Somme qui n'a pas produit de mémoire en défense ;
Vu la décision du 22 août 2006 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Douai accordant l'aide juridictionnelle totale à M. X ;
Vu l'ordonnance en date du 25 août 2006 reportant la clôture de l'instruction au 15 septembre 2006 ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leur famille ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique et le décret
n° 91-1266 du 19 décembre 1991, modifié ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2006, à laquelle siégeaient Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre, Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur et M. Manuel Delamarre, premier conseiller :
- le rapport de Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre ;
- et les conclusions de M. Olivier Mesmin d'Estienne, commissaire du gouvernement ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : « L'autorité administrative compétente peut, par arrêté motivé, décider qu'un étranger sera reconduit à la frontière dans les cas suivants : (…) 3º Si l'étranger auquel la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé, ou dont le titre de séjour a été retiré, s'est maintenu sur le territoire au-delà du délai d'un mois à compter de la date de notification du refus ou du retrait (…) » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. Benaouda X, de nationalité algérienne, s'est maintenu sur le territoire français plus d'un mois après la notification, le
11 avril 2006, de l'arrêté du préfet de la Somme du 5 avril 2006 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'invitant à quitter le territoire ; qu'il entrait ainsi dans le champ d'application de la disposition précitée ;
Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :
Considérant qu'à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté ordonnant sa reconduite à la frontière, M. X soutient que l'arrêté du préfet de la Somme refusant de lui délivrer un certificat de résidence, pris le 5 avril 2006 et confirmé sur recours gracieux de l'intéressé le 15 juin 2006, est illégal dès lors qu'il est toujours marié avec une ressortissante française ;
Considérant qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : « Le certificat de résidence d'un an portant la mention « vie privée et familiale » est délivré de plein droit : (…) 2. Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (…). Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2° ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux » ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. X s'est marié avec Mme Delphine Y, ressortissante française, le 26 octobre 2002 et est entré régulièrement en France en dernier lieu le 14 juin 2003 ; que bien qu'il soit séparé de son épouse, l'intéressé remplissait à la date de l'arrêté attaqué les conditions posées par les stipulations du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié pour l'obtention d'un premier certificat de résidence d'une validité d'une année et dont la délivrance n'est pas subordonnée à une communauté de vie effective entre les époux ; que, dès lors, en prenant l'arrêté de reconduite à la frontière du 7 juillet 2006 à l'encontre de M. X le préfet de la Somme a méconnu les stipulations du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 0601666 du 18 juillet 2006 du magistrat délégué par le président du Tribunal administratif d'Amiens et l'arrêté du préfet de la Somme du 7 juillet 2006 ordonnant la reconduite à la frontière de M. X sont annulés.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. Benaouda X, au préfet de la Somme et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire.
Délibéré après l'audience du 31 octobre 2006, à laquelle siégeaient :
- Mme Câm Vân Helmholtz, président de chambre,
- Mme Brigitte Phémolant, président-assesseur,
- M. Manuel Delamarre, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 14 novembre 2006.
L'assesseur le plus ancien,
Signé : B. PHEMOLANT
Le président-rapporteur,
Signé : C.V. HELMHOLTZ
Le greffier,
Signé : M.T. LEVEQUE
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur et de l'aménagement du territoire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier
M.T. LEVEQUE
N°06DA00991 2